13. Audition de M. Nicolas Chung, délégué aux technologies de l'information et de la communication de l'Association des Régions de France (ARF)
M. Nicolas Chung a tout d'abord indiqué que six régions (Alsace, Limousin, Corse, Réunion, Guadeloupe et Aquitaine) avaient des projets d'établissement et d'exploitation de réseaux de haut débit dans le cadre d'une délégation de service public, avec l'objectif de permettre l'accès au haut débit à l'ensemble de la population sur leur territoire. Il a noté que dans ce domaine, les régions intervenaient le plus souvent, à l'image de Rhône-Alpes et de l'Île-de-France, en appui d'initiatives d'autres collectivités territoriales, départements ou communautés de communes. Il a fait observer que les réseaux construits par les collectivités territoriales étaient entièrement ouverts, à la différence du réseau de l'opérateur historique qui ne l'est que sur le segment de la boucle locale.
En réponse à M. Claude Belot, rapporteur , qui relevait que France Télécom louait de la fibre optique, il a indiqué que les tarifs de location de la fibre n'étaient pas régulés par l'ARCEP et étaient donc prohibitifs en zones peu denses. Il a souligné que des infrastructures existantes appartenant par exemple à VNF ou à RTE étaient souvent utilisées pour la construction des réseaux des collectivités territoriales, permettant ainsi d'éviter l'écueil du doublon, indiquant que tel était notamment le cas pour le réseau du Limousin. Mettant l'accent sur les coûts liés au dégroupage, il a fait observer que certains opérateurs alternatifs s'étaient retirés des petits répartiteurs desservant des zones insuffisamment rentables. Estimant que le problème de la couverture était en passe d'être réglé et que tout le monde aurait bientôt accès au haut débit à 512 kbit/s, il a souligné que les attentes des utilisateurs concernaient désormais l'accès aux services à valeur ajoutée offerts par l'Internet haut débit, tels que la téléphonie sur protocole Internet dite téléphonie sur IP, la visioconférence et la télévision sur ADSL, à des tarifs compétitifs. Ainsi, a t-il conclu, l'enjeu n'est plus le problème de la couverture, mais l'effectivité de la concurrence qui conditionne l'émergence de telles offres. Il a, à cet égard, rappelé que l'ARF s'était déclarée très favorable au dégroupage dans une position adoptée le 9 mars 2005 relative au développement des réseaux et des services à haut débit.
Concernant la forme juridique de l'intervention des collectivités, M. Nicolas Chung a indiqué que l'ARF restait ouverte sur la possibilité de recourir à d'autres montages que la DSP, relevant toutefois que celle-ci permettait d'imposer des obligations au délégataire concernant son catalogue de gros, par exemple en terme de péréquation des tarifs.
Evoquant ensuite les technologies alternatives, il a tout d'abord souligné que d'après l'expérience de la région Aquitaine, le Wimax offrait des possibilités intéressantes, mais toutefois inférieures aux promesses généralement avancées pour cette norme : il permettrait ainsi de diffuser un débit de 18 Mbit/s sur un rayon de 20 kilomètres (plutôt que 50 Mbit/s sur 50 kilomètres). Il a rappelé que le Wimax allait être développé à grande échelle en Limousin en partenariat avec Altitude Télécom ou d'autres opérateurs lorsque de nouvelles licences auront été attribuées par l'ARCEP. Il a, à ce propos, fait savoir que l'ARCEP envisageait d'attribuer les licences Wimax à l'échelon régional. Concernant le satellite, il a considéré que son utilisation, expérimentée notamment en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, était intéressante pour faire reculer les zones blanches, M. Claude Belot relevant néanmoins qu'il demeurait une technologie coûteuse. Enfin, il a relativisé l'intérêt des courants porteurs en ligne (CPL), dès lors que les équipements d'EDF étaient bien souvent localisés dans les mêmes endroits que ceux de France Télécom, c'est-à-dire dans les zones denses déjà couvertes par le haut débit. Il a indiqué que le recours aux technologies alternatives visait en général à répondre à un problème de couverture et non de concurrence, puisqu'un seul opérateur à la fois pourrait les utiliser.
Interrogé sur l'opportunité de développer davantage la fibre optique, il a estimé que son utilisation était incontournable pour les réseaux de collecte et bientôt inévitable pour les entreprises, mais il s'est montré prudent s'agissant de son extension à destination des particuliers, compte tenu du coût important du remplacement du réseau constitué par la paire de cuivre. Il a néanmoins plaidé pour qu'à l'occasion des opérations d'urbanisme, des fourreaux soient aménagés en vue d'un éventuel équipement en fibre à l'avenir.
M. Claude Belot ayant considéré que le cuivre gardait tout son intérêt pour desservir les usagers finals, à condition que ceux-ci ne soient pas trop éloignés du répartiteur, M. Nicolas Chung a évoqué la possibilité de dégrouper au niveau des sous-répartiteurs.
Abordant ensuite l'opportunité d'inclure le haut débit dans le périmètre du service universel, il a admis que cette question était complexe et qu'elle nécessitait l'élaboration d'une modalisation économique détaillée. Estimant que les offres dites « triple play » constitueraient un jour une demande de base, il a suggéré de définir le service universel du haut débit comme un objectif à atteindre dans le temps : il pourrait, par exemple, consister à garantir l'accès de tous à une offre de haut débit déterminée dans un délai maximal de trois à quatre ans, afin d'éviter que les écarts ne se creusent à l'échelle d'un territoire.
M. Claude Belot s'est dit ouvert sur l'inclusion du haut débit dans le service universel pour les pays qui, comme la France, étaient relativement avancés en matière d'accès à l'Internet, reconnaissant toutefois qu'une telle obligation ne pouvait être imposée à d'autres Etats membres de l'Union européenne, tels que les nouveaux adhérents, compte tenu de leur retard dans ce domaine.
M. Nicolas Chung a fait état des bons résultats enregistrés par la France en matière de pénétration et de tarifs du haut débit. Revenant sur les projets de réseaux à haut débit des collectivités territoriales, il a constaté la progression désormais modérée du nombre de projets engagés, après la phase d'engouement liée à l'adoption de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
En conclusion, M. Claude Belot a souhaité que les régions s'impliquent, dans le domaine du haut débit, en faveur du maintien de la cohérence à l'échelle de leur territoire.