Audition de M. Hervé
LE FLOC'H LOUBOUTIN,
Directeur de la législation
fiscale
(2
octobre 2002)
M.
Jean ARTHUIS, président
- J'accueille tout d'abord
M. Hervé Le Floc'h Louboutin, directeur de la
législation fiscale. Merci Monsieur le Directeur d'avoir accepté
de venir nous faire part de votre expérience en matière de
fiscalité locale et de répondre à nos questions qui
portent principalement sur l'utilisation actuelle des marges de manoeuvre
fiscales dont disposent les élus locaux et sur l'assiette et le produit
des impôts locaux.
J'aimerais également que vous nous fassiez part de vos idées en
matière de nouvelles assiettes locales. En effet, nous sommes à
la veille d'une étape importante de décentralisation dans
laquelle sera sans doute consacré le principe d'autonomie
financière des collectivités territoriales, alors que la
fiscalité locale présente une faible propension à se
réformer depuis quelques années.
Les bases des impôts liés au foncier qui sont les moins sujettes
à une délocalisation - taxe d'habitation ou impôts
fonciers proprement dits - devaient être actualisées. Cependant,
les conséquences d'une actualisation étaient telles qu'aucun
gouvernement ne s'est risqué à mettre en oeuvre cette
réforme. Les alternances politiques n'ont rien changé à
cet immobilisme. Les différentes réformes ont eu pour objet de
faire disparaître certains impôts locaux en les compensant
progressivement par des dotations de l'Etat, sans d'ailleurs être en
mesure de proposer un dispositif cohérent. C'est la raison pour laquelle
nous faisons aujourd'hui appel à vous pour nous éclairer.
Si vous le voulez bien, votre exposé répondra aux questions que
nous vous avons adressées. Ensuite vous serez soumis aux questions des
membres de la commission des finances. Monsieur le directeur, vous avez la
parole.
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN, directeur de la législation
fiscale
- Le document qui vous est distribué répond aux
différentes questions que vous m'avez adressées. Mon intervention
liminaire se limitera donc aux interrogations portant sur le devenir des quatre
taxes locales directes ; ce débat ne peut être occulté
par celui qui porte sur les impôts nouveaux susceptibles d'être
transférés aux collectivités territoriales dans le cadre
de la décentralisation.
Je me concentre sur ces taxes pour deux raisons. La première tient
à la part essentielle qu'elles occupent dans les recettes fiscales
propres des collectivités territoriales : 80 % du total.
La seconde tient au fait que l'affirmation du principe d'autonomie
financière des collectivités territoriales et le transfert
corrélatif d'impôts ne conduisent pas à abandonner une
réflexion concernant la meilleure manière de revitaliser ces
quatre impôts.
Je précise que ces réflexions n'engagent que moi.
En matière de fiscalité directe locale, deux scénarii
s'offrent à nous.
J'appelle le premier, le scénario de
« l'attrition ». C'est celui qui prévaut depuis
vingt ans. L'Etat a pris une part croissante dans la charge des impôts
locaux par l'intermédiaire des dégrèvements, compensations
et autres allègements, et dont la justification tient pour l'essentiel
à la difficulté d'assumer les conséquences d'une
réforme, profonde, de ces quatre taxes directes locales.
Dès lors qu'est réaffirmé le principe d'autonomie
financière et fiscale, au niveau local, un second scénario doit
être envisagé : la modernisation de l'assiette de ces quatre
impôts locaux.
Que signifie cette modernisation ?
1° Les taxes foncières
Le premier élément concerne la valeur locative. Le concept de
valeur locative est au coeur de la fiscalité locale. Je pense que ce
concept garde tout son sens dans la détermination de l'assiette des
impôts locaux.
La valeur locative intervient tout d'abord dans le calcul des taxes
foncières. Or, ces taxes représentent une part essentielle des
ressources fiscales des collectivités territoriales et nous retrouvons
également des taxes équivalentes chez nos partenaires
européens.
La principale difficulté tient au vieillissement des valeurs locatives.
Le dispositif, élaboré par la loi du 10 janvier 1980, pour
assurer l'actualisation des valeurs locatives n'a jamais été mis
en oeuvre. Je rappelle que ce dispositif était fondé sur des
majorations forfaitaires annuelles, une actualisation triennale et une
révision générale effectuée tous les six ans.
Ces dispositions n'ont absolument pas fonctionné. Seule les majorations
forfaitaires ont été appliquées. Une seule actualisation a
été réalisée depuis 1980. La révision
générale, tentée à la fin des années
quatre-vingts, n'est jamais entrée en vigueur.
S'agissant de la modernisation de la taxe foncière, l'alternative est la
suivante :
- soit le statu quo, c'est-à-dire le maintien des valeurs locatives
actuelles issues de la prévision de 1970, prévaut. Le risque
d'une dérive est patent : l'appréciation administrative des
valeurs locatives se détache complètement des
réalités du marché locatif contemporain. Ce risque a
été assumé jusqu'à présent mais il peut
difficilement perdurer indéfiniment.
- soit on tente de rénover ces bases en tirant les leçons de
l'échec de la révision de 1990, en recherchant une formule
allégée de révision, c'est-à-dire une forme de
révision qui ne joue pas sur tous les paramètres qui servent au
calcul d'une valeur locative, mais privilégie certains d'entre eux.
C'est pourquoi le concept de révision d'initiative locale a
été développé et nourrit actuellement la
réflexion. Il a déjà été
évoqué devant le comité des finances locales. J'y
reviendrai plus tard. A mon sens, c'est une voie dans laquelle il nous faut
avancer, car je ne vois guère d'autres solutions. L'exemple de la
tentative avortée de révision, menée en 1990, est dans
toutes les mémoires. La piste qui conduit à un tel travail,
pharaonique, est désormais fermée.
L'idée d'une révision d'initiative locale des valeurs locatives
consiste à permettre aux collectivités territoriales et aux
élus locaux de moduler principalement les tarifs issus des
précédentes révisions dans des conditions encadrées
par le législateur. Une plus grande souplesse est accordée pour
permettre des ajustements très modulés et réduire les
transferts entre contribuables. Il nous faut en effet absolument
préserver, dans notre système de fiscalité locale, la taxe
foncière, d'autant que les incertitudes qui pèsent sur le devenir
de la taxe professionnelle et la taxe d'habitation rendent plus cruciale la
sauvegarde de cette taxe. Pour s'assurer de son maintien, il est
nécessaire de trouver un moyen d'en réviser les bases.
2° La taxe professionnelle
Deux scénarii encadrent le devenir de la taxe professionnelle. D'un
point de vue économique, sa justification est fragilisée en
raison de la réduction de l'assiette à la seule composante
liée à l'investissement. D'autres pays européens
possèdent une forme de participation des entreprises à la
fiscalité locale, mais sous la forme qu'elle prend en France, la taxe
professionnelle est assez singulière dans le contexte européen.
En termes d'attractivité du territoire, cette taxe pose de
sérieux problèmes, même si cela n'est évoqué
qu'à mots couverts. Elle est sans doute notre principal handicap,
peut-être même avant le niveau de l'impôt sur les
sociétés.
Deux voies s'offrent à nous : un scénario
« d'attrition » ou réagir. Je ne crois pas du tout
au scénario du statu quo. L'opposition à la taxe professionnelle
monte. Rapidement, des demandes naîtront : elles tendront peu ou
prou à réduire progressivement la quote-part des investissements
nouveaux pris en compte dans les bases de la taxe professionnelle, à
réduire le taux du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée
etc...
Il faut donc s'interroger sur les conditions d'une revitalisation de cet
impôt. Ceux de nos partenaires européens qui imposent localement
les entreprises retiennent deux types de base d'imposition : soit le
bénéfice (Allemagne, Luxembourg) soit la valeur ajoutée
(Italie).
Il n'y a pas, me semble-t-il, d'autre alternative à une assiette
indiciaire que le bénéfice ou la valeur ajoutée.
Ceux-ci soulèvent trois types de difficultés :
- la première tient à l'ampleur des transferts qui en
résultent tant pour les entreprises que pour les collectivités
territoriales. Une telle réforme ne peut se faire à produit
constant.
- la deuxième tient à la localisation de l'impôt. Celle-ci
est moins aisée dans le cadre d'une assiette économique
(bénéfice ou valeur ajoutée). Dans le cas d'une entreprise
à établissements multiples, la répartition des bases
d'imposition entre les collectivités concernées ne peut se faire
qu'en utilisant des clefs forfaitaires.
- la dernière difficulté tient à la volatilité des
bases d'imposition. Le système actuel de la taxe professionnelle
garantit largement les collectivités territoriales contre ce risque. En
revanche, une assiette économique, qu'il s'agisse de la valeur
ajoutée ou a fortiori du bénéfice, les exposerait beaucoup
plus à ce risque de volatilité des bases d'imposition et donc de
leurs ressources.
3° La taxe d'habitation
La taxe d'habitation pose le même problème de choix entre une
assiette indiciaire, fondée sur la valeur locative, et une assiette
réelle, fondée sur le revenu.
Bien qu'il soit difficile parfois de justifier l'adoption de la valeur locative
comme base de la taxe d'habitation, la généralisation d'une
assiette fondée sur le revenu semble tout aussi problématique.
À long terme, l'adoption, comme dans certains pays étrangers,
d'un impôt local sur le revenu peut être examinée et l'a
déjà été par le passé.
La mise en place d'une assiette mixte, qui combinerait une prise en compte de
la valeur locative et du revenu, a également été
étudiée. En fait, nous sommes d'ores et déjà dans
un système d'assiette mixte, puisque notre système
d'exonérations et de dégrèvements de taxe d'habitation,
qui concerne environ 10 millions de contribuables, est articulé pour
l'essentiel autour du revenu. Cela étant, les tentatives et les
débats, auxquels a donné lieu cette idée tendant à
faire une part plus grande au revenu dans l'assiette de la taxe d'habitation
depuis plus de dix ans, montrent qu'elle n'est guère compatible avec le
contexte du débat sur le prélèvement fiscal direct dans
notre pays.
M. Philippe MARINI, rapporteur général
- Concernant la
taxe professionnelle, je note à la suite de votre exposé
l'importance de la composante contributive des entreprises au système
des finances locales. Les réformes qui sont envisageables ne
risquent-elles pas de conduire à une déresponsabilisation des
collectivités et des élus locaux ? La taxe professionnelle
existante, souvent vilipendée, reste pourtant un impôt au
rendement éprouvé. Cette taxe est en outre étroitement
liée aux réalités économiques locales. Un
impôt comparable, calculé sur une base différente, comme le
résultat ou la valeur ajoutée par exemple, conserverait-il les
mêmes qualités ? J'ai eu le sentiment, à vous
écouter, d'une certaine résignation quant aux possibilités
de mener à bien une réforme de la fiscalité locale.
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- Je ne suis pas
résigné, je crois au contraire qu'en réaffirmant le
principe d'autonomie financière des collectivités territoriales,
nous nous obligeons en quelque sorte, non seulement à transférer
de nouveaux impôts aux collectivités territoriales, mais aussi
à moderniser les impôts existants. C'est en quelque sorte le refus
d'assumer les conséquences de cette modernisation qui, depuis vingt ans
et plus, nous a conduits au scénario d'attrition que j'évoquais,
tant à propos de la taxe d'habitation que de la taxe professionnelle.
Pour répondre aux questions concernant les nouvelles assiettes locales,
je vous renvoie à la troisième section du document qui vous a
été remis. Mes collaborateurs ont réuni, dans un tableau,
l'ensemble des assiettes éventuellement transférables aux
collectivités territoriales avec les écarts de ressources ou de
potentiels pour chaque assiette. L'écart de potentiel moyen entre les
cinq départements les plus riches et les cinq départements les
plus pauvres, pour les quatre taxes directes locales (taxe d'habitation, taxe
professionnelle et les deux taxes foncières) s'élève
à 2,5. Ce rapport est égal à 4,9 pour l'impôt sur le
revenu, à 23,9 pour l'impôt sur les sociétés,
à 20,5 pour la TVA (nette recouvrée par la direction
générale des impôts, hors TVA recouvrée par la
direction générale des douanes et des droits indirects), à
8,9 pour la taxe sur les salaires. Enfin, en laissant de côté
l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), ce rapport
s'élève à 14,7 pour ce qui concerne les droits de mutation
à titre gratuit (successions et donations).
Ces ratios indiquent clairement que la plupart des nouvelles assiettes
auxquelles nous pensons aujourd'hui ne feront en fait qu'accroître les
inégalités entre collectivités territoriales. Se posera
donc, en termes nouveaux, le problème de la péréquation.
Le débat le plus avancé concerne la taxe intérieure sur
les produits pétroliers (TIPP). Le transfert de cette assiette aux
collectivités territoriales, c'est-à-dire sa localisation, et la
possibilité de voter le taux de cette taxe posent un problème de
conformité au droit communautaire. En effet, ce dernier repose sur le
principe d'un taux unique par produit et par Etat.
Tous les efforts actuels en matière de fiscalité sur
l'énergie tendent à renforcer et harmoniser cette taxation entre
les Etats. La localisation de la TIPP est en contradiction au moins partielle
avec cet objectif.
La deuxième difficulté résultant d'une localisation de la
TIPP tient à son mode de collecte. Cet impôt est aujourd'hui
sûr et rentable, car il est prélevé immédiatement
auprès de quelque quatre cent cinquante raffineries que compte notre
territoire. L'idée de le localiser conduirait à la mise en place
d'un système de prélèvement beaucoup plus lourd. D'un peu
plus de quatre cents collecteurs de cette taxe, nous passerions à
près de vingt mille. De nouveaux problèmes de circuits de papiers
et de contrôles naîtraient, puisque des produits lourdement
fiscalisés seraient en transit entre les raffineries et les pompes
à essence, en franchise de taxe.
Dans ces conditions, il serait préférable de demander aux
redevables actuels de calculer le taux de la TIPP revenant à chaque
collectivité. Cela suppose une localisation, mais à un
échelon suffisamment large. Le niveau communal semble exclu.
Peut-être faudrait-il s'attacher au niveau régional ?
Se pose toujours le problème de l'unicité du taux. Cet aspect est
fondamental. La position technique du ministère des finances est
connue : si l'affectation de nouvelles ressources financières aux
collectivités territoriales est souhaitée, il est plus
aisé de procéder à un transfert du produit d'un
impôt d'Etat que de procéder à la localisation de cette
même assiette.
M. Michel CHARASSE
- Je constate en écoutant les propos de
M. Hervé Le Floc'h Louboutin qu'il est bien impossible à un
fonctionnaire de trancher des débats dont chaque développement
pose d'éminents problèmes politiques. J'observe de surcroît
depuis des années, dans différents lieux comme à
l'Association des maires de France ou au ministère du budget, que tous
les élus sont favorables à une réforme, mais que tous sont
opposés aux conséquences des réformes quelles qu'elles
soient.
En d'autres termes, nous vivons dans un rêve. Dans certaines
assemblées de maires, je peux dessiner ce rêve : une
réforme de la fiscalité des localités est indispensable et
urgente, mais il faut qu'elle n'ait aucune conséquence pour qui que ce
soit, en tout cas, aucune conséquence négative.
Je pense que le débat sur l'évaluation de la valeur locative est
un faux débat. Comme le dit bien M. Hervé Le Floc'h Louboutin,
n'importe quelle valeur peut être choisie, car ce choix revient à
la même chose globalement. Le problème naît de la question
du transfert de charge. Comment, en effet, faut-il sortir d'une situation
présente pour nous placer dans une nouvelle ? Les critiques
naissent à ce moment-là. Quelle que soit la solution
adoptée, il est nécessaire de prendre en compte ce
problème de transfert de charge. Considérons que les
Révolutionnaires eurent beaucoup de chance, car ils ont
créé la fiscalité locale à partir de rien !
Notre problème consiste à sortir de quelque chose qui existe pour
aller vers un autre système. C'est une première observation.
N'importe quelle valeur peut être choisie, mais la valeur
déterminée est critiquée rapidement, dès qu'elle
n'est pas ajustée régulièrement. Une
réévaluation périodique s'impose en effet,
généralement dans un délai de trois ans. Cette
réalité ne fait malheureusement pas partie de la culture
administrative qui prévaut aujourd'hui. La loi de 1973 prévoyait
une révision triennale des valeurs locatives, mais elle n'a jamais
été appliquée. Nous vivons aujourd'hui sur la base de la
précédente révision générale. Une fois le
problème de la mise à jour régulière des valeurs
locatives réglé, les transferts de charge sont relativement
indolores ou facilement amortis. En revanche, si ces révisions sont
moins fréquentes, les transferts de charge sont plus lourdement
ressentis. Ils sont par conséquent moins facilement acceptés.
J'ai moi-même fait cette expérience, puisque j'ai
été l'auteur de la dernière révision,
élaborée entre 1990 et 1992, et à laquelle a
collaboré M. le directeur. Cette dernière révision n'a
jamais été mise en application. En 1987, les deux
assemblées ont voté à l'unanimité un même
amendement à la loi de finances pour 1988, qui imposait au gouvernement
de mener une révision du mode de calcul. Au cours de mes nombreux
déplacements, j'ai entendu à l'envi ce même souhait de
mener à son terme une réforme. Une fois cette révision
établie, les résultats ont cependant soulevé
immédiatement l'hostilité : dans le cadre de cette remise
à plat, deux tiers des collectivités voyaient leurs
prélèvements allégés et le tiers restant, ses
prélèvements locaux alourdis. Cette situation jugée
inacceptable par le tiers des collectivités a donné lieu à
la non-application de ce texte. Il faut retenir qu'en 1990, l'administration et
les élus ont été mis à forte contribution. La
participation à ce chantier a été immense. Je ne pense pas
qu'un tel travail puisse être à nouveau demandé, quand on
sait à quels résultats il a abouti.
La révision constitutionnelle qui s'annonce, et qui reprend, selon moi,
une idée perverse de la loi Mauroy, laisse la détermination des
taux et de l'assiette des impôts locaux, directs, aux bons soins des
collectivités territoriales. Je ne pense pas que le contribuable puisse
accepter d'avoir pour un même bien une détermination de la valeur
locative qui soit différente selon qu'elle est déterminée
par la commune, le département, ou la région. C'est
impossible ; il faut qu'il y ait une harmonisation ou que le
législateur tranche quand elles ne s'entendent pas.
Les campagnes ont subi jusqu'à présent les plus forts
dégrèvements. En conséquence, les villes supportaient
l'essentiel de la masse imposable. La révision de 1973 avait
déjà porté sur cet état de fait. Mais si,
aujourd'hui, de nouvelles dispositions législatives laissent à la
commune le soin de fixer la valeur locative elle-même, celle-ci aura,
selon toute vraisemblance, tendance à la fixer à un niveau le
plus bas possible. En revanche, elle fixera des taux très
élevés. Comme les taux sont aujourd'hui utilisés pour les
péréquations, tout le système sera faussé. Il
faudra alors une harmonisation. La détermination de l'assiette ne peut
donc pas être choisie avant d'avoir consulté les
collectivités qui en seront bénéficiaires.
En ce qui concerne la taxe professionnelle, je crois que la discussion a
été ouverte bien avant le débat portant sur la part des
salaires ; et elle continue aujourd'hui. J'ai toujours entendu parler d'un
problème concernant la taxe professionnelle. La patente, dont a
hérité la taxe professionnelle, était soumise aux feux des
mêmes critiques. Derrière tous ces débats et ces critiques,
la question est, en fait, simple : les entreprises doivent-elles encore
contribuer au financement des collectivités territoriales ?
Si nous souhaitons qu'elles sortent du système de financement, à
qui les charges seront-elles transférées ? L'impôt
national peut alors prendre le relais, mais dans ce cas, le recul de la
liberté locale est implicitement entériné. Si nous
souhaitons que les entreprises continuent à contribuer à la
fiscalité locale, elles seront toujours soumises à une charge
lourde.
Je trouve le tarif des patentes très intéressant : ce tarif
permettait de faire taire les revendications excessives de certains en adoptant
des mesures ponctuelles et
ad hoc
, par catégorie ou par
profession. Avec la loi de 1975, que j'appelle « le système
Fourcade », ce système des patentes a été
supprimé. De ce moment-là, tout le monde a été
traité de la même manière : la grande entreprise,
comme
Michelin
, et le petit cordonnier. Il ne faut pas exclure de
revenir à un tarif qui permette de résoudre des problèmes
de nature diverse.
Le problème du poids de l'impôt est celui du poids des
dépenses locales. Ces dépenses locales sont elles-mêmes la
conséquence de la liberté accordée aux
collectivités territoriales. La lutte contre le poids de l'impôt
ne peut se faire qu'en restreignant la liberté locale. Ce n'est pas si
facile. Comment est-il possible de résister à la pression des
citoyens qui demandent un accroissement des dépenses locales et, en
même temps, répondre aux griefs des contribuables qui exigent une
réduction du poids de l'impôt ? Cela me semble impossible.
M. le Président
- Les collectivités territoriales sont
soumises à une obligation d'équilibre budgétaire. Par
rapport aux contraintes imposées par le traité de Maastricht,
elles contribuent positivement à une inscription de nos déficits
dans des limites acceptables. M. Michel Charasse rétorque qu'il en est
ainsi pour l'instant. Elles contribuent à hauteur de + 0,1 % au respect
des critères de Maastricht. L'existence des systèmes de
plafonnement conduit l'Etat à intervenir et à prendre à sa
charge la différence. La réticence concernant une augmentation
des taux est alors beaucoup moins manifeste. Je crois que le
déverrouillage des taux de la taxe professionnelle, qui nous est
annoncé pour cette année, et qui est, selon moi, une bonne chose,
sera en partie payé par l'Etat par le biais du plafonnement. À
une hauteur que je ne peux pas chiffrer, mais que M. le directeur peut
certainement chiffrer.
M. Eric DOLIGÉ
- Je souhaite juste livrer une réflexion
à propos de réforme. Ne peut-on pas réfléchir
à des économies ? Je suis surpris que l'on travaille
toujours sur les mêmes volumes, alors que L'Etat prélève
près de 10 % du produit de la taxe professionnelle pour sa
collecte ; et c'est la même chose pour la perception de
l'impôt sur le revenu. Ne peut-on pas laisser les entreprises et les
collectivités être leur propre percepteur ? Peut-être
les coûts de perception pourraient-ils en être diminués.
Avec un coût de 10 % en moyenne sur la taxe professionnelle, des efforts
d'économies permettraient sans doute de donner une marge de manoeuvre
supplémentaire aux entreprises. Baisser les coûts de perception
permettrait peut-être de dégager des marges de manoeuvre en
attendant de pouvoir trouver et mettre en oeuvre une bonne réforme, qui
semble difficile à espérer dans un avenir proche.
M. Michel CHARASSE
- Les deux tiers des services du ministère des
finances servent au calcul de l'assiette et à la perception des
impôts locaux.
M. Yves FRÉVILLE
- J'ai été très sensible au
langage de vérité de M. le directeur de la législation
fiscale. J'en retire que le seul impôt, qui s'impose à tous les
pays du monde, au niveau local, est l'impôt sur la
propriété. Et si l'on ne sauve pas l'impôt sur la
propriété, il ne reste plus grand-chose.
En ce qui concerne l'impôt sur la propriété, je partage
complètement l'avis de Michel Charasse et je pense que c'est
véritablement un problème de transferts. Je suis sûr d'une
seule chose : si une solution n'est pas trouvée rapidement, un
problème identique à celui qui s'est posé à nous
pour la taxe d'habitation et la taxe professionnelle surviendra.
En effet, l'Etat intervient toujours pour remédier aux problèmes
de financement. C'est d'ailleurs ce qui se passe en ce moment avec la taxe
d'enlèvement des ordures ménagères. Elle est insupportable
et mal répartie. Tout le monde est concerné. La
nécessité de révision me semble une évidence.
Cependant, la révision d'initiative locale ne me semble pas possible. Il
faudrait qu'elle fût au moins d'initiative départementale, voire
régionale, puisque c'est un impôt départemental ou
régional. Je vous demande dans quelle mesure une révision
allégée peut se faire, en gardant en mémoire celle de 1990
sur laquelle trop avait été investi, si la question des HLM est
par ailleurs réglée. Si rien n'est fait, je crois que la base de
notre fiscalité locale disparaîtra ; et il n'y aura plus de
fiscalité locale. Cela ne me semble pas aller dans le sens de l'histoire
aujourd'hui.
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- Je voulais revenir sur la question
de la taxe professionnelle évoquée par MM. Marini et Charasse et
évoquer une piste de réflexion.
La majorité des entreprises est imposée désormais sur une
base réduite aux seuls investissements. Mais à côté
de ces entreprises, un certain nombre sont d'ores et déjà
imposées en fait sur une base valeur ajoutée, soit parce qu'elles
sont soumises à la cotisation minimum, soit parce qu'elles sont
plafonnées en fonction de la valeur ajoutée. L'une des pistes
possibles de réflexion porte sur la question suivante : ne
pourrait-on pas faciliter un glissement de l'assiette actuelle de la taxe
professionnelle vers une assiette valeur ajoutée en relevant d'un
coté le taux de la cotisation minimum et en réduisant de l'autre
le plafond valeur ajoutée ?
Ce qui est clair de mon point de vue, c'est qu'aucune réforme d'assiette
de la taxe professionnelle (ou de la taxe d'habitation) ne peut se faire
à produit constant pour les contribuables, car les transferts qui en
résultent sont trop importants. Dès lors l'autonomie fiscale des
collectivités territoriales peut s'en trouver affectée.
Il y a d'une certaine manière un arbitrage à faire entre la
modernisation des impôts locaux et ses conséquences sur le
« taux » d'autonomie fiscale des collectivités
territoriales.
M. le Président
- Vos observations nous montrent les limites qui
existent en matière de réforme de la fiscalité locale.
Chacun est à la recherche d'une formule miraculeuse pour faire payer par
quelqu'un d'autre le coût des responsabilités assumées
localement. Fait-on payer le citoyen ou bien fait-on payer les
entreprises ? La tentation est forte de faire payer les entreprises. Cette
tentation est toutefois de plus en plus condamnée : c'est le
procès qui est habituellement fait à la taxe professionnelle.
Tout ce qui touche à la taxation de la valeur ajoutée nous
ramène, selon moi, à la taxe professionnelle : en ajoutant
les salaires à la quotité des investissements, l'essentiel de la
valeur ajoutée est retenu. En y ajoutant le bénéfice,
l'intérêt de l'impôt augmente. Que se passe-t-il cependant
en cas de ralentissement économique ? Comment peut-on
répartir les taux d'autant que ce prélèvement s'effectue
avec un décalage ? Je pense que la taxe professionnelle a un avenir
incertain. Dès lors que l'une de ses composantes en est sortie, le
risque est grand de voir d'autres éléments progressivement
éliminés de son calcul.
L'impôt qui est réhabilitable est celui qui n'est pas
délocalisable, qui est autrement enraciné dans le
territoire : c'est donc l'impôt foncier. Il faut donc trouver des
bases de valeur qui soient pertinentes, équitables. Mis en place en
1990, vous nous avez dit que ce chantier, admirablement conduit à
l'époque, n'a pas su être exploité et qu'il est impossible
d'y revenir. Il a tout de même coûté quelques milliards de
francs aux contribuables. Ses conséquences sont donc obsolètes.
D'où la question : comment pourra-t-on fixer de nouvelles
bases plus équitables, pour cet impôt de répartition ?
Nous continuons à traîner dans les matrices des
éléments qui sont sans commune valeur avec ce qu'ils auraient
dû devenir. Il y a des rentes de situation. Il est plus commode de ne
rien faire. Un problème supplémentaire se posait concernant les
HLM : ceux-ci disposaient d'un allégement de 30 %. Pour les
communes dont le parc immobilier est largement composé d'HLM, cette taxe
devient un véritable impôt de répartition. Cependant,
comment ne pas se demander alors ce que supportent les contribuables modestes
qui ne sont pas logés dans le parc HLM ? C'est inapplicable.
M. Michel CHARASSE
- L'affaire des HLM n'était pas une
proposition du gouvernement. Mon administration et moi-même nous ne
souhaitions pas intégrer cette disposition dans la loi. La
majorité parlementaire d'alors a demandé la création d'une
catégorie HLM à l'intérieur de la catégorie du
logement social. Cela a abouti à une situation folle : un fort
dégrèvement des HLM et une surtaxation forte des logements
sociaux qui ne sont pas des HLM, mais qui ressemblent à des HLM. Il
suffirait alors de supprimer cette catégorie HLM, mais cela
n'empêche pas qu'il y aura un très important transfert de charge.
Une majorité aura-t-elle le courage un jour d'imposer ces transferts, ou
bien leur étalement ? J'avoue l'ignorer.
M. le Président
- Monsieur le directeur, voulez-vous conclure
dans les cinq minutes ?
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- Je voudrais revenir sur le
problème de l'actualisation permanente des bases. Les termes
« d'initiatives locales » sont peut-être maladroits,
en vérité. De toute évidence, le travail sera mené
conjointement par les élus et l'administration fiscale. L'administration
assumera sa part de responsabilité dans cet exercice.
Toutefois, je suis intimement convaincu que nous pouvons déjà
régler quelques problèmes. Il n'est par exemple pas
nécessaire d'avoir une valeur locative qui diffère selon le
niveau pris en compte : communal, départemental ou régional.
Nous nous devons d'établir une valeur locative unique. Si elle est
définie au niveau communal, il faut alors figer le produit
départemental perçu dans chaque commmune. Dans le cas contraire,
le risque est grand d'avoir à faire face à des transferts de
charge. Il est possible d'avoir une base locative unique, mais il est important
de se placer à un niveau plus élevé que le niveau
communal. Je rappelle que, dans le cadre de la révision de 1990, nous
raisonnions à partir d'un concept de secteur locatif,
c'est-à-dire englobant potentiellement plusieurs communes.
Nous devons nous diriger dans cette voie : le calcul des valeurs locatives au
niveau d'un groupement de communes ou d'un département. La solution la
plus simple serait le niveau départemental. Cet impôt est un
impôt de répartition. Il y aura certainement des ajustements qui
pourront se faire localement sans qu'il soit indispensable que le cadre
juridique défini à un niveau national les prévoie.
Il faudrait donc donner un peu plus de possibilités de modulations des
transferts à un niveau proche des contribuables - aussi proche que
possible. Dans un cas contraire, nous sommes confrontés au dilemme
habituel ; soit rien n'est fait, car les transferts sont insupportables,
soit la demande est faite à l'Etat de supporter le coût de ces
transferts, ce qu'il ne peut pas faire. Pour lisser les transferts liés
à une révision, une plus grande marge de manoeuvre doit
être tolérée afin que l'ajustement se fasse au niveau local
approprié.
Concernant une possible réforme, au vu de l'échec de l'entreprise
menée en 1990, je vois difficilement comment il serait possible de
renouveler cette expérience selon les mêmes modalités.
Cette réforme, personne n'a voulu l'endosser. La suggestion de M. Yves
Fréville concernant la mise en oeuvre d'une réforme plus
générale, mais simplifiée, se heurte à un
même problème lié aux transferts des charges. La logique de
la révision de 1990 était perfectionniste. Nous nous orientons
vers une actualisation des valeurs locatives, qui permet un lissage plus
aisé et qui consiste à emprunter une autre voie que celle de la
révision générale au sens de 1990.
M. Arthuis évoquait le problème du coût de la
« déliaison » des taux sur les
dégrèvements. Pour être franc, le coût sera assez
faible, parce que la plupart des dégrèvements sont aujourd'hui
calculés sur la base de taux figés, c'est-à-dire des taux
de 1997. La première demande des milieux professionnels est de ne plus
retenir ce taux de 1997. Si cela est accordé, le coût serait alors
très élevé.
Concernant le problème des économies, l'éternel
débat repose sur la question des frais d'assiette. Si l'examen est
porté isolément sur les frais d'assiette et les
dégrèvements de l'Etat, la discussion peut être longue. En
revanche, nous pouvons aisément nous apercevoir, par un examen plus
attentif, que le coût net de la fiscalité locale excède
très largement les frais perçus au titre des frais d'assiette et
de dégrèvement. Ce débat reste donc, selon moi,
très théorique et impossible à régler. Trouver de
possibles économies sur les dégrèvements ne me semble pas
non plus envisageable.
Pour répondre à Yves Fréville, ne reposons-nous pas
déjà un peu sur une assiette portant sur la valeur ajoutée
pour les entreprises ? Le nombre d'entreprises qui
bénéficient du plafonnement pour la valeur ajoutée est de
1.400 ; et le nombre d'entre elles qui bénéficient d'un
plancher de cotisation minimum est compris entre 1.000 ou 2.000. Cela concerne
donc peu d'entreprises aussi bien au niveau du plafond que de la cotisation
minimum. Ce plafonnement coûte cher. Progressivement ne peut-on pas
rapprocher les valeurs du plafond et du plancher pour aboutir à une
valeur unique qui permettrait une imposition fondée sur la seule valeur
ajoutée, autour d'un taux pivot d'environ de 2 % ? C'est une
hypothèse à laquelle on réfléchit dans le cadre
d'une réforme de la taxe professionnelle et de la modification de sa
définition qui s'appuierait désormais sur la valeur
ajoutée. La transition serait plus aisée avec une baisse
progressive du plafond et un relèvement progressif du plancher. D'un
point de vue budgétaire, ce serait néanmoins très lourd.
M. Adrien GOUTEYRON
- Le nombre d'entreprises soumises au plafonnement
me semble faible.
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- J'ai fait une erreur : les
entreprises plafonnées au titre de la valeur ajoutée sont au
nombre de 13.000. Les entreprises qui se situent au plancher de cotisation sont
au nombre de 1.250.
M. Jacques OUDIN
- C'est un problème de compréhension de
la charge fiscale globale qui pèse sur la population en fonction
éventuellement de leur richesse. Je me réfère à
deux des annexes de votre document répartissant les départements
en fonction des bases de taxe d'habitation par habitant et la même chose
pour les propriétés bâties. Je constate que les
départements du littoral sont systématiquement les plus
imposés par habitant. Cependant la notion d'habitant dans un
département du littoral ne revêt pas la même
réalité que dans un autre département. Mon canton compte
dix mille habitants mais douze mille logements, soit un tiers de
résidences principales et deux tiers de résidences secondaires.
Les contribuables paient donc une taxe d'habitation et une taxe sur la
propriété bâtie. La notion d'habitant définie par la
DGF n'est pas forcément caractéristique de ce que paient
réellement les occupants de logement.
Je constate une anomalie en regardant les bases de taxe foncière sur les
propriétés non bâties des départements.
En matière de fiscalité locale, la France dispose d'un revenu
moyen par habitant qui diffère d'un département à l'autre,
d'un secteur à l'autre. Les études que j'ai pu mener dans mon
département où j'ai créé un Observatoire de la vie
départementale font apparaître que le prélèvement
sur les habitants est de plus en plus important en fonction de la strate de la
commune à laquelle appartiennent ces habitants. Mais les revenus des
habitants sont de plus en plus importants en fonction de la même strate.
Est-il possible d'établir un classement des départements en
fonction d'un rapport entre la richesse moyenne d'un département et son
imposition moyenne ? En d'autres termes, peut-on apprécier cette
charge fiscale globale rapportée au revenu global d'un même
département ? Un classement pourrait alors être établi
en fonction de leur poids contributif respectif au regard la fiscalité
locale. Nous aurons peut-être un moyen plus fin de déterminer la
nécessité de certaines péréquations. Il y a des
départements qui, compte tenu de leur richesse et de leur volonté
de développement, ont une fiscalité élevée, quand
d'autres départements ont une pression fiscale locale moins forte. Pour
une grande justice dans la fiscalité locale, ce type d'approche me
semble indispensable. Etes-vous en mesure, à la DGI, en liaison avec la
direction de la prévision, de nous apporter un éclairage sur ce
problème de développement à partir des richesses locales?
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- La réponse est oui. Ce
ratio par département, qui combinerait le montant des impôts
locaux prélevés sur les ménages en le rapportant à
un indicateur de richesse (le revenu brut des ménages dans ce
département) est envisageable. Le raisonnement peut être
mené uniquement sur les résidences principales.
M. le Président
- Il faut remettre dans le pot commun un certain
nombre de dotations. Je participais récemment à une
délibération, au Conseil régional, de la commission pour
la répartition des excédents de taxe professionnelle. Il faut
simplifier la réglementation qui a des effets très arbitraires.
On arrive à des situations extrêmement complexes et pas toujours
très équitables.
M. Jacques OUDIN
- Je poursuis ma demande formulée
précédemment en vous interrogeant Monsieur le directeur. Selon
vous, à quel niveau de finesse pouvez-vous descendre dans l'analyse
de la part contributive des départements ? Pouvez-vous descendre
au-dessous du cadre départemental ? Pensez-vous pouvoir
définir un indicateur qui distingue les zones rurales des zones
urbaines, en utilisant une définition INSEE ?
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- Je ne le sais pas.
M. Jacques OUDIN
- Si le ministère des finances est en mesure de
faire apparaître ce que les zones rurales paient en termes de
prélèvement fiscal global, je pense que l'on fera un grand pas en
avant dans la compréhension des systèmes de taxation.
M. Hervé LE FLOC'H LOUBOUTIN
- Si l'on ajoute les aides
compensatoires aux revenus, le résultat risque d'être très
surprenant. Ce ne sera pas facile.
M. le Président
- Je retiens de cette communication que nous
cernons bien sur quels principes repose l'autonomie financière des
collectivités territoriales. Mais la rédaction d'un texte dont
les dispositions seraient applicables à échéance
rapprochée semble un exercice extrêmement délicat.
Sur les impôts locaux, nous ne devons pas nous faire d'illusions. Les
entreprises doivent-elles payer ? La question mérite d'être
posée sérieusement dans le contexte actuel où la taxation
est un facteur important de délocalisation. En effet,
persévérer dans la voie de la collecte d'impôt sur la base
des entreprises donne certainement des satisfactions à court terme, mais
les arbitrages des entreprises peuvent être à plus long terme
très préjudiciables aux intérêts de la
collectivité.
Il faut alors trouver des impôts qui soient supportables par les citoyens
eux-mêmes, car en définitive tout retombe sur le citoyen, qu'il
soit consommateur ou contribuable. Les seuls bons impôts qui subsistent
sont ceux dont l'enracinement territorial est indiscutable. Ainsi, celui qui se
prête peu à la délocalisation est l'impôt foncier. Il
reste donc à en déterminer la valeur pour en constituer
l'assiette. C'est sur ce point que nous devons concentrer nos efforts. Il faut
poursuivre les études concernant d'autres impôts aux assiettes
facilement localisables, par exemple les impôts touchant à la
consommation d'énergie.
Vos propos nous font prendre conscience de l'âpreté de la
tâche qui nous attend. Je vous remercie, Monsieur le Directeur.