3. Audition du BRGM
Etaient présents :
- Philippe VESSERON, Président du BRGM
- Jacques VARET, Directeur de la Prospective du BRGM.
Philippe Vesseron s'est tout d'abord employé à présenter le statut et les fonctions du BRGM. Le Bureau de recherches géologiques et minières, a-t-il rappelé, est un établissement public à caractère industriel et commercial créé en 1959. Placé sous la triple tutelle des ministères en charge de la recherche, de l'industrie, et de l'environnement, le BRGM a deux missions essentielles :
- comprendre les phénomènes géologiques, développer des méthodologies et des techniques nouvelles, produire et diffuser des données pertinentes et de qualité ;
- mettre à disposition les outils nécessaires aux politiques publiques de gestion du sol, du sous-sol et des ressources, de prévention des risques naturels et des pollutions, d'aménagement du territoire.
Philippe Vesseron a insisté sur le fait que la France recelait dans son sous-sol un véritable « trésor énergétique » dont une seule infime partie était aujourd'hui exploitée en France.
Il a toutefois regretté que la géothermie profonde comme superficielle souffrait d'un déficit d'image hérité de « l'aventure géothermale » des années 1980. Il a rappelé que la première opération de géothermie d'Ile-de-France avait été réalisée en 1969 à Melun, dans le cadre des recherches des énergies nouvelles, et suivie de deux autres opérations, jusqu'en 1976. Puis, après les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979, l'Etat a fortement incité les collectivités territoriales à se lancer dans des opérations de géothermie : 45 opérations géothermiques ont ainsi été réalisées en Ile-de-France de 1981 à 1985. Dans la plupart des cas, ce sont les municipalités qui ont été les maîtres d'ouvrage des opérations. Cependant, en 1986, les réseaux de chaleur géothermiques réalisés souffraient de difficultés économiques dues à la baisse du prix des énergies fossiles (contre-choc pétrolier), au plafonnement des prix de vente ainsi que de difficultés techniques (corrosion des tubages). Il a fait valoir que 29 opérations de géothermie étaient actuellement en exploitation en Ile-de-France (les deux tiers des puits construits dans les années 1980), auxquels il ajouter deux installations de production associées à une pompe à chaleur, Bruyères-le-Chatel et la maison de la radio, qui fut la première opération de géothermie en Ile-de-France réalisée en 1963.
M. Jacques Varet a indiqué que 29 opérations de géothermie étaient toujours en exploitation en Ile-de-France (les deux tiers des puits construits dans les années 1980), auxquels il ajouter deux installations de production associées à une pompe à chaleur, Bruyères le Chatel et la maison de la radio, qui fut la première opération de géothermie en Ile-de-France réalisée en 1963.
Au total, M. Jacques Varet a souligné que la géothermie était la première énergie renouvelable en région parisienne : les puits fournissent plus de 80 000 tep aux réseaux de chaleur qui alimentent en chauffage et en eau chaude sanitaire plus de 150 000 équivalents habitants. Il a également fait valoir que la géothermie en bassin aquitain présentait un intérêt certain, citant les exemples de Bordeaux, Dax et Jonzac.
M. Claude Belot, rapporteur , a soutenu qu'il convenait de corriger sans tarder le déficit d'image de la géothermie car les handicaps dont a pu souffrir cette filière au milieu des années 1980 (corrosion, faible rentabilité...) ont désormais totalement disparu : le potentiel est immense et le gisement totalement sous-exploité notamment en Ile-de-France et en région Aquitaine, régions où se trouvent des bassins sédimentaires aquifères, c'est-à-dire avec des ressources d'eau chaude en profondeur.
M. Philippe Vesseron a ajouté que si la géothermie avait pu être présentée dans les années 1980 comme un « procédé expérimental » ou une « aventure technologique », la situation était aujourd'hui radicalement différente. Avec les effets classiques de la courbe d'apprentissage, de la taille critique résultant de l'extension des marchés, la technologie est désormais totalement fiable, éprouvée et maîtrisée : l'introduction de matériaux composites (en lieu et place de l'acier) permet désormais de faire face au problème de corrosion qui a fortement hypothéqué les projets géothermiques menés en Ile-de-France entre 1980 et 1985. De même, les techniques de forage et de maintenance ont été améliorés et la productivité des puits optimisée.
M. Jacques Varet , Directeur de la Prospective, a élargi le tableau de la géothermie, en montrant qu'à coté des installations pour le chauffage à partir des bassins sédimentaires profonds il était pertinent de développer la géothermie pour la production d'électricité dans les îles volcaniques, et notamment dans les DOM (Guadeloupe, Martinique et Réunion). Il a soutenu qu'il y avait là non seulement un potentiel significatif de substitution aux centrales thermiques actuelles alimentées par de l'énergie fossile (pétrole essentiellement), mais aussi des perspectives de développement dans le monde. Avec la centrale de Bouillante en Guadeloupe, on dispose déjà, a-t-il plaidé, d'une référence (10+5MW) qu'il faut multiplier et dont il faut augmenter la puissance.
M. Jacques Varet a déclaré qu'à plus long terme le BRGM menait aussi, dans un cadre européen et notamment franco-allemand, des travaux de recherche sur la géothermie profonde, à partir de la plate forme de Soultz en Alsace.
Il a fait valoir, en outre, qu'il était extrêmement pertinent de développer de manière beaucoup plus significative en France, dans l'habitat individuel, la géothermie très basse énergie, citant l'exemple de la Suède où 70 % des constructions neuves se dotent aujourd'hui d'une pompe à chaleur géothermique. Il a plaidé en faveur d'un programme d'installation d'au moins 100.000 pompes à chaleur par an en France, soit une installation sur trois logements neufs puisque le parc de logements se renouvelle de 1 % par an, soit environ 300.000 logements. L'Etat, les collectivités publiques et notamment les maires doivent, a-t-il soutenu, encourager la valorisation de la géothermie superficielle dès la conception du bien, compte tenu du fait qu'il est beaucoup moins onéreux de créer un plancher chauffant à la construction plutôt qu'après.
En conclusion, Philippe Vesseron a formulé deux recommandations de nature à relancer la filière géothermique en France :
- améliorer la formation des professionnels : le secteur des énergies renouvelables, et singulièrement de la géothermie, manque actuellement de professionnels qualifiés. C'est pourquoi, a-t-il indiqué, la formation initiale et continue des techniciens constitue aujourd'hui un véritable enjeu. Par exemple, les pompes à chaleur nécessitent de combiner les compétences de plombier, de thermicien, d'électricien et d'électronicien ;
- rétablir le fonds de garantie géothermie : en effet, le problème de la géothermie est aujourd'hui moins la rentabilité économique que le risque pris par le maître d'ouvrage, qui lance un forage sans avoir la certitude qu'il sera fructueux, que ce soit du point de vue de la température ou du débit. Jusqu'en 1995, il y avait un fonds de garantie, alimenté à la fois par les maîtres d'ouvrage et les pouvoirs publics, et qui prémunissait les opérateurs contre les forages infructueux. Il a été supprimé et une mesure bienvenue consisterait à le rétablir et l'élargir au risque de défaillance dans le temps.
Enfin, il a signalé que le BRGM préparait, avec l'ADEME, une « feuille de route » géothermie, et que -parmi les propositions faites- figurait la création d'un centre d'excellence à Orléans sur la géothermie-chaleur (en partenariat avec le Conseil régional du Centre), et d'un pôle de compétitivité sur la géothermie haute énergie (notamment pour les îles volcaniques) en Guadeloupe.