D. DÉBAT SUR L'ÉNERGIE
1. Les énergies renouvelables et l'environnement
La raréfaction des sources d'énergies fossiles n'est pas sans incidence en matière de droits de l'Homme tant il semble délicat à terme de répondre à l'ensemble des besoins de l'humanité. Rapporteur de la commission de l'environnement, de l'agriculture et des questions territoriales, M. Jean-François Le Grand (Manche - UMP) a présenté un texte rappelant la nécessité de restructurer notre système énergétique en vue de privilégier les énergies renouvelables :
« Le système énergétique actuel présente de nombreux points de rupture prédéterminés. D'une part, les combustibles fossiles sont limités, d'autre part, on constate un nombre croissant de crises liées à l'énergie dans le monde. Qu'il y ait conjonction ou non des deux termes, le système énergétique actuel ne fonctionnera plus.
Quelles que soient les ressources énergétiques actuelles, elles s'épuisent très rapidement. Quant aux crises, elles sont de différentes natures : crise climatique, en partie due à la production d'énergie à partir de combustibles fossiles ; crise de la dépendance énergétique, crise de la pauvreté. La problématique du nucléaire est celle, très spécifique, des déchets, mais aussi de la finitude de la ressource. Quant à la ressource en eau, il faudra de plus en plus l'épargner et la consacrer à la satisfaction de besoins vitaux, comme l'a souligné le forum mondial d'Istanbul. A cela s'ajoutent les crises sanitaires liées notamment aux émissions de CO2 ou aux gaz à effet de serre.
Toutes ces crises renforcent l'urgence de promouvoir les énergies renouvelables et d'améliorer l'existant, comme le nucléaire, solution de transition, ou le charbon propre. Nous avons analysé les énergies renouvelables du point de vue, d'abord, de leur rendement et de leurs émissions. L'éolien et le solaire offrent des rendements inégaux, alors que la biomasse produit des émissions, mais est plus respectueuse du climat que les énergies fossiles.
Du point de vue de la rapidité de mise en oeuvre, évidente par rapport aux centrales thermiques, elle le sera encore davantage à mesure qu'on accélèrera les transferts de technologie. Quant aux besoins fonciers, relativement faibles s'agissant de l'éolien ou du solaire, ils sont plus importants en ce qui concerne la biomasse, qui risque de se développer au détriment des cultures vivrières.
La diversification du bouquet énergétique est une priorité. Elle permettra le développement des énergies renouvelables pendant que la part des énergies conventionnelles diminuera. Le stockage des énergies, quel que soit leur mode de production, est un autre objectif important, qui nécessitera des recherche sur les technologies de stockage.
En ce qui concerne les coûts, les comparaisons doivent tenir compte des coûts réels, c'est-à-dire intégrer tout ce qui est subvention à la production ou soutien à la recherche. Il faut souligner également que les coûts socio-économiques des énergies fossiles iront en augmentant, alors que ceux des énergies renouvelables iront en diminuant, du fait du changement d'échelle et de l'amélioration des technologies. »
Le développement des énergies renouvelables suscite un consensus, comme l'a rappelé M. Jean-Claude Frécon (Loire - SOC), qui nécessite désormais d'être traduit dans les faits :
« Le rôle de l'énergie dans les relations internationales n'a sans doute jamais été aussi important. Sa dimension stratégique s'est considérablement accrue. Elle est un enjeu de pouvoir déterminant. Elle est aussi source de nombre de crises et de conflits, dont notre Assemblée est parfois amenée à débattre. Dans notre discussion de ce matin sur le Moyen-Orient, le pouvoir énergétique était naturellement très présent.
Le rapport souligne les avantages des énergies renouvelables en matière de préservation de l'environnement. En France, le Parlement est en train d'examiner un projet de loi de programmation relatif à la mise en oeuvre de ce que l'on appelle « le Grenelle de l'environnement », à savoir un processus sans précédent de concertation avec l'ensemble des acteurs, publics et privés, concernés par les questions environnementales. Ce texte prévoit notamment de développer les énergies renouvelables en France.
Je rappelle que le « paquet énergie-climat » de la Commission européenne fixe pour l'Union européenne un objectif contraignant de 20 % d'énergies renouvelables dans la consommation globale d'énergie d'ici à 2020, contre 8,5 % aujourd'hui. Cet effort doit être réparti de façon équitable entre les États membres, de telle sorte que la France, sur la même période, se voit assigner un objectif de 23 % d'énergies renouvelables dans sa consommation finale d'énergie, contre 10,3 % actuellement. Les principaux leviers de développement des énergies renouvelables sont liés à la biomasse, à l'éolien, à la géothermie et au solaire photovoltaïque. À ce titre, je rappelle que la France, dont les émissions de CO2 par habitant comptent parmi les plus faibles des pays industrialisés, est le premier producteur européen d'énergies renouvelables. Elle bénéficie pour cela d'une situation géographique favorable.
Elle possède en effet des gisements d'énergies renouvelables considérables : le deuxième potentiel éolien d'Europe, 16 millions d'hectares de forêt exploitables, un ensoleillement supérieur à la moyenne européenne, des nappes géothermiques exploitables et des terres agricoles, sans compter de nombreuses entreprises leaders dans le secteur.
Dans un contexte marqué par un renchérissement tendanciel des prix du pétrole et du gaz, un engagement résolu en faveur des sources d'énergies alternatives aux énergies fossiles présente de nombreux avantages. Les énergies renouvelables renforcent l'indépendance énergétique et permettent une diminution notable des gaz à effet de serre, tandis que la diversification du bouquet énergétique constitue un des axes fondamentaux de la sécurité énergétique. Par ailleurs, ce secteur pourrait entraîner la création de dizaines de milliers d'emplois dans les années à venir. Ainsi, il emploie actuellement 75 000 personnes en France, mais l'atteinte des objectifs du Grenelle de l'environnement pourrait créer plus de 220 000 emplois d'ici à 2020.
Le développement des énergies renouvelables requiert donc une accélération de l'effort de recherche pour permettre les ruptures technologiques nécessaires. Il implique aussi de prendre un certain nombre de précautions. Il convient en effet d'éviter que le développement des énergies renouvelables se fasse au détriment d'autres objectifs environnementaux. »
Les incertitudes concernant l'impact environnemental actuel de la production d'énergies renouvelables ont été soulevées lors de la précédente partie de session. Le projet de recommandation privilégie leurs effets à long terme, insistant sur les garanties qu'elles offrent en matière de sécurité énergétique. Les gouvernements doivent en conséquence oeuvrer en faveur d'une réduction des obstacles administratifs en la matière et d'une promotion des investissements privés dans ce domaine. Une politique fiscale adaptée apparaît également comme une opportunité. La création d'une Agence internationale des énergies renouvelables fait également figure d'avancée majeure, comme l'a indiqué M. René Rouquet (Val-de-Marne - SRC) :
« Il y a urgence aujourd'hui à généraliser l'utilisation des énergies renouvelables pour préserver notre environnement menacé. Je voudrais insister sur la géothermie, énergie déjà bien implantée mais riche de nombreuses potentialités - chacun comprendra mon intérêt puisque j'ai été chargé par notre commission de l'élaboration d'un rapport dans ce domaine.
La géothermie n'est pas tributaire des conditions climatiques comme le sont d'autres énergies renouvelables telles que le solaire ou l'éolien. Elle ne dépend que des caractéristiques intrinsèques du sous-sol, ce qui lui assure une grande régularité de mise en oeuvre. A l'échelle européenne, elle peut donc contribuer à notre indépendance énergétique de façon économique et innovante, aussi bien pour les équipements de grande ampleur - de production d'électricité par exemple - que pour le chauffage d'immeubles ou de maisons individuelles.
Chers collègues, s'agissant d'une des propositions majeures de ce rapport, la création d'une Agence internationale des énergies renouvelables, j'y adhère pleinement, car elle ne peut qu'aller dans le bon sens, même si elle ne pourra résoudre tous les problèmes. Mon expérience d'élu de terrain m'a également montré, bien souvent, que nous manquons encore de professionnels ou d'entreprises ayant la maîtrise de la mise en pratique de ces techniques.
S'agissant, par exemple, des panneaux photovoltaïques, on constate que le nombre d'entreprises capables de les installer est aujourd'hui relativement restreint. Or, dans le contexte de crise que nous connaissons tous, où l'aggravation du chômage touche de plus en plus de secteurs, chacun mesure la nécessité de favoriser et d'accompagner dans chaque pays d'Europe l'évolution de l'activité économique vers l'énergie verte !
Aussi, il me semble important d'insister sur la nécessité d'une véritable mise en place, à l'échelle européenne, des dispositifs permettant de mieux accompagner les entreprises et de pouvoir former les salariés dans leur nécessaire mutation vers l'énergie verte.
Concernant enfin les deux propositions relatives à l'accès aux marchés de l'énergie des États membres du Conseil de l'Europe, qui apparaît aux points 9-2 et 9-3 du rapport, il me semble que la maîtrise publique de l'énergie ne peut être uniquement regardée sous l'aspect des énergies renouvelables, et que la notion de service public doit être prise en compte, d'autant que d'après ce que j'ai pu constater en France, cet accès aux réseaux n'est pas actuellement source de blocage pour le développement des énergies nouvelles. »
M. André Schneider (Bas-Rhin - UMP) a, quant à lui, insisté sur la difficulté à mettre en oeuvre un politique crédible et efficace en matière énergétique :
« La question des énergies renouvelables est devenue cruciale : elle détermine les engagements que nous prenons aujourd'hui pour les générations futures.
Développer les énergies renouvelables répond à deux défis : assurer la sécurité des approvisionnements énergétiques et par là même construire une politique économique énergétique européenne indépendante, tenir les engagements que nous avons pris lors de la signature du Protocole de Kyoto afin de réduire de manière conséquente les émissions des gaz à effets de serre et leur impact sur le réchauffement climatique.
Notre action s'inscrit dans un cadre global, elle ne peut être isolée face aux enjeux du développement durable. Seule une coopération effective entre pays européens permettra de construire une politique énergétique ambitieuse fondée sur les énergies renouvelables.
L'Union européenne, comme je le rappelle dans le rapport, Énergie : quelle stratégie pour l'Union européenne ?, que j'ai présenté le 6mai 2009 devant la commission chargée des affaires européennes de l'Assemblée nationale, préconise de repenser la politique énergétique de l'Europe en augmentant de manière significative la part des énergies renouvelables. La Commission européenne, dans sa communication sur la « deuxième analyse stratégique », a fixé pour objectif une contribution des énergies renouvelables de 20 % d'ici 2020. Le Parlement européen dans sa résolution sur la « deuxième analyse stratégique » a invité l'Union et les États membres à porter à 60 % la part des énergies renouvelables d'ici 2050.
Le Grenelle de l'Environnement, en cours d'examen par le Parlement français, a pour objectif chiffré de diversifier le bouquet énergétique avec l'objectif de 23 % d'énergie renouvelable d'ici à 2020.
Ces objectifs ambitieux ne doivent pas cacher les difficultés inhérentes à la construction d'une politique crédible de développement des énergies renouvelables. En effet, quels types d'énergies développer au sein des énergies renouvelables ? La politique de développement de l'énergie nucléaire, controversée pour certains de nos partenaires, répond-elle aussi à la définition d'une énergie renouvelable et doit-elle être prise en compte au même titre que les autres énergies renouvelables, l'énergie solaire, l'énergie éolienne, l'énergie hydraulique, l'énergie tirée de la biomasse et des ressources marines ?
Si la France remplit les objectifs du Protocole de Kyoto, c'est parce que plus de 80 % de l'énergie qu'elle produit est le fait de ses centrales nucléaires et que, toutes formes d'énergie confondues (pétrole, gaz, électricité...), 41 % de l'énergie consommée en France est d'origine nucléaire. Il y va aussi de notre indépendance énergétique.
Développer l'énergie nucléaire innovante en partenariat avec les pays européens ne doit pas pour autant nous amener à négliger le développement des autres énergies renouvelables au titre desquelles l'énergie éolienne et l'énergie solaire sont les plus prometteuses.
L'énergie des panneaux photovoltaïques, la construction d'éoliennes, sur terre et, un jour, sur mer sont, en effet, des enjeux en termes de développement durable et d'aménagement du territoire à l'échelle européenne. La Commission européenne recommande le déploiement à grande échelle de l'éolien en mer, car une éolienne off shore pourrait produire jusqu'à 50 % d'électricité en plus par rapport à une éolienne installée sur les terres.
Il ne faut pas oublier la biomasse, et plus précisément les carburants de troisième génération. Il convient de trouver un équilibre entre le nécessaire développement de cette énergie et les besoins alimentaires, notamment des pays les plus pauvres. Il est évident que l'alimentation humaine doit prévaloir.
Les solutions qui s'offrent à nous sont donc doubles : investir dans l'énergie nucléaire innovante et favoriser le développement des énergies renouvelables afin de répondre aux impératifs en matière de sécurité énergétique et de réchauffement climatique.
Un équilibre est aussi à trouver entre la promotion de ces énergies renouvelables et le niveau optimal de soutien public à apporter pour arriver à ce résultat. Il convient d'éviter les effets d'aubaine et une charge trop lourde pour les finances publiques si, par exemple, les tarifs de rachats se révélaient inutilement généreux.
Le développement des énergies durables est le défi majeur du XXI ème siècle.
C'est pourquoi les choix que nous engageons aujourd'hui doivent être à la hauteur des enjeux de demain.»
Concluant le débat, M. Le Grand a rappelé la nécessité pour le politique de répondre à l'urgence qu'impliquait la situation actuelle :
«Je voudrais remercier globalement l'ensemble des orateurs qui ont largement contribué à l'amélioration de ce rapport ou qui l'ont conforté par leurs observations. Il y avait un fort tropisme pour accompagner la réflexion menée par la commission. Je saisis l'occasion pour remercier la commission et son président M. Meale d'avoir eu l'audace de me confier ce rapport. J'étais très heureux que l'association entre énergies renouvelables et énergie nucléaire soit faite. Ca me paraissait indissociable.
Je voudrais globaliser les réponses. J'ai trouvé, pour ma part, que trois grandes rubriques se détachent.
La première concerne les économies d'énergie. Vous avez été un certain nombre à faire appel à cette recherche d'économies d'énergie. C'est sans doute la plus grande réserve disponible au monde. Il faut mettre en place des agences locales de l'énergie. Pour les pays de l'Union européenne, ces dispositifs existent.
Je voudrais ajouter qu'il s'agit de comportements publics, pour les décideurs publics, mais aussi et beaucoup de comportements privés. Il y a là tout un phénomène culturel à développer. On ne répètera jamais assez : « Il faut penser global et agir local ». C'est dans l'action de nos concitoyens qu'on trouvera la vraie réserve de cette économie d'énergie. En allant plus loin et en associant le numérique et la domotique, on finira par créer des maisons non seulement économes en énergie, mais également des maisons intelligentes.
Deuxième point, la recherche et le développement. Dans le rapport, on suggère une mutualisation de la recherche et du développement en matière d'énergies renouvelables. Cela vaut pour nos comportements, cela vaut aussi pour l'Agence internationale des énergies renouvelables qui pourrait participer à cette mutualisation. Il y a urgence à organiser cette recherche et ce développement. Il y urgence pour la planète. Il faut décider maintenant puisqu'après ce sera trop tard. Je voudrais ajouter que la recherche et le développement s'intéressent également à l'observation des coûts.
Madame Stump, vous avez raison, plus on avancera dans la recherche, plus les coûts diminueront. Soit à cause des effets d'échelle, soit également parce que les technologies iront vers l'usage de matériaux beaucoup moins coûteux.
Troisièmement, la notion de crise. Je voudrais relever ce que disait tout à l'heure notre collègue Díaz Tejera. Si on ne règle pas ces problèmes d'approvisionnement, les crises iront en augmentant. Je ne fais pas allusion aux crises armées mais au phénomène des migrations. Un certain nombre de peuples quittent leur pays parce qu'ils sont en dépendance énergétique et qu'ils n'ont pas de ressources pour vivre. Ceci était d'ailleurs inclus dans mon rapport.
Un rapport, c'est bref. C'est un peu frustrant. On aimerait dire tellement de choses. Les items du rapport dans le projet de recommandations comprennent eux-mêmes l'ensemble de ce qui a été dit en le condensant. J'emprunterai ma conclusion à l'intervention de M. Eörsi. Oui, « l'énergie n'a pas de couleur politique » ! C'est vrai. Mais c'est un enjeu politique majeur. Nous sommes des hommes et des femmes politiques. Il convient donc que nous assumions notre responsabilité politique en décidant maintenant. »
2. L'énergie nucléaire et le développement durable
L'industrie nucléaire est à la croisée des chemins tant l'opportunité qu'elle représente au sein d'un continent européen en proie à des crises d'approvisionnement d'énergie récurrentes est contrebalancé par l'incertitude qu'elle engendre en matière de respect de l'environnement.
Le projet de résolution présenté par la commission de l'environnement, de l'agriculture et des questions territoriales réaffirme la contribution au réchauffement climatique que peut apporter l'énergie nucléaire, comme l'a souligné M. Francis Grignon (Bas-Rhin - UMP) :
« Je souscris totalement au projet de résolution présenté par nos collègues MM. Le Grand et Etherington.
Je souhaiterais toutefois relativiser le paragraphe 6 du rapport de M. Etherington selon lequel les ressources en uranium seraient « limitées » et uniquement disponibles « à moyen terme ». La question des réserves mondiales d'uranium est certes stratégique, mais, la situation ne semble pas tendue. Toutes catégories confondues, les réserves d'uranium seraient comprises entre 15 et 22 millions de tonnes, ce qui autorise deux siècles de consommation au rythme de 70 000 tonnes d'uranium par an. De surcroît, le passage à la quatrième génération de réacteurs nucléaires devrait diminuer considérablement les besoins en uranium, ces réacteurs devant pouvoir fonctionner en cycle fermé, voire réutiliser les déchets nucléaires produits par ceux des générations précédentes.
Quoi qu'il en soit, il me semble que le rapport démontre une évolution favorable de notre Assemblée sur la question du nucléaire, et je m'en réjouis. J'ai bien compris, monsieur le rapporteur, qu'il ne s'agissait pas d'un blanc-seing pour le nucléaire. Néanmoins, je me dois de souligner que la France, dans le secteur de l'électricité, conduit une politique ambitieuse et volontariste.
L'utilisation de cette technologie permet à la France de bénéficier d'une électricité à des prix compétitifs. La structure du parc français rend le coût de la production indépendant à 95 % de l'évolution du prix des hydrocarbures, ce qui constitue un facteur majeur d'indépendance énergétique. Malgré des investissements de départ très importants, le prix de l'électricité d'origine nucléaire est le plus faible de toutes les techniques actuellement disponibles.
Le choix du nucléaire se justifie également au regard de la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre. La France est, en Europe et parmi les pays de l'OCDE, le pays qui émet le moins de CO2 par habitant. Grâce à l'énergie nucléaire, l'émission dans l'atmosphère de 41 millions de tonnes de carbone, soit 151 millions de tonnes de CO2, est évitée chaque année. Je rappelle que, selon la Commission européenne, les engagements de Kyoto seraient quasiment impossibles à respecter dans le cas où la part du nucléaire dans le bouquet énergétique européen ne serait pas au moins maintenue à l'horizon 2025.
De plus, le jour où l'on fera le bilan de ce qu'on appelle aujourd'hui « l'énergie grise », c'est-à-dire celle qui est nécessaire à toute la filière, en intégrant toutes les énergies consommées, pour les transports aussi bien que pour la création des outils de production, je pense que le nucléaire tiendra encore largement la route et pour un certain temps.
Je suis naturellement conscient que le recours à l'électricité nucléaire reste un sujet très controversé en Europe, même si des évolutions sont perceptibles. L'énergie nucléaire est confrontée à des défis. Elle suscite des inquiétudes. Aussi la transparence du secteur doit-elle être renforcée. Le vrai problème qui se pose est celui de l'avenir des déchets nucléaires. Il est encore loin d'avoir trouvé une réponse pleinement satisfaisante. C'est là sans doute que nous devrions faire porter nos efforts, notamment en développant la recherche. Il faut impérativement utiliser les économies permises par le nucléaire pour trouver au plus vite des solutions au traitement des déchets ultimes. N'oublions pas que les grottes de Lascaux avaient 20 000 ans quand nous les avons découvertes et que nous les avions largement oubliées. Qu'en sera-t-il des déchets nucléaires dans 200 000 ans ? »
Le texte n'entend pas pour autant assimiler l'énergie nucléaire à une énergie renouvelable, les réserves en uranium étant limitées. La question du stockage mérite de surcroît une attention particulière des gouvernements.
De telles réserves se retrouvent dans le document de la commission qui insiste sur le fait qu'à terme, seules les énergies renouvelables peuvent apparaître comme une garantie de sécurité énergétique. L'énergie nucléaire est de ce fait considérée comme une option temporaire, son apport étant néanmoins indéniable. Afin que son utilisation réponde à des critères de sécurité, de transparence et d'équité, la commission appelle de ses voeux un échange de bonnes pratiques entre les nations qui l'utilisent et la création concomitante d'une organisation au niveau international. Celle-ci pourrait aborder notamment la délicate question du traitement des déchets. L'information des opinions publiques sur l'état des infrastructures, les apports et les risques de l'énergie nucléaire fait également figure de priorité.