3. L'obligation alimentaire : l'absence de mode de calcul précis pour la fixation des pensions alimentaires

Aux termes de l'article 371-2 du code civil, « chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant » . En cas de séparation entre les parents, cette contribution prend la forme d'une pension alimentaire versée par l'un des parents à l'autre, qui est fixée par une convention entre les parents homologuée par le juge, ou, à défaut, directement par le juge, en application de l'article 373-2-2 du code civil.

Les pensions alimentaires sont en principe fixées en fonction de deux critères : le montant respectif des ressources de chacun des parents et les besoins de l'enfant.

Leur montant modique, d'environ 150 euros en moyenne par mois et par enfant, contribue à la précarité de nombreuses mères de familles monoparentales.

Au-delà de cette modicité, la fixation du montant de la pension alimentaire par le juge aux affaires familiales laisse parfois un sentiment d'inéquité, voire d'arbitraire, en l'absence de barème et de mode de calcul précis, car les pratiques varient considérablement d'un juge à l'autre.

Aussi engendre-t-elle un abondant contentieux, quoique tendant à diminuer en volume, dont l'évolution au cours des années récentes est retracée dans le tableau suivant :

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Demandes relatives à la pension alimentaire après divorce

41 650

38 751

36 515

34 052

30 337

29 929

Demandes relatives à la pension alimentaire des enfants naturels

17 039

15 335

14 494

14 130

14 840

16 343

Source : répertoire général civil

Cette conflictualité s'explique sans doute en partie par une insuffisante prise en compte, avant la rupture, de l'appauvrissement résultant de la séparation, ainsi que l'a souligné Mme Morgane Le Douarin, juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris, au cours de son audition devant la délégation.

Le montant modique de la pension alimentaire peut en effet être lié à la faiblesse des ressources du père, parfois également obligé de verser une prestation compensatoire à son ex-conjointe et de payer des pensions alimentaires pour les enfants de plusieurs lits. La fixation du montant de la pension doit aussi notamment tenir compte de l'augmentation des coûts d'hébergement supportés par le parent non gardien pour accueillir son enfant.

L'élaboration de barèmes indicatifs apparaît cependant souhaitable car elle permettrait à la fois d'aider les juges à fixer le montant des pensions alimentaires et d'améliorer, en amont, la prévisibilité des modalités de la séparation pour les couples en favorisant de ce fait la conclusion d'accords amiables sur le montant de la pension.

Mme Morgane Le Douarin s'est déclarée favorable à la mise à disposition des juges de tels barèmes, en précisant qu'ils devaient à son sens demeurer indicatifs, le juge devant pouvoir s'en écarter pour pouvoir régler au cas par cas des situations spécifiques. Ainsi que l'a fait observer Mme Marie-Dominique Bedou-Cabau, membre du bureau de la Conférence des Bâtonniers, les enfants n'ont pas tous les mêmes besoins en terme d'éducation et de loisirs et les parents peuvent effectuer des choix extrêmement variables dans ce domaine, ce qui justifie une fixation de la pension alimentaire au cas par cas et non pas selon une proportion mécanique des revenus.

Dans le même sens, tout en se montrant défavorable à la mise en oeuvre d'un barème automatique et obligatoire, M. Marc Guillaume, directeur des affaires civiles et du Sceau au ministère de la justice, a considéré que pour parvenir à plus d'équité dans les décisions de justice, il serait utile que le juge dispose d'outils d'aide à la décision fondés sur des indicateurs objectifs, par exemple le coût d'un enfant en fonction de son âge. Des expériences ont d'ailleurs déjà été conduites en ce sens.

La délégation recommande l'élaboration de barèmes indicatifs de calcul des pensions alimentaires fondés sur des critères objectifs, ce qui permettrait non seulement de faciliter et d'harmoniser la fixation du montant des pensions alimentaires, mais également de mieux prévoir les incidences financières de la séparation.

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