Audition de M. Thierry Morin, président de Valeo.
La commission a entendu M. Thierry Morin, président de Valeo.
M. Thierry Morin a tout d'abord annoncé qu'il s'exprimerait sur la situation actuelle des équipementiers ainsi que de la filière en général, dont les difficultés résultent de la coexistence de phénomènes déjà anciens et d'évolutions plus récentes.
S'agissant des évolutions observées sur une longue période, il a souligné la tendance à la délégation des activités industrielles des constructeurs, illustrant cette idée par le fait qu'un certain nombre de constructeurs demandaient désormais qu'une partie du développement soit assurée par les équipementiers. Il a aussi mis en avant la montée en puissance du rôle des équipementiers pour un nombre croissant de tâches telles que le développement des produits ou l'assemblage de modules complets des véhicules.
Pour ces raisons, il a estimé nécessaire de revenir sur le terme de sous-traitant et de lui substituer celui de « composantier » ou de « systémier », plus représentatif des nouvelles fonctions assurées par les équipementiers.
Toujours au titre des évolutions constatées sur une longue période, il a cité le raccourcissement de la durée de vie des véhicules qui contraint les équipementiers à amortir leurs investissements sur des séries de 300.000 ou 400.000 exemplaires, alors que les modèles de véhicules précédents portaient sur un nombre d'unités comprises entre 700.000 et un million.
Il a ajouté que cette difficulté était encore plus aiguë pour certains équipements particuliers comme les éclairages à l'avant des véhicules ou la signalisation à l'arrière, dont le cycle de vie pouvait désormais être inférieur à deux ans.
Il en est ensuite venu à l'évocation de problèmes plus récents, parmi lesquels il a fait valoir la hausse du prix de l'électricité ainsi que l'envolée du prix des matières premières le prix du cuivre ayant été multiplié par cinq en trois ans, celui de l'aluminium par deux en deux ans et celui du zinc par cinq en deux ans rappelant que ces dernières représentent 40 à 55 % des coûts de production des équipementiers. Il a ajouté qu'il était très difficile aux entreprises de répercuter ces hausses sur leurs prix de vente, dans la mesure où une forte pression à la baisse des coûts était exercée par les constructeurs automobiles eux mêmes confrontés à une situation de surcapacité du marché, l'offre excédant aujourd'hui la demande pour environ quinze millions de véhicules.
Il a attribué à deux ordres de raisons le fait que le prix des équipements constitue la principale variable d'ajustement des coûts de la production automobile. La première tient au fait que c'est aujourd'hui chez les équipementiers que se réalise la plus grande part de la valeur ajoutée d'un véhicule, et la seconde est que la quasi-totalité de leurs clients sont les constructeurs eux-mêmes.
Il a achevé sa description des difficultés récentes en citant les surcoûts engendrés par la mondialisation des échanges, qui exige la création d'un plus grand nombre d'implantations industrielles qu'auparavant de façon à produire au plus près des marchés nationaux ou régionaux, dont le nombre s'est d'ailleurs fortement accru.
Il a souligné que, conséquence de ces tensions, près de trente-cinq équipementiers américains parmi ceux affichant un chiffre d'affaires supérieur à un milliard de dollars étaient désormais sous la protection du chapitre 11 relatif aux faillites. Tout en notant que tel n'était pas encore le cas en Europe, il a rappelé qu'un grand équipementier allemand du domaine de l'éclairage avait annoncé l'an dernier qu'il subirait des pertes, et ce, pour la première fois de son histoire.
Concentrant ensuite son exposé sur le cas de Valeo, il a commencé par rappeler qu'en 2001 l'entreprise avait subi 700 millions d'euros de pertes, soit 7 % de son chiffre d'affaires. Il a fait valoir que, du fait de son indépendance, le groupe Valeo s'était trouvé dans la nécessité de ne compter que sur ses propres forces pour combler au plus vite les pertes réalisées et ce, au travers d'un plan de redressement.
Il a signalé que ce plan avait été réalisé à effectifs à peu près constants, les opérations ayant consisté non seulement en la fermeture de 52 sites sur 170, mais aussi en l'ouverture de 29 nouvelles implantations ainsi qu'en la cession de 26 sites et la réalisation de 13 acquisitions. Il a indiqué que cette restructuration avait permis au groupe Valeo de disposer de sites de très haute technologie capables de maîtriser les techniques de différenciation des produits en Europe de l'ouest, aux Etats-Unis et au Japon, ainsi que d'usines répondant aux besoins d'autres marchés exigeant des produits moins sophistiqués mais beaucoup plus compétitifs en termes de prix, comme tel est le cas des unités de production du groupe basées en Chine et en Europe centrale.
Après ce rappel du plan de redressement, il a indiqué que l'année 2001 avait aussi été marquée par la mise en place d'une stratégie articulée autour de trois axes : l'action sur les coûts, la recherche d'une « qualité totale » et l'innovation.
S'agissant de la diminution des coûts, il a rappelé que Valeo avait optimisé les actifs industriels en recourant, entre autres, à des actifs plus légers, c'est-à-dire à des outillages moins coûteux, grâce à une démarche visant à redéfinir les processus de fabrication. Il a indiqué que cette méthode avait permis d'obtenir aujourd'hui des coûts situés aux meilleurs niveaux mondiaux.
Pour ce qui concerne l'objectif de qualité, il a rappelé qu'avant l'entrée en vigueur du plan, les équipes de Valeo mesuraient la qualité des productions par des pourcentages de défaut inférieurs, selon les cas, à 1 % ou à 0,1 %, trop élevés à ses yeux.
Il a indiqué que le nouveau système de comptabilisation portait sur le nombre de défauts par millions d'unités produites, réservant à la commission la primeur de l'information selon laquelle Valeo avait atteint au 31 décembre 2006 la moyenne très faible de quinze défauts par million d'unités produites, quinze usines du groupe affichant même en 2006 une absence totale de produits défectueux, et ce, alors même qu'il y a encore quelques années, il était parfois considéré que -pour certaines productions il serait très coûteux de descendre en dessous d'1 % de défaut.
Cette exigence de qualité va au-delà des seuls produits, puisqu'elle intègre, par exemple, le paramètre du nombre d'accidents du travail, la poursuite de l'objectif de « qualité totale » signifiant ainsi l'absence d'accidents de ce type.
Puis M. Thierry Morin, président de Valeo, a exposé le troisième axe de la stratégie d'innovation de son entreprise. Il a tout d'abord rappelé qu'en 2001 il avait été conduit à réétudier l'ensemble du portefeuille des produits du groupe, en se fondant principalement sur l'analyse et l'anticipation des besoins du marché. Il en a déduit qu'un utilisateur d'automobile souhaitait des véhicules à la fois plus confortables, de plus en plus sûrs, moins polluants et plus agréables à conduire.
C'est dès lors dans ces différentes directions que Valeo avait décidé d'orienter le développement de ses nouveaux produits. Rappelant qu'une voiture de cylindrée d'1,5 litre consommait à peu près sept litres de carburant pour cent kilomètres, ce qui représente deux tonnes de CO 2 par an, M. Thierry Morin a jugé absolument indispensable une diminution des émissions et a déclaré ne pas partager l'opinion de M. Manuel Gomez selon laquelle il serait souhaitable que le législateur s'abstienne de poser de nouvelles obligations dans ce domaine. Il a estimé qu'il convenait au contraire de continuer d'augmenter la pression environnementale, qui est seule en mesure d'amener les industriels à progresser. Il a fait valoir que Valeo s'efforçait d'être en pointe sur ce sujet, l'objectif étant de réconcilier l'automobile et la cité.
Il a d'ailleurs affirmé que les équipementiers disposaient aujourd'hui de la capacité de diviser par deux la consommation des véhicules et il a indiqué que ce résultat ne se limitait pas à la prise en compte des seules émissions de CO 2 , citant l'exemple des produits tels que des systèmes à soupapes électromagnétiques réduisant de 40 % la consommation totale de l'automobile ou encore le système STARs, dont la troisième génération, qui sera commercialisée dans près d'un an, permettra de récupérer toute l'énergie cinétique produite par le ralentissement de l'automobile au moyen d'ultra-capaciteurs.
Précisant les conditions de la mise en oeuvre opérationnelle de cette politique d'innovation, il a indiqué que Valeo lui consacrait 6 à 7 % de son chiffre d'affaires depuis 2001 et que cette activité occupait aujourd'hui 5.000 ingénieurs du groupe. Il a signalé que le groupe avait ainsi pu l'an dernier figurer au quatrième rang des entreprises françaises pour les dépôts de brevets, avec plus de 600 brevets derrière Renault, L'Oréal et PSA.
Il a aussi mis en avant la création par Valeo d'un concept de gestion du projet « autour du cadran » (en anglais : « round the clock ») reposant sur l'idée que l'innovation de Valeo ne s'interrompt jamais, puisque les travaux d'études d'un même projet sont réalisés en Asie le matin, en Europe le midi et aux Etats-Unis le soir avant de recommencer en Asie le lendemain.
M. Thierry Morin a précisé que ce système de travail en continu permettait à la fois de travailler plus vite et de travailler mieux. Au-delà des gains de temps, le fait de confier un projet d'études à plusieurs équipes rend en effet nécessaire la mise en place de procédures internes incitant au respect des délais, qui constitue souvent le point faible de ce type de travaux. En définitive, le temps consacré à la coordination des travaux demeure négligeable par rapport au temps gagné grâce à ce mode de travail « autour du cadran » et à la mise en place de règles et de procédures rigoureuses de gestion du projet.
Pour M. Thierry Morin, le groupe Valeo a mis sur le marché, pour chacun de ses domaines d'activité, des produits que n'offre aucun autre équipementier au monde : il a évoqué STARs qui équipe les Citroën C2 et C3 et permet d'interrompre automatiquement le fonctionnement du moteur lorsque la voiture s'arrête à un stop ou un feu rouge, celle ci ne redémarrant que lorsque le conducteur sollicite l'accélérateur. Cette technologie permet d'obtenir 80 % des résultats environnementaux atteints par un moteur hybride pour un coût cinq à six fois plus faible et ce, alors même que les véhicules équipés de ce dernier type de moteurs bénéficiaient de subventions, ce qui n'est pas le cas pour le système de Valeo.
Un autre système très novateur mis au point par l'entreprise Valeo permet, quant à lui, de garer le véhicule de manière automatique, sans que le conducteur ait besoin de toucher au volant.
M. Thierry Morin a par ailleurs estimé que la promotion de l'innovation exigeait surtout aujourd'hui de convaincre le marché, tant le secteur automobile faisait parfois preuve de conservatisme du fait notamment de l'obligation de résultat en termes de qualité des véhicules. Il a ainsi estimé qu'un des risques de l'innovation était d'aboutir à ce que, dans un premier temps, son groupe soit fragilisé par le fait d'investir davantage en recherche et développement, sans être certain que les nouveaux produits représenteront une part importante des ventes.
Enfin, s'agissant de la façon dont les équipementiers peuvent relever l'ensemble des défis exposés, il a fait valoir qu'une des forces des groupes tels que Valeo était de posséder et de développer des actifs industriels dont la valeur est beaucoup plus tangible que celles des éléments immatériels qui constituent par exemple l'essentiel de l'actif des entreprises du secteur tertiaire. Il a indiqué que c'est ce qui expliquait que certains de ses concurrents puissent accumuler des pertes pendant une longue période avant de se trouver en situation de faillite. Il a ajouté que ceci se vérifiait par exemple aux Etats-Unis, où Delphi et Visteon avaient subi perte sur perte sans pour autant disparaître. Il a toutefois signalé que ces entreprises avaient, du fait de leur situation financière, une tendance regrettable à se livrer à des pratiques de dumping leur permettant de conserver une part de marché importante. Il a ensuite précisé que, conformément aux exemples cités, ce phénomène était plus américain qu'européen, dans la mesure où General Motors avait initié les baisses de prix très fortes il y a deux ans. Il a toutefois pronostiqué que ces tensions pourraient se produire en Europe l'année prochaine du fait des difficultés des constructeurs français et de l'intensification de la compétition qui devrait en découler. Dans un tel contexte, il a estimé que la consolidation de la filière des équipementiers était un des éléments majeurs de la recherche d'un nouvel équilibre dans les relations avec les constructeurs.
M. Gérard Cornu, président, a tenu à remercier M. Thierry Morin pour le message positif porté par son témoignage.
M. Paul Raoult s'est, quant à lui, interrogé sur le point de savoir si l'innovation ne revenait pas en fait à rendre les véhicules plus complexes, ce qui exposait le marché au risque d'aller à l'encontre des souhaits réels du client.
M. Thierry Morin, tout en reconnaissant que les voitures étaient de plus en plus sophistiquées, a estimé que cette évolution ne devait pas représenter une difficulté pour le client, rappelant que Valeo disposait d'un laboratoire d'ergonomie et citant en exemple des micro-caméras fixées sur les yeux du conducteur pour vérifier s'il doit quitter la route des yeux pour atteindre son autoradio. Il a fait valoir que si les constructeurs utilisaient les nouveaux systèmes, c'était précisément pour simplifier l'utilisation des véhicules. Il s'est aussi déclaré très attaché à la notion d'intuition du conducteur, estimant tout à fait anormal qu'un automobiliste ait besoin de consulter un manuel de cent cinquante pages pour utiliser son véhicule.
Répondant à une intervention de M. Paul Raoult relative à un cas concret de difficulté de dépannage d'un véhicule du fait de la complexité des systèmes électroniques, M. Thierry Morin a répondu que si l'intérêt de l'électronique avait pu être remis en cause à quelques reprises par la presse, les apports de ces nouveaux équipements avaient été occultés. Quant à l'une des affaires qui avait défrayé la chronique, il a rappelé qu'il s'était finalement avéré que le véhicule était hors de cause, le conducteur ayant trafiqué sa voiture pour tenter de se la faire rembourser.
Il a en revanche reconnu que pouvaient survenir des problèmes de fiabilité, en particulier au niveau des moyens de réparation dont disposent les garagistes. A ce titre, il a rappelé que les constructeurs d'automobiles menant entre eux une vive compétition avaient, par le passé, une tendance naturelle à ne pas communiquer les codes source de leurs équipements électroniques à leurs concurrents. Il a ajouté que, bien que le droit communautaire ait désormais contraint les constructeurs à le faire à destination de l'ensemble des entreprises, il pouvait encore demeurer des difficultés liées au fait que ces transmissions d'informations s'effectuaient avec un peu de retard.
Après avoir noté que l'exposé de M. Thierry Morin avait clairement permis de comprendre la stratégie mise en oeuvre pour le redressement de son groupe, M. Jean Desessard a fait remarquer qu'il percevait une certaine divergence entre ces propos et ceux tenus par M. Manuel Gomez au sujet des exigences environnementales.
Sur ce point, il s'est inscrit en faux contre la thèse selon laquelle il ne fallait pas être plus exigeant en termes de normes environnementales, alors même que ces dernières sont une préoccupation croissante des consommateurs comme des responsables politiques. Il s'est d'ailleurs félicité de ce que les constructeurs français mettent au point des véhicules qui comptent aujourd'hui parmi les plus économes en consommation et les moins polluants.
Il a toutefois tenu à faire part de sa surprise quant au fait que ces performances soient trop peu connues, aussi bien du grand public que des pouvoirs publics, prenant l'exemple du Conseil régional d'Ile-de-France, au sein duquel le groupe des Verts avait demandé que la collectivité achète des voitures propres, produits pour lesquels il n'avait pas été possible de proposer de voitures françaises. Il a fait valoir que ce cas était illustratif de l'existence d'un problème d'information, car il lui a paru particulièrement étonnant que les services spécialisés du Conseil régional ne soient pas capables d'identifier l'existence d'une offre nationale de véhicules peu polluants. Il a d'ailleurs regretté que le président du Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA) ait donné le sentiment de rester sur la défensive, et non de valoriser le fait que les Européens, en raison de leur histoire et de leurs préoccupations environnementales, avaient édicté des normes ambitieuses, dont ils assumaient le coût financier.
M. Jean Desessard a ensuite interrogé M. Thierry Morin sur le point de savoir en quoi les normes européennes étaient pénalisantes, dans la mesure où les constructeurs non européens y étaient soumis eux aussi dès lors que leurs véhicules étaient exportés vers le vieux continent.
En réponse, M. Thierry Morin a estimé qu'à l'inverse, l'engagement de plus en plus marqué de l'Europe dans la production de véhicules peu polluants pourrait revenir à mettre en place indirectement l'équivalent d'une protection du marché intérieur, idée à laquelle M. Jean Desessard a adhéré.
Puis M. Daniel Dubois est revenu sur la stratégie de redressement de Valeo en demandant si la forte priorité donnée à l'innovation permettait au groupe de faire face à ses concurrents pratiquant le dumping sur les prix. Il s'est demandé si une des réponses appropriées ne consisterait pas plutôt à conclure des partenariats plus forts avec les producteurs automobiles et à être davantage intégré dans le processus d'assemblage.
M. Thierry Morin a répondu en rappelant qu'il était fortement attaché à l'idée d'indépendance de Valeo qui lui permettait de vendre ses produits à tous les constructeurs du monde, tout en admettant que les rumeurs d'OPA sur le groupe n'avaient jamais cessé ces dernières années.
Il a ajouté que, dès lors que cette indépendance était maintenue, la principale réponse de l'entreprise à ses défis consistait en une intensification de l'effort d'innovation, afin d'être en position plus favorable dans les discussions sur les prix menées avec les constructeurs. Il a d'ailleurs indiqué que son objectif était que Valeo n'ait pas de compétiteurs pour 15 % de ses produits et que tel était déjà le cas d'une dizaine d'équipements dont le système STARs.
M. Daniel Dubois a toutefois fait observer que ces produits très innovants ne représentaient aujourd'hui que 2 % du chiffre d'affaires du groupe.
M. Thierry Morin a répondu d'une part, que les produits innovants avaient représenté 27 % dans le carnet de commandes de Valeo en 2006 et il a fait valoir d'autre part, que cette stratégie d'intensification de l'innovation avait débuté il y a seulement un peu plus de trois ans. Par ailleurs, il a estimé que les pratiques de dumping manifeste constatées dans le secteur n'étaient probablement pas appelées à durer, dans la mesure où les entreprises concernées avaient plutôt vocation à être rachetées dans le cadre de la nécessaire consolidation du secteur de l'équipement automobile.
M. Yves Krattinger a fait part de ses interrogations sur le fait que la voiture à bas coût puisse prendre une place importante sur le marché de l'Europe de l'ouest et que les composants de ce type de véhicules puissent éventuellement provenir des pays émergents.
M. Thierry Morin a répondu que l'origine des équipements d'une voiture à bas coût dépendait elle-même du lieu de fabrication, précisant que si cette dernière était fabriquée en Roumanie, il y avait peu de chances pour que ses composants soient produits en France et ce, en raison de problèmes de compétitivité. Il a estimé qu'en revanche, si la voiture était fabriquée en France, elle pourrait bénéficier des composants produits dans notre pays, tant il y existait une capacité de fabrication d'équipements à un bon niveau de coût.
S'agissant de la question plus générale des perspectives de réussite des voitures à bas coût, il a estimé que celles-ci étaient très réelles, rappelant que l'achat automobile n'était pas d'abord un achat rationnel motivé par le besoin, mais un achat réalisé en fonction d'autres critères tels que l'envie ou les moyens financiers, ce qui laissait une place aux véhicules à bas coût.
Il a d'ailleurs fait observer qu'il existait en France, comme en Italie, une tradition de voitures à bas coût, citant en exemple la Fiat 500, la 4 CV Renault, la 2 CV ou encore la 4 L, qui avaient toutes remporté un grand succès. Quant à l'actuel succès d'estime dont bénéficie la Logan, il a rappelé qu'il n'était pas aujourd'hui suffisant pour en faire un produit leader du marché. Il a attribué cette situation au fait que ce véhicule n'avait pas été construit pour la France, alors même qu'une voiture à bas coût pourrait être très bien accueillie, dès lors qu'elle contiendrait les fonctionnalités auxquelles les consommateurs occidentaux se sont désormais habitués. Il s'est ainsi déclaré favorable à l'idée de voitures à bas coût, tout en estimant que ce serait une erreur de les assimiler à des voitures « sans rien » et en précisant qu'il devait s'agir d'un véhicule moderne, avec de bonnes performances en termes de tenue de route et de confort et capable de garantir un très haut niveau de sécurité.
M. Jean Desessard a ensuite posé deux questions, l'une sur l'existence en France d'un avantage lié à l'utilisation de robots dans le processus de fabrication et l'autre sur le point de savoir si les véhicules utilitaires faisaient partie de la gamme de véhicules équipés par les industriels français.
M. Thierry Morin a tout d'abord indiqué que Valeo fabriquait effectivement des équipements pour les véhicules de transports en commun ou les petits véhicules utilitaires, tout en s'estimant moins compétent qu'en matière de voitures particulières pour décrire la stratégie des clients constructeurs. Il a ajouté que le secteur recourait de plus en plus à la mécanisation, les voitures elles-mêmes étant très largement assemblées par des machines. Il a précisé que Valeo utilisait un grand nombre de robots en particulier pour les assemblages des systèmes de transmission, d'embrayage ou de phare. Il a fait observer que les usines de certains de ses clients japonais étaient aujourd'hui plutôt moins automatisées que les usines françaises, tant les industriels japonais focalisent davantage leur attention sur le suivi de production que sur l'automatisation du processus.
Il a conclu sur ce point en estimant que le coût de revient de l'automobile dépendait beaucoup plus de l'utilisation optimale de l'ensemble de l'actif industriel des entreprises que de la présence d'un équipement de production exceptionnel à un endroit donné.
M. Yannick Texier a estimé que, d'une façon générale, si les voitures étaient de plus en plus complexes, elles étaient aussi de plus en plus pratiques et de plus en plus sûres, les voitures françaises n'ayant dans ces domaines rien à envier aux autres.
Au sujet du système « stop and go » qui équipe déjà les véhicules du groupe PSA, il a posé une question sur les possibilités de voir des véhicules BMW ou d'autres marques étrangères prochainement équipées de ce système. Il a par ailleurs souhaité savoir si, aux yeux de M. Thierry Morin, la communication des constructeurs autour de ce système était bonne, notamment au sujet des économies d'émission de CO 2 .
Sur ce point, M. Thierry Morin a fait remarquer que la communication que pouvait réaliser un équipementier par rapport à un produit monté sur automobile était, par définition, limitée, même s'il a indiqué que Valeo parvenait davantage à faire passer ses messages au travers de la communication des constructeurs, citant l'exemple des phares au xénon. S'agissant des systèmes tels que le « stop and go », il a toutefois indiqué que le principal problème rencontré était l'inquiétude du constructeur par rapport aux habitudes de conduite.
Il a confirmé que ce produit donnait lieu à des projets avec plusieurs constructeurs, le système en question étant d'ailleurs lui-même en constante amélioration. Il a ainsi précisé que la fonction du système de démarrage et de charge de la batterie venait d'être changé à travers le remplacement de l'alternateur et du démarreur par une seule machine réversible. Il a aussi annoncé que dans une deuxième génération cette machine serait capable de récupérer l'énergie du freinage et que, dans une troisième génération, elle permettrait à la voiture de disposer d'un moteur plus petit, et donc de diminuer consommation et pollution. Il a estimé être en mesure d'imposer ce processus comme un nouveau standard dans un délai de cinq à six ans.
En conclusion de cette audition, M. Gérard Cornu, président, a rappelé tout l'intérêt porté par la commission à la défense de l'industrie nationale et des innovations technologiques françaises, jugeant que, de ce point de vue, le langage volontariste tenu par M. Thierry Morin était très rassurant.