I. VARIATIONS SUR LA POLITIQUE DE R&D

Les variantes de mise en oeuvre de la politique d'accroissement de l'effort de R&D sont appréhendées dans l'hypothèse des mécanismes médians du modèle et donc notées V 0,i .

Le financement public de la R&D

L'exercice avec financement public de l'accroissement de R&D (V 0,1 ) conduit à de meilleures performances aussi bien dans la phase de multiplicateur que dans la phase où se développent les effets d'offre. En effet, l'accroissement de PIB est en 2030 de 15,2 % en Europe contre 12,1 % dans le scénario de référence V 0,0 où le financement est privé. En France, le PIB augmente respectivement de 8,8 % et de 7,1 %. Si l'on rapporte le surplus de croissance au déficit ex ante , c'est-à-dire dû au seul accroissement des dépenses liées au soutient de la R&D par l'Etat, le multiplicateur est de 8,1 en Europe et de 6,4 en France.

Tableau 9: Résultats des variantes de mise en oeuvre de la politique

 

V 00

V 0,1 financement public

V 0,4 commandes publiques

 

Europe

France

Europe

France

Europe

France

PIB 1

12,1

7 ,1

15,2

8,8

15,8

9,5

Emploi total 2

10 007

949

13 867

1 321

17 104

1 867

Emploi de recherche 2

3 140

346

3 273

359

3 298

364

Solde budgétaire 3 2010

0,13

0,07

- 0,81

- 0,57

- 1,9

- 1,07

1 en écart au compte tendanciel en 2030, en %.

2 en écart au compte tendanciel, en milliers.

3 en points de PIB

Cela s'explique par l'accroissement du déficit de l'Etat qui permet d'éviter les tensions inflationnistes dues au financement de la R&D par l'augmentation des prix des entreprises dans V 0,0 . Ainsi, les pertes de compétitivité des entreprises sont limitées dans la première période. L'accroissement des importations et la diminution relative des exportations s'en trouvent dès lors réduits dans ce scénario. Cet avantage de compétitivité se retrouve encore à long terme, ce qui explique, en 2030, la plus forte croissance du PIB. Cela se traduit également par des créations d'emplois plus importantes : 13,9 millions d'emplois supplémentaires sont créés en Europe, dont 3,3 millions en France.

Il apparaît ainsi que ce type de relance publique, axé sur les investissements en R&D, n'est pas défavorable à la compétitivité du pays, et ce, même à un horizon de 30 ans. Les tensions inflationnistes engendrées par le surcroît de demande sont réduites par les gains de productivité provenant des investissements en R&D. Néanmoins, on ne saurait trop exagérer la portée de ce résultat. En effet, le modèle n'étant pas intégré financièrement, il n'y a aucun retour des déficits publics sur les taux d'intérêt et les comportements financiers et économiques en général. En revanche, on peut constater que les finances publiques demeurent excédentaires (à partir de 2017 pour l'Europe). En 2030 cet excédent est de 2 % du PIB en Europe. Ces résultats, bien qu'optimistes, incitent à réfléchir au caractère particulier des déficits liés à la R&D en raison de leur durée limitée et même des surcroîts de PIB et de solde des finances publiques qu'ils engendrent à long terme.

Marchés et commandes publiques

L'augmentation de l'effort de R&D provient ici en partie de commandes adressées à des secteurs intensifs en R&D (chimie, machines de bureau, biens électriques et matériels de transports). Les commandes représentent 2,5 % du PIB en 2010. Ceci correspond à une croissance de la production en 2010 de 8,9 % pour la chimie, de 12,1 % pour les machines de bureau, de 18 % pour les biens électriques et de 9,4 % pour les matériels de transports. Ces chiffres sont donc très élevés. Malgré cela, l'accroissement de R&D est insuffisant pour atteindre les objectifs de Barcelone et donc il est nécessaire d'ajouter un effort supplémentaire de toutes les entreprises. En fait, les commandes publiques adressées aux secteurs intensifs accroissent l'intensité de R&D du tiers de l'effort nécessaire en 2010. Les deux tiers restants sont mis en oeuvre de la même manière que dans la variante V 0,0 .

Les résultats de la variante V 0,4 sont plus favorables que ceux obtenus avec le scénario V 0,0 , à la fois en termes de PIB et d'emploi, tout au long de la période. Le PIB européen s'accroît de 2,5 % en 2010 et 15,8 % en 2030, alors que l'emploi augmente de 3,5 millions en 2010 et de 17,1 millions en 2030. Cela est dû à l'effet d'entraînement créé par les commandes publiques financées par déficit public. Néanmoins, durant la première phase, l'économie européenne est moins compétitive que dans la variante V 0,0 . En effet, le surcroît de demande entraîne des tensions inflationnistes qui ne sont pas compensées par les effets de la R&D. Les fortes créations d'emplois dans les secteurs intensifs en R&D favorisent, d'une part, la consommation et, d'autre part, l'accroissement des salaires via l'effet Phillips, ce qui en retour soutient la demande. Par exemple, en 2010, le salaire réel augmente de 2,7 % dans V 0,4 en 2010 et de 1,4 % dans V 0,0 . Durant la deuxième phase, après 2010, la croissance des prix est limitée par les effets bénéfiques de la R&D. Mais, comparativement au scénario central, le déflateur du PIB européen est deux fois moins réduit en 2030. Les bénéfices de la politique en terme de compétitivité sont donc amoindris par la relance budgétaire. Il apparaît ainsi que la croissance est ici davantage tirée par la demande. Les effets bénéfiques de la R&D ne sont pas suffisants pour annuler les tensions inflationnistes de la relance keynésienne, dont ils permettent néanmoins de retarder les effets négatifs.

Graphique 106 : Impacts macroéconomiques des commandes publiques*

* En % par rapport au compte tendanciel.

La concentration, dans ce scénario, de l'effort de R&D sur les secteurs technologiquement avancés procure ainsi trois types d'avantages par rapport au scénario de référence V 0,0 :

la productivité de la R&D augmente de façon plus importante ;

le rôle des externalités technologiques est renforcé ;

les gains de productivité sont limités dans les secteurs intensifs en main d'oeuvre ce qui y est très favorable à la progression de l'emploi.

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