B. UNE ARCHITECTURE ADMINISTRATIVE GÉNÉRALE INADAPTÉE ET PEU STRUCTURÉE

1. La mise en oeuvre de la politique de sécurité sanitaire n'est pas, à proprement parler, interministérielle

La mise en oeuvre de la politique de sécurité sanitaire relève au niveau national de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire » placée sous la coresponsabilité du ministre chargé de la santé et des solidarités et du ministre chargé de l'agriculture et de la pêche, et composée de deux programmes d'inégale importance :

- le premier, placé sous la responsabilité du ministre chargé de la santé et des solidarités, est intitulé « Veille et sécurité sanitaires » et son responsable administratif a été désigné en la personne du directeur général de la santé du ministère de la santé et des solidarités ;

- le second, placé sous la responsabilité du ministre chargé de l'agriculture et de la pêche, est intitulé « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » et son responsable administratif a été désigné en la personne du directeur général de l'alimentation du ministère de l'agriculture et de la pêche.

Toutefois, au cours de sa présente mission de contrôle sur pièces et sur place dédiée à l'utilisation des crédits publics en faveur de la lutte contre la grippe aviaire, votre rapporteure spéciale a pu constater que si, d'un point de vue opérationnel, il était possible de parler d'une forme d'interministérialité des deux administrations centrales compétentes, cette dimension interministérielle était moins affirmée au niveau déconcentré d'une part et faisait défaut s'agissant de l'élaboration du budget relatif à la politique publique de sécurité sanitaire d'autre part .

En outre, si la création d'un poste de délégué interministériel à la lutte contre la grippe aviaire (DILGA), placé auprès du Premier ministre 15 ( * ) , doit être accueillie favorablement, votre rapporteure spéciale ne peut que constater la nature hybride de ce poste : en effet, nommé en la personne du directeur général de la santé, c'est-à-dire d'un haut fonctionnaire de l'Etat, le DILGA a été très vite opérationnel, mais son statut administratif l'a privé, par essence, d'une autonomie politique pourtant indispensable du point de vue de l'architecture administrative et politique de l'Etat . Dès lors, v otre rapporteure spéciale voit, dans cette nomination, une dégénérescence de la fonction politique .

a) Une interministérialité administrative opérationnelle

Sur le plan opérationnel, au niveau central, l'interministérialité est réelle et se traduit de différentes manières :

- les relations entre les deux ministres compétents en matière de sécurité sanitaire ne posent pas de difficulté particulière et sont même de bonne qualité sur certains sujets spécifiques : ainsi, des réunions bimestrielles ont lieu entre les deux ministres pour faire le point sur les dossiers sanitaires en commun et les échéances à venir. En outre, il faut rappeler que la législation alimentaire est une compétence partagée entre les deux ministères et que la présentation, par les autorités nationales, à la Commission européenne du plan national de contrôle officiel pluriannuel (PNCOPA) relatif à la surveillance alimentaire constitue également un facteur de rapprochement entre les deux administrations ;

- une relation de confiance s'est instaurée entre la direction générale de l'alimentation et la direction générale de la santé  par le biais notamment de rencontres régulières et fréquentes entre les deux directeurs (toutes les six semaines environ) ;

- en outre, l'interministérialité de la gestion du risque a été assurée, par le biais de réunions interministérielles systématiques sous l'égide du Premier ministre, de saisines conjointes des agences sanitaires et d'une communication commune :  des réunions régulières, au moins trimestrielles, entre trois directions de trois ministères différents, la direction générale de l'alimentation, la direction générale de la santé et la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes, ont été organisées et les deux ministères, agriculture et santé, assurent la tutelle commune de plusieurs agences sanitaires, notamment celle de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) ;

- la création de la délégation interministérielle à la lutte contre la grippe aviaire est également un facteur de cohésion ;

- enfin, des réunions hebdomadaires de sécurité sanitaire réunissant l'ensemble des agences sanitaires ont constitué un élément important d'interministérialité en termes de méthode.

De fait, les différentes thématiques relatives à la santé humaine et à la santé animale sont de nature à rapprocher les administrations des deux ministères . Dès lors, on peut estimer que le fonctionnement opérationnel de l'interministérialité a donné satisfaction et s'est renforcé au fil du temps, sous l'égide notamment du délégué interministériel à la lutte contre la grippe aviaire (DILGA) .

Au niveau déconcentré , il faut noter l'animation par les directions départementales des services vétérinaires (DDSV) de missions inter-services (MISSA) qui assure une coordination technique entre les différents services déconcentrés de l'Etat.

Interrogées sur ce point par votre rapporteure spéciale, les deux administrations de tutelle ont fait valoir l'existence de liens étroits, sur le terrain, entre les services déconcentrés, DDSV d'une part, DDASS et DRASS d'autre part. Toutefois, à la lumière de ces différents déplacements, votre rapporteure spéciale ne peut s'empêcher d'avoir le sentiment d'une interministérialité déconcentrée « de façade » caractérisée plus par une juxtaposition de services sur le terrain que par une réelle réflexion conjointe des problématiques de sécurité sanitaire .

* 15 Décret n° 2005-1057 du 30 août 2005 instituant un délégué interministériel à la lutte contre la grippe aviaire.

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