4. Les relations entre l'agence, le réseau culturel et l'ambassadeur
Dans son rapport précité, M. Bernard Faivre d'Arcier envisage la faisabilité de l'hypothèse selon laquelle l'agence en charge du rayonnement culturel extérieur de la France « aurait à gérer à la fois les budgets et les activités de CulturesFrance, ainsi que le réseau des centres et instituts français fusionnés avec les SCAC et qui viendrait enfin en appui du second réseau, celui des alliances françaises ».
Cette configuration, qui vise à unifier le réseau culturel français à l'étranger, pose trois types de problèmes que M. Thierry Le Roy a relevés dans le cadre de sa mission relative à la modification du décret de 1976 sur les établissements culturels à autonomie financière (EAF) :
- elle suppose une stricte séparation entre les tâches de conception stratégique et les tâches opérationnelles dans l'élaboration et la mise en oeuvre de notre politique culturelle extérieure. Si cette dichotomie vaut pour la politique d'aide au développement mise en oeuvre par l'Agence française de développement (AFD), établissement public autonome (non sans heurts) vis-à-vis des postes diplomatiques mais placé sous la tutelle du ministère des affaires étrangères, il n'est pas garanti qu'elle soit aisément acceptée par les acteurs de notre réseau culturel à l'étranger ;
- « elle laisse entière la question du rôle laissé à l'ambassadeur vis-à-vis de services qui font actuellement pleinement partie des postes diplomatiques, et celle de son articulation avec la responsabilité de la direction générale de cet établissement public » ;
- elle implique de consentir au futur établissement public une marge d'autonomie comparable à celle du British Council ou du Goethe Institut, perspective qui est encore loin de recueillir l'assentiment du Quai d'Orsay.
M. Bernard Faivre d'Arcier relevait, pour sa part, que « CulturesFrance a toujours entretenu des relations parfois difficiles, parfois conflictuelles, avec les demandes des postes culturels français à l'étranger. Il a semblé à beaucoup que CulturesFrance, en tant qu'association indépendante, voulait défendre avant tout ses offres de tournées (d'expositions, de spectacles, etc.) avant d'être à l'écoute des demandes locales ».
Afin d'éviter que l'agence use trop largement de son autonomie pour se délier des consignes ministérielles, M. Bernard Faivre d'Arcier évoque une proposition exprimée par l'ambassadeur de France en Allemagne : les futurs « EspacesFrance » seraient placés sous l'autorité de l'ambassadeur et cette structure, qui aurait le statut d'EAF, serait la filiale locale d'une agence mondiale d'action culturelle . Cette configuration s'inspire en partie de l'expérience du fonctionnement du réseau de l'AEFE : l'ambassadeur, membre du conseil d'administration des établissements gérés par l'agence, conserve un droit de regard.
Pour mémoire, dans son article 2, la proposition de loi de M. Louis Duvernois prévoyait qu'« afin d'accomplir ses missions, l'établissement s'appuie sur le réseau diplomatique et culturel à l'étranger et sur des partenaires publics et privés ».
L'article 2 de la proposition de loi de M. Adrien Gouteyron prévoit également que « pour l'accomplissement de ses missions, l'agence dispose de bureaux culturels et linguistiques à l'étranger, dénommés « Instituts CulturesFrance », qui font partie des missions diplomatiques . Là où l'agence ne dispose pas de bureaux, elle peut être représentée par le réseau du ministère chargé des affaires étrangères, qui met en oeuvre, dans le cadre d'une convention, les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions ». De plus, son article 3 ménage la possibilité pour l'agence de s'appuyer « autant que de besoin sur le réseau diplomatique, les lycées français à l'étranger et les alliances françaises ».
Enfin, se pose la question de la dénomination de la future agence chargée de la coopération culturelle.
Contrairement aux autres pays et, à l'exception du réseau des Alliances françaises, le modèle français se caractérise par une très grande variété d'appellations de ses établissements culturels à l'étranger. Afin d'améliorer la lisibilité et la cohérence de notre réseau, l'idée d'un label unique, sur le modèle du British Council ou du Goethe Institut, a été avancée.
Plusieurs dénominations ont été proposées pour le nom de la future agence chargée de la coopération culturelle et éventuellement de ses antennes locales.
Le ministre des affaires étrangères et européennes avait, dans un premier temps, marqué sa préférence pour le nom d'Albert Camus. D'autres noms de grandes personnalités de la culture française avaient été suggérés, comme Victor Hugo, Jules Verne, Stendhal, Voltaire, Descartes ou Diderot. Les personnels du réseau culturel ont d'ailleurs été consultés sur le choix de cette dénomination, par la voie d'une consultation sur l'Intranet du ministère des affaires étrangères.
Lors de sa conférence de presse du 25 mars dernier, M. Bernard Kouchner a annoncé que la future agence pourrait s'intituler « Institut Français ».
Au cours de l'audition de M. Christian Masset, plusieurs membres de vos deux commissions se sont interrogés sur cette nouvelle appellation.
D'une part, la notion d'« Institut », qui semble-t-il est inspirée du terme allemand, peut paraître réductrice car revêtue d'une forte connotation immobilière et administrative, qui ne correspond pas à la vocation de l'agence de favoriser les échanges entre la culture française et les cultures locales.
D'autre part, on peut s'interroger sur l'opportunité de modifier pour la troisième fois en trois ans la dénomination de l'opérateur chargé de la coopération culturelle.
Le nom de « CulturesFrance » commence seulement à asseoir sa réputation à l'étranger. Est-il réellement pertinent de vouloir changer à nouveau d'appellation, alors même que l'objectif recherché est de renforcer la lisibilité et la visibilité de notre action culturelle à l'étranger ?