CHAPITRE III
L'INTROUVABLE
RÉGULATEUR DU FOOTBALL INTERNATIONAL
Par sa dimension internationale, le football européen appelle l'existence d'organismes à même d'organiser cette activité à un niveau supranational. Or, malgré les interventions des regroupements de fédérations nationales ou des institutions européennes, cette fonction n'est pas convenablement assurée . La gouvernance du football international , et, en particulier, du football européen, n'est pas satisfaisante . Ce constat se fonde sur des observations portant à la fois sur son organisation institutionnelle et sur l' action concrète des acteurs .
I. LES FÉDÉRATIONS INTERNATIONALES OU LE CONFLIT ENTRE PROMOTION ET RÉGULATION
L'internationalisation du football s'est, dès l'origine, traduite par la création d'instances internationales regroupant les fédérations nationales. Initialement lieux de concertation centrés sur les questions sportives, ces instances ont été confrontées à l'intensification du processus de commercialisation d'un football professionnel. Les fédérations nationales, concentrées sur la gestion du football amateur et des équipes nationales, ont délégué partout l'organisation à des ligues, qui ne participent pas directement aux travaux de ces fédérations internationales qui les composent. Ce hiatus n'a pas empêché ces dernières de prendre pleinement la mesure des intérêts commerciaux à l'oeuvre dans le football.
Leurs activités de promotion du football, à dimension commerciale de plus en plus accusée, se sont considérablement développées . Cet essor, qui peut entrer en contradiction avec leur mission de régulateur , contraste avec la relative inefficacité avec laquelle elles s'acquittent de cette autre dimension de leur activité .
A. LES AMBIGUÏTÉS DE LA FIFA
La renommée de la FIFA est principalement liée à ses fonctions d'organisateur de la Coupe du Monde de football. Pourtant, par sa situation, au sommet de la pyramide en forme de quoi est organisé le football, la FIFA devrait occuper une place plus déterminante pour le fonctionnement du football, place que ses statuts lui reconnaissent d'ailleurs.
Cependant, si elle a investi certains champs importants relevant, soit du domaine de la régulation, soit du domaine du développement, ses interventions restent loin de satisfaire les besoins de régulation que la dimension commerciale du football suscite, et son action dans le champ de la promotion du football, qui reste nettement marquée par les enjeux internes à l'organisation, manque souvent de la cohérence nécessaire.
Ainsi, la FIFA qui n'échappe pas aux contradictions qui peuvent surgir entre sa mission de régulateur et celle de promoteur du football , mène une action au service du développement, dont le principe doit être salué, mais qui reste trop incertaine.
Les modalités d'institutionnalisation et de gouvernance de la FIFA sont à l'origine de ces ambiguïtés .
1. Une association de droit suisse au sommet du football mondial
La Fédération internationale de football association (FIFA) a été créée en 1904 à Paris après qu'un « International football Association Board » (Board) avait vu le jour en 1882 réunissant les fédérations du Royaume-Uni. Ce rappel historique a quelques prolongements contemporains, la FIFA et le « Board » partageant encore la compétence de gardiens des lois du jeu. Pour le reste, le rôle de la FIFA est devenu prépondérant.
Organisée sous forme d' association à but non lucratif de droit helvétique ( le siège de la FIFA est à Zurich), elle regroupe environ 200 associations nationales et représente le sommet de l'organisation pyramidale du football dans le monde. La FIFA ne reconnaît qu'une fédération par pays, ce qui exclut toute concurrence entre des organisations pluralistes au niveau des Etats, contrairement à ce qu'on peut trouver aux Etats-Unis. Par ailleurs, si elle reconnaît l'existence de six confédérations régionales, dont l'UEFA, celles-ci ne comptent pas parmi ses membres.
Les attributions de la FIFA sont définies par ses statuts. Le premier objectif mentionné est d' assurer la promotion du football . Le second objectif est de contrôler que le fonctionnement du football est bien conforme aux statuts et règlements de la FIFA ainsi qu'aux lois du jeu.
On doit souligner d'emblée la dualité des objectifs poursuivis : organe régulateur , la FIFA est aussi un opérateur dont les conditions d'exercice de ses activités reposant sur sa seule appréciation. On relèvera également la dimension très vaste des compétences de la FIFA qui lui permettent d'intervenir, du moins en théorie, sur l'ensemble du champ, comme en témoignent, de façon un peu caricaturale, les sanctions lourdes un moment infligées au Cameroun pour avoir porté un maillot non-homologué par elle.
L' organisation de la FIFA appelle enfin une présentation sommaire afin de mettre en évidence le caractère fortement présidentiel de son régime. Le Congrès de la FIFA composé de l'ensemble des associations élit directement le Président et peut seul modifier les statuts et le règlement d'application. Le Comité exécutif est, quant à lui, élu par les confédérations selon une pondération inégalitaire, puisque l'Europe y est plus représentée que les autres confédérations, mais cependant assez différenciée pour assurer une pluralité d'origines. Le Comité exécutif est censé être l'organe de gouvernement de la FIFA mais la fréquence de ses réunions (2 fois par an) et la reconnaissance du Président comme représentant légal de la FIFA donnent à ce dernier un réel pouvoir, d'autant que la vie de l'organisation est articulée sur l'existence d'un très grand nombre de commissions (24 commissions permanentes) en charge chacune d'un segment d'activité.