4. Le développement de capacités multinationales dans le cadre de l'OTAN
Les capacités militaires de l'Alliance reposent essentiellement sur celles des Etats-membres qui les mettent à disposition en cas d'opération.
L'OTAN joue cependant depuis longtemps un rôle fédérateur en matière de systèmes d'information et de communication, afin d'assurer l'interopérabilité entre les différents systèmes alliés.
C'est le cas en matière de défense aérienne , où l'OTAN a mis en place des moyens d'interconnections des différents systèmes de détection, de poursuite et d'identification des pays alliés. Elle engage à ce titre un important programme de modernisation et de standardisation de l'ensemble des systèmes de commandement et de contrôle aérien - l' Air command and control system (ACCS) - dont le coût global atteindra 2,6 milliards d'euros, incluant 1,7 milliard d'euros en financement commun. Les pays européens de l'OTAN disposeront ainsi d'un système unifié de défense aérienne qui reposera sur cinq centres de commandement fixes.
La seule capacité militaire véritablement détenue en propre par l'OTAN est jusqu'à présent une flotte de 17 Boeing Awacs stationnée en Allemagne et offrant une capacité de surveillance aéroportée. Ces avions appartiennent à l'OTAN et ont été financés par 15 pays 9 ( * ) . Ils ont été déployés à diverses reprises (après les attaques du 11 septembre, en Turquie lors de la guerre d'Irak en 2003 ou encore lors des Jeux olympiques d'Athènes en 2004). Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France possède leurs propres Awacs, interopérables avec ceux de l'OTAN.
Voulant favoriser une rationalisation des investissements de défense, mais également pour faire face à des besoins nouveaux, l'OTAN a multiplié ces dernières années les initiatives visant à renforcer les capacités de ses membres , voire à acquérir des capacités collectives .
Le domaine du transport aérien stratégique , dans lequel les Européens souffrent de fortes lacunes, offre un premier exemple de cette démarche qui a toutefois débouché sur deux solutions différentes. D'un côté, 16 pays réunis autour de l'Allemagne, de la France et de l'Espagne ont mis en oeuvre une « solution intérimaire pour le transport aérien stratégique » ( Strategic Airlift Interim Solution - SALIS) permettant d'affréter auprès de deux sociétés russe et ukrainienne six avions gros porteurs Antonov AN-124-100 . Cette solution a été qualifiée d'intérimaire, en l'attente de la livraison de l'Airbus A400M à compter de 2009. Cette capacité sera disponible tant pour l'OTAN que pour des opérations de l'Union européenne. Parallèlement, un autre groupe de 17 pays constitué autour des Etats-Unis, où l'on compte également 9 participants à l'initiative SALIS , vont acquérir trois ou quatre avions gros porteurs Boeing C-17 qui seront pilotés par des équipages multinationaux sous le commandement d'une structure militaire multinationale. Une nouvelle agence de l'OTAN ( NATO Airlift Management Organisation - NAMO ) procédera, pour le compte des pays partcipants, à l'acquisition, à la maintenance et à l'entretien de ces avions.
L'acquisition d'une véritable capacité collective est en revanche à la base du programme de surveillance de l'espace de bataille qui, s'il était lancé dans la configuration actuellement envisagée, serait le plus coûteux jamais engagé par l'Alliance, pour un budget de l'ordre de 8 milliards d'euros sur 20 ans, dont la moitié pour l'acquisition sur la période 2008-2010. Ce programme AGS ( Air ground surveillance ) vise à fédérer des moyens radars de surveillance du sol, embarqués sur des avions et des drones, et destinés à donner au commandement une connaissance précise et permanente de la situation sur le théâtre d'opération. L'élément principal du programme porte sur la conception et la réalisation en coopération transatlantique d'un radar ( Transatlantic cooperative AGS radar - TCAR ) qui sera emporté par des Airbus A321 et par des drones Global Hawk .
Avec les grands programmes engagés ces dernières années ( ACCS ) ou dont le lancement est envisagé ( AGS ), le rôle de l'OTAN dans l'acquisition de capacités collectives s'accentue et son budget d'investissement s'accroît rapidement . Cette orientation vise à partager les coûts tout en permettant d'améliorer significativement les capacités pour les opérations menées en commun. Toutefois, le risque existe d'engager les alliés dans des investissements surdimensionnés par rapport à leurs possibilités et à leurs priorités militaires.
C'est l'un des problématiques de l'engagement de l'OTAN dans les programmes de défense antimissile.
* 9 Allemagne, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Grèce, Hongrie, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Turquie.