ANNEXE N° 2 -

LA POLITIQUE DE DÉLOCALISATION DES EMPLOIS PUBLICS

La politique de délocalisation concerne depuis près de 45 ans le déplacement hors de Paris de certaines structures de l'administration centrale, d'entreprises publiques ou d'associations contrôlées par l'Etat. En 30 ans (1960-1991) 25 350 emplois seulement ont été transférés. Entre 1992 et 1999, en sept ans, ce sont 17 260 emplois qui ont été transférés par cette politique.

1. Les objectifs : équilibrer, développer, moderniser.

L'objectif premier de la politique de délocalisation consistait à relever le défi que résume la formule « Paris et le désert français ». Jusqu'en 1991, les régions privilégiées étaient celles de l'Ouest et du Sud Ouest, la Bretagne et le Pays de Loire en particulier.

Depuis 1991, de nouvelles orientations ont vu le jour, répondant à l'évolution même du territoire : en toile de fond, un réseau de métropoles d'équilibre, en perspective, le défi européen et la mondialisation. L'accent désormais est mis sur le développement des pôles de compétence ainsi que sur la compétitivité des métropoles régionales qui doivent faire face dans le contexte européen, à la concurrence de capitales comme Milan ou Francfort. C'est pourquoi des communes comme Lyon ou Lille bénéficient depuis 1991 d'une grande partie des transferts d'emplois publics, sans nuire à Paris dans son rôle de métropole internationale.

Depuis 1991, la politique de délocalisation a visé ainsi à la modernisation de l'Etat. A l'époque, le gouvernement avait relancé cette politique en prenant des décisions « volontaristes », notamment celle concernant l'Ecole nationale d'Administration. Le Premier Ministre, Mme Edith Cresson, dressait alors un bilan négatif des politiques d'aménagement du territoire, constatant que l'Ile-de-France qu'on croyait stabilisée reprenait sa croissance, et reprochant aux services publics leur immobilisme.

2. Le processus de décision

2.1. Rationaliser les organismes chargés de l'implantation des emplois publics.

Héritier du comité de décentralisation de 1955 et de la mission des délocalisations publiques créée en 1991, devenue en 1998 la mission pour l'implantation territoriale des emplois publics, l'actuel Comité pour l'Implantation territoriale des Emplois Publics (CITEP) gère d'une part l'octroi des agréments à Paris et en Ile-de-France et d'autre part la politique de délocalisation. La création par décret en 2000 du CITEP souligne l'engagement du gouvernement à poursuivre et rationaliser les délocalisations. Cette continuité s'inscrit dans la relance des politiques urbaines et d'aménagement du territoire, avec la loi Voynet d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire en 1999 et la loi Chevènement, de la même année, sur la simplification et le renforcement de la coopération intercommunale.

2.2. La définition des critères pour le transfert d'emplois publics.

Un projet de délocalisation peut être proposé par le CITEP, une administration, un service public ou un ministère. La plupart du temps, il s'agit d'une décision prise au niveau politique.

Le choix d'un lieu d'implantation peut se faire après une étude de la DATAR éclairée par des avis des préfets de région, en consultation avec les élus locaux et les forces socio-économiques. Les choix se portent désormais essentiellement sur des lieux disposant de structures qui favorisent un effet de synergie avec les nouvelles implantations. La décision va souvent au plus offrant, là où les coûts pour l'Etat sont le moins élevés, ce qui favorise les villes les plus compétitives.

Les services délocalisés sont ceux le plus facile à déplacer. Il s'agit généralement d'établissements publics, de services logistiques, de recherche et d'enseignement plus que d'administrations centrales.

2.3. Le coût budgétaire

Il est difficile de définir précisément le coût global d'une délocalisation. Le rapporteur du budget de l'aménagement du territoire à la Commission des finances du Sénat, M. Roger Besse, soulignait la complexité de la question qui oblige à recenser de multiples contributions ministérielles et à faire la part entre ce qui relève du déplacement de l'organisme et ce qui concerne sa modernisation. En l'absence de recensement général des crédits affectés par les ministères, le rapporteur se basait sur une étude confiée en 1999 à un cabinet spécialisé : en règle générale celui-ci concluait qu'il fallait compter entre 81 000 et 110 000 euros par emploi transféré.

3. Analyse des implantations

Répartition géographique des transferts réalisés ou en cours

(Situation au 30 juin 2001 des décisions arrêtées depuis 1992 ; le présent tableau ne prend pas en compte les mesures arrêtées par le CIADT du 9 juillet 2001).

Source : CITEP


Région

Transferts d'emplois initialement prévus (y compris stagiaires)

Emplois effectivement transférés

Emplois actuellement en cours de transfert

Somme des emplois transférés et en cours de transfert

Solde des emplois à transférer

Alsace

410

410

0

410

0

Aquitaine

3031

2324

23

2347

684

Auvergne

437

195

30

225

212

Bourgogne

216

39

22

61

155

Bretagne

2377

1483

425

1908

469

Centre

1506

1288

46

1334

172

Champagne-Ardenne

195

75

0

75

120

Corse

54

2

0

2

52

Franche-Comté

506

410

0

410

96

Ile-de-France

6938

4128

1375

5503

1435

Languedoc-Roussillon

646

789

0

789

0

Limousin

1459

452

601

1053

406

Lorraine

493

331

19

350

144

Midi Pyrénées

1536

1023

643

1666

-130

Nord - Pas de Calais

2127

1265

466

1731

396

Haute Normandie

722

201

96

297

425

Basse Normandie

323

194

13

207

116

Pays de la Loire

2681

2031

360

2391

290

Picardie

1318

805

15

820

498

Poitou - Charente

1369

1209

210

1419

-50

Provence - Côte d'azur

1532

855

11

866

666

Rhône Alpes

3798

2690

605

3295

503

D.O.M

30

20

0

20

10

Répartition régionale non disponible

2162

775

14

789

1373

TOTAL GENERAL

35866

22994

4974

27968

8042

L'analyse de ce tableau montre que l'Ile-de-France est le principal bénéficiaire des délocalisations. Si l'on considère la colonne des « emplois effectivement transférés », la deuxième région concernée est Rhône Alpes, vient ensuite l'Aquitaine et en quatrième position, le Pays de Loire. Une région comme l'Auvergne n'a vu que 195 emplois réellement transférés en 2001, soit environ 20 fois moins qu'en Ile-de-France.

Evolution annuelle et cumulée des emplois publics

Source : CITEP



Principales opérations réalisées depuis 1997

Source : CITEP

A la fin de l'année 1997, le nombre des emplois transférés s'élevait à 17 562 ( 13 052 transferts effectifs et 4 510 transferts en cours) .
Au 30 juin 2001, le nombre des emplois transférés atteignait 27 968 emplois (22 994 transferts effectifs et 4 974 transferts en cours).

Les principaux ministères concernés par ces mouvements sont par ordre d'importance décroissante, des transferts effectifs au 30 juin 2001 :

Défense :           ;                          &n bsp;            &nbs p;                    + 2 452
Dont :  Ecole de gendarmerie de Châteaulin          &nbs p;           + 655
Etat-Major de la force d'action rapide à Lille             + 566

Ecole des cadres de la gendarmerie de Rochefort    + 360

Pôle de soutien logistique de Saint-Etienne              + 144

ALFOST à Brest                                                    + 139

Service des droits individuels de la DGGN au Blanc   + 136

Economie, finances et industrie (hors La Poste et de France Télécom) :        &nb sp;              ;
&n bsp;         + 1796
(principalement sur le territoire de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée)

La Poste et France Télécom :                         &n bsp;         + 915

Dont : La Poste, direction des centres financiers, à Nantes     + 461

La Poste, direction des centres financiers, à Bordeaux  + 367

France Télécom, à Belfort                                 &n bsp;          + 171



Equipement, transports et logement              &n bsp;          + 513

(hors opérateur public SNCF)

Dont :     DGAC (STNA), à Toulouse                          &n bsp;             + 250

DGAC (SIA), à Mérignac                                          + 80

Laboratoire central des Ponts-et-Chaussées à Nantes + 40



SNCF                                                  &n bsp;            &nbs p;                    +  475

Dont :      Informatique voyageurs, à Nantes                       + 200

Informatique financière, à Villeurbanne                +  60

Informatique frêt, à Ermont                                 + 55

Ingénièrie technique du matériel roulant au Mans  + 50



Education Nationale                                                        +1215

Dont :     Ecole Normale Supérieure de Lettres à Lyon          +1073



Justice                                                 &n bsp;            &nbs p;                    + 799

Dont :  Ecole Nationale d'Administration Pénitentiaire, à Agen + 786              ;



Intérieur          &nbs p;                                   &n bsp;            &nbs p;                     + 692

Dont :  Ecole nationale de police de Périgueux          &nbs p;      +  516

Sous-direction de la police technique et scientifique à Ecully +186



Recherche                                          &n bsp;            &nbs p;                     + 328

Nombreux sites dont : CNRS, à Lille                      + 31

&n bsp;            &nbs p; CNRS, à Valbonne               + 27

&n bsp;            &nbs p; CNRS, à Orléans                  + 18

&n bsp;            &nbs p; CNRS, à Montpellier            + 18

&n bsp;            &nbs p; IFREMER, à Brest            &nb sp;  + 30

En 2002, on attend une augmentation des effectifs transférés sur des opérations en cours non encore achevées, ainsi que plusieurs transferts qui devraient débuter après achèvement des travaux.

La mise en oeuvre d'autres opérations, à plus longue échéance, comme celle concernant l'Ecole nationale des douanes à Tourcoing, le Centre national de formation et d'études de la P.J.J à Roubaix, ou le CNASEA à Limoges, devraient conduire de nouveaux transferts d'emplois dans l'avenir.

Bilan

Le bilan de la politique de délocalisation s'élève à près de 30.000 emplois réellement transférés.

Du point de vue géographique, l'Ile-de-France reste largement en tête avec 5 503 emplois transférés ou en cours de transfert. Les trois régions majoritairement bénéficiaires de la politique de délocalisation sont Rhône Alpes, l'Aquitaine et les Pays de Loire. L'Ouest de la France initialement favorisé est dépassé aujourd'hui, concurrencé par des régions économiquement dynamiques répondant mieux à l'objectif de compétitivité internationale. L'accent est de plus en plus mis sur le développement des pôles de compétence, ce qui souvent pénalise les régions défavorisées.

Le CIADT de décembre 2002 a souligné que cette politique était encore trop souvent caractérisée par des décisions ponctuelles qui en compromettent la cohérence.

D'un point de vue qualitatif, la politique de délocalisation semble avoir porté ses fruits. Une étude menée par le CITEP dresse un bilan positif pour les communes d'accueil : les nouvelles implantations améliorent l'image du territoire, permettent de maintenir certains services publics qui étaient voués à disparaître comme une école ou un service postal qui représentent le plus souvent un point d'ancrage pour des activités tertiaires et favorisent ainsi l'installation d'entreprises.

La critique la plus fréquemment formulée concerne le « déracinement » des services délocalisés. Elle n'est pas sans fondement dans le court terme. Mais, à plus long terme, on constate que les services transférés en région sont modernisés, que le lien avec l'administration centrale est facilement maintenu par le développement des technologies de communication et que bon nombre d'entre elles ont démontré une forte capacité d'intégration au milieu local.

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