VIII. RENFORCER L'ACTION MENÉE DANS LE SECTEUR RÉSIDENTIEL-TERTIAIRE |
Ce secteur représente un enjeu important puisqu'il est responsable en France de 33 % des émissions de CO 2 .
C'est aussi un domaine d'action dans lequel une politique de normalisation assez continue a été menée depuis 1973, en termes de réglementation thermique. Cette politique a obtenu des résultats, puisque depuis 1973 et sur les seules quinze dernières années l'efficacité énergétique des logements a augmenté de 10 % .
Amplifier cette action est aujourd'hui un impératif :
- la réhabilitation des bâtiments anciens pour les mettre à des normes de consommation de chauffage compatibles avec une durabilité de développement est un chantier de très grande envergure. Sur le parc de logements qui existera en 2050, soixante pour cent existent aujourd'hui, avec des taux de consommation moyens au m² de l'ordre de 200 KWh (250 KWh dans le tertiaire), alors que la norme applicable actuellement est de 80 KWh/m² et que la norme qu'il faudrait rapidement atteindre est de 50 KWh/m². Des estimations fournies par l'ADEME, la division par trois des consommations du parc existant représentera un coût de 400 à 600 milliards d'euros ,
- la construction de logements - et notamment de logements sociaux - s'accèlère (420 000 logements mis en chantier en 2005) sous l'effet de la poussée de la demande. Or, pour des raisons de coût, cette construction qui s'amplifie s'effectue sur la base de normes qui seront dépassées dans quinze ans alors que les constructions sont bâties pour un siècle ,
- l'urbanisme périurbain pavillonnaire se développe - souvent hors des zones desservies par les transports communs. En dix ans, la région Ile-de-France a utilisé la surface de Paris pour construire 30 000 à 40 000 logements par an 53 ( * ) . Cette urbanisation inspirée du modèle américain a le double inconvénient de contraindre les occupants à un usage quotidien de l'automobile et de bâtir des maisons individuelles dont les normes d'isolation sont moins importantes que celles des immeubles collectifs ,
- enfin, les consommations d'électricité spécifiques des produits électroménagers et des produits informatiques et audiovisuels se développent.
Au total, il faudrait appliquer les critères d'efficacité énergétique de demain aux logements et bureaux d'avant-hier et celles d'après-demain aux logements et bureaux qui se construisent aujourd'hui.
Des facteurs favorables y contribuent :
- le développement de nouveaux instruments comme les certificats d'efficacité énergétique des bâtiments qui devront être fournis à l'occasion de toute transaction à compter du 1 er juillet 2006 et celui des certificats d'énergie prévus par la loi sur l'énergie,
- le renforcement des instruments traditionnels comme le crédit d'impôt pour les dépenses d'équipement de production d'énergie ou source d'énergie renouvelable, d'isolation thermique ou de régulation de chauffage (qui ne concerne annuellement que 770 000 bénéficiaires),
- les propositions technologiques nouvelles qui se développent dans l'ensemble des domaines d'économies d'énergie dans le bâtiment,
- et, enfin, la perception de la montée des prix du fioul domestique et du gaz de chauffage dont on a constaté l'an dernier qu'elle était à la source d'une demande forte d'équipement renforcé de l'efficacité énergétique des logements.
Ce sont ces instruments qu'il sera nécessaire de renforcer pour améliorer le bilan énergétique du secteur résidentiel-tertiaire, tant en matière de bâtiment que de consommation d'électricité spécifique.
A. LE BÂTIMENT
1. Mettre le développement durable au coeur de l'action de l'État
On reproduit aujourd'hui les erreurs commises dans les années soixante où les pouvoirs publics, confrontés à une forte demande sociale de logements, réactivent massivement les aides à la construction pour satisfaire les besoins actuels indépendamment de ce que seront les nécessités de demain.
Or, compte tenu des échéances qui se rapprochent en matière de hausse du prix du pétrole et du gaz naturel et de changement climatique, il n'est pas admissible de reproduire le schéma qui aboutirait dans trente ans à relancer une action de rénovation urbaine, parce qu'on aura ignoré les exigences du surlendemain .
Il faut construire plus de logements à haute efficacité énergétique pour ne pas imposer des coûts insupportables aux usagers dès les années à venir.
La croissance des coûts de chauffage rend déraisonnable d'offrir à des populations défavorisées des logements dont le coût de fonctionnement risque d'excéder d'ici quinze ans leurs moyens.
Il sera donc nécessaire de modifier l'attribution de subventions au logement social en renforçant celles-ci pour les constructions à très haute performance énergétique.
* 53 Chiffres fournis dans le récent rapport du Conseil économique et social : « Les politiques de l'urbanisme et de l'habitat face aux changements climatiques » (avril 2006).