2. Des négociations internationales qui progressent mais demeurent inabouties
Prenant conscience de l'impact potentiel du changement climatique pour les années à venir et de la nécessité d'une action concertée à l'échelle internationale, les Etats ont, à partir des années 1990, fait de la réduction des émissions de gaz à effet de serre une priorité des négociations internationales sur le climat.
Grâce à l'adoption de la convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) en 1992 et à la dynamique impulsée par l'entrée en vigueur du protocole de Kyoto, des progrès ont été réalisés. Cependant, de nombreux points restent en suspens, qui constitueront l'enjeu des débats à la conférence de l'ONU sur le climat prévue à Copenhague au mois de décembre 2009 ou « COP-15 ».
a) La dynamique lancée par le protocole de Kyoto
(1) La convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques
La convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), adoptée au Somment de la Terre à Rio de Janeiro en 1992 et entrée en vigueur le 21 mars 1994, a constitué une première étape importante.
Ratifiée aujourd'hui par 192 pays, elle reconnaît, en effet, l'existence du changement climatique d'origine humaine et stipule, dans son article 2, que les Etats signataires s'engagent à « stabiliser [...] les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique ».
Cependant, comme l'indiquent Dominique Bureau et Patrick Criqui 10 ( * ) , la convention ne donne aucune indication chiffrée sur le niveau de concentration de gaz à effet de serre à contenir, ni sur les instruments devant permettre d'atteindre cet objectif .
(2) Le protocole de Kyoto
C'est en ce sens que l'adoption du protocole de Kyoto en 1997, après deux ans et demi de négociations, a constitué une étape importante dans la mise en oeuvre de la convention-cadre précitée. En effet, par rapport à celle-ci, le protocole de Kyoto pose des engagements chiffrés de réduction de gaz à effet de serre 11 ( * ) pour les pays les plus industrialisés et propose des mécanismes devant permettre le respect de ces engagements .
Les Etats les plus industrialisés, parties au protocole et inscrits dans l'annexe B de celui-ci, sont ainsi tenus de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d'au moins 5 % par rapport aux niveaux de 1990 durant la période d'engagement 2008-2012 .
Cet objectif global est décliné selon les pays : moins 6 % pour le Canada et le Japon, moins 7 % pour les Etats-Unis et moins 8 % pour l'Union européenne, celle-ci étant signataire, au côté de l'ensemble de ses Etats membres, de la convention et du protocole. En revanche, les engagements du protocole ne sont évidemment pas contraignants pour les pays ne l'ayant pas conclu ou ratifié, comme les Etats-Unis.
Objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre des pays de l'annexe B du protocole de Kyoto
Pays |
Cibles de réduction par rapport aux émissions de 1990 |
UE-15*, Bulgarie, République Tchèque, Estonie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Monaco, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suisse |
- 8 % |
Etats-Unis |
- 7 % |
Canada, Hongrie, Japon, Pologne |
- 6 % |
Croatie |
- 5 % |
Nouvelle-Zélande, Fédération de Russie, Ukraine |
0 |
Norvège |
+ 1 % |
Australie |
+ 8 % |
Islande |
+ 10 % |
* L'objectif global de l'Union européenne a été réparti entre les différents Etats membres en fonction de leurs perspectives de croissance économique, de la ventilation des différentes formes d'énergie et de leur structure industrielle. L'objectif fixé à la France est une stabilisation de ses émissions de gaz à effet de serre.
Source : convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques
Le protocole de Kyoto prévoit, en outre, des mécanismes économiques destinés à permettre une répartition efficace de cet effort : les Etats ont le choix entre réduire leur propre « empreinte carbone » ou financer un effort équivalent en achetant des permis à l'étranger. Le protocole de Kyoto pose ainsi le principe d'un marché d'échange de quotas d'émission de CO 2 .
Il définit, par ailleurs, deux autres dispositifs :
- la « mise en oeuvre conjointe » (MOC) : en contrepartie du financement de projets ayant pour objectif le stockage de carbone ou la réduction des émissions de gaz à effet de serre, les investisseurs peuvent recevoir des quotas d'émission supplémentaires ;
- le « mécanisme de développement propre » (MDP), mécanisme comparable au précédent pour les investissements réalisés dans les pays en développement.
Le protocole de Kyoto devant être signé par au moins 55 Etats déjà parties à la Convention, comptant pour un total d'au moins 55 % du total des émissions de CO 2 en 1990, il n'a pu entrer en vigueur que le 16 février 2005 après la ratification de ce texte par la Fédération de Russie. Le refus des Etats-Unis, annoncé en mars 2001, de ratifier le protocole, a en effet retardé son entrée en vigueur, les émissions américaines représentant environ 22 % des émissions mondiales.
Le protocole de Kyoto expirant en 2012, une nouvelle négociation s'est ouverte à Bali en 2007. Cette conférence a fixé un plan d'action prévoyant comme date-butoir, pour l'adoption d'un nouvel accord international sur « l'après-Kyoto », la fin de l'année 2009.
* 10 Dominique Bureau, Patrick Criqui, « Ecotaxes et quotas d'émissions échangeables CO 2 », fiche n° 6 pour le Conseil économique pour le développement durable, 2009.
* 11 Il s'agit des gaz suivants : CO 2 , CH 4 , N 2 O, HFC et SF 6 .