C. DE LA RÉTRIBUTION DE L'AVOCAT À SA RÉMUNÉRATION : LE « BARÊME HORAIRES »

1. Une refonte d'ensemble du barème pour mieux assurer la rémunération de l'avocat

Entre rétribution et rémunération, le débat récurrent autour de la question de l'indemnisation de l'avocat participant au bon fonctionnement de l'AJ n'est pas que sémantique. Il recouvre un véritable enjeu : l'appréciation à sa juste valeur de la prestation de l'avocat auprès du bénéficiaire de l'AJ.

Alors que la loi de 1991 parle de « rétribution » en faveur des avocats et des auxiliaires de justice, le protocole d'accord conclu le 18 décembre 2000 entre le garde des Sceaux, ministre de la justice, et les organisations professionnelles d'avocats arrête « le principe de la rémunération des avocats intervenant au titre de l'aide juridictionnelle ». Votre rapporteur spécial joint en annexe au présent rapport ce protocole (cf. annexe 6).

Votre rapporteur spécial approuve le principe d'une rémunération des avocats et souhaite que le nouveau dispositif permette de corriger le caractère désormais largement daté, si ce n'est dépassé, du barème actuel permettant l'indemnisation des avocats ( cf. supra , partie II-B-3).

La modernisation du barème a, par ailleurs, pour conséquence de rendre pour ainsi dire secondaire la problématique de la revalorisation de l'UV qui a trop longtemps cristallisé les mécontentements. En effet, dans le cadre d' une refonte d'ensemble du barème , le montant de l'UV correspond surtout à une variable d'ajustement au sein d'une équation plus globale. En devenant plus générale, la réflexion s'écarte aussi des considérations de court terme qui masquent, en définitive, les enjeux les plus décisifs.

2. Une grille de rémunération plus transparente : le « barème horaires »

Le barème actuel repose sur un principe devant être maintenu : un forfait selon le type de procédure . Cependant ce forfait doit être beaucoup mieux adapté qu'aujourd'hui à la réalité du travail accompli par l'avocat afin de permettre sa juste rémunération.

Dans ce but, deux leviers doivent être pris en considération :

- le coût horaire de la prestation de l'avocat ;

- le temps passé par type de mission.

L'objectif poursuivi est de parvenir à l'établissement d' un « barème horaires », principe sur lequel les « Assises de l'accès au droit et de l'aide juridictionnelle » organisées par la Chancellerie le 30 janvier 2007 ont, semble-t-il, permis de dégager un certain consensus.

Le coût horaire , tout d'abord, doit intégrer à la fois la rémunération de la prestation intellectuelle de l'avocat et la couverture de ses frais.

La base de rémunération de la prestation intellectuelle pourrait, dans un tel système, prendre pour référence la rémunération nette d'un magistrat. Ce principe avait d'ailleurs déjà été retenu par M. Paul Bouchet dans son rapport précité et recueille l'assentiment du CNB 75 ( * ) . Cette base de référence pourrait, en outre, être modulée selon l'ancienneté de l'avocat.

Une fois cette base définie, il conviendrait ensuite de déterminer le nombre d'heures à retenir pour en déduire la rémunération horaire. A titre d'exemple, M. Paul Bouchet évoquait dans son rapport un quantum de 1.200 heures facturables par an, compte tenu de l'impossibilité de facturer au client la perte de temps lié au traitement judiciaire de l'affaire (attente, renvoi...) et de la nécessité de prendre en considération le temps consacré à des activités de formation et de gestion du cabinet qui ne peut être affecté à un dossier. Cette base du nombre d'heures à retenir devra, en tout état de cause, s'appuyer sur des données rendant compte objectivement de l'activité des cabinets pour garantir la fidélité du mode de calcul à la réalité du travail accompli.

L'appréciation des frais à retenir dans le calcul du coût horaire est plus complexe. Certains peuvent se mesurer relativement aisément, en particulier les cotisations sociales de l'avocat, la cotisation à son Ordre, les assurances ainsi que la taxe professionnelle. D'autres, en revanche, sont plus difficiles à estimer. Il s'agit, notamment, des frais d'équipement en matériel informatique et de documentation, ou des dépenses de loyer (qui varient fortement selon le lieu d'implantation du cabinet).

Une fois encore à titre d'exemple, le rapport Bouchet proposait de retenir comme référence le taux de charge médian des cabinets dont au moins 25 % du chiffre d'affaires provient de l'AJ . Il conviendrait toutefois de pondérer ce taux de charge par un coefficient incorporant les disparités régionales, liées au coût des loyers notamment.

L'évolution du tarif horaire , garante du maintien du niveau de rémunération dans le temps face aux divers phénomènes d'érosion, serait dans ce dispositif assurée par l'évolution de la rémunération nette d'un magistrat. En matière de charges, la référence pour la prise en compte des frais pourrait être indexée sur l'indice des prix.

Avec la détermination du coût horaire, l'appréciation du temps passé selon le type de mission constitue la seconde variable clef dans l'élaboration du « barème horaires ». Elle devra naturellement procéder d'une étroite concertation avec la profession d'avocat afin de garantir la viabilité du système et son acceptation par toutes les parties prenantes.

Votre rapporteur spécial considère que le « barème horaires » ainsi défini répond non seulement à la nécessité d'une rémunération plus juste et réaliste de l'avocat, mais aussi à un impératif de transparence, dont le dispositif actuel s'est progressivement éloigné .

* 75 Rapport d'étape de la commission « Accès au droit et à la justice » du CNB, adopté en assemblée générale les 12 et 13 janvier 2007.

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