2. Des publics distincts : les contentieux de masse pour les actions de groupe, les situations individuelles pour l'aide juridictionnelle

L'action de groupe est présentée par certains comme un moyen de parvenir à mieux réguler les flux d'admissions à l'AJ . Le raisonnement sous-tendu ici s'appuie sur l'espoir que nombre d'affaires relevant actuellement de l'AJ puissent « basculer » sur les « class actions » engagées. Ainsi, M. Paul Bouchet, dans son rapport précité, considérait-il que « la technique de l'action de groupe mériterait d'être développée et étendue à d'autres secteurs du droit (droit du logement, droit administratif...) ». Il précisait qu'elle « s'avère extrêmement intéressante dans tous les cas où la plupart des intéressés renonceraient à faire valoir leurs droits, en raison du coût ou de la complexité de la procédure juridictionnelle ».

L'effet attendu de l'introduction d'une telle novation au sein du système juridique français sur les demandes d'admission à l'AJ dépendrait naturellement, notamment, du champ couvert par le dispositif adopté : droit de la consommation, droit de l'environnement, droit de la santé, droit administratif...

Pour autant, votre rapporteur spécial estime que le développement des actions de groupe en droit français n'aurait qu'un impact très limité sur l'évolution des demandes d'AJ .

D'une part, l'action de groupe présente les mêmes limites que l'assurance de protection juridique au regard de la matière pénale . Les « class actions » n'auraient évidemment aucun effet sur le stock d'affaires au pénal relevant de l'AJ.

D'autre part, l'action de groupe a vocation à traiter des contentieux de masse, alors que l'AJ concerne plutôt des situations individuelles : divorce, mineurs...

Aussi, tout laisse à penser que l'instauration de « class actions » en droit français aurait, outre les interrogations que cette procédure soulève au regard de notre tradition processuelle 74 ( * ) , un impact inférieur à celui de la récente réforme de l'assurance de protection juridique en termes d'effet sur les effectifs de justiciables à l'AJ.

* 74 Parmi les questions qui se posent, on peut notamment évoquer les suivantes : une action de groupe, quelle que puisse être sa forme, offrirait-elle une meilleure protection des victimes que ne l'assure actuellement le droit français ? Nos principes constitutionnels autorisent-ils un tel mécanisme ? Est-il possible d'introduire une procédure d'action de groupe sans mettre à mal la cohérence de notre système de procédure civile ?

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