INTRODUCTION DE L'APRÈS-MIDI
M. Gérard Larcher,
sénateur des Yvelines,
président de la commission des Affaires économiques et du Plan du Sénat

En ouvrant vos travaux de cet après-midi, je voudrais avant toute chose saluer votre présence nombreuse à ce colloque organisé à l'initiative de la Commission des Affaires économiques et du Plan, aux destinées de laquelle j'ai l'honneur de présider, et plus particulièrement de Jean-François Le Grand, un de ses membres éminents.

Les élus sont tous, dans la diversité de leurs responsabilités, confrontés à la mise en oeuvre de cette directive européenne. À plusieurs reprises, notre Commission a eu l'occasion de se pencher sur les difficultés, les inquiétudes légitimes, les craintes ou les fantasmes qu'elle génère. Ainsi, en 1997, notre collègue Jean-François Le Grand s'était vu confier un rapport sur ce sujet et avait prolongé sa réflexion par une proposition de loi adoptée en juin 1998 par le Sénat mais auquel le Gouvernement de l'époque s'était farouchement opposé.

Devant les difficultés d'application que connaît encore Natura 2000, devant l'urgence qu'il y a pour la France, s'agissant de la désignation des ZPS, à réagir avant que ne se déclenche le jeu fatal des astreintes, devant la nécessité de restaurer un vrai climat de confiance afin de transformer le timide démarrage de Natura 2000 en essai victorieux, la Commission des Affaires économiques a, une fois encore, décidé de relever le défi.

La directive Natura 2000 est trop importante pour être exclusivement confiée à des spécialistes de l'environnement, elle a trop d'impacts sur notre société pour ne pas être « managée » par les élus. Nous avons été choisis pour cela, il faut que nous retrouvions toute notre place.

Ce matin, au cours d'une première table ronde, vous avez d'abord contribué à redéfinir le cadre et les enjeux de Natura 2000 : l'objectif de préservation de la biodiversité, la méthodologie de la directive qui fixe un objectif, laissant aux États-membres le choix des moyens, les voies et moyens adoptés par la France.

Ensuite, vous avez illustré votre propos en mettant en valeur les actions déjà menées, la mise en valeur ne voulant pas dire que vous avez choisi seulement des actions réussies, mais bien au contraire que vous avez ciblé des actions qui recelaient en elles l'ensemble de la problématique.

Je voudrais remercier tout particulièrement tous ceux qui ont accepté de dire les choses comme elles sont ou comme ils les ont ressenties, plutôt que de chercher à les décrire comme ils auraient voulu qu'elles soient. Il m'a été rapporté, que l'on soit pour ou que l'on soit contre, que vous avez d'abord et avant tout été vrais. C'est à ce prix seulement que l'on peut faire évoluer des situations et que le Parlement est mieux à même de faire des observations ou de formuler des propositions hors des dogmatismes.

Cet après-midi, nous nous plaçons dans une démarche prospective pour dégager ensemble les lignes de force qui peuvent assurer le succès du réseau Natura 2000 demain.

Comme l'a souligné Jean-François Le Grand dans son introduction, il faut replacer Natura 2000 au coeur d'un aménagement partagé et concerté de nos territoires . Ceci doit se traduire à toutes les étapes du processus et vous nous ferez des suggestions. Il faut parallèlement que l'implication des élus locaux soit mieux reconnue. Pour cela, il y a sans doute un processus de pédagogie accentué à mettre en oeuvre. Je crois également indispensable de renforcer et de réorienter la communication institutionnelle sur Natura 2000, et nous avons un spécialiste en communication pour nous éclairer.

Mais, comment dégager un consensus minimal de tous les acteurs concernés ? Beaucoup de suggestions très intéressantes seront formulées cet après-midi. Pour ma part, il y a un principe qu'il m'apparaît indispensable de respecter, à savoir ne pas faire preuve d'intégrisme écologique . Il ne convient pas de faire de l'entrée dans Natura 2000 une entrée en religion. Pour assurer la biodiversité de nos territoires, nul besoin de revêtir une chasuble verte et de s'incliner devant l'autel d'une nature mythique et intouchée. Il suffit d'avoir la volonté de préserver des écosystèmes fragiles et de préserver leur existence en inventant les nécessaires conciliations avec les autres exigences du monde moderne. Pour Natura 2000, ce n'est pas d'intégrisme, c'est de pragmatisme dont nous avons besoin .

Ceci posé, ne nous leurrons pas : nous n'esquiverons pas la délicate question des financements à trouver pour mettre en place et animer le réseau et contractualiser sur les mesures de gestion. Les contraintes budgétaires au niveau national, auxquelles s'ajoutent, au niveau communautaire, celles liées à l'élargissement, nous imposent d'être raisonnables, mais non pas de baisser les bras. En confiant aujourd'hui ce second rapport à Jean-François Le Grand, notre Commission réaffirme son intérêt pour la protection de la biodiversité, en inscrivant « l'outil » Natura 2000 dans une démarche de valorisation de nos territoires ruraux.

Il s'agit de redonner du sens politique à cet objectif ambitieux en permettant aux collectivités territoriales et aux acteurs locaux de se l'approprier. Natura 2000 ne sera un succès que s'il est porteur d'une identité collective.