TRAVAUX DE LA MISSION
Audition de Mmes Annie PODEUR, directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos), Martine AOUSTIN, responsable de la mission T2A (MT2A), et Maryse CHODORGE, directrice de l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation (Atih) (mardi 15 janvier 2008)
Mme Annie Podeur, directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, a tout d'abord affirmé que la nouvelle échelle nationale des coûts, en cours d'élaboration, qui sera commune aux établissements publics et privés, prend en compte les observations émises tant par la Cour des comptes que par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'inspection générale des finances (IGF) sur les défauts de la méthode utilisée pour la précédente échelle. A cet égard, il faut souligner que la plupart des autres pays ne disposent pas d'un tel instrument. En effet, l'échelle des coûts a été élaborée à partir des données disponibles dans un ou deux établissements seulement en Suisse ; elle est en cours de construction en Belgique et, ailleurs, elle est établie à partir d'une grille internationale assez générale.
En France, l'échelle nationale des coûts est réalisée à partir d'un échantillon d'établissements volontaires, utilisant une méthodologie commune, arrêtée en septembre 2007. Les résultats de l'analyse des coûts de ces établissements sur l'année 2006 seront connus en avril 2008. Les établissements retenus pour cette enquête doivent disposer d'une comptabilité analytique de bon niveau leur permettant de déterminer non seulement le coût d'un service, mais encore celui de chaque type de séjour. La généralisation de la comptabilité analytique à l'ensemble des établissements hospitaliers est d'ailleurs un objectif prioritaire de la Dhos, qui souhaite avancer au rythme de cinquante établissements par an.
La difficulté de l'identification du coût d'un séjour tient à la très grande variabilité des éléments à prendre en compte qui peuvent être liés aux patients eux-mêmes en fonction de leur âge, de leur sexe et de leur état de santé, aux conditions de réalisation des actes ou aux éventuelles complications. Il n'y a donc pas de séjour standard à proprement parler.
Les innovations majeures de la nouvelle échelle nationale des coûts sont, d'une part, la nette augmentation des contrôles mis en oeuvre, d'autre part, l'accroissement significatif de l'échantillon retenu, qui passe de 35 à 104 établissements, dont 61 publics et 43 privés, enfin, l'amélioration de la pertinence des coûts calculés. L'objectif est de constituer, à l'horizon de cinq ans, un véritable échantillon représentatif des établissements de santé de notre pays.
M. Pierre Bernard-Reymond a souhaité savoir si l'échantillon retenu est suffisamment représentatif de la taille des établissements.
Mme Maryse Chodorge, directrice de l'Atih, a précisé que l'AP-HP est présente dans cet échantillon, ainsi que plusieurs CHU. Ces derniers étant un peu surreprésentés, des travaux de recalage sont effectués pour la constitution définitive de l'échelle.
Mme Annie Podeur a fait valoir que le passage de la tarification à l'activité (T2A) à 100 % est un puissant incitatif au développement de la comptabilité analytique dans les hôpitaux, ce qui permettra d'élargir l'échantillon au cours des prochaines années.
M. André Lardeux s'est interrogé sur la représentativité géographique des établissements retenus.
Mme Maryse Chodorge a indiqué que toutes les régions sont représentées dans l'échantillon, mais ne sont retenus que les établissements capables de répondre à l'ensemble des questions du recueil des données, ce qui constitue une limite.
Mme Annie Podeur a ensuite rappelé que les travaux, engagés il y a quelques années, d'analyse des coûts du secteur privé se sont avérés très complexes et ont donc pris beaucoup de retard. Les résultats ont été obtenus en juillet 2007 et ne sont exploitables qu'avec beaucoup de prudence, mais on peut considérer que le recueil des données effectué à cette occasion a été une sorte de galop d'essai permettant à certains établissements de faire des efforts pour pouvoir être intégrés aux travaux sur l'échelle commune des coûts.
Beaucoup d'espoirs sont fondés sur cette nouvelle échelle commune. En particulier, une nouvelle classification en différents niveaux pour un même traitement devrait pouvoir être établie. Dans ce but, un contrat d'objectifs et de moyens a été signé entre la Dhos et l'Atih afin de préciser les conditions de réalisation de l'échelle ; dans le prolongement de ce contrat, une convention tripartite est établie avec les établissements de santé qui s'engagent à respecter une charte de qualité très contraignante.
M. Bernard Cazeau a souhaité savoir pourquoi n'a pas été attendue la finalisation de la nouvelle échelle nationale des coûts avant de généraliser la T2A.
Mme Annie Podeur a souligné que la T2A a été lancée sur la base de travaux existant depuis 1997 et sur l'analyse des coûts effectuée en 2001 par le rapport Marrot Gilardi. Certains travaux ont été certes très critiqués. Par exemple, de nombreux établissements estimaient que le supplément de réanimation, soit plus de 800 euros par jour, était notoirement sous-évalué. Or, une enquête approfondie a montré que non seulement celui-ci était correctement calculé, mais qu'il était peut-être même surévalué. Cela prouve l'intérêt de mettre en oeuvre une approche transparente, s'appuyant sur la réalité économique des tarifs applicables.
M. François Autain a souhaité obtenir des précisions sur l'identification du coût d'un séjour et d'un groupe homogène de malades (GHM).
Mme Annie Podeur a reconnu que la plupart des établissements ont des difficultés à établir ces coûts, mais pas ceux qui ont été retenus dans l'échantillon de l'échelle nationale commune.
Mme Maryse Chodorge a précisé que pour les GHM les plus couramment pratiqués, c'est-à-dire environ cinq cents, le recueil de données regroupe plusieurs milliers d'observations. En revanche, pour quelques GHM rares, comme les greffés du pancréas, on ne dispose que de peu d'observations.
Mme Annie Podeur a rappelé que la mission Igas de janvier 2006 avait recommandé la réalisation de seize études complémentaires, ainsi que divers moyens à mettre en oeuvre pour piloter ces études. Celles-ci seront prêtes le 15 octobre prochain, comme le préconise l'article 62 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Elles concerneront, tout d'abord, le coût du travail, en analysant les écarts entre les secteurs public et privé, les honoraires et dépassements pratiqués par les médecins libéraux ainsi que les résultats de l'externalisation de certaines fonctions techniques et logistiques.
Ensuite, une étude cherchera à identifier le surcoût lié à la précarité, c'est-à-dire à mesurer l'impact, sur le coût et les caractéristiques des séjours, des patients éligibles à la CMU, à la CMU-c et à l'aide médicale de l'Etat (AME). En effet, certains établissements situés au Havre, dans le Nord-Pas-de-Calais et en Moselle font état de surcoûts liés à la pauvreté et à la précarité, qu'il paraît aujourd'hui nécessaire d'objectiver.
Une autre étude sera consacrée à la permanence des soins et au coût des gardes et astreintes. L'idée est de sortir des groupes homogènes de séjour (GHS) le coût de cette permanence des soins pour en faire une mission d'intérêt général, ce qui devrait permettre des gains d'efficience. Une autre étude portera sur la réalisation des soins avant et après les séjours hospitaliers. Enfin, la variabilité des coûts internes aux GHM sera approfondie.
L'ambition de ces différents travaux, qui devront être réalisés dans un calendrier très resserré, que la Dhos s'engage à respecter, est de mieux identifier les tarifs et les divers surcoûts qui peuvent être constatés afin de permettre à l'échelle commune de refléter le plus fidèlement possible le coût des diverses prises en charge.
Un comité de pilotage a été constitué pour suivre ces travaux ; il s'est réuni le 12 décembre dernier et a acté le calendrier et le programme des études. Il associe de nombreux organismes et comprend des experts indépendants de haut niveau qui pourront avoir un regard technique sur certaines études.
M. Alain Vasselle, président, a fait observer que le surcoût lié à la précarité est déjà pris en charge à travers les missions d'intérêt général et aide à la contractualisation (Migac).
Mme Annie Podeur a indiqué que les Migac ne financent actuellement que le seul programme d'accès aux soins (PAS), c'est-à-dire, pour l'essentiel, l'intervention d'une assistance sociale. Or, cela est insuffisant pour avoir une vision objective, globale et précise du coût de la précarité.
Elle a ensuite à nouveau insisté sur le rôle du comité de pilotage de la convergence dont l'Atih est maître d'oeuvre, et la Dhos et la mission T2A assurent la maîtrise d'ouvrage. Entouré d'un comité d'experts, il est en concertation permanente avec les fédérations hospitalières, publiques et privées.
Un cahier des charges est en cours d'établissement : il doit permettre de respecter l'objectif de 2012 pour la convergence intersectorielle. Tout dépendra néanmoins de la qualité des études et de la capacité à identifier l'origine des écarts de coûts.
M. Alain Vasselle, président, a souligné la nécessité d'une volonté politique forte pour mener à bien l'ensemble de ces études.
Mme Annie Podeur a fait valoir que pour la Dhos, le chantier de la convergence est un aspect prioritaire de son action en 2008. Puis elle a donné un certain nombre de chiffres sur l'emploi dans les établissements de santé. Les effectifs non médicaux des établissements de santé publics ont progressé de 7 % entre 2002 et 2006, pour s'établir à 795 639. Cette progression est essentiellement due aux trente-cinq heures. Les filières ayant vu leurs effectifs le plus progresser sont la filière socio-éducative avec + 16 %, qui comprend l'emploi dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (Ehpad), et la filière administrative avec + 10 %. Les charges salariales de personnels de ces effectifs non médicaux ont progressé de 13,4 % au cours de la même période, les rémunérations nettes s'élevant au total à 18,95 milliards d'euros en 2006. Les effectifs non médicaux des établissements privés ont crû de 5 % entre 2002 et 2006, pour atteindre 260 865. Cette moindre progression est pour l'essentiel liée à des modalités différentes de mise en place des trente-cinq heures. Les personnels médicaux comprennent 42 078 libéraux et 121 602 salariés, dont 104 965 dans les établissements publics, 12 025 dans les établissements privés sous dotation globale et 4 612 dans les établissements privés. Ces effectifs ont progressé de 5,9 % entre 2002 et 2005.
Sur les départs à la retraite dans la fonction publique hospitalière, l'observatoire national des emplois et des métiers, créé en 2001, et la cellule statistique constituée par la Dhos sur ce sujet ont publié différents travaux au cours de l'année 2007.
Dans la filière ouvrière, 90 % des effectifs de certains métiers seront partis en retraite d'ici à 2015. Cela nécessite une poursuite de la réforme des corps de catégorie C afin de permettre une plus grande souplesse dans la gestion de ces emplois.
A partir de la mise en place d'un répertoire des métiers de la fonction publique hospitalière, une étude prospective sur les métiers sensibles et stratégiques a d'ailleurs été publiée au mois de décembre dernier. Elle met en évidence quelques fonctions cruciales, comme les permanenciers du Centre 15 ou les techniciens d'information médicale.
Il convient toutefois de rappeler que la fonction publique hospitalière relève d'une gestion décentralisée, le pouvoir de recrutement étant placé entre les mains des chefs d'établissement et non dans celles de la Dhos.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir si les médecins sont également recrutés par les directeurs d'établissement.
Mme Annie Podeur a indiqué que depuis le mois de septembre 2007, c'est le centre national de gestion des praticiens hospitaliers, et non la Dhos, qui recrute les médecins, leur nomination étant confirmée par le ministre. Leur affectation, en revanche, relève des directeurs d'établissement. Elle a ajouté que l'une des pistes de réflexion de la mission Larcher concerne précisément cet aspect de la gouvernance de l'hôpital. Pour les professeurs universitaire praticiens hospitaliers (PUPH), les nominations sont centralisées car elles relèvent d'une codécision du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la santé. Néanmoins, les établissements recrutent d'ores et déjà des praticiens à statut contractuel, donc provisoire.
La Dhos suit également avec attention les évolutions actuelles destinées à favoriser les gains de productivité. Ainsi, pour les personnels paramédicaux, la formation a été revue ainsi que la démographie avec l'établissement d'un quota d'entrées annuel pour les infirmiers de 30 000 par an. Par ailleurs, un fonds de modernisation spécifique a été mis en place pour accompagner les changements de métier des agents. Enfin, pour les personnels médicaux, une étude réalisée en 2005 par l'observatoire national des professions de santé a montré que les médecins salariés étaient mieux protégés que ceux du secteur libéral. C'est pourquoi on prévoit qu'en 2025 un tiers des médecins seront salariés hospitaliers contre seulement 29 % aujourd'hui ; par ailleurs, les femmes, qui représentaient 40 % de cette population à la fin de 2002, devraient être plus de 50 % en 2025. La démarche actuellement engagée dans le cadre des Etats généraux de la santé doit permettre d'aborder cette question de la démographie médicale et de la répartition des professionnels sur le territoire.
Mme Annie Podeur a ensuite présenté quelques éléments chiffrés sur le processus d'externalisation suivi dans les établissements de santé. Deux grandes fonctions sont concernées : la blanchisserie et la restauration. Dans le secteur public, la blanchisserie est externalisée à 26 % mais elle l'est à 69 % dans le secteur privé. Pour la restauration, ces chiffres sont respectivement de 12,6 % et de 48 %. A cela s'ajoutent les mécanismes de coopération et de mutualisation des charges entre établissements de santé, en forte progression actuellement : 10 % des établissements hospitaliers ont recours à ce dispositif pour ces deux fonctions.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 prévoit d'ailleurs à ce titre le développement des groupements de coopération sanitaire, ce qui n'exclut pas la poursuite de l'externalisation. En tout état de cause, ce qui compte est le résultat obtenu et non la méthode utilisée. Il est important que les cahiers des charges soient correctement établis et que la question du reclassement du personnel soit posée.
M. Alain Vasselle, président, a estimé qu'il serait intéressant de savoir si l'externalisation a permis des baisses d'effectifs à l'hôpital.
Mme Annie Podeur a répondu que tel est le cas mais qu'une analyse plus fine est nécessaire afin de mesurer les reclassements de personnels ou les reprises d'agents par les sociétés privées.
M. Pierre Bernard-Reymond a souhaité savoir si les agents hospitaliers peuvent conserver leur statut lorsqu'ils sont repris dans une structure privée.
Mme Annie Podeur a précisé que, pendant quelques années, les agents peuvent conserver le bénéfice du statut de la fonction publique hospitalière et qu'en outre, ils bénéficient de perspectives d'évolution professionnelle parfois plus attractives dans le secteur privé.
S'agissant de la question du paiement des heures supplémentaires acquises et affectées dans un compte épargne-temps (CET), il est important de connaître les enjeux chiffrés du dossier. Ainsi, le volume de jours épargnés dans un CET est de 2,6 millions pour la fonction publique hospitalière à la fin 2007 et de 1,6 million pour les personnels médicaux, soit un total de 4,2 millions de jours. Les heures supplémentaires représentent 1,1 million de jours, pour la quasi-totalité au titre des agents de la fonction publique hospitalière.
Une négociation est en cours sur le financement de ces travaux supplémentaires. Un fonds pour l'emploi hospitalier a été constitué à cet effet, logé à la Caisse des dépôts et consignations, et doté de 746,5 millions d'euros. Une première tranche de 398 millions d'euros a été utilisée en 2004, le montant aujourd'hui disponible est donc de 348,5 millions d'euros. S'ajoutent à ce fonds les provisions inscrites dans les comptes des établissements de santé, soit 328 millions d'euros. Ces disponibilités rendent à l'évidence possible une monétarisation au moins partielle des travaux supplémentaires.
Sur le plan budgétaire, le passage aux états des prévisions de recettes et de dépenses (EPRD) en 2006 a introduit, dans les hôpitaux, la nécessité d'un pilotage par les recettes et a interdit les reports de charges. Aussi, les reports de charges antérieures, soit 519 millions d'euros dont 360 millions pour les charges de personnels, ont-ils été inclus dans les résultats de 2006 des établissements de santé. Le déficit consolidé des établissements publics de santé a atteint, à la fin de 2006, 254 millions d'euros et le déficit du compte de résultat principal, 429 millions d'euros. Si l'on raisonne non plus de manière générale, mais en distinguant les établissements excédentaires et ceux en déficit, on constate un excédent global de 407 millions pour les premiers et un déficit de 661 millions pour les seconds, ce qui traduit de réelles différences de situation financière entre les hôpitaux. En tout état de cause, les dotations aux amortissements ne peuvent constituer une variable d'ajustement, car cela nuirait au développement de la capacité d'autofinancement des hôpitaux. Afin de prévenir tout risque de détournement des masses concernées, les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) ont la possibilité d'intervenir pour que les EPRD respectent les obligations de sincérité et de transparence qui incombent aux gestionnaires.
Ceci étant, on constate certes une décélération du taux de progression des dotations aux amortissements, mais pas une diminution de ce poste d'une année à l'autre.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir si les comptes des hôpitaux sont validés par une instance particulière, comme un expert-comptable.
Mme Annie Podeur a indiqué que le comptable de chaque établissement contrôle la régularité des dépenses, l'ARH examine la sincérité des EPRD et, a posteriori, les chambres régionales des comptes, qui ont acquis une grande compétence en ce domaine, effectuent un contrôle budgétaire approfondi.
Par ailleurs, une ordonnance du 2 mai 2005 a institué les conseillers généraux des établissements de santé, nommés par le ministre pour appuyer les hôpitaux dans l'amélioration de leur fonctionnement et de leur gestion. Ces conseillers sont actuellement au nombre de vingt-six. Ils ont trois profils : anciens directeurs d'hôpitaux, praticiens hospitaliers ou anciens directeurs d'ARH. Depuis leur création, ils ont mené quarante-quatre missions d'appui-conseil, dont dix-sept sont terminées, vingt-quatre encore en cours et deux font l'objet d'un suivi hebdomadaire. Les principales conclusions auxquelles ils sont parvenus dans leur diagnostic concernent le manque d'ambition en matière d'approche économique, le recours à des recettes trop souvent irréalistes, la difficulté de faire adopter des réformes par les conseils d'administration, la rigidité dans la gestion des personnels médicaux, le mauvais positionnement stratégique de certains établissements ou encore la charge d'investissement trop lourde de quelques hôpitaux. Ces travaux ont conduit à la mise au point d'un « diagnostic flash » comprenant divers clignotants et indicateurs, très utiles pour déceler rapidement les dysfonctionnements des établissements.
Par ailleurs, ces conseillers ont conduit quarante-deux missions d'études thématiques, dont quinze sont achevées. Elles ont notamment porté sur les jours accumulés dans les CET, la démographie des infirmières, l'évaluation des centres 15-18 et les transports sanitaires. Après un an de fonctionnement, il apparaît que la capacité d'expertise et d'audit de ces conseillers est très utile. Le centre national de gestion assure leur prise en charge dans le cadre de l'enveloppe hospitalière.
Audition de MM. Frédéric VAN ROEKEGHEM, directeur général de la caisse nationale d'assurance maladie ?des travailleurs salariés (Cnam) et de l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam), et Jean-Marc AUBERT, directeur délégué à la gestion et à l'organisation des soins (mardi 15 janvier 2008)
M. Alain Vasselle, président, a rappelé que la Mecss souhaite établir un diagnostic de la situation des établissements de santé. Il a tout d'abord interrogé M. Frédéric Van Roekeghem sur les compétences et les responsabilités de l'assurance maladie dans le domaine de la politique hospitalière.
M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Cnam et de l'Uncam, a indiqué que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, qui a institué la tarification à l'activité (T2A), et la loi du 13 août 2004, relative à l'assurance maladie, ont précisé les compétences de la Cnam dans le secteur hospitalier.
Il a rappelé que le législateur a souhaité faire évoluer la fonction de l'assurance maladie d'une position de payeur qui rembourse les dépenses hospitalières engagées par les assurés vers un rôle d'acheteur de soins et de gestionnaire du risque. Ces textes ont ainsi accru le pouvoir de l'assureur solidaire qu'est devenue la Cnam, selon les termes de la convention d'objectifs et de gestion 2005-2009, en matière de fixation des tarifs des actes hospitaliers.
Cette évolution législative a nécessité la définition d'une politique hospitalière propre à la caisse, dont les orientations ont été validées par le conseil de la Cnam en septembre 2005.
Les premières actions ont été engagées à partir de 2006 avec la mise en oeuvre d'une politique de maîtrise médicalisée hospitalière, dont les principes sont identiques à ceux de la maîtrise conventionnelle en usage dans le domaine des soins de ville. A cet effet, les agents de l'assurance maladie se sont rendus dans les établissements de santé. Des profils d'activité ont été établis autour de quelques priorités définies au niveau national, notamment dans le domaine des indemnités journalières, des statines, des antibiotiques, du respect de l'ordonnancier bizone et des transports sanitaires afin de convaincre les praticiens hospitaliers d'entrer dans une démarche de maîtrise des dépenses.
En liaison avec les services du ministère de la santé, des outils de contractualisation, sur le modèle des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens signés entre les établissements et les ARH, ont été développés pour formaliser les relations entre l'assurance maladie et les établissements de santé. A ce jour, les représentants de l'assurance maladie ont pris contact avec les commissions médicales d'établissements de plus de 90 % des hôpitaux et 255 contrats ont été conclus. Le développement de la maîtrise médicalisée hospitalière figure dans les objectifs annuels fixés aux directeurs de caisses locales.
En 2007, l'assurance maladie a transmis aux établissements leurs profils d'activité et s'est engagée dans la promotion de la chirurgie ambulatoire. Une attention plus grande a été portée aux contrôles des prescriptions établies à l'hôpital, mais exécutées par l'intermédiaire des pharmacies d'officine, ainsi qu'aux actes ayant fait l'objet d'un processus de réinternalisation au sein des établissements (analyses visuelles, endoscopies).
M. Frédéric Van Roekeghem a indiqué que l'assurance maladie s'est également attachée à sensibiliser les établissements au contrôle de la tarification à l'activité, notamment pour examiner les évolutions du volume et du codage des actes. L'accomplissement de cette tâche suppose la mise en oeuvre de nouvelles modalités de liquidation des dossiers afin de surveiller le profil d'activité des établissements. Dans la mesure où les dépenses hospitalières représentent 45 % des dépenses totales d'assurance maladie, leur optimisation constitue un enjeu fort pour la Cnam.
Il a observé que les pays qui ont recours à la T2A développent des modes de régulation spécifique, soit par le recours à l'accord préalable, soit par un renforcement du rôle du médecin traitant chargé d'orienter le patient dans le système de soins.
Dès 2008, l'assurance maladie sera en mesure de transmettre aux médecins traitants des informations sur le profil de dépenses de leurs patients. Simultanément, un dispositif d'accord préalable sur les actes de chirurgie ambulatoire verra le jour. Cette démarche sera suivie de la mise en oeuvre d'un système de facturation individuelle des séjours hospitaliers qui, à compter du 1er janvier 2009, sera directement adressée à des caisses pivots chargées de payer les établissements de santé.
Cette nouvelle logique de paiement renforce le rôle et la responsabilité de l'assurance maladie en matière de contrôle.
M. Frédéric Van Roekeghem a jugé que les autorités sanitaires doivent également s'interroger sur les modes de fixation des tarifs, sachant que d'un strict point de vue financier, et dans un souci de lutte contre les déficits, l'intérêt de l'assureur solidaire est de privilégier les établissements dans lesquels le coût des soins est le moins élevé.
M. François Autain a estimé que le recours aux accords préalables est insuffisant pour lutter contre les éventuels effets inflationnistes de la T2A. Il a voulu connaître les modalités selon lesquelles sont articulés les objectifs quantifiés prévus dans le cadre de schémas régionaux d'organisation sanitaire (Sros) avec l'évolution du volume d'activité des établissements de santé et il s'est interrogé sur l'opportunité de recourir à une régulation « prix/volume » afin d'encadrer les conséquences financières d'une trop forte croissance de l'activité hospitalière.
M. Frédéric Van Roekeghem a reconnu que le recours à l'accord préalable constitue une réponse insuffisante et a jugé indispensable de développer de nouveaux mécanismes de régulation des dépenses hospitalières, notamment par une meilleure reconnaissance du rôle de l'acheteur de soins, c'est-à-dire de l'assurance maladie.
Une telle reconnaissance constitue une évolution stratégique importante, puisque les équipes de contrôle des dépenses hospitalières ont été mises en sommeil en 1999 et qu'il est, depuis, difficile d'expliquer le rôle de l'assurance maladie dans le contrôle des établissements de santé.
M. Alain Vasselle, président, a voulu savoir si la Cnam a analysé les différences de coût existant entre établissements de santé publics et privés.
M. Frédéric Van Roekeghem a estimé que, compte tenu de l'importance du déficit de la branche maladie, l'assureur solidaire doit s'intéresser à la question du coût des soins hospitaliers et établir les raisons pour lesquelles, à qualité identique, une prestation de soins donnée fait l'objet d'une facturation différente suivant le type d'établissement qui la réalise. Des études spécifiques ont été réalisées, sur la base d'une méthodologie stricte, afin de comparer les coûts de plusieurs actes, comme par exemple l'accouchement, en tenant compte des coûts complets (le groupe homogène de séjour, les honoraires des professionnels de santé et les éventuels dépassements d'honoraires).
Le résultat de cette étude montre qu'il existe un écart d'environ 30 % entre les établissements les plus chers et les établissements les plus efficients à l'intérieur de chaque secteur, public ou privé. Il ressort de cette étude que les coûts du secteur privé sont globalement inférieurs de 40 % à ceux du public.
Une analyse approfondie des résultats fait apparaître des écarts de productivité importants, notamment dans le mode d'utilisation des plateaux techniques. Ces écarts résultent des imperfections de la « carte hospitalière », d'une mauvaise optimisation de l'organisation de la permanence des soins, mais également d'une prise en compte insuffisante des missions de service public, des contraintes liées au statut des établissements et des niveaux d'effectifs dédiés aux fonctions logistiques et administratives.
M. Frédéric Van Roekeghem a rappelé que, dès 2005, le haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie a proposé d'entamer la réduction des écarts tarifaires entre établissements publics avant l'achèvement des nombreuses études destinées à faire la lumière sur ces écarts. Il s'est déclaré, pour sa part, favorable à cette solution.
Il a jugé indispensable d'accroître l'efficience de la gestion des établissements de santé, même si, au regard des statistiques publiées par l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les résultats de la France en matière de taux de croissance des dépenses de santé ont été meilleurs que ceux des autres pays européens sur la période 1995-2005.
Il a précisé que notre pays se caractérise par la part élevée (67 % hors médicaments) des soins délivrés en établissements hospitaliers.
Mais des marges d'économies pourraient être dégagées, à condition que les établissements disposent des moyens de s'adapter aux nouvelles règles de financement et aux contraintes de la T2A.
M. Jean-Marc Aubert, directeur délégué à la gestion et à l'organisation des soins, a indiqué que les études sur les écarts de coûts, entreprises par la Cnam, portent sur un échantillon de deux mille établissements de santé. Les résultats ne font pas apparaître d'effets liés à la taille des établissements, sauf aux extrêmes pour les établissements les plus petits et les plus grands qui présentent des coûts effectivement plus élevés. Il n'existe pas non plus de différences qui pourraient être fondées sur le degré de spécialisation, expliquant les moindres coûts du secteur privé. L'application d'un coefficient géographique est apparue comme justifiée en Ile-de-France et en Corse, et uniquement dans ces deux régions métropolitaines, pour les établissements publics et privés.
Ces études n'ont pas non plus fait ressortir de surcoût significatif correspondant à la prise en charge des patients en situation précaire.
Il a précisé que l'analyse des coûts induits par la permanence des soins se poursuit. L'analyse de cette activité est complexe car elle nécessite une bonne compréhension de l'organisation interne des établissements et une prise en compte des contraintes pesant sur les équipes médicales (gardes) qui produisent des effets sur la mesure de la productivité.
Il a jugé souhaitable de réfléchir à un aménagement des modalités de financement de la permanence des soins qui pourrait être prise en charge au titre des missions d'intérêt général (Migac) plutôt que des activités de médecine, chirurgie et obstétrique rémunérées par l'intermédiaire d'un groupe homogène de séjour (GHS). Il arrive, en effet, que la nuit ou le week-end, certaines équipes n'aient aucune activité, notamment lorsque plusieurs établissements assurent la permanence des soins sur une même zone géographique.
M. Frédéric Van Roekeghem a souligné que les coûts hospitaliers varient essentiellement en fonction du statut des établissements (centre hospitalier régional universitaire, centre hospitalier général, centre hospitalier). Les éléments attachés à ce statut (régimes applicables aux personnels, plateau technique) peuvent expliquer cette variation, ainsi que les écarts de coûts avec les établissements privés, lesquels emploient moins de personnel pour des niveaux d'activités identiques.
Il a observé que ces différences statutaires et tarifaires entraînent des décisions sur les périmètres d'activités des établissements. Par exemple, les établissements privés n'investissent pas dans la maternité car ils estiment que cette activité n'est pas rentable. Mais l'intérêt de la Cnam est d'avoir à sa disposition une offre de soins diversifiée et efficiente. Celle-ci s'interroge donc légitimement sur les stratégies qu'elle doit développer en tant qu'assureur solidaire. Or, son choix ne peut pas se limiter à privilégier les questions tarifaires, mais doit également prendre en compte la qualité des prestations assurées. Les autorités sanitaires doivent accompagner cette démarche en développant des modalités de tarification qui privilégient la recherche de la qualité.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur l'opportunité de développer une stratégie tarifaire pluriannuelle destinée à donner une plus grande visibilité financière aux dirigeants des établissements de santé. Il a voulu savoir si la publication d'un tableau comparatif des tarifs des établissements publics et privés soulève des problèmes techniques.
M. Frédéric Van Roekeghem a rappelé que la Cnam a sollicité les pouvoirs publics afin que soit définie une stratégie tarifaire pluriannuelle. Cette évolution est indispensable pour permettre aux gestionnaires des établissements de santé d'apprécier l'évolution des dépenses et des recettes à moyen terme, et donc de planifier les investissements et les recrutements.
M. Jean-Marc Aubert a précisé que la Cnam a soumis cette proposition au conseil de l'hospitalisation et a obtenu que les grilles tarifaires ne soient plus modifiées tous les deux ans, mais sur une période plus longue.
Il a rappelé que si les écarts tarifaires entre établissements publics et privés ne sont pas tous explicables, les autorités sanitaires conservent la possibilité de procéder à une première étape de convergence des coûts dans le secteur public vers les tarifs les plus efficients du secteur. Des solutions pourraient également être recherchées pour enclencher une démarche globale de convergence vers les tarifs les plus efficients du privé. Cela supposerait d'attribuer une dotation financière complémentaire aux établissements publics durant la période de transition, le montant de cette dotation étant réduit au fur et à mesure que les résultats des études visant à expliquer les écarts de coûts entre établissements publics et privés seraient connus.
Il a enfin observé qu'une part croissante des activités de chirurgie est désormais effectuée par les établissements privés. Historiquement, cette situation s'explique par le rôle des chirurgiens dans le développement des cliniques. Toutefois, dès lors que la présence dans le secteur privé est assurée par des structures financières en quête de rentabilité, le risque est grand de les voir investir également dans les activités de médecine. Or, l'intérêt de l'assurance maladie est de financer des opérateurs efficients mais également de maintenir une offre publique complète sur toute la gamme de soins.
M. Alain Vasselle, président, a voulu savoir si les études de coût peuvent constituer un levier pour accroître l'efficience du secteur public hospitalier.
M. Frédéric Van Roekeghem a insisté sur la nécessité de maintenir une offre de soins complète dans le secteur public hospitalier. Cette pérennisation suppose de développer une organisation plus efficiente des établissements publics, peut-être en allégeant certaines contraintes statutaires, et de réétudier les obligations applicables aux établissements privés.
Ce dernier point permet d'évoquer la question des dépassements d'honoraires et de leur absence d'encadrement qui pénalise les praticiens hospitaliers par rapport à leurs collègues exerçant dans le privé.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur la pertinence des modalités de contrôle des dépenses hospitalières.
M. Frédéric Van Roekeghem a jugé que les opérations de contrôle se déroulent dans des conditions satisfaisantes malgré les délais d'accès aux données, et avec le soutien des directeurs des agences régionales d'hospitalisation. En effet, les textes réglementaires sont contraignants, puisque le délai réglementaire entre l'envoi de la lettre annonçant le contrôle et la réception du rapport par l'unité de contrôle régional est de dix semaines, puis encore de quatre semaines entre cette réception et sa transmission aux caisses d'assurance maladie, pour ne citer que ces exemples.
En 2006, 534 établissements ont fait l'objet d'un contrôle et 154 000 dossiers ont été examinés. Sur les trois premiers trimestres de 2007, ce sont 404 établissements supplémentaires qui ont été contrôlés et plus de trois millions d'euros d'indus qui ont été notifiés aux structures contrôlées.
Il a précisé que le recours à des logiciels spécifiques permet d'automatiser une partie des contrôles, notamment ceux portant sur le codage des actes.
Il a estimé que la Cnam doit être libre de mener les contrôles tout en coordonnant son action avec le directeur de l'agence régionale de santé.
M. Alain Vasselle, président, a rappelé que parmi les propositions remises au comité d'alerte, la Cnam a proposé une simplification des règles de contrôle de la T2A. Il a voulu connaître les procédures susceptibles d'être simplifiées.
M. Frédéric Van Roekeghem a indiqué qu'aujourd'hui la procédure de contrôle s'étale sur une période comprise entre cinq et six mois du fait de la multiplicité des intervenants et des délais réglementaires fixés pour chaque étape. Par ailleurs, la nouvelle répartition des compétences entre les ministères a eu pour effet de transférer la tutelle des opérations de lutte contre la fraude du ministère chargé de la santé vers le ministère chargé des comptes publics. Le nombre élevé des intervenants constitue une contrainte lourde pour le contrôleur.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître les raisons justifiant les retards constatés dans la mise en oeuvre de la facturation directe entre les établissements de santé publique et les caisses pivots.
M. Jean-Marc Aubert a précisé que ce sujet constitue un chantier important tant pour l'assurance maladie que pour les établissements de santé. Cette procédure doit démarrer à compter du 1 er janvier 2009 et, dès le mois d'avril, la Cnam mettra des environnements de qualification à la disposition des établissements de santé afin de procéder à des tests.
Il a insisté sur le fait que cette opération ne se limite pas à un simple processus de transmission informatique, car sa mise en oeuvre aura un impact majeur sur la politique de contrôle des factures dont l'automatisation pourra être amplifiée.
Audition de MM. Jean-Loup DUROUSSET, président de la fédération de l'hospitalisation privée (FHP) et Philippe BURNEL, délégué général (mardi 22 janvier 2008)
M. Jean-Loup Durousset, président de la FHP, a rappelé qu'avant la mise en oeuvre de la tarification à l'activité (T2A), les établissements de santé privés étaient financés par l'intermédiaire de prix de journée déterminés dans le cadre d'une négociation conventionnelle entre les organismes représentant les cliniques et l'assurance maladie. Le lien entre le niveau d'activité et les ressources perçues par les établissements privés préexistait donc à la mise en oeuvre de la T2A, contrairement à la situation du secteur public dont les ressources étaient versées par l'intermédiaire d'une dotation globale.
Les nouvelles modalités de financement des établissements de santé ont rendu inutiles les négociations conventionnelles entre l'assurance maladie et les cliniques privées puisque, désormais, les tarifs du secteur privé sont fixés par le ministère chargé de la santé. Mais, du fait des règles antérieures, les modalités de calcul des tarifs actuels du secteur public et du secteur privé diffèrent. Les tarifs du privé (ou groupes homogènes de séjour [GHS]) sont le fruit des négociations antérieures menées entre l'assurance maladie et les cliniques, tandis que les GHS publics sont déterminés à partir d'une échelle nationale de coûts.
Les écarts constatés entre les deux grilles tarifaires doivent être réduits à l'issue d'un processus de convergence qui doit s'achever en 2012, ce qui suppose la mise en oeuvre d'une échelle nationale des coûts (ENC) commune à l'ensemble des établissements.
Or, la première version de cette étude comparative développée en 2007 s'est révélée peu satisfaisante. En conséquence une deuxième ENC, à laquelle participent quarante-trois établissements privés, est en cours d'élaboration. Ses premiers résultats seront publiés en octobre 2008.
M. Philippe Burnel, délégué général, a observé que cette ENC permettra une meilleure analyse des coûts du secteur privé pour chaque groupe homogène de malades (GHM). Des études complémentaires seront également engagées pour parfaire la connaissance des écarts de coûts entre les établissements privés et publics. Elles porteront notamment sur les coûts de la prise en charge de la précarité ou de la permanence des soins.
M. Jean-Loup Durousset a rappelé que pour comparer les tarifs des établissements privés avec ceux du public, il faut prendre en compte non seulement le tarif du GHS mais également les honoraires perçus par le médecin ainsi que d'éventuels dépassements d'honoraires. Il a souligné que même en tenant compte de ces différents éléments, un acte identique a un coût moins élevé dans un établissement privé que dans un établissement public.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître les raisons de ces écarts de coûts entre établissements publics et privés
M. Jean-Loup Durousset a estimé que le coût du travail en est la principale explication. Les premières cliniques créées par les professionnels de santé étaient régies par une convention collective qui prévoyait des grilles de rémunération relativement basses pour les personnels soignants employés dans ces établissements. Aujourd'hui encore, les écarts de rémunération entre, par exemple, une infirmière employée par une clinique et une infirmière exerçant dans le secteur public sont de l'ordre de 15 %.
M. Philippe Burnel a précisé que les écarts de salaire sont de 15 % sur les salaires bruts et de 20 % sur les salaires nets. En outre, le montant de cotisations sociales est plus élevé dans le secteur privé.
M. Jean-Loup Durousset a précisé que la convention collective qui s'applique aux cliniques est distincte de celle applicable aux personnels des établissements de santé privés participant au service public hospitalier.
La structure des emplois peut également expliquer les différences de coûts entre les deux secteurs, public et privé. Le secteur privé emploie une moyenne de 115,98 personnes pour cent lits d'hospitalisation, tous personnels confondus, contre 229,79 pour le secteur public.
Un constat similaire peut être fait si l'on aborde la question de la productivité en termes de personnels nécessaires pour l'accomplissement d'un acte. Ainsi, lorsqu'une sage-femme pratique cent accouchements dans le privé, elle en réalise trois fois moins dans certains centres hospitaliers universitaires (CHU).
En conclusion, pour une même tâche, le secteur public emploie plus de salariés et les rémunère mieux que le secteur privé.
M. Paul Blanc a souhaité connaître les écarts de productivité constatés dans l'usage des appareils d'imagerie médicale.
M. Philippe Burnel a estimé que l'écart va de 1 à 1,8. La productivité moyenne des salles d'opérations se décompose de la manière suivante : 743 interventions par an dans les centres hospitaliers régionaux, 861 dans les centres hospitaliers, 737 dans les établissements privés participant au service public hospitalier et 1 250 dans les établissements privés.
Ces écarts d'utilisation des plateaux techniques demeurent élevés, même en tenant compte de la lourdeur des cas traités dans le secteur public qui allonge les durées moyennes des interventions et réduit donc leur nombre.
M. Jean-Claude Etienne a voulu connaître les effectifs des personnels administratifs de chaque secteur.
M. Philippe Burnel a indiqué que le secteur privé emploie une moyenne de 17,28 personnes pour cent lits contre 26,28 dans les établissements publics.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur l'existence de règles différentes en matière de durée légale du travail.
M. Jean-Loup Durousset a précisé que la durée légale du travail est identique pour les personnels salariés. En revanche, le mode d'exercice des praticiens peut avoir un effet sur le temps de travail et la productivité. Les praticiens exerçant dans le secteur privé sont rémunérés à l'acte : ils ont donc une tendance naturelle plus forte à accueillir les patients quand ils se présentent. Ce mode d'exercice est donc positif en termes de développement de l'activité.
M. Philippe Burnel a estimé que d'autres facteurs peuvent expliquer les écarts de coûts entre établissements publics et privés, notamment la variété de l'activité. Un établissement dont l'activité est spécialisée peut analyser et réduire ses coûts plus facilement qu'un établissement qui pratique une large gamme d'actes.
M. Jean-Loup Durousset a indiqué que de nombreuses cliniques sont installées à la périphérie des villes, y compris dans des zones sensibles, et qu'elles prennent donc également en charge des patients en situation de grande précarité. La localisation géographique décide de cette prise en charge plus que le statut juridique de l'établissement. Les coûts supplémentaires résultant de la prise en charge de ces patients doivent être compensés pour les deux catégories d'établissements et non pas seulement dans le public.
Cette égalité de traitement doit être étendue à toutes les activités, comme par exemple la participation aux urgences. Cent vingt établissements privés participent au service public des urgences sur huit cents cliniques ayant des activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO). Ils accueillent 18 000 personnes par an et par site, soit près de deux millions de patients sur un total d'environ dix millions de passages aux urgences.
Les cliniques qui assument les mêmes contraintes que leurs homologues publiques doivent bénéficier d'une rémunération d'un niveau équivalent. Elles acceptent le maintien du principe d'une rémunération au passage, c'est-à-dire lorsqu'un patient est pris en charge par l'établissement. Cela constitue un trait caractéristique du secteur privé alors que les établissements publics, imprégnés par la culture de la dotation globale, souhaitent bénéficier de tarifs de passage et de dotations complémentaires.
M. François Autain a fait remarquer que les cliniques sont en train de présenter des revendications identiques à celles des établissements publics.
M. Jean-Loup Durousset a indiqué que les cliniques privées s'adaptent aux modalités de financement définies par les pouvoirs publics. L'enveloppe budgétaire allouée aux missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) s'élevant à 6 milliards d'euros, les cliniques estiment que, lorsqu'elles assurent une mission de service public, elles doivent bénéficier de cette source de financement. Or, aujourd'hui elles ne perçoivent que 60 millions à ce titre, ce qui signifie que leur rôle n'est pas reconnu.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître l'appréciation portée par la FHP sur le niveau des tarifs rémunérant les activités des cliniques.
M. Jean-Loup Durousset a observé que ces tarifs n'ont plus de lien avec les coûts réels de production des établissements. L'ensemble de la grille tarifaire doit être redéfini, à enveloppe constante, en tenant compte des résultats de l'ENC. Les nouveaux tarifs doivent jouer un rôle incitatif pour l'activité des établissements, notamment lorsque les autorités sanitaires souhaitent le développement de certaines activités comme la chirurgie ambulatoire.
M. Philippe Burnel a précisé qu'en 2006, la marge nette moyenne du secteur privé était de 3 %, si l'on ne tient compte que des ressources versées par l'assurance maladie, et de 6 % lorsque l'ensemble des ressources est pris en compte. On peut en conclure que les tarifs sont insuffisants pour permettre au secteur privé de renforcer son taux d'encadrement en personnel ou pour augmenter les rémunérations.
M. Alain Vasselle, président, a demandé l'avis de la FHP sur la méthodologie retenue par les services de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) pour mener à bien les différentes études relatives aux écarts de coûts. Il s'est étonné de la réduction de l'activité obstétrique dans le secteur privé et a voulu savoir si l'insuffisance des tarifs est susceptible d'expliquer cette évolution.
M. Philippe Burnel a indiqué que le calendrier des études a été présenté aux différents acteurs à l'occasion d'une réunion du comité de convergence le 12 décembre dernier. Il a émis des doutes sur la possibilité de mener à bien l'ensemble des études dans les délais impartis, c'est-à-dire avant le 15 octobre 2008. Il a observé que le souci de perfectionnisme affiché par certains acteurs s'avère disproportionné par rapport aux écarts de coûts constatés entre le public et le privé et risque de ralentir l'exécution de ces travaux.
M. Jean-Loup Durousset a indiqué qu'au cours des sept dernières années, le nombre d'accouchements pris en charge par le secteur privé a baissé de 50 000 unités, sa part de marché tombant de 45 % à 32 %. Les établissements privés portent une part de responsabilité dans cette évolution. La prise en charge des naissances impose des contraintes si particulières en termes d'organisation du travail que certaines cliniques ont choisi de ne plus pratiquer cette activité. Celle-ci s'est également révélée déficitaire dans la plupart des cliniques en raison de l'inadéquation entre les tarifs et les charges. Ce désengagement des établissements privés a un coût pour l'assurance maladie puisque l'écart de tarif entre le public et le privé est d'environ 20 % (3 280 euros contre 2 637). Le surcoût peut être estimé à 40 millions d'euros. L'évolution de la profession d'obstétricien et l'accroissement des contentieux ont également découragé la pratique libérale.
M. Bernard Cazeau a précisé que les obstétriciens exercent majoritairement dans le secteur public.
M. Jean-Loup Durousset a relevé que ceux qui choisissent malgré tout le secteur privé ne le font pas nécessairement pour pratiquer des accouchements mais plutôt pour travailler dans des activités de procréation médicale assistée.
M. Paul Blanc a estimé que la fermeture des petites maternités a également eu des effets sur la pratique professionnelle des obstétriciens.
M. François Autain a rappelé que la société Générale de santé obtient chaque année des résultats financiers positifs.
M. Jean-Loup Durousset a précisé que les cliniques privées emploient 136 085 salariés, effectif en hausse de 2 % entre 2005 et 2006. Sur la même période, la masse salariale a augmenté de 3,9 %. Les contraintes nouvelles comme la certification des établissements ou la nécessité de développer les systèmes d'information et de renseigner le programme de médicalisation du système d'information (PMSI) explique le recrutement de nouveaux agents administratifs. Les emplois d'infirmiers, 38 348, sont également en progression. Les effectifs des autres catégories d'emplois sont en revanche en baisse.
Le chiffre d'affaires a progressé de 1,8 % pour l'ensemble du secteur privé. Ce taux est plus faible que celui constaté ces dernières années.
Il a souligné que les résultats financiers de la société Générale de santé ne sont pas uniquement dus à un accroissement de l'activité médicale du groupe mais également à une nouvelle politique immobilière. Il a invité les établissements publics à mieux valoriser leur patrimoine immobilier.
Il a précisé que l'attractivité du secteur privé est médiocre auprès des professions paramédicales qui peuvent prétendre à de meilleures rémunérations dans le secteur public.
Il a rappelé que dans les années quatre-vingt-dix, sous l'effet des recrutements massifs décidés par les établissements publics, le secteur privé a souffert d'une pénurie de personnel qualifié et notamment d'infirmières.
M. Philippe Burnel s'est inquiété d'une possible répétition de ce scénario sous l'effet des prochains départs à la retraite dans le secteur public.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur la situation financière des établissements privés.
M. Jean-Loup Durousset a indiqué que la situation financière du secteur s'est améliorée bien que 14 % des établissements soient en déficit, tandis que près de la moitié des cliniques privées ont constaté au moins une fois un déficit au cours des trois dernières années. Le taux de rentabilité du secteur est de 3,7 %, en résultat net sur chiffre d'affaires en 2005.
Ce résultat, s'il apparaît en nette amélioration par rapport au début de la décennie, est cependant insuffisant pour permettre le renouvellement du parc hospitalier privé et, sans les aides débloquées dans le cadre du plan Hôpital 2007, peu d'établissements auraient pu faire face aux investissements immobiliers nécessaires à la poursuite et au développement de leurs activités.
Dans ce contexte, les médecins ne peuvent plus assurer seuls les investissements préalables à la création d'un établissement. Les conditions étaient donc réunies pour que les investisseurs privés, parmi lesquels figurent de nombreuses mutuelles, manifestent leur intérêt pour le secteur.
M. Jean-Claude Etienne s'est étonné que l'on puisse comparer les coûts des établissements publics et privés alors que les missions sont différentes. En effet, le secteur public assure des actes techniques et médicaux tandis que le secteur privé est spécialisé dans les interventions chirurgicales. Le secteur public prend également en charge la formation des futurs professionnels de santé.
M. François Autain a estimé que les hôpitaux publics n'ont pas la même fonction que les cliniques.
M. Paul Blanc a rappelé que la charge de formation ne pèse que sur les CHU et que souvent le travail effectué par les internes n'est pas pris en compte. Il a voulu savoir si les établissements privés participent à la formation des aides-soignants.
M. Jean-Loup Durousset a estimé que le fait que les hôpitaux traitent une plus grande variété de cas ne suffit pas pour justifier les écarts de coûts importants constatés sur un acte identique.
Il a précisé que les établissements privés sont prêts à participer à la formation des médecins.
Il a rappelé que le régime d'autorisation d'activité mis en place dans le cadre des nouveaux schémas régionaux d'organisation de l'offre de soins (Sros) abolit les différences fondées sur les statuts pour ne faire prévaloir que la qualité des actes. De plus, les pouvoirs publics incitent au renforcement des coopérations « public-privé ». Or ces actions ne peuvent pas se développer tant que coexisteront des grilles tarifaires distinctes entre les différentes catégories d'établissements.
Il a conclu en insistant sur la nécessité de définir un processus de convergence acceptable pour tous les acteurs concernés. En particulier, il ne paraît pas raisonnable de penser que le public pourra à terme aligner ses tarifs sur ceux du privé.
Audition de MM. Emmanuel DURET, président, et Jérôme ANTONINI, directeur du secteur sanitaire, de la fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif (Fehap) (mardi 22 janvier 2008)
M. Emmanuel Duret, président, a d'abord indiqué que les établissements de la Fehap n'ont pas été laissés à l'écart par l'administration de la réflexion engagée sur l'échelle nationale des coûts. Pour l'élaboration de la nouvelle échelle, six établissements participent à l'étude.
Les observations émises tant par la Cour des comptes que par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l'insuffisante fiabilité des travaux menés précédemment apparaissent totalement justifiées. En effet, l'ancienne échelle avait l'inconvénient d'être trop approximative en matière de charges de structures et de pénaliser les établissements spécialisés par rapport aux établissements généralistes. La nouvelle échelle doit permettre de remédier à ces problèmes.
La Fehap est satisfaite que le Parlement ait inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 la date du 15 octobre prochain pour la remise des études complémentaires associées à la nouvelle échelle nationale. Elle participe au comité de pilotage qui suit le calendrier de réalisation de ces études. Elle a l'espoir que grâce à ces travaux, la répartition des sommes entre les différentes catégories d'établissements se fera dans un sens plus équitable. En effet, si la Fehap est soumise à la même tarification que les établissements publics, ses coûts sont sensiblement différents et, au total, plus lourds car le personnel qu'elle emploie est de droit privé avec une charge, en termes de cotisations retraite, supérieure à celle de la fonction publique hospitalière. Aussi, bien que les salaires nets soient plutôt inférieurs dans les établissements Fehap à ceux constatés dans les établissements publics, la masse salariale qu'ils représentent est supérieure à celle des hôpitaux publics.
Le ministre Xavier Bertrand avait demandé en 2006 à l'Igas de mener une étude sur ce point précis des surcharges de dépenses salariales. L'étude a été remise voici un an. Elle constate que, du fait de la convention collective de 1951 en vigueur dans les établissements Fehap, ceux-ci enregistrent un surcroît de masse salariale d'au moins 4 % par rapport aux hôpitaux publics. La Fehap a donc demandé un correctif sur la T2A qui lui est applicable pour tenir compte de ce différentiel. Un amendement de la commission des affaires sociales du Sénat a porté cet espoir mais le Gouvernement a renvoyé la décision aux études complémentaires en cours d'élaboration. Ce report est un souci majeur pour la Fehap qui ne bénéficie d'aucune aide pour compenser ce surcoût. Cela est d'autant plus problématique que le mécanisme de la T2A pourrait être étendu aux établissements de soins de suite et de réadaptation ainsi qu'aux établissements de soins psychiatriques, secteurs dans lesquels la Fehap est particulièrement bien représentée.
Cette difficulté s'ajoute à une situation financière générale assez préoccupante des établissements « médecine, chirurgie, obstétrique » (MCO) du secteur privé à but non lucratif. En effet, la somme des déficits de ces établissements avoisine aujourd'hui 100 millions d'euros mais ce montant masque des situations très contrastées, au nombre desquelles les importants déficits des hôpitaux Saint-Joseph et Foch. Ces déficits nuisent à la capacité d'autofinancement et d'investissement des établissements mais surtout mettent en question leur existence même puisqu'en cas de déficits répétés, les commissaires aux comptes pourraient exiger des plans sociaux, voire des dépôts de bilan.
En matière d'emploi, la Fehap regroupe 105 000 salariés, représentant 90 000 équivalents temps plein, pour une masse salariale de 4,5 milliards d'euros qui représente les deux tiers des dépenses des établissements.
La mise en place d'un observatoire économique, social et financier interne à la Fehap a permis de grands progrès dans la connaissance de la situation des établissements membres et dans l'explication du caractère déficitaire des établissements MCO depuis quelques années.
Par ailleurs, la participation de la Fehap aux travaux de l'observatoire économique de l'hospitalisation publique et privée est pour l'instant plutôt décevante. Les remarques de la Fehap n'ont pas été incluses dans le premier rapport de l'observatoire et ses demandes n'ont pas reçu de réponse de l'organisme. Or, la Fehap revendique des subsides supplémentaires au nom de l'équité de traitement et de la survie de ses établissements.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir si, en dehors de la masse salariale, d'autres facteurs expliquent la différence de coûts constatée entre les établissements Fehap et les autres, si une évaluation de ces écarts a été faite et si une aide financière existe pour les compenser. Il a rappelé que la ministre chargée de la santé Mme Roselyne Bachelot, s'est engagée devant le Sénat à réexaminer la question du différentiel de charge salariale des établissements Fehap en fin d'année. Il a demandé des précisions sur le recours devant le Conseil d'Etat de l'hôpital Foch pour dénoncer l'inéquité de traitement dont celui-ci s'estime victime.
M. Paul Blanc a demandé si des différentiels de charges identiques apparaissent pour les établissements médicosociaux de la Fehap.
M. Jean-Claude Etienne a souligné que le ratio du nombre d'agents administratifs pour cent lits présente des écarts très importants entre le secteur public, où il est de vingt-six, et le secteur privé, où il est de dix-sept. Il s'est enquis du taux constaté dans le secteur privé à but non lucratif.
M. Emmanuel Duret a indiqué que tous les personnels des établissements Fehap sont soumis à la convention collective de 1951, ce qui signifie que les personnels des établissements médicosociaux relèvent également de ces dispositions. La Fehap demande depuis plusieurs années que d'autres éléments que la masse salariale soient pris en compte dans l'analyse des écarts de coûts, comme la fiscalité locale, mais cela n'a pas encore été le cas.
M. Jérôme Antonini, directeur du secteur sanitaire, s'est félicité de ce que la pression parlementaire ait permis de relancer les nécessaires études complémentaires de l'échelle nationale des coûts commune à tous les secteurs. Dans ce cadre, une refonte de la classification des groupes homogènes de séjour (GHS) est attendue ainsi qu'un approfondissement de l'étude sur les écarts de coûts salariaux entre les secteurs. Toutefois, le calendrier retenu par la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) est très serré et l'on risque de ne disposer que de données incomplètes au mois d'octobre prochain. Des divergences subsistent en effet avec la Dhos sur ce que l'on doit mesurer, en particulier dans le partage des coûts pris en charge par l'assurance maladie et par les assurances complémentaires. La Fehap souhaite que les évaluations prennent en compte la totalité des coûts pour la collectivité, y compris donc les dépassements d'honoraires pratiqués par certains médecins.
M. Emmanuel Duret a rappelé que les établissements Fehap sont, en effet, les seuls où les médecins sont uniquement salariés sans aucune activité libérale.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir si la Fehap a mené ses propres études sur la question des écarts de coûts entre les différentes catégories d'établissements.
M. Jérôme Antonini a indiqué que la Fehap ne dispose pas de données sur les autres catégories d'établissements, comme par exemple sur le nombre de patients inscrits à la couverture maladie universelle (CMU) qu'ils accueillent. En revanche, grâce à la création de l'observatoire économique, des éléments de comparaison sur la performance des différents types d'hôpitaux commencent à être analysés.
M. Emmanuel Duret a une nouvelle fois regretté qu'aucune aide financière généralisée ne soit accordée aux établissements Fehap. Seules des aides au cas par cas sont attribuées par les agences régionales de l'hospitalisation (ARH), soit dans le cadre des conventions d'objectifs et de moyens, soit en fin d'exercice. Mais ces aides sont par nature imprévisibles en gestion, jamais acquises et en général non reconductibles. Ce sont simplement des sortes de mesures curatives qui interviennent dans un contexte de grande opacité, sans que des critères clairs de distribution soient définis.
Pour les établissements Fehap, entre 2005 et 2006, le taux de progression des charges de personnel a été de 5 %, celui des charges médicales de 9 % et celui du secteur hôtelier et général de 6 %. En revanche, les dotations aux amortissements et les provisions ont diminué de 5 %.
M. Jérôme Antonini a souligné le caractère très différent des hôpitaux Foch et Saint-Joseph. Additionnés, ceux-ci s'apparentent en effet à un CHU moyen, compte tenu de leurs activités de recherche et de publication. Toutefois, ils disposent de moyens deux à trois fois inférieurs à ceux d'un CHU. Le budget de l'hôpital Foch est ainsi d'environ 300 millions d'euros. Les difficultés proviennent non d'un problème de performance mais d'une disparité de statut. Cette différence se traduit par un manque à gagner de 20 millions d'euros sur l'enveloppe que perçoivent ces hôpitaux au titre du financement de leurs missions d'enseignement et de recherche. La réforme envisagée de ces missions permettra néanmoins de réduire de moitié l'écart actuellement constaté à l'horizon de cinq ans.
M. Emmanuel Duret a indiqué qu'entre le 1 er janvier 2005 et le 1 er janvier 2007, l'effectif total des personnels Fehap n'avait progressé que de 0,2 %. Mais d'un côté, le nombre des personnels médicaux a augmenté de 2 % et de l'autre, celui des personnels d'encadrement administratif et techniques a baissé, parfois sensiblement pour les ouvriers, dont le nombre est en réduction de 8 %. Au total, on compte environ 11 000 agents administratifs pour 170 000 lits.
M. Jean-Claude Etienne a insisté sur la disparité des ratios d'encadrement administratif car ils expliquent certainement une part des écarts de coûts constatés entre les différents secteurs.
M. Emmanuel Duret a fait valoir que les établissements Fehap ne peuvent pratiquer de reports de déficits, ce qui les contraint à faire des efforts de productivité et à adopter des plans sociaux notamment au détriment des catégories administratives et techniques. Mais on est peut-être allé un peu loin car, aujourd'hui, on manque de personnel d'informatique médicale et d'agents formés à la classification. C'est pourquoi, malgré leur participation entière à tous les aspects de la vie hospitalière, les établissements Fehap ont le sentiment d'être pénalisés lorsqu'on leur applique de façon brutale et sans nuance une échelle nationale des coûts commune.
Audition de MM. Gérard VINCENT, délégué général, et Yves GAUBERT, adjoint au délégué général, de la fédération hospitalière de France (FHF) (mardi 22 janvier 2008)
M. Gérard Vincent, délégué général de la FHF, a indiqué qu'il n'existe pas de raisons de remettre en cause la fiabilité des données collectées dans le cadre de l'échelle nationale des coûts (ENC) en cours d'élaboration pour les établissements publics. Mais la représentativité de cette étude est insuffisante car peu d'établissements sont volontaires pour participer à ces travaux. La FHF, qui est favorable à cette démarche d'évaluation, estime indispensable d'améliorer la représentativité de l'échantillon servant de base à cette étude, par l'inclusion de nouveaux établissements.
M. Yves Gaubert, adjoint au délégué général de la FHF, a souligné que soixante et un établissements, sur un total de mille, participent à cette étude sur la base du volontariat. Parmi les participants, certains ne sont pas en mesure de transmettre l'ensemble des données réclamées dans le cadre de cette étude, ce qui réduit encore le panel servant de support à l'ENC.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître la liste des études complémentaires prévues pour analyser les écarts de coûts entre établissements publics et privés. Il s'est interrogé sur la capacité de la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins à mener à bien les études dans les délais impartis par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, c'est-à-dire avant le 15 octobre prochain.
M. Yves Gaubert a indiqué que les études complémentaires dont la réalisation est prévue sont celles recommandées en janvier 2006, en conclusion des travaux de la mission d'appui sur la convergence tarifaire public-privé menée par l'inspection générale des affaires sociales (Igas). Aucune étude n'a été menée au cours de l'année écoulée mais cinq études principales relatives aux activités non programmées, à la permanence des soins, à l'hétérogénéité des groupes homogènes de séjour (GHS), aux surcoûts liés à la prise en charge des personnes en situation de grande précarité et aux différentiels de charges salariales sont attendues.
L'analyse des surcoûts liés à la non-programmation des activités constitue un dossier important. Il s'agit d'une étude complexe dont le cahier des charges n'est pas encore défini. La situation est identique pour les travaux relatifs à la prise en charge de la précarité.
Un seul chantier semble en mesure d'être ouvert rapidement, celui relatif au différentiel de charges salariales qui repose sur la méthodologie retenue par le rapport de l'Igas consacré à l'étude des écarts de coût du travail entre les établissements publics et les établissements privés participant au service public hospitalier, publiée en mars 2007. Cette analyse sera étendue aux honoraires médicaux (honoraires et dépassements d'honoraires). Le champ de l'étude n'est pas encore totalement délimité puisque la question de savoir si le périmètre de l'analyse se limite aux dépenses prises en charge par l'assurance maladie ou est étendu à l'ensemble des dépenses, y compris celles supportées par les assurés, fait encore l'objet de vives discussions.
M. Gérard Vincent a souligné que, lors de sa réunion du 20 décembre 2007, le conseil d'administration de la FHF s'est prononcé en faveur d'un financement mixte des établissements publics, réparti, à égalité, entre la valorisation de l'activité en fonction du volume et les missions d'intérêt général.
M. Yves Gaubert a indiqué que, selon les résultats issus d'une étude scientifique menée sur les surcoûts liés à l'activité non programmée du CHU de Strasbourg, la différence de coût entre les activités programmées et non programmées est de 63 %. Une autre étude commandée par le ministère de la santé révèle, sur la base d'un échantillon, que la prise en charge des personnes en situation de précarité entraîne un surcoût de 30 % par rapport aux autres patients.
L'hétérogénéité des groupes homogènes de malades (GHM) utilisés pour déterminer les groupes homogènes de séjour (GHS), qui servent de base à la tarification des actes, constitue une difficulté supplémentaire pour comparer l'activité des deux catégories d'établissements. La détermination des GHM repose sur l'analyse de l'activité constatée dans les établissements publics ; or, celle-ci est différente de celle pratiquée dans les établissements privés qui ont à traiter des cas globalement moins sévères. Si les cliniques estiment avoir dans leur activité les mêmes GHM que les hôpitaux publics, ces derniers prennent en réalité en charge les cas les plus lourds pour une rémunération identique.
Par ailleurs, les écarts de productivité trouvent également leur source dans l'étendue plus ou moins grande des activités pratiquées par chaque catégorie d'établissement. Un hôpital public réalise ainsi 80 % de son activité dans un champ comprenant en moyenne deux cents GHM, quand une clinique concentre la même proportion d'activité sur seulement soixante GHM.
M. Yves Gaubert a rappelé par ailleurs que les contraintes réglementaires en matière d'achat ne sont pas les mêmes suivant les secteurs puisque les cliniques ne sont soumises à aucune règle particulière, alors que les hôpitaux doivent respecter le code des marchés publics. La réunion de ces éléments permet elle aussi d'expliquer les écarts de coûts constatés entre les différentes catégories d'établissements.
Il a estimé que, pour l'essentiel, les études prévues par le ministère pour justifier les écarts de coûts entre les établissements publics et privés ne seront pas réalisées dans les délais impartis, c'est-à-dire avant le 15 octobre 2008. Le compte rendu du comité de convergence, qui réunit les différents acteurs du système hospitalier, souligne d'ores et déjà que les résultats de certaines études ne seront pas connus avant le premier trimestre 2009.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur la possibilité de voir les études conduites par le ministère déboucher sur des résultats différents de ceux présentés par la FHF.
M. Yves Gaubert a observé que le ministère ne pourra achever les études prévues qu'en ayant recours à des experts reconnus en France ou à l'étranger. Or, les résultats présentées par la FHF s'appuient sur des études déjà disponibles et sont comparables aux situations analysées dans d'autres pays européens.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité connaître plus précisément la position exprimée par le conseil d'administration de la FHF sur les modalités de mise en oeuvre de la T2A.
M. Gérard Vincent a estimé que les principes de la T2A sont sains quand ils permettent de rémunérer l'ensemble des établissements qui travaillent et qui améliorent leur gestion. Dans la réforme mise en oeuvre depuis 2004, c'est le souci de convergence rapide entre les secteurs public et privé qui soulève le plus de difficultés. Sur ce point, les propositions du Sénat, visant à accélérer le processus de convergence, défendues à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, étaient à son avis irresponsables. En France, l'introduction de la T2A est polluée par l'existence d'un important secteur privé et par la décision des pouvoirs publics de faire converger les grilles tarifaires de ces secteurs.
Il a indiqué qu'une étude récente affirme que le secteur des cliniques privées figure aujourd'hui parmi les activités économiques les plus rentables en France.
M. Alain Vasselle, président, a rappelé que l'étude de l'Igas sur la convergence tarifaire a souligné que les surcoûts liés à la précarité sont déjà pris en charge à travers les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac). Il a souhaité que le périmètre des activités devant être financées par les Migac soit clarifié afin que cette question ne vienne pas perturber le processus de convergence. Il s'est enfin interrogé sur d'éventuelles différences de productivité entre les établissements publics et privés.
M. Gérard Vincent a souligné que l'exécution des missions de service public constitue la caractéristique principale de l'hôpital. Il s'est dit convaincu que les études complémentaires conduites sous l'autorité du ministère mettront finalement en évidence le moindre coût de l'hôpital public par rapport aux cliniques.
Certes, le secteur public fait parfois preuve d'une productivité inférieure à celle du secteur privé. Par exemple, deux tiers des anesthésistes exercent leur activité dans le secteur public avec seulement un tiers des chirurgiens. Il n'y a donc pas d'adéquation entre l'effectif des deux activités. Cela se traduit par un écart de productivité avec le privé puisqu'en clinique, un anesthésiste surveille trois salles d'opérations simultanément quand, dans le public, il n'exerce que dans une salle à la fois, sans que cette pratique soit justifiée par des règles de sécurité.
Il existe peut être une plus faible productivité des chirurgiens exerçant dans le public par rapport à leurs confrères libéraux mais les pouvoirs publics sont incohérents en n'accordant pas aux établissements les moyens d'améliorer cette situation.
M. Jean-Claude Etienne a estimé que les comparaisons de coûts entre établissements publics et privés doivent être menées avec la plus grande prudence dès lors que, pour l'essentiel, les hôpitaux prennent en charge les actes les plus lourds.
M. Alain Vasselle, président, a voulu savoir si la FHF a étudié l'existence d'écarts de coûts liés à la taille des établissements publics.
M. François Autain a rappelé qu'en effet, lors de son audition, le directeur général de la Cnam, M. Frédéric Van Roekeghem, a insisté sur le fait que la taille des établissements constitue le principal facteur explicatif des écarts de coûts.
M. Yves Gaubert a estimé que ce critère rejoint celui lié à la nature des activités, puisque les établissements les plus grands exercent la palette d'activités la plus large et que ces hyperspécialisations ont un coût élevé.
Il a estimé que les données fournies par le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) sont trop imprécises pour évaluer la gravité des cas pris en charge au sein d'un même GHM, par les hôpitaux et les cliniques.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître la situation de l'emploi dans le secteur public hospitalier.
M. Gérard Vincent a précisé qu'il existe des différences de coûts entre les établissements publics, provoquées, par exemple, par les effectifs de personnels employés. Ces situations reposent soit sur des bases historiques aujourd'hui difficiles à expliquer, soit elles sont motivées par la nécessité de maintenir en place un établissement dont l'activité est faible mais indispensable pour l'accès aux soins de la population.
Il a indiqué que la FHF ne dispose pas d'informations plus précises que celles fournies par le ministère sur la situation de l'emploi dans les hôpitaux. Les effectifs des personnels hospitaliers ont progressé entre 2001 et 2006 avec l'instauration des trente cinq heures et le développement des plans de santé publique mis en place par le gouvernement. Cela s'est traduit, notamment, par une augmentation de 15 % de l'effectif des personnels médicaux.
Il a observé que, compte tenu de la situation de sous-financement chronique dans laquelle se trouvent les hôpitaux, le retour à l'équilibre financier nécessitera une réduction du nombre d'emplois puisque ce poste constitue 70 % des dépenses des établissements quand l'activité médicale n'en représente que 15 %.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître les différences existant entre les établissements publics et privés en matière de répartition des effectifs, notamment entre personnels soignants et non soignants.
M. Gérard Vincent est convenu qu'une réorganisation et des gains de productivité sont indispensables, mais la question de la réduction des effectifs à l'hôpital n'est pas évoquée par les autorités de tutelle et semble taboue auprès des pouvoirs publics.
Il a précisé que l'Igas a mené une mission sur l'efficacité des plans de retour à l'équilibre conclus entre les agences régionales d'hospitalisation (ARH) et les établissements. Ces plans font souvent le pari d'un développement de l'activité plutôt que de recourir à des économies de fonctionnement. Ce rapport met en exergue l'échec de ces dispositifs, principalement en raison du refus exprimé par les élus locaux d'adapter les effectifs aux réalités budgétaires.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur l'opportunité de favoriser l'externalisation de certaines activités des établissements de santé.
M. Gérard Vincent a précisé que le recours à l'externalisation présente peu d'intérêt pour les établissements de santé car les statuts de la fonction publique hospitalière ne prévoient pas encore la possibilité de détacher les personnels, employés précédemment pour ces tâches, auprès du prestataire de service, contrairement à ce qui se passe dans la fonction publique territoriale. Les dispositions proposées par le Sénat et votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 vont permettre d'entamer des discussions sur l'évolution de ce cadre réglementaire.
M. Bernard Cazeau a souligné que 80 % des personnes détachées auprès des opérateurs privés choisissent de poursuivre leur carrière dans le privé.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître les modalités retenues pour financer les comptes épargne-temps (CET).
M. Gérard Vincent a précisé que, si une somme de 350 millions d'euros est inscrite dans les comptes du fonds pour l'emploi hospitalier, une incertitude demeure sur la disponibilité des sommes inscrites en provisions dans les comptes des établissements publics de santé.
Il a fait part de son inquiétude quant aux conséquences financières que pourrait avoir le paiement des sommes dues sur l'équilibre budgétaire des établissements, d'autant plus qu'en décembre, certains hôpitaux ont dû souscrire des emprunts pour régler leurs dépenses de personnel.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur le montant des reports de charges accumulés par les établissements de santé.
M. Gérard Vincent a rappelé que, techniquement, il n'est plus possible de faire des reports de charge d'une année sur l'autre. Une connaissance précise de la situation financière exacte des établissements de santé est donc difficile. Un certain nombre d'établissements sont cependant en retard pour le paiement de leurs charges, mais sans pouvoir évaluer les montants en cause.
M. Yves Gaubert a indiqué que les avances de trésorerie consenties par l'assurance maladie, en 2005, à l'occasion de la mise en oeuvre de la T2A, n'ont été remboursées qu'à hauteur de 25 %. Or, le non-remboursement complet de ces sommes masque la réalité de la situation financière des établissements.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur l'existence d'un risque de mauvaise évaluation des recettes lors de la constitution de l'état prévisionnel de recettes et de dépenses (EPRD) de chaque établissement.
M. Gérard Vincent est convenu qu'un tel risque ne peut être écarté. Des possibilités de multiplication d'actes inutiles sont également à prévoir dès que le mode de rémunération des établissements est corrélé à leur volume d'activité. Le contrôle de la pertinence des actes réalisés devient indispensable. La Cnam doit donc renforcer son activité de contrôle, notamment auprès des établissements privés afin de s'assurer de la qualité et de la pertinence des actes.
Il a jugé que la T2A constitue un puissant intérêt à agir pour convaincre les établissements de développer une comptabilité analytique. Il a d'ailleurs regretté la lenteur avec laquelle les établissements développent celle-ci.
Il a estimé que la suppression des petits établissements ne permettra pas les gains financiers escomptés. Il conviendrait d'engager une réflexion sur le rôle de l'hôpital en matière d'aménagement du territoire et sur le devenir des hôpitaux de proximité.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur l'opportunité de faire évoluer les compétences du centre de gestion.
M. Gérard Vincent a estimé que les départs en retraite attendus dans la fonction publique hospitalière constituent une opportunité pour réduire le niveau des effectifs. Toutefois, cette affirmation va à l'encontre de l'opinion généralement admise selon laquelle les hôpitaux fonctionnent en sous-effectifs. On peut donc être dubitatif sur la capacité de la tutelle et des gestionnaires à réduire l'emploi au cours des prochaines années.
Il a ensuite rappelé que le centre de gestion joue parfaitement son rôle pour écarter certains directeurs et praticiens hospitaliers qui n'accomplissent plus correctement leurs tâches. L'extension des compétences du centre de gestion à d'autres cadres d'emplois n'apparaît pas nécessaire en l'état.
Il a estimé qu'aucun hôpital public n'est menacé de fermeture. En revanche, certains secteurs d'activité devront être fermés si la garantie des soins n'est plus assurée, car l'intérêt du patient doit être privilégié. Cependant, les hôpitaux locaux ont encore un bel avenir, dans la mesure où ils peuvent offrir une interface efficace entre la médecine de ville et le secteur hospitalier. On pourrait ainsi imaginer qu'ils accueillent dans leurs locaux de jeunes médecins, particulièrement dans les zones d'aménagement du territoire les plus fragiles.
M. Jean-Claude Etienne a estimé indispensable d'étudier l'opportunité de prendre appui sur les hôpitaux locaux pour développer les réseaux de télémédecine.
Audition de Mme Solange ZIMMERMANN, vice présidente de la Conférence nationale des directeurs de centre hospitalier (CNDCH) et de M. Jean-Pierre DEWITTE, vice-président de la Conférence des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires (mardi 29 janvier 2008)
Mme Solange Zimmermann, vice présidente de la Conférence nationale des directeurs de centre hospitalier, a indiqué que la CNDCH n'est pas associée aux études complémentaires accompagnant l'élaboration de la nouvelle échelle nationale des coûts. Au cours des années antérieures, la Conférence nationale avait été associée de façon plus ou moins indirecte à l'élaboration de l'échelle nationale, mais elle avait déjà considéré cette participation insuffisante. Pourtant, l'échelle nationale des coûts est un outil important, malgré ses défauts, parmi lesquels son manque de pertinence dû à sa base insuffisante en nombre d'établissements et en termes de représentativité, ainsi que les délais trop importants dans la mise à disposition des données. Aujourd'hui, l'enjeu ne se situe pas tant sur le plan de l'élaboration technique de cette nouvelle échelle des coûts que sur celui de la prise en compte des spécificités des missions de chaque secteur.
Les écarts de coût constatés proviennent en effet d'aspects techniques, de caractéristiques liées aux missions des établissements et de différences d'organisation.
Les écarts « techniques » résultent essentiellement du fait que les groupes homogènes de séjours (GHS) sont calculés sur seulement 40 % des coûts dans le secteur public alors que les surcharges liées à la précarité, aux urgences et aux problèmes sociaux ne sont pas prises en compte. Par ailleurs, contrairement au secteur public, le secteur privé repose essentiellement sur une activité programmée d'où sont en outre écartées de nombreuses dépenses médicotechniques intervenant en aval ou en amont. Enfin, le périmètre d'activité est très différent entre les établissements publics et privés. Le panel des pathologies traitées ou « case mix » comporte une soixantaine de groupes homogènes de malades (GHM) en moyenne dans les établissements privés, mais plus de deux cents GHM dans les établissements publics ; par ailleurs, non seulement ce panel est plus important dans le secteur public mais les pathologies sont aussi plus lourdes avec des prises en charge en soins plus élevées.
Un autre motif d'écart résulte du fait que l'hôpital public traite en même temps et dans un même lieu des pathologies très différentes ainsi qu'un grand nombre d'urgences, c'est-à-dire une activité non programmée dont le surcoût par rapport aux activités programmées peut être évalué à plus de 60 %. Il existe également une problématique de l'effet taille des établissements qui doivent assurer une mission de continuité territoriale et offrir une palette de prises en charge variées. Dès lors, il arrive fréquemment que des frais fixes importants ne puissent être absorbés en totalité par l'activité, par exemple dans des secteurs comme la pédiatrie ou la néonatalogie.
Le souhait de la Conférence nationale est donc que les missions d'intérêt général soient élargies pour que les coûts fixes par rapport aux missions et aux activités des établissements soient mieux identifiés. Si ce préalable est réalisé, on peut sans crainte accepter une baisse des tarifs hospitaliers qui deviendraient alors comparables à ceux du secteur privé.
Ainsi, les différences de coûts peuvent être imputées à l'impact de la permanence des soins, la continuité territoriale, les différences de réglementations et de contraintes, le statut des personnels, enfin la gouvernance des établissements.
M. Jean-Pierre Dewitte, vice-président de la Conférence des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires, a, en préalable, insisté sur le fait qu'on n'a jamais levé l'ambiguïté sur les notions respectives de coût et de tarif. Ainsi, la tarification à l'activité (T2A) est une bonne réforme qui, au départ, reposait sur des tarifs. Or, l'établissement de deux bases nationales des coûts a créé une réelle distorsion entre les coûts et les tarifs. On va donc aujourd'hui plutôt vers des tarifs communs que vers des coûts identiques, pour des raisons économiques mais également pour des raisons politiques ou même de lobbying, comme récemment dans les domaines de l'obstétrique ou de l'ophtalmologie.
Les écarts de coût constatés sont en fait liés à la structure même des secteurs public et privé. L'objectif de convergence en 2012 est nécessaire car il permettra de clarifier la situation mais l'opposition entre les deux secteurs n'est pas souhaitable. En effet, il faut envisager les choses de façon globale, en tenant compte, par exemple, des soins réalisés en aval et en amont, des modes de fonctionnement différents et d'une prise en charge distincte pour les honoraires, qui entrent dans les coûts de l'hôpital pour le secteur public et dans les soins de ville pour le secteur privé.
La conférence des directeurs de CHU avait été associée par la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) aux premières réflexions sur la mise en oeuvre de la T2A et la définition du contenu des missions d'intérêt général. Depuis, les travaux menés par la Dhos se font sans les partenaires hospitaliers, en l'absence de transparence, ce qui nuit à la compréhension mutuelle. En outre, pour permettre une véritable comparaison des coûts, il est indispensable que des règles juridiques et financières identiques soient établies, par exemple en matière de réglementation des achats.
Pour ce qui concerne la restructuration de la carte hospitalière, il est clair que trop de structures hospitalières font aujourd'hui la même chose sur des territoires limités. Il est donc nécessaire, pour faire des économies, de réorienter l'activité des établissements de façon plus marquée et de développer les activités, dont les besoins sont croissants, de soins de suite, de médecine générale et de gériatrie, de façon notamment à préserver localement les emplois et l'activité. A cet effet, de véritables schémas d'organisation territoriale devront être établis. La conférence des directeurs des CHU estime qu'il conviendrait d'avoir une « tête de pont » par territoire de santé, c'est-à-dire un hôpital référent par département.
Mme Solange Zimmermann a estimé que les restructurations hospitalières doivent se faire à travers un projet médical de territoire qui répartira les rôles entre les établissements au sein d'un même espace géographique. Le recours aux groupements de coopération territoriale devra également être développé.
En matière de coûts, il convient aussi de prendre en compte la qualification des personnels puisque, par exemple, les exigences requises dans les blocs opératoires sont plus strictes dans le secteur public que dans le secteur privé.
M. Paul Blanc s'est interrogé sur la gouvernance des établissements hospitaliers et sur le rôle des maires, présidents de conseil d'administration de ces établissements, dans les projets de regroupement d'activités ou de fonctions.
M. Dominique Leclerc a estimé qu'au-delà de la différence entre les secteurs public et privé, il faut insister sur la priorité du service au public et au patient. Dans ce cadre, il convient de comparer les établissements entre eux plutôt que de les opposer. Le coût le plus important pour l'hôpital est la masse salariale et, sur ce point, les écarts sont importants entre les deux secteurs avec des grilles de salaire pour les médecins plus favorables dans le secteur privé. Par ailleurs, il a regretté que la France soit l'un des deux seuls pays de l'OCDE où les directeurs d'hôpitaux ne sont pas des praticiens, ce qui explique en partie le grave problème actuel d'organisation de l'hôpital.
M. Jean-Claude Etienne a jugé essentielle la distinction entre coût et tarif. Il a souhaité savoir comment la Conférence nationale des directeurs de centres hospitaliers envisage la place de l'hôpital local, son ouverture aux médecins installés en secteur libéral, sa participation à la résorption du problème démographique et son utilisation de la télémédecine.
Par ailleurs, il a constaté un différentiel important dans les taux d'encadrement en personnels non soignants dans les différentes catégories d'établissements qui, pour la partie administrative, peuvent aller de quinze ou dix-sept agents pour cent lits dans le secteur privé et à but non lucratif, à vingt-huit ou vingt-neuf agents pour cent lits dans le secteur public.
M. Jean-Pierre Dewitte a estimé que la nouvelle gouvernance, engagée par Jean François Mattei, est une excellente réforme. Elle permet une étroite relation de l'administration avec le corps médical et la création du conseil exécutif s'avère très utile. Le Président de la République a indiqué récemment qu'il faut un patron et un seul à l'hôpital, ce à quoi souscrit pleinement la Conférence des directeurs de CHU. Pour celle-ci d'ailleurs, il convient d'aller vers un patron par territoire départemental, ce qui implique de fédérer les hôpitaux voisins et de regrouper un certain nombre d'activités. Il a aussi jugé indispensable de redonner un rôle moteur à l'hôpital local, en lien avec le secteur ambulatoire. Ce mouvement est en cours. La télémédecine pourra contribuer à cette évolution mais elle nécessite encore des investissements pour mieux organiser, sécuriser et faciliter la numérisation des activités de radiologie.
Il a ensuite insisté sur la différence de nature entre les secteurs public et privé. Le secteur privé recherche la rentabilité annuelle alors que le service public doit s'attacher à assurer une permanence au quotidien, mais également sur le long terme. A titre d'exemple, il a cité la fermeture en trois mois d'une maternité privée à Châtellerault qui réalisait plus de six cents accouchements par an et dont le secteur public a dû, en urgence, assurer la charge.
Puis M. Jean-Pierre Dewitte a évoqué la problématique des questions de personnel. Pour réduire la masse salariale, il faut envisager de supprimer au moins 1 % des emplois par an, ce qui entraîne un important effort de réorganisation du travail de chacun. Toutefois, parallèlement à cette évolution, on assiste aujourd'hui à une forte pression du corps médical et des soignants pour augmenter le temps passé auprès des malades. Aussi, les marges d'économies sur les personnels soignants apparaissent-elles illusoires. Pour ce qui est des autres catégories de personnels, il faut tenir compte des effets de structures. En effet, il n'existe pas de clinique privée de deux mille lits alors que cette situation est courante dans le secteur public. Par ailleurs, à brève échéance, l'âge moyen de prise en charge dans les établissements de santé va augmenter, ce qui rendra nécessaire une présence humaine accrue et des soins plus nombreux auprès des malades.
L'externalisation de certaines fonctions à l'hôpital peut être utile, mais à la seule condition que cela permette des économies budgétaires. En outre, il faut avoir les moyens d'imposer cette externalisation ce qui signifie parfois de modifier la culture des décisionnaires au nombre desquels figurent les maires, présidents des conseils d'administration. A cet égard, il serait sans doute préférable que le maire préside un conseil de surveillance plutôt que le conseil d'administration.
M. Jean-Pierre Dewitte s'est déclaré très favorable au système du centre national de gestion. Il a ensuite souligné le piège que constitue le compte d'épargne-temps (CET) car même en payant l'arriéré, on n'a rien résolu pour l'avenir avec des logiques corporatistes et des pratiques différentes qui rendront les négociations futures inévitablement longues.
Sur la situation financière des établissements, on constate un doublement du déficit des CHU en un an, avec environ 300 millions d'euros. La capacité d'autofinancement des établissements est en diminution, ce qui représente un appauvrissement des établissements. La mise en place d'une comptabilité analytique est évidemment une bonne chose, même si cela fait plus de vingt ans qu'on y travaille. La difficulté réside dans le fait que le soignant n'a pas l'habitude de donner le détail de ce qu'il fait car, pour les médecins, il s'agit d'une activité globale indissociable. Une autre difficulté provient du fait que l'on raisonne en prix de journée d'hospitalisation alors qu'il est indispensable de connaître le coût par malade au-delà du simple coût par pathologie.
Mme Solange Zimmermann a indiqué que, selon la Conférence nationale des directeurs de centre hospitalier, il est indispensable de nommer un directeur des activités médicales par territoire. En matière de personnel, et en prévision des départs à la retraite dans la fonction publique hospitalière, il va falloir développer les activités de mutualisation, de partage des équipes et d'ouverture au secteur privé. Cette évolution ne devrait toutefois pas concerner les personnels non soignants. Dans ce cadre général, l'utilisation de procédures d'externalisation ne doit se faire que pour des motifs de coût. D'une manière générale, l'affectation des personnels à des structures de regroupement pourrait s'avérer indispensable dans les années futures.
En ce qui concerne le rôle du centre national de gestion, la CNDCH constate que cette structure vient d'être mise en place. Peut-être pourrait-on envisager d'étendre son champ de compétence à l'ensemble du personnel d'encadrement ? La Conférence reste réservée pour l'instant sur ce point.
Sur la question du CET, le problème du stock vient d'être réglé. Pour l'avenir, il paraît utile de maintenir le dispositif pour des raisons d'attractivité mais il serait sans doute judicieux d'organiser une gestion annuelle des heures supplémentaires affectées dans les CET.
Les établissements hospitaliers connaissent actuellement une situation globalement déficitaire avec quelques établissements qui n'ont plus de capacité d'autofinancement. Le déficit global était de 500 millions d'euros en 2006 et s'est certainement aggravé depuis. La comptabilité analytique est utilisée dans la plupart des établissements hospitaliers.
M. André Lardeux a voulu savoir quels sont les écarts de salaires entre les secteurs public et privé pour le personnel infirmier et si on rencontre des difficultés de recrutement.
M. Jean-Pierre Dewitte a indiqué que la rémunération des infirmiers est, aujourd'hui encore, plus favorable dans le secteur public, mais cet avantage qui était d'environ 20 % il y a quatre ou cinq ans n'est plus que de 4 % ou 5 % aujourd'hui ; en effet, il y a beaucoup de postes vacants d'infirmiers, ce qui conduit à des pratiques de sur-rémunération à l'embauche ou de recours à des missions d'intérim. Pour les aides-soignants, on constate encore des écarts sensibles. D'autres problèmes de rémunération existent, par exemple pour les radiologues sensiblement mieux payés dans le privé, ce qui traduit la nécessité d'une révision du statut des personnels et de l'instauration d'une possibilité d'adaptation des rémunérations et d'intéressement individuel des différents acteurs.
Mme Solange Zimmermann a également évoqué la formule du contrat individuel, aujourd'hui préconisée par la Conférence nationale des directeurs des centres hospitaliers.
Audition de Mme Martine AOUSTIN, directrice opérationnelle de la mission « tarification à l'activité » (MT2A) (mardi 29 janvier 2008)
Mme Martine Aoustin, directrice opérationnelle de la mission « tarification à l'activité » (MT2A), a indiqué que cette mission a été mise en place le 20 novembre 2002. Son rôle est de définir les modalités d'allocation de ressources aux établissements de santé par l'intermédiaire de la tarification à l'activité (T2A), d'établir des simulations sur les effets de ce nouveau mode de financement, de consulter les acteurs du système hospitalier et de proposer les mesures législatives et réglementaires nécessaires à la mise en oeuvre de la T2A. La MT2A est un gestionnaire de projet qui intervient de manière transversale auprès de l'ensemble des directeurs d'établissements ou des agences régionales d'hospitalisation (ARH). Son effectif se compose de dix personnes, dont des médecins, des directeurs d'hôpitaux, des économistes et un responsable scientifique.
Des comités d'experts sont associés aux travaux de la MT2A et des comités de suivi et d'accompagnement ont été constitués afin d'associer les acteurs du système hospitalier à l'avancement des travaux. Un comité de suivi de la réforme, qui regroupe l'ensemble des professionnels concernés (professions de santé, représentants des établissements publics et privés, partenaires sociaux), se réunit chaque semestre. Le pilotage global de la réforme est assuré par le ministère chargé de la santé.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité connaître les différentes étapes prévues jusqu'à la mise en oeuvre complète de la T2A en 2012.
Mme Martine Aoustin a précisé que la tâche prioritaire de la MT2A est de fournir des éléments susceptibles de justifier les écarts de coûts entre les établissements publics et privés en procédant notamment à des études thématiques sur la permanence des soins, la prise en charge de la précarité ou encore les surcoûts résultant des activités non programmées.
La mission est également chargée d'évaluer le périmètre des missions d'intérêt général et d'aides à la contractualisation (Migac), activités qui font l'objet d'un financement spécifique. Pour ce faire, des actions de communication sont entreprises en direction des ARH et des établissements afin de les aider à valoriser les activités qui entrent dans le champ des Migac et de permettre ainsi à la MT2A d'affiner les évaluations sur le coût constaté de ces missions.
L'examen du coût des missions d'évaluation, de recherche, de référence et d'innovation (Merri) fait également partie des missions assignées à la MT2A pour les mois à venir, avec pour objectif d'améliorer les modalités de financement de la recherche, mais aussi de favoriser les regroupements et la création de pôles d'excellence. Des améliorations sont d'ores et déjà perceptibles dans le domaine des essais cliniques.
Par ailleurs, la MT2A évalue conjointement avec l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation (Atih) la nouvelle version (V 11) des groupes homogènes de malades (GHM) servant de support à la détermination des tarifs ; enfin, elle suit les évolutions des dépenses de médicaments et de dispositifs médicaux facturés en sus des groupes homogènes de séjour (GHS).
En 2009, la MT2A accompagnera la mise en oeuvre de la tarification dans les établissements du service de santé des armées. La T2A sera également appliquée pour rémunérer l'activité des cabinets de radiothérapie libéraux afin de favoriser une meilleure prise en compte des actes d'une part, et du coût des investissements techniques, d'autre part.
Evoquant l'extension de la T2A aux activités de psychiatrie, Mme Martine Aoustin a indiqué que la MT2A doit d'abord bâtir un modèle de financement propre à ce secteur dans lequel il est difficile de valoriser l'activité des professionnels de santé. Des actions sont en cours pour recueillir des informations sur le fonctionnement des établissements concernés, passage obligé avant la mise en oeuvre d'une échelle de coût et d'une analyse des missions d'intérêt général propre à ce secteur. Une première étape a été franchie avec la création d'une unité de compte : la valorisation des activités psychiatriques (VAP). L'ensemble de cette démarche est effectué en étroite collaboration avec les professionnels de santé concernés.
La loi prévoit également le recours à la T2A pour le financement des activités de soins de suite et de réadaptation (SSR). Un modèle cible proche de celui retenu pour le financement des activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO) a été défini, ce qui permettra d'utiliser des règles identiques pour financer les établissements pluridisciplinaires. Les modalités de rémunération des activités de SSR seront modulées à compter de la campagne budgétaire 2009 afin de mieux valoriser l'activité des établissements qui prennent en charge les patients nécessitant les soins les plus importants. Ce mode de rémunération sera progressivement adapté jusqu'à la mise en oeuvre d'une T2A propre à ce secteur, à compter de 2011. L'Atih est chargée d'établir une étude nationale des coûts et une classification des actes. Ces opérations sont nécessaires pour déterminer les tarifs applicables aux activités de SSR. Cette évolution permettra un financement plus équitable des différents établissements ayant développé ces activités.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité des précisions sur les études en cours relatives à l'évaluation du coût des Migac.
Mme Martine Aoustin a souligné que ces études vont permettre de mieux définir le périmètre du processus de convergence tarifaire entre les établissements publics et privés. Si les études complémentaires en cours font apparaître des surcoûts liés, par exemple, à la prise en charge des personnes en situation de précarité, ce surcoût pourra être financé soit dans le cadre des Migac, soit par l'intermédiaire d'une majoration des tarifs.
M. Alain Vasselle, président, a voulu savoir si toutes les activités sont susceptibles d'être valorisées par l'intermédiaire d'un tarif ou s'il est nécessaire de maintenir une rémunération forfaitaire pour certaines d'entre elles.
Mme Martine Aoustin a jugé nécessaire de maintenir le principe d'un paiement forfaitaire pour certaines missions. Le recours aux Migac permet de traiter des prestations qui n'ont pas forcément un lien direct avec l'acte médical mais qui sont indispensables pour la prise en charge de certains patients, comme par exemple le recours à une assistante sociale. Les surcoûts mis en exergue par les études menées sous l'égide de la MT2A ou de l'Atih peuvent également être pris en charge par une majoration de la rémunération versée au titre d'un GHS. C'est le cas depuis l'entrée en vigueur de la version V 7 de la grille tarifaire qui tient compte de la sévérité des pathologies traitées. Les pouvoirs publics devront trancher, au cas par cas, entre ces deux solutions, tarifs ou Migac, pour financer les surcoûts que feront apparaître les analyses en cours.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur la capacité de la MT2A et de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) à mener à bien toutes les études engagées avant le 15 octobre prochain, comme le prévoit la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.
Mme Martine Aoustin a observé que la MT2A s'est engagée sur un scénario resserré qui ne concerne que les grands indicateurs susceptibles de justifier les écarts de coût entre établissements de santé publics et privés. Aucune étude détaillée portant sur l'ensemble des sujets traités ne sera disponible dans l'immédiat. L'objectif principal est d'analyser les différentiels de coûts et d'obtenir des résultats susceptibles d'orienter la campagne budgétaire 2009.
L'étude nationale de coûts comparés doit permettre de recenser les charges pesant sur les secteurs public et privé et notamment les différences en matière de coût du travail. Les surcoûts liés à la prise en charge de la précarité, à la permanence des soins seront également analysés ainsi que les modes de prise en charge des soins périhospitaliers.
Les études supplémentaires destinées à approfondir les premières analyses sont cependant d'ores et déjà lancées ; leur achèvement est prévu en 2010.
M. Alain Vasselle, président, a indiqué qu'à l'occasion de son audition, Gérard Vincent, délégué général de la fédération des hôpitaux de France (FHF), a exprimé le souhait, au nom de son organisation, que les établissements publics soient financés pour moitié en fonction de leur activité et pour moitié par l'intermédiaire des Migac.
Mme Martine Aoustin a observé qu'il n'est pas souhaitable de définir en amont la part que représente la dotation Migac dans le budget global d'un établissement. Une approche factuelle est préférable, d'autant que cette part va varier par exemple en fonction de la taille d'un établissement, entre un centre hospitalier universitaire et un centre hospitalier, en raison des dotations versées au titre des activités de recherche. Les Migac doivent donc être adaptées à la réalité des services rendus par chaque établissement.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur la possibilité de mettre en place une stratégie tarifaire pluriannuelle ainsi que l'a préconisé l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam).
Mme Martine Aoustin a estimé légitime de faire bénéficier les établissements de la meilleure visibilité possible sur les modalités de financement de leurs activités. Définir une grille tarifaire pluriannuelle se heurte toutefois à de nombreuses difficultés, notamment en raison des incertitudes existant sur la détermination du taux d'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) et sur les conditions de régulation du secteur hospitalier. L'Ondam fait, en effet, l'objet d'un vote annuel par le Parlement et il n'est pas possible d'anticiper ce que sera son taux de progression. En conséquence, les autorités de tutelle du secteur hospitalier ne sont pas en mesure de fixer des grilles tarifaires pluriannuelles.
Mme Martine Aoustin a également indiqué que la réforme se trouve encore dans une période de transition et que des ajustements sont toujours possibles. La définition d'une stratégie pluriannuelle est complexe lors de la montée en charge de la réforme, période propice à des évolutions constantes.
Elle a rappelé que le financement des établissements de santé est déterminé dans le cadre d'une enveloppe budgétaire définie préalablement : le sous-objectif « dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l'activité » de l'Ondam. Lors de la préparation de la campagne budgétaire annuelle, les acteurs du système hospitalier peuvent choisir de privilégier, dans ce cadre budgétaire, soit des augmentations de tarif, soit une hausse des volumes d'activité. Ils font aujourd'hui le choix de la revalorisation tarifaire des actes.
M. Alain Vasselle, président, s'est inquiété d'une possible déconnexion entre les coûts réels et les coûts constatés.
Mme Martine Aoustin a rappelé que les tarifs ne sont pas calculés en fonction du coût constaté dans chaque établissement mais sur la base d'un coût moyen obtenu à partir des données recueillies par l'échelle nationale des coûts (ENC) propres aux établissements publics. Des hôpitaux peuvent donc avoir un coût de fonctionnement supérieur aux tarifs. Cet écart s'explique parfois par un taux d'occupation des lits, en réanimation par exemple, inférieur à celui retenu pour le calcul du tarif. Une activité moins importante entraîne une réduction des recettes.
Ces coûts sont observés annuellement et peuvent fluctuer en fonction des résultats collectés dans le cadre de l'ENC.
Elle a estimé que les choix méthodologiques retenus pour la détermination des tarifs incitent les établissements à améliorer leur efficience.
M. Alain Vasselle, président, a indiqué que certains établissements privés estiment que les activités d'obstétrique font l'objet d'une valorisation insuffisante.
Mme Martine Aoustin a rappelé que les établissements privés ont commencé à réduire leur activité obstétrique avant la mise en oeuvre de la T2A, sans doute pour des motifs de rentabilité insuffisante. Ces tarifs ont cependant fait l'objet d'une revalorisation régulière, avec notamment l'introduction d'un tarif « bébé », selon une procédure identique à celle utilisée dans le secteur public. Des négociations tarifaires ont lieu régulièrement avec les représentants de l'hospitalisation privée, qui peuvent, s'ils le souhaitent, attirer l'attention des pouvoirs publics sur ce point particulier.
Le processus de convergence intersectorielle va permettre de rapprocher les tarifs des établissements publics et privés.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité connaître le nombre de GHM utilisés pour décrire les pathologies prises en charge par les établissements et le nombre de GHS servant à déterminer les tarifs. Il s'est également interrogé sur la possibilité de rendre publique une étude comparative sur les coûts des établissements publics et privés pour un échantillon de GHS.
Mme Martine Aoustin a indiqué qu'il existe 781 GHM et 789 tarifs. Rien ne s'oppose à la publication de l'étude comparative sur les coûts du public et du privé par GHS.
M. François Autain a fait état d'une étude récente de la direction de la recherche de l'évaluation et des études statistiques (Drees) du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports qui a estimé à 15,6 % le taux de rentabilité des cliniques en 2005. Il a souhaité savoir si les tarifs du secteur privé prennent en compte la rentabilité de ce secteur. Il a estimé impossible de mettre en place une concurrence libre et non faussée entre le public et le privé en raison des différences existant dans les modalités de rémunération des professionnels de santé selon les secteurs.
Mme Martine Aoustin a indiqué que le taux de rentabilité retenu par la MT2A pour la détermination des grilles tarifaires des établissements privés est inférieur à 15 %. Ces tarifs sont calculés pour éviter la création de rentes de situation.
Elle a estimé que les indicateurs sur la rentabilité des cliniques privées, évoqués par l'étude de la Drees, ont été établis, en tout état de cause, sur la base du modèle de financement antérieur à la mise en oeuvre de la T2A (mars 2005) et a insisté sur la nécessité de procéder à une analyse approfondie des coûts.
Elle est convenue que les établissements publics rencontrent des difficultés pour assurer leurs missions, y compris dans le domaine de la permanence des soins, en raison des écarts de rémunérations perçues par les praticiens hospitaliers par rapport à leurs collègues exerçant dans le privé. Les autorités de tutelle doivent donc réfléchir aux moyens nécessaires pour maintenir l'attractivité des hôpitaux.
M. Jean-Claude Etienne a voulu connaître les modalités de rémunération de l'activité libérale des praticiens hospitaliers.
Mme Martine Aoustin a indiqué que cette activité est rémunérée en fonction du volume d'activité de chaque praticien concerné, et notamment du nombre de consultations réalisées.
Audition de Mme Elisabeth BEAU, directrice de la mission nationale d'expertise et d'audit hospitaliers (MeaH) (mardi 29 janvier 2008)
Mme Elisabeth Beau, directrice de la mission nationale d'expertise et d'audit hospitaliers, a indiqué que l'efficience des établissements de santé doit être analysée dans une double perspective : celle de la productivité et des résultats économiques, d'une part, celle de la qualité des soins, d'autre part. Ces deux aspects vont d'ailleurs souvent de pair et l'on constate qu'une bonne qualité des soins a un effet motivant sur les médecins et les personnels soignants. Plutôt qu'une séparation des établissements en deux catégories, correspondant aux secteurs public et privé, on observe en France l'existence d'une mosaïque d'établissements présentant souvent les mêmes types de difficultés. Néanmoins, on constate une moindre réactivité au changement et à la mise en oeuvre de bonnes pratiques organisationnelles dans le secteur public. De même, le management des établissements de santé est plus juridique, institutionnel et stratégique dans le secteur public alors qu'il est plus orienté vers la production de soins, le côté opérationnel et économique dans le secteur privé. Enfin, on observe des objectifs plus nombreux et souvent contradictoires dans le secteur public alors que ceux-ci sont plus clairs et plus simples dans le secteur privé.
En matière de gisements d'efficience, on constate qu'il en existe à peu près partout. Toutefois, pour déterminer les bons gisements, il convient de prendre en compte un certain nombre d'éléments. Le premier est celui de la part de l'activité concernée dans la dépense. Par exemple, les activités de blanchisserie ne représentent que 0,3 % en moyenne de la dépense hospitalière ; elles ne pourront donc représenter un gisement majeur d'économies. Un deuxième élément tient aux marges de progrès ouvertes par l'activité, comme par exemple pour les blocs opératoires dans lesquels on trouve facilement 10 %, 15 %, voire 30 % de marge de progression. Le troisième aspect tient à la capacité des établissements à mobiliser ces gisements de progrès, cette capacité étant liée au contexte et à la plus ou moins grande complexité des sujets.
Depuis 2003, la MeaH a traité vingt-quatre thèmes et a trouvé à chaque fois des possibilités d'amélioration. L'essentiel des constatations a trait aux questions d'organisation, c'est-à-dire la recherche d'une bonne adéquation entre les ressources et les activités. Elles touchent aussi aux processus de travail, afin de supprimer des tâches inutiles ou redondantes, et au développement du management à tous les niveaux de l'hôpital. Sur ce dernier aspect, une réflexion a été lancée pour renforcer la fonction de management des médecins, des chefs de secteurs, des directeurs grâce à la mise en place de diagnostics, d'indicateurs, de mesures de l'activité, d'actions correctrices et de communication.
M. Jean-Claude Etienne est convenu du caractère fondamental de la question du management. Toutefois, les médecins qui assumaient la responsabilité d'un service ont peu à peu vu leurs fonctions disparaître avec la création des départements, puis des pôles, et le renforcement du poids de l'administration. Que penser de cette évolution qui a, à son sens, dépersonnalisé et mécanisé une partie de la gestion des hôpitaux ?
Mme Elisabeth Beau a indiqué que la MeaH a beaucoup travaillé sur la mise en place de la comptabilité analytique dans les hôpitaux. Elle a non seulement fourni des outils nombreux et variés aux gestionnaires mais elle a également veillé à ce que ceux-ci soient mis en oeuvre et appliqués. Par exemple, elle a aidé à la définition d'outils pour établir des comptes de résultats par pôle ou pour réaliser des études économiques ponctuelles liées, notamment, à la durée des séjours, à l'utilisation des consommables dans les blocs opératoires ou à la mise en place d'un nouveau service.
Les enseignements tirés de ces travaux montrent que, dans le secteur public, les systèmes sont plus complexes avec un grand nombre d'activités et de données, parfois difficiles à interpréter. D'une manière générale, les différences de coûts constatées sont liées à la densité des personnels et à des problèmes d'organisation. La MeaH apporte donc une aide aux établissements et services dans le but de leur permettre des gains d'efficience. Dans le secteur privé, l'approche est différente avec une attention plus grande aux questions de gestion, aux approches ponctuelles et aux études à portée plus pratique. Par exemple, le travail sur les consommables médicaux utilisés dans les blocs opératoires a donné des résultats probants.
Sur le temps médical, un travail a été mené avec plus d'une centaine d'établissements dans lesquels les médecins sont salariés. Trois séries de problèmes principaux ont été rencontrées : la nécessité de clarifier les règles applicables, par exemple, en matière de réduction du temps de travail (RTT) ; l'amélioration de la gestion du temps, en particulier dans l'établissement des tableaux de service, des heures de garde ou des heures additionnelles ; enfin, l'amélioration de l'organisation du temps, en adaptant l'activité et les ressources disponibles, en analysant les variations de l'activité au cours de chaque semaine et dans l'année et en favorisant un lissage des plans de charge. Dans tous les établissements où la MeaH est intervenue, des résultats positifs ont été obtenus, par exemple, au centre hospitalier d'Apt où 300 000 euros annuels ont été économisés grâce à la seule réorganisation de l'activité médicale et à la refonte des tableaux de garde.
Mme Elisabeth Beau a indiqué que la MeaH n'accompagne pas les opérations d'externalisation mais qu'à l'occasion de missions de réorganisation, elle a aidé à la rédaction de cahiers des charges, ceux-ci étant en effet essentiels pour que l'externalisation soit réussie. En matière de restauration, plusieurs systèmes existent, entre la régie directe et la concession totale au secteur privé. L'analyse détaillée des coûts de ces diverses options ne montre pas de différence spectaculaire. Dans 85 % des établissements, le coût d'un repas est inférieur à 5 euros et dans 60 % à 4 euros ; en outre, quelle que soit la formule retenue, le coût des matières premières est légèrement inférieur à 2 euros.
La MeaH n'intervient pas sur les questions de gestion prévisionnelle des effectifs ni sur la fonction de gestion des ressources humaines. Toutefois, dans la plupart des chantiers qu'elle a engagés, les questions de personnel étaient présentes surtout en termes d'organisation.
M. Jean-Claude Etienne a souhaité savoir pourquoi on constate une si grande disparité dans le rapport du nombre de soignants et du nombre de non-soignants entre les différentes catégories d'établissements hospitaliers.
Mme Elisabeth Beau a indiqué que les travaux de la MeaH ont permis de nombreuses comparaisons et la constatation de réels écarts de productivité qui s'expliquent le plus souvent par des différences sensibles de densité des personnels rémunérés et parfois également par des différences de coûts salariaux. Par exemple, on peut constater des écarts allant de un à trois sur le nombre de manipulateurs dans un service de radiologie ou sur le nombre de médecins dans un service d'urgence. L'idée est donc de trouver les meilleures pratiques opérationnelles grâce à une meilleure organisation, ce qui permet une utilisation optimale des ressources qui sont parfois rares.
Audition de M. Gérard de POUVOURVILLE, professeur titulaire de la chaire Essec-Santé (mardi 5 février 2008)
M. Gérard de Pouvourville, professeur titulaire de la chaire Essec-Santé, a d'abord indiqué qu'il avait été directeur de recherches au centre national de la recherche scientifique (CNRS) en économie de la santé et conseiller scientifique auprès du ministère de la santé à l'occasion de la mise en place du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), de la procédure budgétaire liée au PMSI et de l'étude nationale des coûts (ENC). Aujourd'hui, il assume un rôle d'expert auprès de la mission « tarification à l'activité » (T2A) et travaille, cette année, sur la convergence entre les secteurs public et privé.
La tarification à l'activité constitue certainement un élément moteur pour inciter les établissements de santé à améliorer leur organisation et leurs outils de gestion. En effet, elle a pour objet de faire dépendre les recettes de l'activité, ce qui rend obligatoire de connaître l'activité et les coûts de production de chaque établissement. Les évolutions sont bien amorcées, mais avec des vitesses très différentes selon les établissements. Ainsi, la majorité des établissements publics est très loin de disposer des outils lui permettant de connaître aussi bien ses marges que ses pertes. Néanmoins, sans l'instauration de la T2A, on en serait resté à un pilotage très approximatif des établissements.
La culture de la T2A, qui est une culture de la marge et non du profit, est nouvelle pour les établissements de santé et assez éloignée de la formation actuelle des médecins et même des directeurs d'hôpitaux. Il est donc impératif de définir une meilleure formation des personnels, aussi bien administratifs que médicaux, et de mettre en place des systèmes d'information permettant un pilotage de la gestion sous l'angle médico-économique.
Les dépenses de personnel ne sont un obstacle que pour les établissements en déficit lourd. Dans ceux-ci, l'ajustement des effectifs à l'activité ne peut se faire que par des départs à la retraite ou par des réaffectations au profit d'autres structures publiques, ce qui signifie que les restructurations nécessitent une certaine durée.
M. François Autain a souhaité savoir si l'alternative est la suppression de la T2A ou la suppression du statut de la fonction publique hospitalière.
M. Gérard de Pouvourville a indiqué que le maintien du statut de la fonction publique hospitalière n'exclut pas d'organiser le redéploiement des personnels hospitaliers avec des mécanismes de reconversion et de reclassement. Une telle action est possible, comme en témoigne la restructuration de l'hôpital psychiatrique Maison blanche dans les années quatre vingt dix, où ont eu lieu d'importants reclassements d'effectifs.
D'une façon générale, le secteur privé est plus réactif que le secteur public aux évolutions nécessaires pour améliorer l'efficacité des établissements de santé. Toutefois, des pistes existent pour faire progresser la situation actuelle, en particulier la formation au management des médecins hospitaliers responsables et des cadres hospitaliers. Par ailleurs, les établissements publics en déficit doivent remettre en cause leur organisation, leur utilisation des ressources médicales, les protocoles de prise en charge des patients, les prescriptions médicamenteuses ou certains protocoles thérapeutiques. Ainsi un examen détaillé des protocoles de bilan effectués à l'entrée du patient dans l'établissement font souvent apparaître des examens inutiles ou redondants. Il serait sans doute aussi intéressant de mettre en place des mécanismes d'incitation internes aux établissements avec des primes de performance pour les services les plus efficients. Enfin, outre la gestion, des pistes d'amélioration de la stratégie des établissements doivent être envisagées, comme le développement des alternatives à l'hospitalisation que sont la chirurgie ambulatoire ou les hospitalisations de jour. Dans ce domaine, les hôpitaux publics français sont en net retard.
M. Gérard de Pouvourville a ensuite observé qu'il existe une certaine contradiction dans la gestion actuelle de la T2A. En effet, dans les pays où la tarification à l'activité a été mise en place, celle-ci est un outil d'incitation à la concurrence entre les établissements et donc à un plus grand dynamisme des acteurs qui sont autonomes dans leur stratégie. Ce n'est pas le modèle choisi par la France où la planification continue de jouer un rôle très structurant et limite d'autant les espaces stratégiques des établissements. Il n'y a donc pas de possibilité de développer une stratégie individuelle et concurrentielle des hôpitaux puisque le modèle est celui d'une régulation tarifaire avec un rationnement de fait. On a en effet hérité du passé un système dans lequel existe une grande interdépendance entre les établissements publics et la tutelle pour l'allocation des ressources. La méthode du budget global ne constituait pas une incitation au retour à l'équilibre, dans la mesure où les chefs d'établissement avaient la possibilité d'obtenir une « rallonge » en cas de difficulté. En sens opposé, les autorités de tutelle ont régulièrement demandé la prise en charge de politiques spécifiques de santé publique par les établissements, sans pour autant assurer leur financement. Si cette culture n'évolue pas, la T2A n'aura pas constitué un élément décisif de réforme de la gestion des établissements de santé.
La fixation d'objectifs quantifiés d'activité présente l'avantage de favoriser le service public et de contenir le développement du secteur privé, mais a aussi l'inconvénient de maintenir des rentes de situation pour les établissements peu ou pas performants.
La convergence entre les établissements publics et privés n'est pas soutenable si l'on ne donne pas les moyens aux établissements publics aujourd'hui lourdement déficitaires de revenir à l'équilibre sur une durée raisonnable, par exemple de cinq ans. L'existence d'éléments qui justifient les différences de coût de production entre les deux secteurs doit naturellement être prise en compte dans le cadre d'une politique de convergence. Par ailleurs, au sein même du secteur public, il y a une grande variété de situations économiques, justifiant des politiques spécifiques pour tenir compte des différences de coûts constatées.
Evoquant les problèmes de gouvernance, M. Gérard de Pouvourville a observé qu'aujourd'hui, l'Etat assure la planification du système, la fixation des tarifs et la définition des règles de gestion des établissements publics. L'assurance maladie est, dans les faits, un payeur relativement passif, même si elle réclame un rôle plus actif, notamment dans le contrôle de la dépense hospitalière.
S'il est légitime que l'Etat assure la responsabilité des problèmes politiques de planification et d'aménagement du territoire, il existe plusieurs options pour répartir les rôles en matière de régulation de la dépense hospitalière. D'un point de vue strictement économique et financier, l'assurance maladie pourrait exiger que les surcoûts liés à des politiques nationales, comme l'aménagement du territoire, soient financés par l'Etat, et non par elle même.
Par ailleurs, le mode de fonctionnement actuel de la T2A ne permet pas de mise en concurrence des établissements hospitaliers entre eux. En effet, le mécanisme d'ajustement des tarifs au niveau national est confiscatoire car les résultats positifs obtenus le cas échéant sont prélevés l'année suivante, pénalisant ainsi les établissements efficients et rendant impossible l'utilisation des surplus, par exemple pour la création de nouveaux services.
Enfin, par rapport aux Etats-Unis, premier pays où a été mis en place un mode de paiement à l'activité, il n'y a pas de contrôle suffisamment rigoureux de l'accès aux soins hospitaliers, en particulier de la pertinence et de l'adéquation des soins effectués. Or, ce contrôle des pratiques hospitalières pourrait être mis en oeuvre par l'assurance maladie, sur la base de recommandations et de critères définis par la Haute Autorité de santé.
M. Alain Vasselle, président, a estimé logique que les surcoûts imposés à l'hôpital public par l'Etat soient pris en charge par ce dernier, mais il conviendrait alors d'en faire la liste précise. Il a donc souhaité savoir quelle est l'origine de ces surcoûts et quel type de gouvernance de l'hôpital public peut être mise en place pour les réduire.
M. Guy Fischer a demandé des précisions sur l'analyse selon laquelle l'équilibre des établissements publics ne peut se faire que par une réduction des sureffectifs. Cela signifie-t-il qu'il y a trop d'établissements hospitaliers en France ou qu'il convient de réduire l'offre de soins ?
M. François Autain a souhaité savoir si la T2A peut améliorer la qualité des soins. Il s'est interrogé sur la différence existant entre les notions de marge et de profit. Il a rappelé que les établissements privés ont connu une rentabilité financière de 16 % en moyenne en 2005, ce qui est considérable par rapport aux revenus de placement habituels. Existe-t-il un lien entre cette rentabilité et la mise en place de la T2A et est-il légitime qu'un secteur aussi rentable soit solvabilisé par la sécurité sociale ? Enfin, l'échéance de 2012, fixée pour la convergence entre les secteurs public et privé, peut-elle être considérée comme réaliste ?
M. Gérard de Pouvourville a indiqué que deux catégories de dépenses devraient être financées par la puissance publique : d'une part, les dépenses à visée d'aménagement du territoire, qui permettent de maintenir des structures hospitalières de proximité dans des conditions de sécurité satisfaisantes ; d'autre part, le financement d'activités d'intérêt général qui devraient être contractualisées avec l'Etat ou même, pourquoi pas, avec les régions pour des missions d'intérêt régional. Ces dépenses devraient être évaluées, non pas en fonction des coûts déclarés, mais sur la base d'un cahier des charges précis et faire l'objet d'une réévaluation régulière tous les cinq ou six ans.
Puis M. Gérard de Pouvourville a indiqué que si certains hôpitaux devenaient plus efficients, la réduction de leurs effectifs n'entraînerait pas forcément une diminution de l'offre de soins. En fait, les réallocations de personnes du secteur aigu vers l'ensemble du secteur médicosocial ou même au sein du secteur hospitalier pourraient au contraire permettre de diversifier et d'améliorer cette offre de soins.
La différence entre les notions de marge et de profit est liée au secteur auquel ils s'appliquent, puisque le secteur public ne fait pas de profit, alors qu'il peut dégager des marges.
Si la T2A n'incite pas de façon prioritaire au développement de la qualité des soins, elle encourage une meilleure efficience, ce qui peut souvent permettre une amélioration de la qualité. La qualité est une des questions-clé de la concurrence entre les secteurs public et privé. Il est donc impératif de maintenir une politique d'exigence en parallèle à la T2A avec des tableaux de bord comparatifs que la Haute Autorité de santé pourrait élaborer. Il serait sans doute légitime d'être plus interventionniste dans le cadre de contractualisations pluriannuelles qui définiraient des indicateurs de résultat précis.
M. Gérard de Pouvourville a indiqué qu'il a été surpris par les résultats du secteur privé en 2005, mais ces résultats traduisent, de la part de celui-ci, une très grande réactivité et une parfaite compréhension de la T2A avec des effets d'abaissement de points morts considérables. Il y a certainement un risque d'actes injustifiés, ce qui rend nécessaire une politique de contrôle.
En conclusion, il a observé que les évolutions dans le secteur hospitalier sont toujours difficiles et lentes. La convergence entre les secteurs public et privé se fera mais dans le cadre d'une vision assez approximative des origines et du niveau des écarts de coût, ce qui risque de produire de nouvelles rentes de situation et, à l'inverse, de pénaliser certains établissements. De ce point de vue, les effets restructurants attendus de la T2A ne sont pas aussi rapides que prévu, mais cette situation est aussi liée à l'administration qui agit un peu en « aveugle » et à des procédures très lourdes.
Audition de M. Didier GUIDONI, ancien conseiller technique au ministère de la santé chargé de la mise en place de la tarification à l'activité, associé d'Ineum consulting (mardi 5 février 2008)
M. Didier Guidoni, ancien conseiller technique au ministère de la santé chargé de la mise en place de la tarification à l'activité, associé d'Ineum consulting, a souligné que les nouvelles modalités de financement fondées sur la tarification à l'activité (T2A) sont de nature à favoriser une meilleure organisation des établissements de santé. Ces derniers développent des outils de pilotage médico-économiques destinés à évaluer les coûts de fonctionnement, localiser les postes de dépenses et analyser la pertinence des modalités de prise en charge des patients retenues jusque-là. Cela se traduit par un investissement massif dans la connaissance des structures, des instruments de gestion, des coûts et des recettes qui ne sera achevé que d'ici deux à cinq ans. Des phénomènes identiques ont été constatés dans tous les pays qui ont mis en oeuvre la T2A (Pays-Bas, Suède, Allemagne).
Le statut de la fonction publique hospitalière ne constitue pas, à son sens, un obstacle rédhibitoire à cette évolution de l'organisation du travail au sein des établissements de santé ainsi qu'à d'éventuelles restructurations. Les conventions collectives appliquées dans le secteur privé comportent également des éléments de rigidité. Des adaptations statutaires sont toutefois nécessaires car les établissements de santé publics ne peuvent pas être gérés comme une école ou une collectivité territoriale.
Dans les autres pays européens, la masse salariale représente, comme en France, environ 70 % des dépenses des établissements de santé, quels que soient leurs statuts, et cette situation n'a pas pour autant constitué un frein à l'amélioration de la gestion hospitalière.
M. Didier Guidoni a indiqué que le secteur public est pénalisé par sa mauvaise organisation plutôt que par les contraintes liées au statut des personnels. C'est notamment le cas du fonctionnement des blocs opératoires qui peuvent rester inoccupés pendant des périodes relativement importantes de la journée (jusqu'à 50 %), des personnels étant pourtant mobilisés pour cette activité. Les comparaisons entre les différentes catégories d'établissements font apparaître des variations de durée moyenne d'intervention qui sont normales, pouvant expliquer qu'un moins grand nombre d'interventions soient pratiquées dans certains blocs, mais elles font également ressortir des différences de productivité qui sont liées à une mauvaise organisation du travail. De la même manière, une consultation médicale à l'hôpital est souvent précédée de deux prises en charge administratives effectuées, l'une, à l'entrée de l'établissement, l'autre, par le secrétariat du médecin, sans que cela ne se traduise par une quelconque valeur ajoutée. Au total, le coût de cette consultation s'élève à 100 euros alors que le tarif réglé par le patient varie entre 34 et 50 euros. L'optimisation de l'organisation du travail constitue donc le principal gisement d'efficience dans le domaine hospitalier.
Par ailleurs, M. Didier Guidoni a estimé que les modalités de rémunération des médecins du secteur public ne sont pas adaptées aux enjeux actuels. L'écart entre les rémunérations perçues dans le public et le privé est trop important ; des ajustements sont indispensables pour préserver l'attractivité des établissements publics, alors que les départs des praticiens hospitaliers vers le secteur privé s'accélèrent. Les établissements publics doivent envisager de lier la rémunération des médecins au volume d'activité de ceux-ci. Le paiement à l'acte étant par nature inflationniste, un compromis doit cependant être trouvé entre une part fixe de rémunération et une part variable. Dans certains établissements, comme l'hôpital Dieu de France à Beyrouth, les médecins gèrent et répartissent eux-mêmes la masse salariale du service qu'ils dirigent.
Les textes législatifs autorisent d'ores et déjà les établissements à compléter la rémunération de leurs personnels en développant une politique de participation. Ces dispositions doivent être adaptées et complétées, par voie réglementaire, afin de permettre aux dirigeants des établissements, directeur et président de la commission médicale d'établissement (CME), de disposer de leviers managériaux afin de mobiliser leurs personnels et de rétribuer les efforts collectifs. Cette démarche doit s'inscrire dans un cadre général qui favorise la tenue de négociations sociales au sein des établissements, ce qui n'a pas eu lieu depuis la mise en oeuvre des trente-cinq heures. L'hôpital ne discute, en effet, jamais des rémunérations et de l'évolution des revenus de son personnel alors qu'il est important d'établir un lien entre l'activité de l'établissement et la rémunération de ceux qui y travaillent. La situation actuelle, qui ne reconnaît aucun lien entre augmentation de salaire et évolution de l'activité de l'établissement, n'est plus satisfaisante.
Enfin, le statut des professeurs d'université-praticiens hospitaliers (PU-PH) est peu conforme aux besoins de l'hôpital et de l'université. L'activité hospitalière devrait être contractualisée, entre le professionnel de santé et l'établissement qui l'accueille, sur le modèle de ce qui se passe dans les centres de lutte contre le cancer, afin de mieux encadrer le rôle de ces professionnels dont l'activité professionnelle est très contrastée.
Interrogé sur les pistes à privilégier pour améliorer l'efficacité des établissements, M. Didier Guidoni a estimé que la question du maintien des maires à la tête des conseils d'administration doit être posée car cette situation peut être la pire ou la meilleure des choses. En effet, les maires, pour des raisons compréhensibles liées à l'emploi ou au souhait de maintenir un service de proximité, s'opposent régulièrement à la fermeture de certaines activités hospitalières, comme par exemple les maternités ou les blocs opératoires.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe a jugé que le conseil d'administration d'un établissement ne dispose pas du pouvoir de s'opposer à une fermeture de service.
M. Didier Guidoni a considéré que les maires disposent d'un pouvoir suffisant pour retarder les restructurations, ce qui prive le système de santé des économies escomptées. Les collectivités territoriales devraient donc assumer les conséquences financière de ce choix imposé aux hôpitaux.
Il a ensuite observé que la direction d'un établissement de santé doit être assurée dans le cadre d'une collaboration des personnels administratifs et médicaux, désormais réunis au sein du conseil exécutif de l'établissement. La présence du corps médical dans cette structure est une avancée importante.
La T2A a été conçue pour que les principes de financement des établissements de santé soient compris par l'ensemble des acteurs du système. La définition d'un cadre tarifaire pluriannuel permettrait de répondre à ce souci de transparence et s'avère indispensable pour amener les équipes dirigeantes de chaque établissement à définir un projet d'établissement et des projets médicaux. L'Etat doit être en mesure d'indiquer un niveau minimal d'évolution des tarifs pour les 80 % des groupes homogènes de séjour (GHS) regroupant les pathologies les plus fréquemment prises en charge par les établissements de santé. Cet effort de transparence porterait ainsi sur 250 à 300 GHS.
M. Didier Guidoni a estimé que la mise en oeuvre des objectifs quantifiés de l'offre de soins (Oqos) rigidifie le système hospitalier quand les établissements devraient au contraire bénéficier d'une plus grande autonomie pour développer leur activité. Le recours aux Oqos ne permet pas de distinguer les établissements les plus efficients, ni de prendre en compte les choix exprimés par les patients ; en conséquence, ce mécanisme doit être revu et corrigé.
Le processus de convergence tarifaire entre les établissements publics et privés demeure la question centrale de la T2A. Sur un strict plan financier, l'assurance maladie sera le principal bénéficiaire de cette évolution, puisque, pour des activités identiques, les différences de coûts sont de l'ordre de 20 % à 30 %. Mais la question du coût des dépenses hospitalières doit être traitée dans sa globalité, en tenant compte des contraintes qui s'imposent à chacun des secteurs en matière d'emploi (convention collective ou fonction publique hospitalière), de fiscalité ou de règles d'achat (code des marchés publics).
M. Didier Guidoni a estimé que si la convergence tarifaire semble irréalisable en raison de la trop grande diversité de ces contraintes, il faut, en revanche, envisager une convergence des marges. Une telle solution suppose de reconnaître que l'activité de production en matière de santé permet de faire des bénéfices. Ces profits sont d'ailleurs indispensables pour réaliser des investissements techniques ou immobiliers. Sans ces investissements, le système hospitalier sera obsolète dans vingt ans. A activité médicale comparable, chaque secteur, public et privé, pourrait donc bénéficier d'une tarification distincte, mais d'une marge identique. Une telle solution présente l'inconvénient de limiter les économies que l'assurance maladie est en mesure d'attendre de la réforme.
Evoquant la future création des agences régionales de santé, il a regretté qu'aucun bilan de l'action des agences régionales d'hospitalisation ne soit établi préalablement. Or, ces instances ont permis de mener à bien une importante restructuration du système hospitalier, grâce notamment à l'association de l'assurance maladie à la régulation hospitalière.
Toute évolution de l'organisation du système de santé doit, à son avis, s'appuyer sur les compétences de l'assurance maladie. C'est vrai tout particulièrement dans le domaine de la gestion du risque dont la caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) s'est saisie depuis 2004 et pour lequel elle possède des acquis et un pouvoir d'initiative dont l'Etat est dépourvu.
M. François Autain s'est demandé, en matière de rémunération des médecins, s'il ne convient pas également de modifier les modalités de paiement des médecins libéraux afin de faire converger leurs revenus avec ceux des praticiens hospitaliers en les payant eux aussi forfaitairement. A l'heure actuelle, ces derniers quittent massivement le secteur public pour exercer en clinique et y percevoir des rémunérations plus importantes, notamment en facturant des dépassements d'honoraires.
Evoquant les écarts de coûts entre les différents secteurs, il s'est étonné de la diversité d'informations disponibles sur ce sujet en rappelant que l'inspection générale des affaires sociales estime que cet écart de coût peut aller jusqu'à 80 %, quand la directrice de la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins évoque un écart de 40 % et que M. Didier Guidoni estime cet écart entre 20 % et 30 %.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe a indiqué que la détermination des tarifs a une influence sur l'activité des établissements. Pour ne prendre qu'un exemple, les cliniques ferment leurs services de maternité faute de rentabilité. Seule l'équité des tarifs permettra de rétablir l'équilibre entre établissements publics et privés.
M. Bernard Cazeau a voulu connaître le détail des modalités d'organisation susceptibles de permettre à un établissement de réduire ses coûts.
M. Guy Fischer s'est demandé comment les hôpitaux publics peuvent être en mesure de dégager des bénéfices alors que ces établissements sont en déficit. Il a voulu savoir si d'autres pays appliquent une T2A à 100 %.
M. Didier Guidoni est convenu que les tarifs versés aux établissements privés pour la prise en charge d'un accouchement sont inférieurs au coût de revient de cette activité. Une telle démarche relève sans doute d'une volonté de transférer les maternités du privé vers le public. La détermination du taux de marge de chaque secteur est une décision qui relève des autorités de tutelle et dont l'objet est bien d'influencer la politique hospitalière en favorisant le développement de tel ou tel type d'activités.
Sur les questions d'organisation, il a évoqué l'accueil en chirurgie ambulatoire qui est intégralement assuré par des infirmières, y compris la partie administrative. Ce modèle peut servir d'exemple pour rationaliser l'accueil des patients dans d'autres secteurs de l'activité hospitalière, notamment les consultations, l'admission pour une hospitalisation complète soulevant d'autres problèmes. Le fonctionnement des établissements peut également être optimisé au niveau des blocs opératoires en harmonisant la présence des différents intervenants afin d'éviter une faible productivité, des horaires non respectés et le paiement d'heures supplémentaires. Des gains de productivité sont donc possibles sans réduire les effectifs hospitaliers.
Il a observé que la rémunération des médecins libéraux comporte de plus en plus d'éléments forfaitisés (rémunération des gardes, forfaits « affection de longue durée » et « santé publique ») et que cette évolution devrait s'accentuer dans les années à venir. Le développement d'une rémunération mixte dans le secteur public suivrait donc une évolution similaire et en tout état de cause le maintien d'un trop grand écart de rémunération entre public et privé constitue un frein aux regroupements d'établissements.
En conclusion, il a indiqué que les autres pays ont effectivement mis en place une T2A à 100 %, ce qui ne signifie pas que toutes les activités sont financées par l'intermédiaire des tarifs des groupes homogènes de séjours (GHS), puisque peuvent cohabiter, en sus des tarifs pour les activités de médecine, chirurgie et d'obstétrique (MCO), des financements mixtes, pour les urgences par exemple, et des forfaits pour les missions d'intérêt général.
Audition de M. Pierre-Louis BRAS, inspecteur général des affaires sociales (mardi 5 février 2008)
M. Pierre-Louis Bras, inspecteur général des affaires sociales, a rappelé que l'objet de son rapport du mois de mars 2007 était de comparer le coût global du travail entre les établissements publics et les établissements privés participant au service public hospitalier. Les résultats ont montré un surcoût de 4 % dans les structures de la fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne (Fehap) et de 14,5 % dans les établissements de lutte contre le cancer. Dans le premier cas, l'écart est entièrement imputable aux charges sociales. Dans le second, 7 % sont dus à des salaires nets plus élevés et 7,5 % aux charges sociales.
A partir de ce constat, trois solutions étaient possibles : compenser le coût global supplémentaire du travail, compenser le seul coût des charges sociales, enfin ne rien faire. La Fehap était favorable à une compensation des charges sociales. Ce n'est pas la solution retenue par le rapport, qui a proposé la compensation, à titre temporaire, de l'écart de coût global du travail.
En effet, l'objectif est de réduire ce coût grâce à la renégociation des conventions collectives. A terme, soit les salaires nets pourraient être inférieurs à ceux du public, soit une surproductivité par rapport au secteur public pourrait compenser cette charge supplémentaire. La solution retenue était la plus cohérente pour ne pas créer une demande des cliniques privées d'un surtarif destiné à compenser leurs charges sociales. En effet, dans les cliniques, les salaires nets sont généralement inférieurs à ceux du public mais les charges sociales entraînent un coût supérieur. La question de la convergence entre les secteurs public et privé est complexe. Il est donc important de ne pas se lier les mains car la priorité est la meilleure maîtrise des dépenses publiques.
M. Pierre-Louis Bras a indiqué ne pas savoir pourquoi l'inspection générale des affaires sociales (Igas) a été chargée de cette mission d'évaluation de coût comparé du travail : sans doute est-ce par manque de temps des services du ministère, l'Igas apportant par ailleurs un appui régulier à la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos).
La méthodologie utilisée dans le rapport n'a pas été pensée pour être transposée au secteur privé à but lucratif. En effet, si on souhaite comparer le coût global du travail, il faudra d'abord tenir compte de la différence très grande entre les médecins rémunérés à l'acte dans le secteur privé à but lucratif et ceux qui le sont sous forme de salaire dans les autres secteurs. La prise en compte du seul travail non médical ne permettrait pas de traiter l'ensemble du problème. Par ailleurs, l'étude de mars 2007 concernait deux secteurs très régulés soit par un statut, ce qui est le cas du secteur public, soit par une convention collective développée, ce qui est le cas des établissements privés participant au service public hospitalier. Dans le secteur privé à but lucratif, les conventions collectives applicables sont minimales et laissent jouer les conditions du marché, ce qui explique des écarts parfois très significatifs entre les établissements, en fonction notamment de la situation locale de l'emploi.
Sur les questions de précarité et d'activité non programmée, M. Pierre-Louis Bras a estimé qu'il s'agit de variables différenciant plus les établissements que les secteurs, public et privé, comme le souligne le rapport de l'Igas de janvier 2006 dont il est l'un des rédacteurs. Le raisonnement de la fédération hospitalière de France (FHF) à cet égard n'est donc pas pertinent. En matière de permanence des soins, on ne peut pas dire que l'hôpital public maintient un niveau en personnel et en moyens supérieur à sa seule activité programmée. Certes, les directeurs des hôpitaux sont amenés à calibrer des moyens un peu supérieurs lorsque les pouvoirs publics en manifestent l'exigence, par exemple pour l'application du plan Canicule. Si c'est le cas, les charges supplémentaires liées à ces exigences doivent être compensées mais seulement en fonction des circonstances.
Les études conduites en 2006 n'ont pas fourni d'éléments très convaincants sur les écarts de coûts liés à ces différents facteurs pouvant justifier l'instauration d'un surtarif.
M. Pierre-Louis Bras a estimé inévitable d'orienter la convergence vers les tarifs les plus efficients. La logique inscrite dans le rapport de l'Igas est la suivante : si les tarifs du secteur privé sont les plus efficients, on doit converger vers ces tarifs qui deviennent alors directeurs. Néanmoins, étant donné l'ampleur des écarts, cette convergence devra se faire sur la durée. La situation actuelle montre en effet que même sans cette obligation de convergence, nombre d'hôpitaux publics ont des difficultés à parvenir à l'équilibre.
Pour ce qui est du secteur privé, l'idée est qu'il puisse bénéficier d'une rentabilité minimale, de l'ordre de 5,5 % (correspondant au rendement des emprunts d'Etat auquel s'ajoute une prime de risque de 1,5 %), mais qu'il ne doit pas y avoir de constitution de rente de situation. Les données de 2005 pour le secteur privé sont effectivement très élevées (près de 16 % en moyenne) mais les taux de rentabilité ont diminué depuis et ils étaient également plus faibles au début des années 2000. Toutefois, l'absence de données précises actualisées - le décalage est en effet de trois ans entre la date à laquelle ces données se rattachent et la date où elles sont connues - rend difficile le pilotage des tarifs du privé.
Par ailleurs, il est important de clarifier la notion de missions d'intérêt général car celles ci doivent à la fois financer toutes les activités dites d'intérêt général, mais seulement celles-ci.
M. Pierre-Louis Bras a rappelé que le rôle de l'Etat en matière hospitalière incombe à la fois au Parlement, aux ministres, aux directions d'administration centrale et aux agences régionales de l'hospitalisation (ARH). L'assurance maladie, de son côté, connaît plusieurs régimes et plusieurs caisses. Pour faire évoluer la répartition des rôles entre ces différents acteurs, il lui paraît préférable de désigner des acteurs concrets plutôt que des principes. Aujourd'hui, la politique hospitalière est largement conduite sous l'autorité du ministre et il paraît difficile de déléguer son pouvoir de décision. Le ministre répond en tout état de cause de ses choix devant le Parlement et devant les citoyens. Au niveau régional, le système actuel est éclaté, avec des ARH qui doivent mobiliser de nombreux services de l'Etat et les compétences de l'assurance maladie pour exercer leur mission. Ce système n'est pas satisfaisant et, dans ce cadre, le projet de création des agences régionales de santé (ARS) a du sens. Il permettra de rassembler en une même équipe intégrée tous ceux qui travaillent autour de l'hôpital. Ainsi, la répartition pourrait être entre l'Etat, au niveau national pour la régulation et la planification de la politique hospitalière, et l'intégration de toutes les compétences au niveau local, au sein des ARS.
M. François Autain a relevé que dans le rapport de l'Igas de janvier 2006, il est indiqué que la Dhos ne disposait pas des outils nécessaires à la préparation de la convergence. Cette appréciation reste-t-elle valable aujourd'hui ? Il s'est également interrogé sur le lien entre la mise en oeuvre de la T2A dans les cliniques privées et le bond de 7 % observé dans la rentabilité de ces établissements entre 2004 et 2005 pour un taux de rentabilité moyenne en 2005 de 16 %. Enfin, il a constaté que la rémunération des médecins est prise en compte de façon différente entre le secteur public et les cliniques privées puisque, pour ces dernières, les honoraires des médecins sont comptabilisés en soins de ville alors que les salaires des médecins hospitaliers entrent dans l'enveloppe hospitalière. La Cour des comptes a notamment souligné ces contradictions internes à l'Ondam. Il serait donc sans doute judicieux de réintégrer la rémunération des médecins des cliniques privées dans l'enveloppe hospitalière. Cela permettrait un meilleur respect des objectifs fixés.
M. Pierre-Louis Bras a fait valoir que, conformément à l'engagement du ministre et aux termes de la loi de financement de la sécurité sociale, les parlementaires disposeront des données complémentaires sur les coûts le 15 octobre prochain. Par ailleurs, le ratio de rentabilité des cliniques privées est très volatile et extrêmement sensible aux évolutions. Si ce taux a progressé très vite avec la mise en place de la T2A, cela résulte à la fois d'un accroissement de l'activité des cliniques et d'une optimisation des groupes homogènes de séjour (GHS). Il est donc impératif de se donner les moyens de mieux suivre et de mieux contrôler les activités hospitalières. Le résultat de 2005 est sans doute un sommet puisque l'activité des cliniques a, semble-t-il, moins progressé en 2006 et 2007.
Il a reconnu que le mode de rémunération des médecins est un problème pour la mise en place de la convergence entre le public et le privé. Il s'agit en fait d'un problème politique car il touche au mode de régulation de la médecine libérale. Cela constitue néanmoins un des éléments qui devra être résolu pour appliquer la convergence.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir comment la question de la convergence des tarifs des médecins a été résolue dans les autres pays européens.
M. Pierre-Louis Bras a indiqué qu'il n'y a pas de pays où existe, comme en France, un double secteur.
M. Alain Vasselle, président, a voulu savoir si, au-delà des écarts de coûts entre le public et le privé justifiés par des différences d'activité, on constate une différence de productivité entre les deux secteurs.
M. Pierre-Louis Bras a considéré qu'une fois toutes les données différentielles objectivées, on constaterait sans doute un résidu d'écart lié à l'efficience et, en particulier, à l'intensité du travail et à l'organisation des équipes, différentes entre les secteurs privé et public.
Audition de M. Jean-Louis BONNET, directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation de Rhône-Alpes, président de la conférence des directeurs d'ARH (mardi 1er avril 2008)
M. Jean-Louis Bonnet, directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation de Rhône-Alpes, a d'abord estimé qu'on pouvait porter un bilan circonstancié sur l'activité des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) depuis leur création, grâce aux rapports réguliers de la Cour des comptes ou à ceux de l'inspection générale des affaires sociales (Igas), comme par exemple un récent rapport consacré à l'efficience des établissements de santé. Cela dit, il est important de souligner que les missions des ARH ont considérablement évolué depuis leur création. A l'origine, le principal sujet de préoccupation était la recomposition du paysage hospitalier ; aujourd'hui, avec la réforme de la tarification et le passage à la tarification à l'activité (T2A), le rôle des agences s'est sensiblement modifié avec notamment une diminution de leur marge d'intervention financière. Le passage de la T2A à 100 % permettra de connaître immédiatement les variations d'activité positives ou négatives, un peu à l'image de ce qui existait avant le régime des dotations globales avec le système des prix de journée. Il n'y a plus de reprise automatique des excédents ou des déficits, ni de mécanismes de lissage des flux financiers.
Par ailleurs, les ARH portent un intérêt de plus en plus grand à l'organisation, à l'efficience et à la qualité des soins. Cette préoccupation est nouvelle car auparavant l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) avait un rôle majeur en matière de qualité des soins. Néanmoins, les ARH ont un pouvoir qui se heurte assez vite au principe d'autonomie des établissements. Leurs outils sont globaux, leur contrôle porte sur les moyens financiers ou les décisions d'autorisation mais elles n'ont jamais la possibilité de se substituer à l'établissement dans le processus décisionnel. A cet égard, le dispositif récemment créé d'administration provisoire constitue certes un nouvel outil pour les ARH mais en aucun cas un mode de gestion habituel.
La question de l'efficience est au coeur du débat actuel sur la convergence des coûts mais il s'agit d'un sujet complexe. Un récent rapport de l'Igas a d'ailleurs fait le constat qu'il n'y a pas d'analyse simple et limpide possible sur les écarts de coût et leur justification. Une partie de ces écarts réside néanmoins certainement dans l'organisation même des établissements et dans l'exigence de la permanence des soins, notamment pour les établissements ayant une activité très modeste. Il est impératif de rationnaliser les astreintes que l'on trouve parfois en double ou en triple sur certains territoires. Il va falloir également réfléchir à l'association du secteur privé à la redéfinition des astreintes. Toutefois, l'un des sujets qui bloque pour avancer sur cette question est le problème de l'accès aux soins entre le secteur 1 et le secteur 2. Des exemples témoignent néanmoins que de telles évolutions sont possibles. Ainsi, à Cognac, un hôpital et une clinique disposaient chacun de services de chirurgie complets, surdimensionnés par rapport aux besoins. On est parvenu à réformer ces deux services grâce à un partage des activités et au développement d'une bonne coopération entre les deux établissements. En outre, il a été décidé d'appliquer les honoraires du secteur 1 à tous les patients passés par les urgences de l'un ou l'autre de ces établissements. Dans la plupart des cas, cela n'a pas posé de problème sauf dans certaines circonstances particulières, notamment lorsque la nécessité de l'intervention chirurgicale a été établie par un médecin généraliste plutôt que dans le service d'urgences.
De telles réformes sont possibles dans les villes moyennes ; en revanche, elles sont plus complexes à mener dans les très grandes villes où existe un clivage très net entre ceux qui assurent la permanence des soins et ceux qui n'y participent pas. Les centres hospitaliers universitaires (CHU) sont de gros établissements très lourds dans lesquels il est difficile de « décortiquer » tous les éléments du prix de l'activité quotidienne. Il serait sans doute souhaitable de leur donner un rôle de recours ou de référent pour les cas jugés à risque. Cela signifierait par exemple de ne plus pouvoir pratiquer un accouchement de niveau 1 dans une maternité de niveau 3.
M. Jean-Louis Bonnet a indiqué que la conférence des directeurs d'ARH partage en grande partie les analyses faites par le rapport de l'Igas sur le retour à l'équilibre financier des hôpitaux. Néanmoins, il faut souligner que les contrats de retour à l'équilibre ont été engagés dans un contexte où les hôpitaux disposaient encore de dotations globales. Le changement de système de tarification fera que, très vite, les projections effectuées ne seront plus pertinentes.
Ainsi, les établissements dont l'activité augmente disposeront des mêmes moyens ; en revanche, si leur activité reste stable ou diminue, ils n'auront plus les mêmes disponibilités financières. Cela signifie que si la croissance retenue est de 1,7 %, on constate en réalité une diminution de 3,7 % des moyens. La baisse d'activité et la baisse des tarifs sont des phénomènes cumulatifs pour les établissements. Si on prend l'exemple de la région Rhône-Alpes qui représente environ 10 % des établissements de santé français, on constatait, au 31 décembre 2006, un équilibre entre les établissements déficitaires et les établissements excédentaires. A la fin de l'année 2007, la situation se détériore, notamment du fait des gros établissements, c'est-à-dire des trois CHU qui couvrent 40 % de l'activité hospitalière de la région et qui ont connu une activité inférieure à ce qui était prévu.
Pour permettre un retour à l'équilibre des établissements, les marges de manoeuvre des ARH sont très faibles car elles ne peuvent intervenir ni sur les activités financées par la T2A, ni sur les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac), mais seulement sur les aides contractuelles. L'idée serait de clarifier et de hiérarchiser les aides prévues dans le cadre du plan hôpital 2012 et de leur redonner un caractère non pérenne.
M. Jean-Louis Bonnet a considéré que la T2A est indéniablement un élément moteur pour inciter les établissements de santé à améliorer leur organisation et leur gestion, mais cela nécessite au préalable un changement de culture dans les établissements. L'Igas a elle-même dénoncé la « culture du déficit » trop souvent rencontrée à l'hôpital public. De ce point de vue, la tarification à l'activité est souvent un révélateur de la lourdeur des procédures et de la désorganisation dans les établissements. En témoignent les travaux lancés par la mission nationale d'expertise et d'audit hospitaliers (MeaH) sur les blocs opératoires dont les conclusions sont très intéressantes. L'une des difficultés récemment rencontrée a été la projection d'activité particulièrement optimiste effectuée par les établissements. Or, certains projets n'ont pas été retenus et on semble avoir atteint les limites de l'optimisation du codage des actes.
M. Bernard Cazeau, président, a souhaité savoir quelles sont les pistes à privilégier pour améliorer l'efficacité des établissements de santé.
M. Jean-Louis Bonnet a indiqué que la première priorité est la réorganisation interne des établissements, la seconde, la refonte de la permanence des soins et des astreintes.
M. François Autain a souligné que la T2A permet un développement de la concurrence entre les établissements.
M. Jean-Louis Bonnet a fait valoir que la principale difficulté est d'associer la logique de la T2A aux besoins de la population sur un territoire donné, ce qui milite, par exemple, en faveur du financement des gardes en dehors de la T2A. Il faudrait que participent aux missions de service public non seulement les établissements publics et les établissements privés à but non lucratif mais également les établissements à but lucratif, grâce à des concessions de service public ou à des associations au service public par la voie de signature de conventions. Le rapport Larcher fournira de nouvelles pistes pour le mode de gouvernance du système hospitalier.
Il s'est déclaré sceptique sur la possibilité de définir un cadre pluriannuel en raison de la difficulté de garantir un niveau d'activité ou de tarif sur plusieurs années. Il a rappelé que 70 % à 75 % des dépenses de l'hôpital sont des dépenses de personnel auxquelles s'ajoutent entre 12 % et 15 % de dépenses à caractère médical. Il est donc difficile de trouver des marges de manoeuvre, à moins de poser la question de la sanctuarisation des dépenses de personnel. On a commencé à le faire sur les dépenses de personnel affecté aux activités de logistique mais ce n'est pas là que se trouve l'essentiel de la question.
M. Jean-Louis Bonnet a estimé que la définition d'objectifs quantifiés d'activité est un moyen d'équilibrer la logique de la T2A. Toutefois, pour être crédibles, ces objectifs quantifiés ne doivent pas l'être seulement en volume mais aussi en termes d'implantations. Il faut prendre en compte les besoins sur l'ensemble des territoires et non uniquement dans les grands établissements.
Il a ensuite estimé indispensable que les futures agences régionales de santé (ARS) détiennent des compétences en matière médicosociale. En effet, un établissement hospitalier qui fermera devra être remplacé par des établissements effectuant des soins de suite ou ayant une vocation médicosociale, notamment en faveur des personnes âgées et, pourquoi pas aussi des personnes handicapées. Il paraît indispensable d'associer le triptyque soins de ville, milieu hospitalier et secteur médicosocial.
M. Bernard Cazeau, président, a souhaité savoir quel pourrait être le mode de fonctionnement des ARS et la définition, en leur sein, des rôles respectifs de l'Etat et de l'assurance maladie.
M. Jean-Louis Bonnet a rappelé la difficulté qu'il y avait eu à faire travailler ensemble les médecins conseils de l'assurance maladie et les médecins de santé publique. La réunion de ces compétences complémentaires est aujourd'hui une réussite mais il faudra résoudre la difficulté juridique de la mise à disposition de services au profit des ARH.
M. François Autain a relevé qu'effectivement, il existe une contradiction entre la logique des objectifs quantifiés et celle de la T2A. Mais il a souhaité savoir en quoi la proposition d'objectifs d'implantation est à même de résoudre cette contradiction. Ne faudrait-il pas mettre en place une sorte de T2A flottante en fonction du nombre d'actes effectués ?
M. Jean-Louis Bonnet a estimé indispensable d'intervenir sur les volumes d'activité. Une voie complémentaire à explorer consisterait à aller plus loin dans la définition des types d'activité et dans l'organisation des établissements.
M. François Autain a demandé des détails sur les divergences constatées dans les modes de rémunération entre les secteurs public et privé.
M. Jean-Louis Bonnet a indiqué que ces différences sont très variables selon les disciplines. L'exemple le plus flagrant est celui de la radiologie où les tarifs sont multipliés par trois ou quatre dès que l'on change de secteur.
M. Louis Souvet a souligné le très grand attachement des élus à leurs hôpitaux et cliniques. Il a évoqué la fusion, en 2000, des hôpitaux de Belfort et de Montbéliard et la création d'un site médian prévue dans le plan hôpital 2012 alors que chacun des établissements actuels connaît des déficits importants, de l'ordre de 12 millions d'euros par an. Il s'est élevé contre le principe du regroupement des hôpitaux publics avec les cliniques et du développement d'une complémentarité des équipements et des soins entre eux.
Audition de M. Robert HOLCMAN, directeur d'hôpital, chargé de mission au sein de la chaire « Economie et gestion des services de santé » du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) (mardi 1er avril 2008)
M. Robert Holcman, directeur d'hôpital, chargé de mission au sein de la chaire « Economie et gestion des services de santé » du Conservatoire national des arts et métiers, a indiqué que l'ouvrage qu'il vient de publier, intitulé « la fin de l'hôpital public » a pour objet de montrer que les établissements publics de santé sont en péril parce que, d'une part, les réformes dont ils font actuellement l'objet sont d'une ampleur sans précédent (tarification à l'activité, nouvelle gouvernance hospitalière, réforme des règles budgétaires et comptables), d'autre part, parce qu'elles sont fondées sur un diagnostic erroné de la situation.
En effet, ces réformes ont pour effet de transférer au niveau local la résolution des difficultés financières rencontrées au niveau national. Or, si au niveau national la France est l'un des pays de l'OCDE qui consent le plus grand effort financier en faveur de l'hôpital, sur le terrain les établissements doivent gérer des situations de pénurie. La décentralisation des problèmes financiers constitue donc une erreur d'appréciation.
Il a estimé que plutôt que de demander à chaque établissement d'optimiser ses dépenses, les autorités de tutelle doivent définir, au niveau national, les voies et moyens à employer pour parvenir à une optimisation des dépenses.
M. Robert Holcman a estimé qu'en l'état les marges d'économies disponibles ne sont pas à la hauteur des montants attendus. En effet, le budget d'un établissement est absorbé à plus de 70 % par les dépenses de personnel, 10 % à 15 % sont consacrés à la prise en charge des activités médicales, une proportion identique aux dépenses dites d'hôtellerie et 3 % à 5 % sont affectés au paiement des frais financiers. Cette répartition des charges est logique puisque l'activité de soins nécessite la présence d'un personnel important et disponible.
Or, il est difficile de faire porter les économies sur des personnels dont les carrières sont régies par les règles de la fonction publique hospitalière. De plus, l'évolution de la masse salariale est indépendante des décisions relatives aux soins et les mutations de personnel vers un autre établissement s'avèrent complexes. La seule variable d'ajustement à la disposition des directeurs d'établissement réside dans la possibilité de ne pas remplacer tous les agents partant à la retraite. Le recours à cette politique peut d'autant plus être envisagé que, d'ici à 2015, la moitié des effectifs de la fonction hospitalière sera concernée.
La gestion des ressources humaines étant contrainte, les établissements se retrouvent dans cette situation paradoxale où la seule variable d'ajustement réside dans la qualité des soins. Le coeur de l'activité des établissements constitue donc le premier poste d'arbitrage financier. La pression budgétaire peut ainsi se traduire par une baisse de la qualité des soins.
Cette situation est regrettable car il est possible de dégager des économies en réorganisant les fonctions logistiques (blanchisserie, restauration) assurées à l'intérieur des établissements. La liste des 183 métiers de la fonction publique hospitalière établie par le ministère de la santé fait apparaître trente fonctions soignantes et dix administratives, les 143 autres ne relevant pas des missions spécifiques de l'hôpital, comme les pâtissiers, les réparateurs automobiles ou les vidéastes. Un rapport récent de la Cour des comptes a d'ailleurs souligné que les hôpitaux emploient 87 000 agents au sein de leurs services techniques et seulement 35 000 pour les activités médicotechniques (pharmacies, laboratoires d'analyses et imagerie médicale).
M. Robert Holcman a estimé que la gestion des ressources humaines doit devenir un sujet central pour répondre aux contraintes financières qui pèsent sur les établissements publics.
M. François Autain a souligné que les établissements publics doivent également faire face à la concurrence de l'hospitalisation privée.
M. Robert Holcman a précisé que le titre de son ouvrage évoque plus la fin d'un certain esprit qu'une évolution structurelle.
Il a insisté sur la nécessité de garantir les missions de service public d'autant que certaines régions ne disposent plus d'une offre de soins publics dans certaines spécialités.
Il a observé que le secteur privé peut techniquement prendre en charge toutes les activités, mais l'exemple du médicosocial, assuré à 98 % par le secteur public, montre que des choix stratégiques sont faits par les opérateurs privés en direction des activités les plus rémunératrices ou les plus aisées à optimiser. Pour illustrer sa démonstration, il a comparé cette stratégie avec celle développée par les centres automobiles spécialisés par rapport aux garages de mécanique générale. Dans l'activité de soins, comme dans l'automobile, la standardisation des activités permet des gains de productivité importants.
M. François Autain a voulu savoir si toutes les activités de soins sont rentables et si un tel comportement ne soulève pas des problèmes éthiques.
M. Robert Holcman a souligné que certaines activités ne sont pas rentables au regard de la T2A, ce qui ne manque pas de susciter des interrogations sur la façon dont les autorités de tutelle peuvent inciter les hôpitaux à poursuivre ces activités.
M. Bernard Cazeau, président, s'est interrogé sur la rentabilité des activités de recherche et d'enseignement.
M. Robert Holcman a estimé que les enveloppes financières destinées à la rémunération des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) et des missions enseignement, recherche, référence, innovation (Merri) prennent correctement en charge ces activités. Toutefois des problèmes perdurent sur la prise en charge de certaines activités comme la participation des établissements de santé à la mise au point des médicaments, activité pour laquelle les établissements publics sont sollicités et qui entraîne des surcoûts en matériel et en personnel. Ces difficultés viennent s'ajouter à celles provoquées par la mise en concurrence avec le privé.
M. François Autain a voulu savoir si la T2A est adaptée à la facturation des soins dispensés par les établissements de santé.
M. Robert Holcman a indiqué qu'il convient de distinguer les activités entre, d'une part, celles qui peuvent être standardisées et pour lesquelles une mise en concurrence du public et du privé est concevable, d'autre part, les pathologies plus lourdes qui sont quasi exclusivement prises en charge par le service public. Pour ces catégories, on peut imaginer leur retrait de la liste des groupes homogènes de séjour (GHS) et une rémunération au forfait.
Le développement d'une politique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences doit constituer l'un des axes majeurs de la réforme du service public hospitalier. Aujourd'hui, les autorités de tutelle n'ont pas une connaissance suffisamment fine de l'emploi hospitalier. Les directeurs ne sont pas incités à développer une politique de non-remplacement des personnels partis à la retraite notamment chez les personnels non-soignants. Une telle décision, prise uniquement au niveau local, les expose à des mouvements sociaux face auxquels ils ne reçoivent pas le soutien de leur tutelle, cela pouvant même pénaliser leur carrière. Les directeurs d'établissements ont donc tout à perdre en menant seuls une politique de réduction des effectifs. Aujourd'hui, un hôpital n'arrive à réduire ses effectifs que dans le cadre d'un contrat de retour à l'équilibre conclu avec son agence régionale d'hospitalisation, c'est-à-dire lorsque le directeur est soutenu par sa tutelle. Les autorités sanitaires doivent donc développer un pilotage centralisé de la gestion des ressources humaines afin d'apporter un soutien technique et politique aux directeurs d'établissements, notamment dans les opérations d'externalisation de certaines fonctions (restauration, blanchisserie). Une telle mutation suppose la création d'un fonds de soutien afin de gérer la période transitoire durant laquelle le personnel statutaire sera toujours employé par l'hôpital malgré le recours à un prestataire extérieur pour assurer certaines fonctions logistiques.
Les marges d'efficacité sont à rechercher auprès des personnels qui ne relèvent pas du soin, notamment auprès des personnels techniques car, contrairement à une idée reçue, les personnels administratifs sont en nombre insuffisant.
M. Bernard Cazeau, président, a demandé à l'orateur de préciser sa vision de la réorganisation des services techniques.
M. Robert Holcman a estimé que les établissements doivent disposer d'une équipe technique polyvalente afin d'assurer les interventions les plus urgentes. Dans un centre hospitalier universitaire de 2 000 lits, l'effectif de cette équipe ne saurait dépasser vingt personnes.
M. Bernard Cazeau, président, a fait état de certaines analyses qui mettent en avant le manque de productivité des blocs opératoires des hôpitaux publics.
M. Robert Holcman a estimé qu'à l'intérieur d'un établissement, il est toujours possible d'améliorer la productivité d'un bloc opératoire. Mais les économies ne doivent pas être recherchées sur les activités de soins avant d'avoir rationalisé tous les autres secteurs d'activités.
Il a indiqué que la mise en oeuvre de la T2A incite les personnels soignants à solliciter des audits pour améliorer leur efficacité.
M. Jean-Claude Etienne a rappelé que la France est, en proportion, le pays du monde qui consacre le plus d'argent au secteur hospitalier mais ce n'est pas pour autant que la santé des Français est meilleure que celle de leurs voisins.
Il a estimé que la rationalisation des dépenses hospitalières doit d'abord être conduite dans les domaines techniques et administratifs. Il a voulu connaître plus précisément les effectifs des personnels administratifs employés dans les établissements publics.
M. Robert Holcman a indiqué que le personnel soignant constitue 80 % de l'effectif de la fonction publique hospitalière. Les personnels administratifs sont au nombre de 59 000.
Il a estimé que le statut de la fonction publique, les contraintes liées aux règles des marchés publics ou de la comptabilité publique ne constituent pas des handicaps majeurs pour l'hospitalisation publique. Le défaut de celle-ci tient au trop grand nombre d'établissements et à l'éparpillement des ressources qui en résulte. A titre d'exemple, malgré l'écart de population entre les deux pays, les effectifs de la fonction publique hospitalière française et allemande sont équivalents, mais le ratio personnel/malades est moins important en France qu'en Allemagne. Cela signifie que la France compte trop d'établissements de soins aigus. Il faut rappeler qu'un rapport remis, en 2006, à Xavier Bertrand, alors ministre chargé de la santé, a recommandé la fermeture de 113 blocs chirurgicaux pour des raisons de sécurité.
Compte tenu du vieillissement de la population, certaines structures de soins aigus, notamment les hôpitaux locaux, doivent être transformées en établissements de soins de suite et de réadaptation ou en établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes. Cette mutation ne pénalisera pas les communes ni les populations qui conserveront une structure de soins de proximité.
En conclusion, il a considéré que la création des agences régionales de santé peut contribuer à la rationalisation des dépenses hospitalières.
Audition de MM. Christophe LANNELONGUE, inspecteur général, et Hervé LÉOST, inspecteur à l'inspection générale des affaires sociales (Igas), et Mme Catherine DARDÉ et M. Bernard BONNICI, conseillers généraux des établissements de santé (mardi 6 mai 2008)
M. Christophe Lannelongue, inspecteur général à l'Igas, a indiqué les conditions dans lesquelles a été choisi l'échantillon d'établissements étudiés par le rapport de l'Igas sur le contrôle des mesures prises dans le cadre du contrat de retour à l'équilibre financier (Cref) par les hôpitaux « perdants » à la tarification à l'activité (T2A). Trois régions ont été retenues : l'Ile-de-France et la Lorraine, où de gros déficits dans un grand nombre d'établissements ont été constatés, et le Midi-Pyrénées, où on observe peu de déficits dans un petit nombre d'établissements. Par ailleurs, les centres hospitaliers universitaires (CHU) de Lille et de Rouen ont été ajoutés à l'échantillon en raison de leur taille très comparable à celle des CHU de Nancy et de Toulouse. Au total, dix-neuf établissements de toute taille, dont cinq CHU, font l'objet de l'étude. Dans chacun de ces établissements la production de soins tarifés à la T2A est apparue déficitaire, ce qui signifie que les dépenses relatives aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) y sont supérieures aux recettes procurées par la tarification à l'activité. Les constats effectués sur ces dix-neuf établissements sont très homogènes, ce qui permet d'extrapoler les conclusions du rapport aux mille établissements de santé français. En effet, les situations de déficit rencontrées résultent dans tous les cas d'une mauvaise performance médico-économique, c'est-à-dire d'une mauvaise efficience dans la production de soins, soit en raison d'une sous activité, soit du fait de coûts de production excessifs, ces derniers étant liés à une mauvaise organisation, à un mauvais management ou à une difficulté à faire évoluer les ressources, notamment médicales. Dans presque tous les établissements examinés, le contexte local est celui d'un fort développement du secteur privé et, face à cette situation, d'une impossibilité de l'hôpital public à s'adapter en termes d'offre de soins et d'efficience.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir si l'échantillon d'établissements retenu peut être considéré comme représentatif.
M. Christophe Lannelongue a estimé que les résultats des établissements de santé pour 2007 confortent pleinement les conclusions du rapport qui envisageait déjà, quelques mois plus tôt, une accentuation des déficits. Cela signifie que l'échantillon retenu est tout à fait représentatif. L'augmentation des déficits est liée à un effet de ciseaux avec, d'une part, la stagnation, voire la baisse, de l'activité, d'autre part, une progression des charges, notamment de la masse salariale, comprise entre 2 % et 4 % par an. Ces déficits ne sont donc pas liés à des effets exogènes mais essentiellement à des facteurs endogènes.
M. Bernard Cazeau a souhaité obtenir des précisions sur la situation particulière du CHU de Toulouse.
M. Christophe Lannelongue a rappelé que cet établissement a disposé de subventions exceptionnelles très importantes à partir de 2004, sans pour autant signer de contrat de retour à l'équilibre. La situation déficitaire de cet établissement n'est en fait qu'un habillage car elle masque l'existence de réserves très considérables. En effet, pour permettre la mise en oeuvre d'un programme d'investissement et de restructuration du CHU sur deux sites, d'environ 500 millions d'euros, des « manipulations comptables » ont été effectuées d'ailleurs en toute légalité et les durées d'amortissement ont été modifiées afin d'accumuler les réserves nécessaires. Ainsi, les comptes de cet hôpital ne peuvent être considérés comme fiables, ce qui est d'ailleurs le cas de nombreux comptes d'hôpitaux publics. Toutefois, dans la plupart des cas, la situation est inverse : on masque les déficits en n'inscrivant pas les provisions ou les dotations aux amortissements, ce qui constitue une réelle menace pour la politique d'investissement des hôpitaux concernés et donc pour l'évolution même des établissements publics de santé.
M. François Autain a souligné l'importance du besoin de financement actuel des hôpitaux publics. En effet, la progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) hospitalier ne permet pas d'accorder les moyens nécessaires au retour à l'équilibre, ce qui risque d'entraîner une accumulation des déficits et de susciter des licenciements de personnel. Il s'est interrogé sur l'analyse selon laquelle cette situation ne serait due qu'à des facteurs endogènes. Il paraît en effet difficile d'ignorer le problème de la tarification des activités non programmées et celui de la prise en compte d'un grand nombre de missions accomplies par l'hôpital et non facturées.
M. Hervé Léost, inspecteur à l'Igas, a considéré que les déficits des hôpitaux sont essentiellement dus à la faible productivité des effectifs, ce qui est bien un facteur endogène. En effet, la mission a souvent constaté un maintien du nombre des personnels médicaux malgré une activité en décroissance. Le discours selon lequel le déficit est lié à un sous-financement de l'hôpital ou la dénonciation de sous-effectifs dans les établissements de santé doit être contesté car, à l'inverse, on constate, le plus souvent, des sureffectifs.
M. Christophe Lannelongue est revenu sur les causes exogènes fréquemment avancées pour expliquer les déficits. La première est celle de l'insuffisance alléguée de la tarification des pathologies lourdes. Or, les tarifs appliqués sont le reflet des productivités moyennes des établissements publics car ces pathologies sont très rarement présentes dans les établissements privés. Les tarifs ne sont donc pas inférieurs aux coûts mais liés aux coûts de production moyens des établissements concernés. La deuxième cause concerne les durées de séjour, généralement plus longues dans le secteur public. Ici encore, il s'agit avant tout d'un problème d'organisation, notamment des filières aval, en particulier celles des soins de suite et de réadaptation (SSR) souvent mal utilisées. Enfin, de nombreux CHU revendiquent des insuffisances de financement pour les activités d'intérêt général. Or, les dotations des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) ont été définies sur la base des propositions des hôpitaux eux-mêmes. Ces derniers les ont parfois, il est vrai, mal évaluées. La dotation Migac est une enveloppe nationale fermée dont la répartition se fait en fonction des « meilleurs » besoins, ce qui suppose de s'interroger sur les missions inutiles ou peu, voire pas, efficientes. Par exemple, à Nancy, la mission a constaté trop de lignes d'urgence et une grande difficulté à les remettre en cause. La faiblesse de la gestion actuelle des Migac est qu'elle se fait en dehors de la notion de coûts de production objectivés et normalisés. Au total, le discours sur les causes exogènes du déficit des hôpitaux publics est donc peu fondé et insuffisamment documenté. En revanche, la démonstration a été clairement faite de l'existence de sous-activités flagrantes et de coûts de production excessifs. Les évolutions sont encore trop lentes, par exemple en ce qui concerne le développement de l'hospitalisation de court séjour ou de la chirurgie ambulatoire.
Le rapport a ainsi fait le constat de l'ampleur extrêmement grave des difficultés endogènes à l'hôpital. De nombreux exemples peuvent être cités comme celui du service de chirurgie viscérale d'un hôpital public, où trois chirurgiens sont employés pour réaliser un nombre d'interventions inférieur à celui du seul chirurgien de la clinique privée voisine. Aucune conséquence n'a donc été réellement tirée de la dégradation de la situation financière des hôpitaux et, en particulier, il n'y a eu ni redéploiement des ressources ni restructuration des activités. Le système actuel bloque les initiatives, les inerties apparaissant à tous les niveaux de décision, depuis la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) jusqu'aux médecins présents dans les hôpitaux.
M. Hervé Léost a ensuite fait état de la faible ambition des mesures prévues en matière d'effectif dans le cadre des Cref. Les Cref analysés par le rapport ont été lancés en 2004 avec un retour à l'équilibre prévu sur trois ou quatre ans. Or, le contenu des contrats est très décevant car il comporte peu de mesures d'économies et est avant tout fondé sur une augmentation des recettes grâce au développement de l'activité dans un contexte de mise en place progressive de la T2A. Un tiers des contrats ne prévoit d'ailleurs même pas de retour à l'équilibre. Les économies envisagées concernent en outre très rarement le personnel mais s'appliquent surtout aux fonctions logistiques, notamment aux achats et à la restauration. Or, la mission a constaté de nombreux problèmes d'effectifs, voire de sureffectifs, dans les hôpitaux analysés. Les raisons de cette situation tiennent, d'une part, à la position en retrait des agences régionales de l'hospitalisation (ARH), qui ont très souvent simplement avalisé les plans préparés en interne par les établissements ou même consenti à des subventions sans signer de contrat ; d'autre part, très peu d'aides ont été mises en place pour permettre la reconversion des sites et des personnels ; enfin, les chefs d'établissement se sont souvent trouvés démunis face à la communauté médicale et aux syndicats, ainsi qu'au conseil d'administration dont le président a fréquemment freiné les mesures de gestion du personnel. Ainsi, les établissements ont certes été peu ambitieux dans leur plan de retour à l'équilibre en matière d'effectifs, mais ils ont été peu aidés par les ARH et par le niveau central.
Mme Catherine Dardé, conseiller général des établissements de santé, a rappelé que la confusion a pu naître du fait que le message associé aux premiers Cref était celui d'un développement de l'activité car ces contrats ont été mis en place en même temps que la T2A. Ce message était clairement insuffisant car il aurait fallu l'accompagner d'un souci prioritaire d'efficience.
M. Alain Vasselle, président, a voulu savoir si la mission avait entendu des objections recevables pour expliquer les insuffisances relevées dans le contenu et la mise en oeuvre de ces contrats.
M. Christophe Lannelongue a estimé que la situation analysée est le reflet des faiblesses du pilotage par les ARH et le niveau national, ainsi que de l'insuffisance du management des établissements, qui se trouve en position de faiblesse face à la communauté médicale et au conseil d'administration. La nouvelle gouvernance, qui commence à être mise en place, et la constitution de pôles doivent permettre des gains en termes de performances de gestion, mais ceux-ci ne sont pas encore apparus. D'une façon générale, les outils de gestion des établissements de santé publics sont très insuffisants et ne permettent pas d'identifier les sources de gains ou de pertes. En outre, la mise en place d'une véritable comptabilité analytique se fait avec un très grand retard. Des progrès ont certes été récemment enregistrés grâce aux actions de la mission nationale d'expertise et d'audit hospitaliers (MeaH) qui a établi des comptes de résultats par pôle et surtout une grille TCCM (tableau coût case mix) permettant des comparaisons entre l'échelle nationale des coûts normés et les coûts réels de l'hôpital. L'objectif doit être de pouvoir repérer les écarts par rapport aux performances moyennes médico-économiques des établissements de santé. Un autre indicateur utile est celui de la durée moyenne de séjour qui apparaît dans le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI). Mais ces outils développés par la MeaH ne sont pas encore mis en oeuvre dans la majorité des établissements, ce qui explique la fragilité des moyens de gestion actuellement à la disposition des équipes de direction.
M. Christophe Lannelongue a estimé que la faiblesse du pilotage du système relève avant tout du manque de suivi des différentes circulaires ou directives établies à l'intention des hôpitaux. Ainsi, il n'y a pas de centralisation du suivi à la Dhos ni de système de relation entre le niveau national et les ARH. Par exemple, il est apparu dans l'étude que l'ARH de Midi-Pyrénées n'avait pas d'objectif quantifié à respecter en termes de retour à l'équilibre des établissements de la région. L'absence d'objectifs chiffrés précis et de dispositifs d'incitation-sanction sont des lacunes importantes.
Par ailleurs, les outils nécessaires aux reconversions sont excessivement centralisés, ce qui est le cas, par exemple, des décisions d'emploi des crédits du fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP). Les ARH ne sont pas en situation d'être soutenues et accompagnées par la MeaH. De même, trop de décisions d'investissements importantes ont été engagées dans le cadre du plan Hôpital 2007 sans lien véritable avec l'augmentation de l'efficience des établissements concernés. Par exemple, un établissement du sud francilien a obtenu des investissements pour augmenter son activité de 20 % alors que celle-ci a diminué. D'une manière générale, on constate un manque de compétences des personnels des ARH face aux équipes de direction des CHU, surtout lorsque celles-ci ont été renforcées. A l'ARH de Lorraine, deux personnes qui ne sont pas issues du milieu hospitalier ont la responsabilité du suivi de trente Cref et de l'ensemble des équilibres financiers des établissements de la région, ce qui est insuffisant. Cela explique que le contrat conclu entre cette agence et le CHU de Nancy reprenne intégralement le projet établi par l'hôpital lui même et ne donne pas lieu à un suivi exigeant. S'ajoutent à ces difficultés l'insuffisance des systèmes d'information des ARH, le manque de coopération des comptables publics, la faiblesse des outils de gestion des ARH et parfois même aussi l'intervention du niveau central qui octroie directement une subvention exceptionnelle, décrédibilisant ainsi la responsabilité des agences.
Le centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, en activité depuis la fin de 2006, est un progrès mais il est encore trop tôt pour voir s'il permettra une gestion réellement active des directeurs d'établissements. Il est en effet impératif qu'il y ait adéquation entre le directeur et les exigences à mettre en place pour le rétablissement de l'équilibre financier d'un hôpital.
M. Dominique Leclerc s'est félicité de la pertinence et de la mesure des propos tenus par les auteurs du rapport, qui témoignent d'une connaissance profonde du monde hospitalier. Cette étude développe opportunément le mal récurrent de l'hôpital : sa mauvaise organisation, son insuffisante gestion des ressources humaines, son manque de productivité. Il faut retrouver le souci de la performance médicale dans le cadre d'équipes solidaires.
M. André Lardeux a souhaité savoir si les élus, et en particulier les maires, peuvent avoir un rôle moteur, et pas seulement une fonction de frein des évolutions.
M. François Autain a demandé par quels moyens on peut adapter l'hôpital si ses charges, notamment sa masse salariale, augmentent de 2 % à 4 % par an et que l'Ondam ne prend pas en compte cette évolution. Il a souhaité savoir si le mode de rémunération des médecins peut avoir un effet pervers, si les zones de sous-performance sont liées à des problèmes internes ou bien à un contexte local particulier, par exemple à l'âge ou à la précarité de la population. Enfin, il s'est interrogé sur le paradoxe entre la coexistence de services vides et d'autres pléthoriques et le chiffre de 30 % de postes de médecins non pourvus à l'hôpital public.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir si les futures agences régionales de santé (ARS) pourront constituer un élément de réponse aux difficultés analysées par les auteurs du rapport et si oui, à quelles conditions.
M. Christophe Lannelongue a estimé que les élus sont toujours très sensibles aux évolutions de l'emploi public local. De nombreux constats montrent que leurs interventions sont souvent bloquantes. Toutefois, certains élus s'engagent réellement dans la restructuration des établissements de santé et dans le développement de partenariats entre hôpitaux, ce qui a alors un impact très positif.
Puis il a estimé impossible de faire évoluer l'hôpital public sans lui redonner des marges de manoeuvre, notamment en termes de ressources humaines. Le rapport propose donc un assouplissement du statut du praticien hospitalier, aussi bien pour permettre des recrutements locaux de médecins qu'en termes de rémunération. Il serait également utile de faciliter la remise à disposition, auprès du centre national de gestion, d'un nombre de praticiens qui pourrait atteindre deux mille. Le rapport Larcher fait également des propositions en ce sens qui paraissent indispensables pour que l'hôpital puisse mieux répondre aux besoins et adapter son activité.
En ce qui concerne les zones de sous-performance, seuls quelques très rares cas d'établissements sont soumis à une situation particulière liée à l'aménagement du territoire. Mais l'essentiel des mille établissements en MCO ne répondent pas à cette logique. Sur la question des vacances de postes, une mission vient d'être lancée par la ministre de la santé afin d'approfondir les raisons de cette situation, notamment en lien avec le problème de la rémunération des médecins. Sur l'évolution des ARH, il paraît impératif d'engager une politique plus exigeante et plus dynamique et de donner plus de marge de manoeuvre aux responsables locaux. Un renforcement de la régulation du système est nécessaire. Or, les ARH ne sont pas en état aujourd'hui de gérer le redressement des hôpitaux, comme en témoignent les résultats des comptes des établissements de santé en 2007.
En conclusion, M. Christophe Lannelongue a remercié le Sénat d'avoir pris l'initiative d'un amendement voté en loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 et permettant de resserrer le cadre juridique applicable aux établissements en situation de déséquilibre financier.
Audition de M. Dominique LIBAULT, directeur de la sécurité sociale (mardi 6 mai 2008)
M. Dominique Libault, directeur de la sécurité sociale, a rappelé que les dépenses hospitalières représentent 45 % du montant total de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam), soit 63 milliards d'euros en 2008 ; elles constituent donc un poste déterminant au regard de la politique de maîtrise des dépenses de santé.
Les pouvoirs publics disposent schématiquement de deux solutions pour maîtriser ces dépenses : la réduction du périmètre des soins pris en charge ou une plus grande efficience de la dépense, cette dernière solution permettant de maintenir et d'améliorer les prestations dont bénéficient les assurés. L'hôpital étant le mode de prise en charge des malades le plus onéreux, les autorités sanitaires sont d'autant plus fondées à s'interroger sur l'efficience des dépenses hospitalières.
En comparaison avec les pays voisins, la France compte un nombre plus important d'établissements de santé par habitant, ce qui laisse supposer que des gains d'efficience sont possibles. Mais la réforme du secteur hospitalier ne procurant pas des économies rapides, les pouvoirs publics ont jusqu'à présent préféré agir sur d'autres catégories de dépenses, comme le médicament.
La mise en oeuvre de la tarification à l'activité (T2A), qui sert de matrice à la réforme hospitalière, a permis de faire évoluer cette situation. Les autorités sanitaires disposent désormais d'un outil pour évaluer la pertinence des dépenses hospitalières, mais l'usage du seul levier budgétaire est insuffisant pour réformer l'organisation du secteur dans son ensemble. Le recours aux bonnes pratiques doit être intensifié ; en ce domaine la mission d'évaluation et d'audit hospitalier (MeaH) fournit aux établissements des moyens d'action dans des domaines aussi variés que la gestion des lits, des blocs opératoires ou la prise en charge des escarres.
Le recours à la T2A pour financer les activités de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) se traduit par une meilleure efficience des dépenses hospitalières mais peut également être à l'origine des difficultés financières rencontrées par les établissements, notamment lorsque ces derniers ne parviennent pas à développer ou à maintenir une activité suffisante. Les pouvoirs publics doivent donc s'assurer que les prévisions d'activité retenues par les établissements pour élaborer leurs états prévisionnels de recettes et de dépenses (EPRD) sont compatibles avec les besoins du territoire de santé où ils sont installés.
M. Dominique Libault a, par ailleurs, regretté l'absence de réflexion stratégique sur la façon d'organiser le système de santé. Les directeurs d'établissement doivent être intéressés à la gestion de ceux-ci : la nouvelle gouvernance mise en oeuvre depuis 2005 et les recommandations qui accompagnent le rapport de la commission de concertation sur les missions de l'hôpital, présidée par M. le sénateur Gérard Larcher, vont dans ce sens. La participation des élus locaux à la gestion des établissements publics est compatible avec ces évolutions.
La création des agences régionales de santé (ARS) constitue une véritable opportunité pour réformer les modes de fonctionnement des établissements de santé mais surtout pour développer une vision plus globale du système de santé en s'assurant que les parcours de soins sont coordonnés entre médecine ambulatoire et médecine hospitalière et, qu'en conséquence, les établissements de santé ne sont pas amenés à prendre en charge, en raison d'une organisation défaillante, des patients qui ne nécessitent pas une hospitalisation.
M. François Autain a souhaité savoir si l'instauration de la T2A est à l'origine du constat des déficits dans de nombreux établissements de santé.
M. Dominique Libault a jugé que la T2A a incontestablement concouru à l'émergence des déficits constatés dans certains établissements de santé. Ces derniers ont cédé à la tentation de construire des budgets faisant la part belle à une progression de leur l'activité afin d'accroître leurs recettes. Or, si les objectifs ne sont pas atteints, un déficit apparaît nécessairement. Pour ces motifs, les autorités sanitaires nationales et régionales doivent s'assurer de la pertinence des hypothèses d'activité retenues pour l'élaboration des EPRD.
M. Alain Vasselle, président, s'est interrogé sur l'assistance apportée par les autorités nationales aux établissements pour le développement de nouveaux outils de gestion et la mise en oeuvre d'une meilleure organisation.
Il a voulu connaître les pistes que la direction de la sécurité sociale (DSS) privilégie pour améliorer l'efficacité des hôpitaux.
M. Dominique Libault a observé qu'une stratégie uniquement fondée sur une hausse du volume de l'activité est perdante. Il est au contraire possible de faire un peu moins à qualité de soins équivalente : c'est tout l'enjeu de la chirurgie ambulatoire qui n'est pas aussi développée en France que dans les pays voisins.
Les pouvoirs publics doivent également réfléchir au moyen de favoriser les rapprochements et les coopérations entre les établissements, sous la forme de communautés hospitalières de territoire, comme le propose le rapport remis au Président de la République par M. Gérard Larcher afin de simplifier, de rationaliser et de mutualiser les moyens, et donc la réponse apportée au patient.
Le caractère embryonnaire des études de coûts de fonctionnement des établissements publics et privés constitue un obstacle à une meilleure connaissance du secteur hospitalier. La réalisation de ces études doit être un objectif prioritaire des autorités de tutelle, notamment afin de déterminer des grilles tarifaires pertinentes.
M. Dominique Libault a également souligné que les établissements de santé ne font encore aujourd'hui qu'une utilisation limitée d'outils de gestion tels que la comptabilité analytique.
Il a rappelé que les dépenses de médicaments trouvent leur origine à l'hôpital, car les pathologies qui y sont traitées suscitent la diffusion des produits innovants. Or, on constate une évolution rapide des dépenses au titre des médicaments onéreux depuis qu'ils ont été retirés des tarifs des groupes homogènes de séjour (GHS) et sont facturés en sus : ces dépenses augmentent, en effet, de manière soutenue (3,6 milliards d'euros, soit 15 % d'augmentation en 2007) et doivent faire l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics. Au moins, l'ancien mécanisme de la dotation globale permettait de fixer des limites qui ont disparu avec le nouveau système.
M. Jean-Claude Etienne a mis l'accent sur le manque de réflexion stratégique dans le domaine de la santé. Il s'est interrogé sur la pertinence des différents modes de prise en charge d'un patient. Il a souligné que le rapport Larcher n'évoque pas la question de l'hospitalisation à domicile, qui constitue pourtant une aspiration nouvelle des Français. Il a estimé que les hôpitaux font une erreur en se lançant dans la course à l'activité plutôt que d'envisager la mise en oeuvre d'une nouvelle organisation interne.
M. François Autain a réagi aux propos précédemment tenus par M. Dominique Libault sur la mesure de facilité qu'a constituée l'action sur le médicament, alors qu'agir sur les dépenses hospitalières aurait une portée plus large pour assurer la maîtrise des dépenses d'assurance maladie. Regrettant que l'hôpital apparaisse trop souvent comme le « bouc émissaire », il a relevé la pertinence du ciblage sur le poste médicament dont la progression a été très rapide ces dernières années, sans que l'on ne s'en aperçoive, puisque ce poste ne fait pas l'objet d'un suivi spécifique et est englobé dans l'objectif « soins de ville » de l'Ondam.
Cette remarque vaut également pour les honoraires perçus par les chirurgiens libéraux. Cette absence de transparence ne permet pas une bonne appréhension des dépenses de santé et conduit, compte tenu des masses financières en cause, à focaliser l'attention des pouvoirs publics sur les enveloppes les plus importantes, en l'occurrence celles attribuées à l'hôpital public.
M. Alain Vasselle, président, a voulu connaître l'appréciation de M. Dominique Libault sur le récent rapport de l'Igas relatif aux mesures prises dans le cadre du contrat de retour à l'équilibre financier par des hôpitaux « perdants » à la T2A. Il s'est également interrogé sur l'existence d'une politique globale de gestion prévisionnelle des emplois à l'hôpital. Il s'est enfin enquis de l'intérêt qu'il y aurait à offrir plus de sécurité aux établissements de santé en fixant les évolutions de tarifs dans un cadre pluriannuel.
M. Dominique Libault a précisé que la DSS a commandé une étude sur les coûts et avantages de l'hospitalisation à domicile et a déclaré souscrire aux préoccupations exprimées par M. Jean-Claude Etienne.
Il a insisté sur la nécessité de ne pas instruire à charge le dossier de l'hôpital public, qui pallie certaines défaillances du système de soins. La répartition des rôles entre les différents acteurs est un défi que devront relever les futures ARS, afin d'organiser des réponses pertinentes aux demandes de soins sur l'ensemble d'un territoire de santé. L'amélioration de la gestion de l'hôpital public est dans l'intérêt de l'assurance maladie mais également des assurés.
Il a reconnu que le rapport de l'Igas dresse un bilan critique de la procédure suivie pour accompagner les établissements de santé sur la voie d'un retour à l'équilibre financier, ce qui n'a pas totalement étonné la DSS. Si les conclusions de l'Igas sont cruelles, elles arrivent à un moment opportun pour rappeler la nécessité de développer de nouveaux outils de gestion. Ceux-ci sont particulièrement insuffisants en matière de gestion des ressources humaines ; dans ce domaine, l'évolution des effectifs hospitaliers au cours des dernières années est étonnante et les autorités sanitaires doivent faire preuve d'un regard plus prospectif sur ce sujet.
M. Dominique Libault a réfuté l'idée selon laquelle le déficit hospitalier est uniquement lié à un manque de moyens financiers.
Il a estimé que le manque de transparence tarifaire, critiqué à juste titre par les établissements, est inhérent au caractère récent de la T2A et aux difficultés de mise en oeuvre. Des améliorations sont possibles dans ce domaine mais sans aller jusqu'à l'établissement de tarifs pluriannuels dont l'instauration priverait le Gouvernement d'un outil de régulation en cas de dépassement de l'Ondam.
M. Alain Vasselle, président, a souligné la nécessité de disposer d'une meilleure information sur les coûts et de développer une meilleure stratégie de soins, y compris en faisant appel à la Haute Autorité de santé pour définir les référentiels nécessaires.
M. Dominique Libault a rappelé qu'il est possible de compléter les annexes de la loi de financement de la sécurité sociale pour améliorer l'information des parlementaires. Par ailleurs, un effort de mise à niveau des systèmes d'information des établissements de santé doit être entrepris pour mieux suivre les prescripteurs ou les patients. Il a conclu en estimant indispensable d'investir dans la connaissance du système de santé.
Audition de Mme Annie PODEUR, directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos), et de M. Patrick OLIVIER, sous-directeur des affaires financières (mardi 6 mai 2008)
Mme Annie Podeur, directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, a présenté le contenu des protocoles d'accords conclus pour le règlement des heures supplémentaires et des jours de congés non pris et non rémunérés affectés dans un compte épargne temps (CET). Pour la fonction publique hospitalière, les jours pouvant être affectés à un CET sont au maximum de vingt-deux par an. Au 31 décembre 2007, le volume des jours épargnés en stock s'élevait à 2,6 millions. Pour les personnels médicaux, qui disposent d'un autre régime, ces jours peuvent aller jusqu'à trente par an sur dix ans et intégrer les congés annuels, des jours de récupération du temps de travail (RTT) ou des jours de récupération. Pour ces personnels, le stock de jours épargnés était d'1,6 million au 31 décembre 2007.
En matière d'heures supplémentaires, le régime applicable à la fonction publique hospitalière est encadré par des dispositions réglementaires et peut être appliqué jusqu'à un plafond de 180 heures, ou de 220 heures par an pour certains personnels. Au 31 décembre 2007, 23 millions d'heures non récupérées ou non indemnisées étaient accumulées depuis le début de la mise en place de la réduction du temps de travail à l'hôpital.
Les deux protocoles conclus au début de l'année 2008 ont été négociés à la demande du ministère de la santé et du ministère de la fonction publique. Le premier protocole, conclu le 15 janvier 2008, concerne les personnels médico-hospitaliers. Il prévoit l'indemnisation de la moitié des jours épargnés, sur la base de 300 euros bruts par jour, à rapprocher des 330 euros retenus lors de la première indemnisation effectuée en 2004. Les décrets sont en cours de publication et la circulaire est prête. A l'avenir, une gestion plus rigoureuse sera demandée aux directeurs d'établissement qui auront l'obligation de produire des tableaux de service afin de justifier l'affectation des jours dans un CET et surtout de provisionner les comptes épargne temps dans leurs objectifs annuels dès l'année 2008.
Le deuxième protocole, conclu le 6 février 2008, concerne la fonction publique hospitalière. Sa traduction doit intervenir dans un décret, également en cours de publication. La moitié, au maximum, des jours épargnés dans un CET pourra être indemnisée sur la base de tarifs fixés par référence à la première indemnisation de 2004 et au système mis en place dans la fonction publique d'Etat : pour les fonctionnaires de catégorie A, 125 euros bruts par jour ; pour les fonctionnaires de catégorie B, 80 euros ; pour les fonctionnaires de catégorie C, 65 euros. En outre, si l'agent titulaire d'un CET est décédé, ses ayants droit pourront revendiquer l'indemnisation prévue. Les heures supplémentaires pourront soit être indemnisées, soit être récupérées, selon le choix de l'agent exprimé au plus tard le 30 juin 2008. L'indemnisation forfaitaire sera de 13 euros bruts par heure, les exonérations prévues par la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa) s'appliquant pour les heures supplémentaires effectuées entre le 1er octobre et le 31 décembre 2007.
Les modalités de financement de ces protocoles se feront à la fois par l'utilisation du solde des crédits du fonds pour l'emploi hospitalier (FEH) et par les provisions constituées par les établissements de santé.
Au 31 décembre 2007, les crédits du FEH atteignaient environ 388 millions d'euros, dont 135,5 ont été délégués aux ARH pour les personnels médicaux et 252 millions affectés à la fonction publique hospitalière. Sur ce dernier montant, 10 millions sont destinés aux agents intervenant dans le secteur social et médicosocial, pour lesquels est également disponible un solde non utilisé de 11 millions d'euros.
Les provisions des établissements s'élèvent à 415 millions d'euros. Celles-ci sont très inégales selon les établissements et pas nécessairement liées à leur situation financière. L'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) est l'organisme qui a le plus provisionné à ce titre au cours des dernières années. Dans la répartition qui sera faite par les ARH, il est important que les établissements qui n'avaient pas provisionné ne soient pas spécifiquement privilégiés. A partir du 1er janvier 2008, la situation sera plus claire puisque tous les établissements devront provisionner les CET et les heures supplémentaires dans leur totalité. A cet effet, les ARH devront signer un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (Cpom) de chaque établissement, conformément à un modèle qui figurera dans la circulaire.
Puis Mme Annie Podeur a indiqué que le rapport de l'Igas sur le contrôle des mesures prises dans le cadre des Cref s'est fait en plein assentiment avec la Dhos, qui a d'ailleurs apporté son concours à l'étude par la présence de conseillers généraux d'établissements. Elle a remis à la commission la liste définitive de l'ensemble des missions d'appui menées par les conseillers généraux d'établissements, ainsi que le « diagnostic flash » utilisé lors de ces missions d'appui.
Ce rapport porte sur la première génération des Cref, conclus en 2004, au moment où une somme de 300 millions d'euros a été débloquée de façon un peu exceptionnelle et rapide pour assainir la situation des hôpitaux. Une contrepartie aux aides versées était exigée mais sans qu'aucune directive particulière n'ait été alors définie. En particulier, il n'y a pas eu de vraie réflexion sur les facteurs d'explication de la situation dégradée des hôpitaux et donc sur l'organisation des activités, les possibilités de gains de productivité et leurs conséquences sur les effectifs.
Si certains établissements ont amorcé une gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences, celle-ci a plus porté sur les compétences que sur les emplois. En outre, le pari fait sur l'augmentation de l'activité a empêché toute réflexion sur la « réduction de la voilure ».
En effet, lors de la mise en place de la T2A, on n'a pas assez insisté sur le véritable but de cette réforme, c'est-à-dire la réduction des rentes de situation et l'augmentation de l'efficience de l'hôpital. On a cru que le développement de l'activité devait permettre le retour à l'équilibre ; or les parts de marché n'évoluent pas aussi vite qu'on peut le penser et la vision initiale était sans doute trop optimiste. D'une manière générale, il y a eu insuffisance du pilotage médico-économique dans le cadre de ces contrats.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir à qui incombe la responsabilité de ces défaillances.
Mme Annie Podeur a considéré que la responsabilité est partagée. En effet, en 2005, les instruments de pilotage et de gestion n'étaient pas encore en place, la Dhos était très mobilisée sur le lancement de la réforme de la T2A et les ARH ont sans doute un peu joué la facilité. Ce qui est important, c'est que cette situation évolue et, de fait, tous les plans de retour à l'équilibre, conclus en 2006 et 2007, ont vu une forte mobilisation des ARH grâce au recrutement de nouveaux chargés de mission, et grâce aussi à l'intervention des missions d'appui conseil menées par les conseillers généraux des établissements de santé. Dans ces nouveaux plans, des réorganisations d'activité et des repositionnements stratégiques sont prévus, ce qui doit rendre possible la réalisation d'économies. Par ailleurs, grâce au « diagnostic flash », on dispose désormais d'indicateurs comparatifs sur les activités et les ressources humaines, ce qui permet d'apprécier objectivement les situations et de suggérer des adaptations en termes d'organisation interne.
Les seuils de déclenchement des plans de retour à l'équilibre sont actuellement ceux retenus par les chambres régionales des comptes, c'est-à-dire 2,5 % de déficit pour les gros établissements et 3,5 % pour les petits. Selon cette définition, une centaine d'établissements était en difficulté à la fin de l'année 2007. La fédération hospitalière de France (FHF) signale un nombre d'établissements en déficit plus élevé mais elle inclut les hôpitaux ayant un déficit très faible ou d'ordre conjoncturel. Cela étant, il serait sans doute utile de déclencher la procédure du plan de retour à l'équilibre financier bien avant les seuils actuellement définis. Un décret pourrait intervenir prochainement pour fixer de nouveaux seuils. Un guide méthodologique est par ailleurs actuellement en cours de publication afin de normaliser et de standardiser les plans de retour à l'équilibre, avec l'objectif très clair de parvenir à un retour à l'équilibre de tous les établissements de santé en 2012.
Mme Annie Podeur a rappelé que l'Ondam hospitalier a progressé de 3,44 % en 2006, de 3,48 % en 2007 et devrait augmenter de 3,18 % en 2008. De leur côté, les charges de personnel, qui comprennent les mesures générales applicables à l'ensemble de la fonction publique et les mesures catégorielles, ont augmenté de 2,07 % en 2006, 1,8 % en 2007 et devraient être en hausse de 1 % en 2008, ce qui représente des montants respectifs d'1 milliard d'euros, de 895,5 millions d'euros et de 616,2 millions d'euros. Toutefois, pour 2008, il faut d'ores et déjà ajouter un surcoût non budgété lié à la récente négociation gouvernementale et, notamment, à la mise en oeuvre de la garantie individuelle de pouvoir d'achat (Gipa), soit au total 191,8 millions d'euros. Simultanément, un effort d'économies est demandé au secteur hospitalier dans le cadre du plan de redressement des comptes de la sécurité sociale. Celui-ci a été chiffré à 534 millions en 2006, 345,7 millions en 2007 et 396 millions en 2008. Pour absorber ces économies, il est donc nécessaire de réaliser d'importants gains de productivité.
M. Patrick Olivier, sous-directeur des affaires financières, a rappelé qu'en 2005, une consigne précise avait été donnée pour la réalisation d'économies en les faisant porter sur les achats. A partir de 2006, l'effort d'économies a été globalisé sans ciblage particulier. Les dépenses de personnels représentant 70 % des dépenses hospitalières, il est évidemment nécessaire de les inclure dans cet effort. Il convient toutefois de souligner la progression très élevée des charges au cours des dernières années, d'environ 4 % à 4,5 % par an, liée aux dépenses de personnel, aux protocoles, aux divers plans de santé publique et aux investissements. Enfin, il faut préciser que l'effort d'économies s'entend compte tenu de l'augmentation de la participation de l'assuré, c'est-à-dire en particulier de l'augmentation du forfait journalier.
Mme Annie Podeur a estimé que les réformes lancées en 2004-2005 n'avaient pas été assez maîtrisées par les directeurs des ARH et les directeurs des établissements qui ont également eu à faire face à une nouvelle méthode comptable et à la nouvelle gouvernance. La période 2006-2007 constitue une rupture et les missions d'appui et de conseil déjà menées à bien ont sans doute permis un électrochoc. De ce point de vue, le rapport de l'Igas sur les Cref a également eu un rôle très utile d'accélérateur de la décision. Il est à l'origine de la mise au point du guide méthodologique en cours de publication et de la standardisation des plans de retour à l'équilibre. De la même façon, le rapport conjoint de l'Igas et de l'inspection générale des finances (IGF) d'avril 2007 sur le pilotage des ARH a entraîné l'organisation d'un séminaire dès le mois de mai de la même année et la définition d'indicateurs de performance dont la liste définitive sera fournie en septembre au Parlement.
M. Alain Vasselle, président, a souhaité savoir quel pourrait être le prochain aiguillon pour progresser dans la voie de l'amélioration de la gouvernance du secteur hospitalier.
Mme Annie Podeur a indiqué qu'une mission d'évaluation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens conclus entre les ARH et les établissements hospitaliers sera entreprise au deuxième semestre 2008. Au préalable, le ministère a conclu un accord avec les directeurs d'ARH pour que le processus de contractualisation entre les agences et les établissements soit mené à son terme avant le 30 juin 2008.
Puis elle est revenue sur les principes directeurs d'un plan de redressement tels qu'ils figurent dans le guide méthodologique : la claire définition du positionnement de l'établissement par rapport à son territoire de santé et au schéma régional de l'offre de soins (Sros), l'adoption d'un diagnostic réellement partagé par l'établissement et l'ARH, la définition d'un plan global de redressement prenant en compte toutes les activités de l'hôpital, la détermination d'un objectif de retour à l'équilibre tenant compte de l'ensemble des ratios de gestion, notamment de l'équilibre structurel de l'établissement, avec une maîtrise du plan de charges et une justification détaillée des éventuels développements d'activité.
Mme Annie Podeur a ensuite détaillé les deux dispositifs législatifs applicables en cas de constat de déséquilibre financier ou de dégradation financière des établissements. S'il y a déséquilibre financier, le directeur de l'ARH saisit le conseil d'administration qui doit présenter un plan de redressement et conclure un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens. Si le conseil refuse ce plan, l'ARH peut arrêter la décision modificative de l'état des prévisions de recettes et de dépenses (EPRD). Si le plan n'est pas mis en oeuvre, l'établissement peut être placé sous administration provisoire par le directeur de l'ARH. En cas de dégradation financière, les seuils de déclenchement du plan de redressement sont définis par décret et s'ils sont applicables, le directeur de l'ARH saisit la chambre régionale des comptes qui préconise les mesures de redressement nécessaires. En cas de problème dans l'application de ces mesures, l'établissement peut également être placé sous administration provisoire. Ces deux procédures doivent être simplifiées et le guide méthodologique comporte un certain nombre de dispositions sur la prévention des risques. Il paraît important que l'ARH intervienne plus tôt afin d'aller plus vite vers la phase de l'administration provisoire. En effet, les chambres régionales des comptes ne sont pas toujours rompues aux conditions très particulières de l'équilibre financier des hôpitaux et leur intervention peut allonger la procédure. Aucun hôpital n'a toutefois encore été placé sous administration provisoire, mais une sanction de ce type pourrait intervenir prochainement.
Mme Annie Podeur a ensuite insisté sur le fait que l'existence de crédits fléchés sur des priorités de santé publique ne doit pas obligatoirement signifier de nouveaux recrutements car des redéploiements sont généralement possibles. Des situations de redressement efficace ont été enregistrées, par exemple dans le cas des hôpitaux de Longjumeau et Orsay, qui étaient l'un et l'autre en déficit et dont la fusion a donné naissance à un établissement aujourd'hui en équilibre.
Selon elle, l'échantillon d'établissements défini par l'Igas dans son rapport sur les Cref ne peut être considéré comme représentatif puisque seuls certains établissements de trois régions ont été retenus auxquels ont été simplement ajoutés les CHU de Lille et de Rouen.
On peut porter une appréciation positive sur le bilan global de l'action des ARH puisque plus de six cents actions de restructuration ont été menées au cours des dix années d'existence de ces agences. Aujourd'hui, la restructuration des maternités est pratiquement achevée tandis que celle de la chirurgie est en cours. De telles actions prennent du temps et mobilisent beaucoup d'énergie sans pour autant produire immédiatement des économies. Actuellement, l'enjeu essentiel est celui de l'efficience et les ARH sont mobilisées sur cet objectif prioritaire. Dans ce cadre, certaines agences ont déjà fait un travail remarquable, notamment dans la redéfinition des missions d'intérêt général. La refondation des ARH au sein des futures agences régionales de santé permettra d'amplifier ces actions.
M. Gilbert Barbier a souhaité savoir si un contrôle est effectué sur le sous-codage, notamment dans le cadre de l'effort d'amélioration de l'équilibre des établissements. Il a estimé que certaines mesures, comme l'organisation de dépôts de sang dans les hôpitaux, sont coûteuses en ce qu'elles exigent en particulier une dotation spécifique en personnel. Il a demandé si le guide méthodologique prévoit un rapprochement entre les activités des établissements du secteur public et du secteur privé dans un même territoire de santé. Enfin, il a souhaité savoir si les déficits enregistrés, comblés par une dotation exceptionnelle, font néanmoins l'objet d'un report à nouveau dans les comptes des années ultérieures.
Après avoir constaté le décalage entre la progression des charges, soit 4 % à 4,5 % par an, et la progression de l'Ondam hospitalier, soit 3,2 % à 3,8 % par an, M. François Autain a demandé jusqu'où l'on pouvait envisager la réalisation d'efforts de productivité, tout en préservant la qualité des soins.
Sur le problème du sous-codage, Mme Annie Podeur a insisté sur la nécessaire rationalisation des chaînes de facturation. Désormais, il convient de rapprocher chaque séjour avec les données administratives correspondantes. Cet exercice révèle des failles importantes puisqu'il a permis de faire apparaître que, dans certains établissements, 15 % des consultations externes n'avaient pas fait l'objet d'une facturation.
Pour l'organisation des dépôts de sang, la compétence de la Dhos est partagée avec celle de la direction générale de la santé et celle de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Néanmoins, il serait sans doute possible d'organiser, dans le cadre de la réglementation en vigueur, un dépôt de sang sans nouveaux recrutements, en optimisant les ressources médicales localement disponibles et d'éviter ainsi les surcoûts.
Le rapprochement entre les secteurs public et privé fait partie des modalités des restructurations en cours. Il existe des concessions de service public attribuées à des établissements privés. Il est important que des coopérations se mettent en oeuvre, aussi bien entre établissements du secteur public qu'entre hôpitaux publics et cliniques privées.
L'accompagnement du retour à l'équilibre des établissements de santé doit être glissant et décroissant, ainsi que le préconise la circulaire budgétaire de 2008. Il est vrai que cet accompagnement n'a pas été assez suivi au cours des dernières années car il est impératif de ne pas laisser s'installer les hôpitaux dans une situation de déficit. D'importants gains de productivité sont possibles. Cela signifie qu'une analyse stratégique doit être développée sur chaque territoire avec la mise en évidence des éventuels doublons. Enfin, il faut souligner que l'on a encore trop souvent recours à l'hospitalisation en France, comparativement aux pays voisins, alors que d'autres solutions existent.