II. UNE RÉALITÉ DÉJÀ PRÉSENTE ET QUI JOUE UN RÔLE ESSENTIEL

Les coopérations spécialisées peuvent prendre trois formes bien différentes.

Il peut s'agir de coopérations dont l'objet et les modalités sont organisées par les traités eux-mêmes, comme c'est le cas pour l'Union économique et monétaire.

Il peut s'agir de coopérations en dehors des traités, comme c'était le cas initialement des accords de Schengen.

Il peut s'agir, enfin, de « coopérations renforcées » au sens précis que les traités donnent à cette expression (voir plus haut).

S'il n'existe pas encore d'illustration de cette dernière possibilité, les deux autres formes ont d'ores et déjà montré leur importance centrale pour la construction européenne.

1. Les coopérations spécialisées organisées par les traités européens

a) L'Union économique et monétaire (UEM)

Les modalités de l'UEM sont définies avec précision par les traités. Si certaines dispositions s'appliquent à tous les États membres (coordination des politiques économiques, certains aspects de la discipline budgétaire), l'UEM n'en constitue pas moins une coopération spécialisée pour les dispositions relatives à la monnaie unique : deux États membres (la Grande-Bretagne et le Danemark) bénéficient d'une dérogation permanente ; par ailleurs, la Suède, depuis les résultats négatifs du référendum organisé en septembre 2003 sur son entrée dans l'euro, bénéficie également, en pratique, d'une dérogation. En même temps, même pour les États membres ne bénéficiant pas d'une dérogation et ayant donc manifesté leur volonté d'entrer dans la zone euro, l'intégration à l'Union monétaire n'est pas automatique : ils doivent préalablement respecter les « critères de Maastricht » concernant le taux d'inflation, le déficit budgétaire, l'endettement public, les taux d'intérêt réels à long terme, l'absence de dévaluation depuis au moins deux ans.

De ce fait, seize États membres sur vingt-sept appartiennent aujourd'hui à la zone euro.

On peut noter que, sans ce recours à une coopération spécialisée, l'Union monétaire n'aurait pu être lancée, l'opposition de la Grande-Bretagne étant manifestement irréductible. Par ailleurs, les mécanismes de cette coopération spécialisée ont permis de concilier la mise en place d'une monnaie unique et le processus d'élargissement : l'existence des « critères de Maastricht » a permis de ne pas inclure au départ les nouveaux États membres dans la zone euro, tout en leur indiquant les critères objectifs à respecter pour leur entrée dans cette zone dès lors que leur économie serait en mesure d'en supporter les conséquences. Enfin, loin de susciter une « fragmentation » de l'Union, la mise en place de l'euro par une partie des États membres a eu un effet bénéfique pour l'ensemble de l'Union : au moment de la crise financière, tous les États membres ont bénéficié, directement ou indirectement, du rôle stabilisateur de l'euro.

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