XV. LES CONDITIONS D'EFFICACITÉ DES AIDES À L'EMPLOI EN DIRECTION DES CHÔMEURS DE LONGUE DURÉE

A. DÉFINITION DU CHÔMAGE DE LONGUE DURÉE ET POSITIONNEMENT DES CHÔMEURS DE LONGUE DURÉE SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL

1. Selon la définition de l'INSEE, « un chômeur de longue durée est un actif au chômage depuis plus d'un an » . A partir de vingt-quatre mois, on parle de « chômage de très longue durée ». En France, les chômeurs de longue durée représentent aujourd'hui un peu plus de 30 % des demandeurs d'emploi en fin de mois en catégorie 1 (31,7 % en avril 2006 soit 718 100 chômeurs de longue durée inscrits en catégorie 1).

2. S'agissant du positionnement des chômeurs de longue durée sur le marché du travail , on peut faire plusieurs remarques.

D'abord, comme l'indique le tableau ci-dessous, environ un quart des jeunes chômeurs est en chômage de longue durée. Dans ces conditions, les remarques générales s'agissant des jeunes s'appliquent également à leur égard 148 ( * ) .

Tableau n° 42 :  Part du chômage de longue durée 149 ( * ) et profils des chômeurs de longue durée

2005 en %

Age

Au chômage depuis 1 an ou plus

Au chômage depuis 2 ans ou plus

Femmes

43,2

21,5

15 - 24 ans

24,4

7,4

25 - 49 ans

44,7

21,3

50 ans ou  plus

60,9

40,4

Hommes

41,8

21,7

15 - 24 ans

23,8

8,0

25 - 49 ans

42,7

21,1

50 ans ou  plus

63,2

42,2

Ensemble

42,5

21,6

Note : Résultats en moyenne annuelle
Champ : Chômeurs au sens du BIT, âgés de 15 ans et plus.

Source : Insee, enquêtes Emploi.

Ce tableau montre également que la part de chômeurs de longue durée est nettement plus importante pour la catégorie des chômeurs de plus de 50 ans. Or, les demandeurs d'emploi âgés sont victimes d'un a priori négatif des employeurs que la politique de l'emploi a d'ailleurs contribué à nourrir à travers l'encouragement au recours aux préretraites.

Les chômeurs de longue durée sont affectés par le fait que les premiers entrés en chômage sont souvent les derniers à en sortir. Plus le chômage dure, plus le risque est grand d'une perte d'employabilité. La population des chômeurs de longue durée n'est pas homogène face à l'accès à l'emploi et une analyse plus fine de l'ancienneté en chômage des bénéficiaires des aides à l'emploi s'avère nécessaire 150 ( * ) .

B. L'ABSENCE D'UN DISPOSITIF GÉNÉRAL D'ACCOMPAGNEMENT RENFORCÉ

Plusieurs dispositifs d'aide à l'emploi, dans lesquels les chômeurs de longue durée représentent une proportion très majoritaire de bénéficiaires, ont été mobilisés pour répondre à cet objectif, notamment les stages d'accès à l'entreprise (SAE) et les stages individuels d'insertion et de formation à l'emploi (SIFE) 151 ( * ) , supprimés par la loi du 18 janvier 2005. On ne retrouve donc pas aujourd'hui de dispositif général d'accompagnement renforcé - symétrique de TRACE ou de CIVIS-accompagnement - pour les chômeurs de longue durée de plus de 25 ans les plus en difficulté.

Le Royaume-Uni met en oeuvre un New deal pour les chômeurs de longue durée de plus de 25 ans, sur le modèle du New deal for young unemployed people . Pendant les quatre premiers mois, un plan d'action individuel est élaboré avec le référent du chômeur et des actions d'accompagnement renforcé sont ensuite engagées pour une durée d'environ 26 semaines : formations qualifiantes, emploi aidé ou aide à la création d'entreprises. A l'issue de cette période, un soutien plus intensif peut être déclenché.

Tableau n° 43 :  Les moyens consacrés au New deal pour les chômeurs de longue durée (en millions d'euros)

1998-99

1999-00

2000-01

2001-02

2002-03

2003-04

49,4

141,1

87,3

301,1

373,8

370,9

Source : Departemental Report 2004, Departement for Work and Pensions, tableau in C. GRATADOUR, Politiques et institutions britanniques d'aide au retour à l'emploi, Les papiers du CERC, n° 2005-04, décembre 2005

L'absence d'un tel accompagnement renforcé en France est, cependant, partiellement compensée par l'existence de plusieurs dispositifs :

- La mise en oeuvre de dispositifs de reclassement dans le cadre des procédures de licenciement pour motif économique, d'une part. Le dispositif retenu pour le contrat de transition professionnelle (CTP) - expérimenté dans sept bassins d'emploi entre le 15 avril 2006 et le 15 avril 2008 152 ( * ) - présente d'ailleurs un certain nombre de similarités avec TRACE : mise en oeuvre d'un accompagnement « renforcé et personnalisé » assuré par l'ensemble des acteurs du service public de l'emploi présents au sein des maisons de l'emploi, désignation d'un référent, accès à diverses prestations d'accompagnement et d'incitation au « retour rapide à l'emploi » , perception d'une « allocation de transition professionnelle » hors période de travail.

- Le partenariat mis en oeuvre dans le cadre des plans locaux pour l'insertion et l'emploi (PLIE), d'autre part. Les PLIE constituent des plates-formes de coordination locale (notamment entre agence locale pour l'emploi, PAIO, mission locale...) destinées à favoriser l'accès ou le retour à l'emploi des personnes les plus en difficulté 153 ( * ) . Les PLIE prévoient un accompagnement personnalisé et comportent des objectifs chiffrés en matière de retour à l'emploi des personnes en difficulté. Au nombre de 203 au 1 er janvier 2005 154 ( * ) , leur financement est principalement assuré par les fonds structurels européens (FSE, objectif 3) et les collectivités territoriales.

Par ailleurs, l'ANPE a indiqué à la Cour qu'elle préparait actuellement le cahier des charges d'un appel d'offre de « mobilisation pour l'emploi ». Ce dispositif d'accompagnement - configuré en l'état pour accueillir de l'ordre de 25 000 bénéficiaires - comporterait la désignation d'un référent et l'utilisation des contrats aidés comme « briques » d'un parcours d'insertion. L'intérêt de l'extension d'un tel dispositif pourrait faire l'objet d'une évaluation après la phase initiale de déploiement.

* 148 Cf supra p. 94.

* 149 La part du chômage de longue durée est la proportion de chômeurs de longue durée dans l'ensemble des chômeurs (définition INSEE).

* 150 Le projet annuel de performance (PAP) pour 2006 associé au programme 102 « Accès et retour à l'emploi » associe d'ailleurs à l'objectif 4 (« mobiliser les moyens vers les publics les plus fragiles ») de son action 2 (« mise en situation d'emploi des publics fragiles ») un indicateur de résultat mesurant la part des chômeurs de longue durée de plus de deux ans dans les bénéficiaires des CIE et CAE.

* 151 Cf la présentation de ces dispositifs en annexe 2.

* 152 Article 32 de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux et ordonnance n° 2006-433 du 13 avril 2006 relative à l'expérimentation du contrat de transition professionnelle.

* 153 Les PLIE ont été créés progressivement à l'initiative des collectivités locales à partir du début des années 1990 avant d'être consacrés par la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.

* 154 Les 203 PLIE regroupaient 4 853 communes (soit environ 7,5 % du nombre total de communes) et concernaient potentiellement 23,8 millions de personnes (soit 39 % de la population française).

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