CONCLUSION
Le Président de la République a fixé l'objectif d'une immigration professionnelle représentant 50 % des flux migratoires. La mise en oeuvre de cet objectif par le ministère de l'immigration enregistre de premiers résultats encourageants . Elle repose sur de nouveaux instruments, comme l'établissement de listes de métiers en tension ou des accords de gestion concertée des flux migratoires avec les pays d'émigration.
L'enjeu est de concevoir l'immigration économique comme un nouveau facteur de croissance. Les besoins de main d'oeuvre sont importants : d'ici à 2015, les créations nettes d'emploi dans les services aux particuliers seraient de l'ordre de 416.000, alors que les départs à la retraite concernaient 790.000 personnes. Le même phénomène se constate dans des secteurs aussi divers que le bâtiment et les travaux publics, la santé ou le transport. Nous souffrons de retard face à des pays qui sont par essence des pays d'immigration, comme l'Australie et le Canada, tout comme par rapport à l'Espagne et au Royaume Uni.
Autant dire qu'une vision nouvelle de la politique de l'immigration était nécessaire . L'immigration économique, nécessairement choisie et régulée, repose sur une qualité accrue des politiques d'accueil et d'intégration. Elle revêt trois dimensions.
Elle est en premier lieu une politique d'attractivité, à destination des talents, ces accélérateurs de croissance aujourd'hui décisifs. Un outil a été créé : la « carte compétences et talents ». 44 cartes seulement ont été délivrées à ce jour, pour un objectif de 2.000 en 2008. Il faut donc « corriger le tir » rapidement. A l'étranger, le « marketing » de nos ambassades est peu dynamique, voire inexistant. Les critères d'attribution mériteraient d'être assouplis. Il paraît aussi souhaitable de lever les contraintes pesant sur les ressortissants des pays de la zone de solidarité prioritaire (Afrique francophone principalement). La carte « compétences et talents » doit être toilettée de ses aspects relatifs au codéveloppement, et pouvoir ainsi être renouvelée au-delà de trois ans. Un même outil ne peut servir à la fois deux objectifs : attractivité et codéveloppement.
En deuxième lieu, face à des métiers en tension, dont les besoins doivent être réévalués chaque année, il faut supprimer les freins à l'immigration professionnelle. Le parcours de l'entreprise et de son futur salarié étranger s'apparente encore à une course d'obstacle, face aux incertitudes en matière de délais. Le présent rapport d'information propose d'introduire un « délai opposable » de 2 mois pour le traitement des demandes d'autorisations de travail. Il est nécessaire en outre de revoir une fiscalité sur l'immigration de travail, conçue en 1975, dans une logique fondamentalement dissuasive. Et pour rapprocher l'offre et la demande d'emploi par delà les frontières, la France a besoin d'une agence du placement international de la main d'oeuvre, dont l'action doit se développer sur internet, et dans une coopération avec les administrations des pays d'origine.
En troisième lieu, ce sont les arrivants au titre du regroupement familial qu'il convient d'intégrer sur un plan professionnel. En 2006, 61 % des signataires du contrat d'accueil et d'intégration déclaraient avoir eu une activité professionnelle avant leur arrivée en France, mais seulement 30,6 % déclaraient en exercer une en France . Ce constat regrettable est connu, et pourtant, la signature du contrat d'accueil et d'intégration, si elle donne lieu à une information des droits des personnes concernées, ne comprend toujours pas d'incitation concrète à la recherche active d'un emploi. Elle doit désormais prévoir un rendez-vous systématique avec l'ANPE. 100 millions d'euros de subventions aux associations sont consacrés en 2007 par l'agence nationale de la cohésion sociale et de l'égalité des chances (ACSé) à l'intégration des migrants, mais la dimension professionnelle est négligée. Il faut réorienter ces crédits vers l'intégration professionnelle des arrivants au titre du regroupement familial.
C'est sur ces trois piliers que reposera le succès de la nouvelle politique de l'immigration professionnelle , qui, parce qu'elle nécessite une profonde réforme administrative, ne pourra parvenir à maturité avant 2010.