2. Les mécanismes à l'oeuvre
La hausse des prix des produits pétroliers est ressentie par les agents économiques, consommateurs ou entreprises, comme un choc de prix important (en France par exemple l'écart de prix à l'utilisation est, à partir de 2005, de l'ordre de 20%, l'amortissement par rapport au choc initial de 100% en dollars étant dû principalement au poids de la fiscalité pétrolière). Contre cette hausse, les agents vont essayer d'opérer des substitutions et de tenter de sauvegarder leurs revenus mais globalement ils n'y arriveront pas car le prélèvement pétrolier est un transfert extérieur. La demande globale va donc baisser.
a) Les effets de substitution
Les entreprises vont d'abord opérer des substitutions entre produits énergétiques au détriment des produits pétroliers qui ne peuvent malgré tout annuler la hausse du prix moyen de l'énergie. Cette hausse va diminuer leur consommation d'énergie et augmenter tous les autres facteurs (emploi, investissement, R&D) pour un niveau de production donnée.
Notons que pour l'investissement et la R&D, l'effet de substitution dû au prix de l'énergie va être renforcé à court et moyen terme par l'effet de la baisse du taux d'intérêt réel (qui est favorable à l'investissement).
Les ménages vont opérer également des substitutions entre énergies et entre produits à faibles et forts contenus en énergie (moins de déplacements en automobile au profit des transports en commun...)
b) Les effets « revenu » et la demande
En fait, les substitutions opérées par les agents ne peuvent leur permettre de maintenir leurs revenus car il y a un transfert extérieur.
Les entreprises vont tenter de préserver leurs profits en essayant de répercuter dans les prix le coût des produits pétroliers mais également d'autres facteurs (comme le travail) qui vont aussi augmenter en raison d'une certaine indexation des salaires sur les prix. Le succès de cette tentative va dépendre du « pouvoir de marché » de l'entreprise ou du secteur.
Les salariés vont tenter de préserver leur pouvoir d'achat en essayant d'obtenir une revalorisation de leur salaire. Le phénomène est traduit dans le modèle NEMESIS par l'équation déterminant les salaires par la variable d'indexation sur l'indice des prix à la consommation. Dans la version qui a été utilisée, l'indexation n'est que partielle à court terme, ce qui fait que le choc pétrolier diminue le pouvoir d'achat des ménages à cet horizon. A long terme, avec des délais relativement importants, l'indexation est totale : une hausse de 1% des prix entraîne une augmentation de 1% des salaires.
Par conséquent, l'augmentation du revenu égale au transfert pétrolier va se répartir en fonction de la possibilité pour les entreprises d'augmenter leurs prix et pour les ménages de maintenir leur pouvoir d'achat. Cette lutte pour le partage du revenu, diminué par le transfert vers l'étranger conduit à une inflation plus importante que ne l'aurait laissé prévoir le report mécanique de la hausse du prix du pétrole.
La baisse de revenu induit une baisse de la demande qui est amplifiée par les tensions inflationnistes et par la baisse de la demande des pays hors de l'Europe. La situation relative de chaque pays européen par rapport à l'ensemble de l'Europe va dépendre de la fiscalité sur le pétrole, de la structure productive, de l'intensité de la consommation de pétrole des ménages et des entreprises et de l'orientation du commerce extérieur.