CONCLUSION

Votre rapporteur spécial relève que de nombreux points d'interrogation demeurent concernant l'avenir de l'ENSOSP , alors même que la délocalisation de l'école a résulté d'une volonté politique forte et a représenté un investissement particulièrement lourd : plus de 90 millions d'euros pour la délocalisation et des ambitions très élevées pour les nouveaux outils de formation.

Le processus de délocalisation est aujourd'hui largement avancé, grâce à la très forte implication des personnels de l'école sur place et à la volonté de réussite du projet . Votre rapporteur spécial tient tout particulièrement à féliciter les personnels de l'école qu'il a rencontrés pour leur rôle dans la réussite de ce projet, malgré les nombreux obstacles qui se sont présentés. L'analyse du processus indique toutefois que certains problèmes auraient pu être évités.

Enfin, il semble à votre rapporteur spécial qu'étant donnés les efforts financiers et humains déjà consacrés au développement de l'ENSOSP à Aix-les-Milles, il est impératif de lever rapidement les derniers obstacles que ce projet rencontre, pour parachever la délocalisation de l'école et lui garantir les moyens de sa réussite .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 22 juillet 2008, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a entendu une communication de M. Claude Haut, rapporteur spécial, sur l'école nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers (ENSOSP).

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Claude Haut, rapporteur spécial , a rappelé les éléments qui l'avaient conduit à choisir le thème de sa mission de contrôle, à laquelle il avait associé Mme Catherine Troendle, en sa qualité de rapporteur pour avis au nom de la commission des lois.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a rappelé que l'ENSOSP, dont la création remontait à 1979, était un établissement public administratif sous tutelle du ministre de l'intérieur. Il a précisé que ses missions étaient étendues : formation initiale et continue des officiers de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, formations à destination d'autres publics, animation du réseau des écoles départementales ou interdépartementales de sapeurs-pompiers, coordination de leurs formations et participation à la coopération internationale en matière de sécurité civile.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a tout d'abord détaillé les conditions de délocalisation de l'ENSOSP qui, depuis 1979, était implantée à Nainville-les- Roches, dans l'Essonne.

Il a évoqué les raisons justifiant la délocalisation de l'ENSOSP : d'une part, l'absence, à Nainville, de « plateau technique », c'est-à-dire d'un terrain permettant des exercices dans les conditions les plus proches de la réalité et, d'autre part, l'augmentation du nombre de formations résultant notamment de la création de la filière service de santé et de secours médical et de la volonté des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) de disposer d'une véritable chaîne de commandement des officiers de sapeurs-pompiers.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a précisé qu'au début de l'année 2002, les deux sites retenus pour la délocalisation de l'ENSOSP étaient Cambrai, dans le Nord, et Aix-les-Milles, dans la périphérie d'Aix-en-Provence. Il a jugé difficile de remettre en cause, 6 ans plus tard, la pertinence du choix d'Aix. Evoquant les avantages respectifs des deux sites, il a indiqué que le choix d'Aix avait relevé, en dernier ressort, du ministre de l'intérieur de l'époque, qui l'avait annoncé le 27 juin 2002.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a signalé que la construction de l'école n'était pas encore achevée : le plateau technique devrait être terminé en septembre 2008 et le pôle pédagogique en septembre 2009. Il a précisé que les cours étaient actuellement dispensés dans des locaux préfabriqués. Si ce délai de 7 ans entre la décision de la délocalisation et l'achèvement de l'école pouvait, au premier abord, paraître excessif, il a estimé que l'étude plus précise du dossier conduisait à porter un jugement plus nuancé, le projet n'ayant qu'un an de retard par rapport au calendrier établi en 2003.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a ensuite fait état des problèmes rencontrés au cours du processus de délocalisation. Le site initial du plateau technique de l'école avait dû être abandonné et un nouveau site, qui s'avéra particulièrement dégradé, être trouvé. Par ailleurs, l'installation de l'ENSOSP à Aix devait s'accompagner de la création sur le site de Cambrai d'un « pôle de défense civile », centré sur les risques terroristes, qui n'a finalement jamais été créé. Enfin, le transfert effectif de l'intégralité des formations à Aix avait dû être précipité, du fait des inconvénients résultant du fonctionnement de l'ENSOSP, entre 2004 et 2006, sur deux sites. Par conséquent, suite à une étude précise des coûts de chacune des solutions, il avait été décidé, en octobre 2006, de transférer intégralement les formations à Aix, pour un coût, évalué à 2,8 millions d'euros. M. Claude Haut, rapporteur spécial, a jugé que les inconvénients liés au fonctionnement de l'école sur deux sites distants de 800 kilomètres auraient pu être mieux anticipés.

Puis M. Claude Haut, rapporteur spécial , a abordé la question du coût de l'ENSOSP. Il a indiqué que le coût total de la délocalisation s'établissait à 93,6 millions d'euros, qui n'a dû être réévalué « que » de 4 millions d'euros en cours de réalisation, ce qui lui semblait relativement modique étant donnée l'enveloppe globale.

Il a précisé que les financements provenaient essentiellement de l'Etat, qui remboursait intégralement l'emprunt de 53 millions d'euros contracté par l'ENSOSP, puis du conseil général des Bouches-du-Rhône, qui participait à hauteur de 30 millions d'euros, du conseil régional, pour près de 6 millions d'euros et enfin de la ville d'Aix et de la communauté d'agglomération, respectivement à hauteur d'1,8 et de 2,7 millions d'euros.

Il a par ailleurs souligné que le budget de fonctionnement de l'école pour l'année 2008 s'établissait à 23,3 millions d'euros. Les ressources de fonctionnement de l'école provenaient pour 40 % des formations facturées aux SDIS, pour 37 % du Centre national de la fonction publique territoriale et pour 18 %, soit 4,3 millions d'euros, d'une subvention annuelle de l'Etat.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a jugé qu'il était trop tôt pour déterminer si la délocalisation, qui s'était accompagnée du recentrage sur le site de l'ENSOSP de formations jusqu'alors très largement sous-traitées à des structures départementales, avait produit des économies d'échelle. Il a estimé que le choix du recentrage avait été fait pour améliorer la formation, sans que les aspects financiers aient été prioritaires.

Enfin, M. Claude Haut, rapporteur spécial , a identifié les forces et les faiblesses actuelles de l'ENSOSP.

Concernant les atouts de l'école, il a relevé l'attractivité des formations, avec plus de 88.000 journées de formation / stagiaire en 2008. Il a fait valoir que les représentants des élèves de l'ENSOSP qu'il avait rencontrés semblaient très satisfaits de leur formation. Il a également fait état d'un taux d'occupation de l'école de 74 %, supérieur à celui de 34 % à Nainville. Enfin, il a relevé la bonne articulation entre l'ENSOSP et les SDIS, un important travail ayant été fait pour améliorer, en amont, la prévision des besoins de formation et pour associer aux formations les 54 SDIS qui disposent d'une école de sapeurs-pompiers.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a toutefois fait état d'incertitudes importantes auxquelles l'école faisait face.

D'une part, l'ENSOSP n'a, dans un premier temps, pas pu embaucher de contractuels, en raison de l'imprécision des textes qui la régissent. D'autre part, l'école rencontre d'importantes difficultés pour attirer le personnel travaillant pour les SDIS, qui constitue pourtant l'essentiel de ses effectifs : sur 155 postes au sein de l'école, 64 sont des sapeurs-pompiers mis à disposition par les SDIS pour 3 ou 6 ans. M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué que les personnels rencontrés sur place lui avaient fait part de leur inquiétude quant aux conditions de réintégration dans les SDIS, à la fin de leur mise à disposition. Par ailleurs, l'école, qui fait appel à plus de 1.000 intervenants occasionnels par an, issus notamment des SDIS, rencontre des problèmes fréquents de défection des intervenants, ce qui pèse sur la qualité de l'enseignement. Pour y remédier, 4 postes de formateurs permanents ont été ouverts sur le pôle pédagogique, mais aucun candidat n'a postulé. M. Claude Haut, rapporteur spécial , a donc souhaité que le statut de professeur à l'ENSOSP soit plus attractif, afin de remédier à ces problèmes.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , s'est également interrogé sur les conditions de vente de l'ancien site de Nainville, dont certains éléments de mobilier pourraient avoir été « bradés » et dont les locaux se dégradent rapidement.

Enfin, il a relevé que la question des ressources foncières de l'ENSOSP n'était pas réglée : l'enveloppe prévue pour l'acquisition de la réserve foncière nécessaire à la montée en puissance de l'école n'est plus suffisante, du fait de l'augmentation du prix du foncier. Par conséquent, l'ENSOSP n'a plus les moyens financiers de ses ambitions.

En conclusion, M. Claude Haut, rapporteur spécial, a regretté que de nombreux points d'interrogation demeurent, alors que le projet de cette école a résulté d'une volonté politique très forte et a représenté un investissement « particulièrement lourd » de plus de 90 millions d'euros. Il a observé que la délocalisation avait bien avancé, grâce à la très forte implication des personnels sur place et à leur volonté de réussir le projet. Enfin, il a jugé qu'à ce stade du développement de l'école et étant donné les moyens qui lui avaient déjà été consacrés, il est nécessaire de lever les obstacles que l'école rencontre, pour lui garantir les moyens humains et matériels de sa réussite.

M. Paul Girod a jugé que, seules, les contraintes du plan d'occupation des sols de Nainville pouvaient justifier la délocalisation de l'ENSOSP, mais qu'un accord aurait pu être passé avec les sociétés d'assurances pour l'exploitation du plateau technique de Vernon. Il a estimé que le choix d'Aix-les-Milles avait résulté de la volonté des sapeurs-pompiers eux-mêmes et regretté que les administrations de l'Etat n'aient pas davantage soutenu le projet de « pôle de défense civile » à Cambrai. Enfin, il s'est interrogé sur l'articulation entre les écoles départementales de sapeurs-pompiers et l'ENSOSP et a souhaité que le système de formation des sapeurs-pompiers soit clarifié.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a jugé qu'il était aujourd'hui impossible de faire « marche arrière » sur le choix d'Aix-les-Milles et qu'il fallait s'assurer que l'ENSOSP dispose des moyens nécessaires pour rendre le meilleur service possible au moindre coût. Il a souhaité que les écoles départementales soient étroitement associées au fonctionnement de l'ENSOSP.

Mme Michèle André s'est interrogée sur ce qui différenciait la formation des officiers de sapeurs-pompiers à l'ENSOSP de celle déjà assurée par les écoles du feu départementales.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a souligné que l'ENSOSP pourrait proposer une formation pratique plus diversifiée, sur son plateau technique, que celle des écoles départementales. Par ailleurs, il a observé que les formations théoriques étaient également plus poussées.

M. Jean Arthuis, président , s'est interrogé sur la formation des officiers de sapeurs-pompiers à la gestion financière de leur activité.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a indiqué que les formations théoriques incluaient des cours de gestion et a jugé qu'il serait toutefois intéressant de demander à l'ENSOSP la liste exhaustive des cours dispensés pour chaque formation.

M. Jean-Claude Frécon a jugé qu'il fallait former les sapeurs-pompiers à la nécessité de maîtriser l'évolution du coût des SDIS. Il s'est interrogé sur le nombre de journées de formation dispensées à l'ENSOSP.

M. Claude Haut, rapporteur spécial , a précisé que les 88.000 journées de formation / stagiaire en 2008 ne correspondaient pas seulement à la formation initiale des élèves officiers mais aussi à la formation continue et à la formation d'élus ou d'experts.

M. Jean Arthuis, président , s'est interrogé sur le coût pour les SDIS des formations obligatoires dispensées par l'ENSOSP et sur le mode de gouvernance de la sécurité civile en France.

M. Paul Girod a jugé souhaitable que la formation dispensée à l'ENSOSP ne se limite pas à des aspects pratiques, mais atteigne, sur le plan théorique, un niveau de qualité à la mesure de l'investissement qui a été fait et des besoins des futurs officiers de sapeurs-pompiers.

M. Alain Lambert a ajouté que les fonctionnaires du ministère de l'intérieur se devaient d'être, à l'avenir, particulièrement attentifs aux coûts de gestion de l'ENSOSP.

La commission a ensuite donné acte au rapporteur de sa communication et en a autorisé, à l'unanimité, la publication sous la forme d'un rapport d'information .

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