B. LE DÉFICIT CHRONIQUE DE L'INRAP, ET LA DÉRIVE RELATIVE DU RECRUTEMENT

1. Un rendement de la collecte des redevances inférieur aux prévisions

Le produit de la redevance d'archéologie préventive devrait être compris en 2004 entre 70 et 80 millions d'euros, selon les estimations réalisées lors de l'adoption de la loi du 1 er août 2003.

Rappelons que les DRAC devaient avoir à traiter, en régime de croisière, 20 % des dossiers de diagnostic d'archéologie préventive, et qu'elles devraient liquider environ 80 % du produit de la redevance, les DDE traitant pour leur part 80 % des dossiers et liquidant 20 % du produit de la redevance. Les DRAC devraient donc, en année pleine, émettre des titres de liquidation de la redevance pour un total estimé à 60 millions d'euros, la part des liquidations effectuées par les DDE étant évaluée à 20 millions d'euros.

Le rendement de la collecte des redevances s'est révélé chaque année bien inférieur aux prévisions , pour trois raisons :

- la modification de l'assiette et des modes de calcul des redevances a entraîné des effets naturels de latence dans la mise en oeuvre des recouvrements ;

- elle a contribué à l'absence, jusqu'en mai 2005, dans les DRAC, d'un logiciel capable d'assurer la chaîne de traitement des redevances concernant les opérations relevant du code de l'environnement, dont la liquidation leur incombe ;

- elle a aussi parfois servi d'alibi à la faible mobilisation de la plupart des DRAC et même, à un moment, des DDE.

2. Les besoins de financement de l'INRAP

En résumé, les besoins et la réalité du financement de l'INRAP par la redevance d'archéologie préventive se présentent ainsi :

- les dépenses totales annuelles de l'INRAP s'élèvent maintenant à environ 118 millions d'euros, dont quelque 65 millions d'euros de frais de personnel ;

- la partie des dépenses concernant les fouilles est couverte par la facturation que supportent les aménageurs, avec l'aide, le cas échéant, des subventions de péréquation versées par le fonds national d'archéologie préventive (FNAP). Financé par une quote-part minimale de 30 % prélevée sur la redevance d'archéologie préventive, le FNAP a notamment l'obligation de prendre en charge les fouilles induites par les constructions de logements locatifs aidés et de logements réalisés par les personnes physiques pour elles-mêmes, y compris dans des ZAC ou des lotissements. A ce jour, selon la réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial, fournie par la direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA) 9 ( * ) :

o le FNAP n'a fait aucune opération en 2003 et en 2004, puisque l'arrêté d'application, en date du 31 janvier 2005, définissant le contenu des demandes concernant les opérations pour lesquelles le financement est de droit, n'a été publié que le 11 février 2005. A fin mars 2005, il n'avait en instance que 9 dossiers pour un montant total de 1,150 million d'euros ;

o les membres de la commission chargée de définir les critères d'éligibilité des demandes n'ont été nommés par arrêté que le 1 er mars 2005 et ont tenu leur première réunion le 19 mai 2005 ;

o le FNAP a commencé à percevoir les premiers reversements de la redevance le 9 juin 2004, et disposait de 3,835 millions d'euros en trésorerie au 31 décembre 2004 ;

o il a budgétisé en 2005 une recette de 19,770 millions d'euros représentant 30 % de l'hypothèse de recette d'archéologie préventive qu'il avait retenue (60,51 millions d'euros). Mais à fin mars 2005, il n'avait encore reçu que 0,770 million d'euros au titre de cet exercice.

- l'INRAP voudrait :

o idéalement, que la redevance d'archéologie préventive rapporte quelque 80 millions d'euros, dont 20 à 25 millions d'euros pour le FNAP et 55 à 60 millions d'euros pour l'INRAP ;

o et, au moins, qu'elle atteigne 65 millions d'euros, dont 10 millions d'euros pour le FNAP et 55 millions d'euros pour l'INRAP ;

o ainsi le budget prévisionnel (et la décision modificative) pour 2005 envisage-t-il un total de 76 millions d'euros, répartis entre le FNAP (19,770 millions d'euros) et l'INRAP (56,240 millions d'euros). Les produits seraient constitués par 15,5 millions d'euros au titre de la redevance de la loi de 2001 et 60,51 millions d'euros au titre de la redevance d'archéologie préventive.

La société « Conjuguer » a été mandatée par le ministre de la culture, M. Renaud Donnedieu de Vabres, pour évaluer le rendement de la redevance d'archéologie préventive et les éventuelles hypothèses d'adaptation. Dans son rapport final, rendu le 28 février 2005, elle a estimé que la redevance d'archéologie préventive, telle que modifiée à l'été 2004, aurait un potentiel fiscal de 52,7 millions d'euros, et que son rendement net pouvait être estimé à 43 millions d'euros.

Il a semblé à votre rapporteur spécial que les estimations réalisées étaient construites sur des hypothèses sérieuses et réalistes. On ne peut donc que constater un écart de 18 millions d'euros entre le potentiel et le rendement fiscal. Si l'on estime, comme l'INRAP l'a indiqué à votre rapporteur spécial, que le besoin de financement de l'établissement public est de l'ordre de 65 millions d'euros, il manquerait annuellement, aujourd'hui, 17 à 23 millions d'euros pour atteindre l'équilibre .

De plus, les difficultés à court terme de liquidation et de recouvrement ont limité les montants réellement perçus du fait des délais de mise en place des modifications apportées par la loi du 9 août 2004 précitée au calcul de la redevance et à la possibilité de choix laissée temporairement aux aménageurs entre la redevance originelle de 2003 et sa version réformée en 2004.

A partir du tableau fourni le 19 mai 2005 par la DAPA, sur la base des informations données par l'INRAP, on peut comparer ce qui précède à la réalité de 2003 et 2004 et aux objectifs très optimistes de 2005 :

Un déficit spécifiquement dû à la mauvaise perception de la redevance s'est donc ajouté au déficit structurel résultant d'une part du décalage entre le niveau de recettes théoriquement prévu et les dépenses à couvrir, et de l'absence d'attitude volontariste pour adapter les dépenses aux recettes à attendre réellement de la redevance, d'autre part.

La DAPA a réagi en demandant aux SRA, par une circulaire du 3 janvier 2003, de réguler le nombre de prescriptions de diagnostics à hauteur de 10,26 % du nombre de dossiers d'aménagement examinés. Mais les excès de prescription constatés en 2001 et en 2002 ont dû être résorbés au cours des années suivantes.

* 9 Pages 1,5 et 6 de la réponse fournie à votre rapporteur spécial le 19 mai 2005 par la DAPA.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page