2. Les pays de l'Union proportionnellement plus touchés
En juin 2005, dans son rapport sur l'économie française, l'INSEE a chiffré l'impact du doublement du prix du baril de pétrole sur six semestres (pour atteindre 50 dollars) sur l'économie française et européenne. Selon ses calculs, ce choc conduirait à une baisse du niveau de PIB de la France de 0,4 point au bout d'un an et de 1,4 point au bout de deux ans par rapport à une situation de référence sans hausse des prix du pétrole. Pour la zone euro, les chiffres seraient respectivement de 0,2 et 1,5 point de baisse du niveau de PIB.
Comme il a été indiqué précédemment, ces chiffres doivent être considérés avec précaution dans la mesure où les modèles utilisés s'appuient sur des mécanismes de transmission observés dans le passé mais qui peuvent ne plus refléter le fonctionnement actuel de nos économies.
Pour autant, cette estimation met en évidence une réalité : compte tenu du faible taux de croissance de la zone euro (1,4% prévu en 2005), toute baisse du PIB a des répercussions proportionnellement plus importantes dans cette région qu'aux Etats-Unis par exemple où le taux de croissance pour 2005 devrait atteindre 3,7% ou encore en Asie, où le taux de croissance des pays émergents devrait s'élever à 7,8% en 2005.
En France, la hausse des prix du pétrole aurait coûté 0,5 point de croissance (simulation OFCE) en 2005, ramenant le taux de croissance à 1,7%, soit en dessous de sa tendance de long terme (2,1% par an).
3. Une situation à risque
Si la hausse des prix du pétrole n'a eu jusqu'à présent qu'un impact limité, des incertitudes pèsent sur l'avenir de la croissance mondiale.
Comme il a été indiqué précédemment, le dynamisme de la croissance des Etats-Unis est en grande partie lié au faible niveau des taux d'intérêt à long terme. Or, rien ne permet d'affirmer que la banque fédérale américaine, compte tenu des déséquilibres croissants constatés au niveau de la balance du commerce extérieur et de la balance des paiements courants, ne soit pas amenée à durcir sa politique monétaire. Un ralentissement de la croissance américaine aurait alors un impact négatif sur l'ensemble des autres économies qui dépendent plus ou moins largement du marché américain pour leurs exportations et la croissance mondiale serait affectée.
Ensuite, l'hypothèse que la capacité de résistance des ménages au renchérissement de l'énergie s'éroderait, les conduisant à un renforcement des revendications salariales et à l'enclenchement d'une spirale prix-salaires (effets dits de « second tour ») ainsi que celle d'une réaction de la Banque Centrale Européenne à la poussée inflationniste doivent être envisagées 5 ( * ) .
On peut ainsi donner quelques conclusions d'une simulation conduite sur ce point par l'OFCE :
- l'apparition d'un effet de « second tour » inflationniste en France amputerait la croissance du PIB français de 0,6 point en 2006, le ramenant à uniquement 1,6% (du fait de la dégradation de la compétitivité) ;
- l'apparition d'un « second tour » inflationniste dans l'ensemble des pays amputerait la croissance du PIB français de 0,4 point, la ramenant à 1,8% (le choc est moins fort que précédemment car la France ne perd pas en compétitivité si le choc inflationniste est généralisé ; néanmoins la croissance mondiale s'en trouve ralentie) ;
- en cas de réaction de la Banque Centrale Européenne (hausse des taux), la croissance du PIB français serait ramenée à 1,6% en 2006 (contre 2,25% dans la prévision du Gouvernement).
Enfin, on peut s'interroger sur les éventuels effets de « cliquet » de la hausse du prix du pétrole : n'existe t-il pas un niveau de prix qui entraînerait une baisse sensible de la confiance des consommateurs et conduirait ainsi à une forte contraction de la demande ?
* 5 Le gouverneur de la Banque Centrale Européenne a d'ailleurs indiqué récemment la possibilité d'une hausse des taux en réponse à ce qu'elle considère comme des tensions inflationnistes.