B. LA DIRECTIVE RTTE 1999/5/CE
La directive 1999/5/CE, couramment appelée « directive RTTE », définit le cadre réglementaire pour la mise sur le marché, la libre circulation et la mise en service dans la Communauté des équipements hertziens et des équipements terminaux de télécommunications. Elle a été adoptée le 9 mars 1999. Depuis le 8 avril 2000, elle annule et remplace la directive 98/13/CE.
Les équipements visés par la directive RTTE doivent satisfaire les exigences essentielles, définies en Article 3 et parmi lesquelles figure à l'alinéa 3.1 (a) « la protection de la santé et de la sécurité de l'utilisateur et de toute autre personne ». Les exigences essentielles sont présumées respectées lorsqu'un équipement est conforme aux normes harmonisées, c'est à dire définies par un organisme de normalisation dûment mandaté par la Commission européenne. L'évaluation de la conformité peut être réalisée par le fabricant s'il applique les procédures définies par les normes harmonisées. Si ce n'est pas le cas, il doit avoir recours à un organisme notifié qui détermine si le protocole utilisé garantit le respect des exigences essentielles. La liste des normes harmonisées est publiée au journal officiel des Communautés européennes (JOCE). La dernière mise à jour de la liste des normes harmonisées a été publiée le 10 août 2002 (JOCE C 190). La liste des organismes notifiés est disponible sur le serveur Internet de la Commission européenne.
Seuls les appareils conformes à toutes les exigences essentielles applicables sont autorisés à porter le marquage « CE », défini selon un graphisme normalisé.
Le comité pour l'évaluation de la conformité et la surveillance du marché des télécommunications (TCAM), composé des représentants des états membres et présidé par un représentant de la Commission, est chargé de s'assurer de la mise en application de la directive RTTE.
C. LES NORMES HARMONISÉES
1. Le mandat de la Commission M/305
Comme prévu dans le cadre de la directive RTTE, la commission a mandaté le CEN (Comité européen de normalisation), le CENELEC (Comité européen de normalisation électrotechnique) et l'ETSI (European Telecommunications Standards Institute), pour rédiger et publier les normes harmonisées relatives à la protection des personnes exposées à des champs électromagnétiques de 0 Hz à 300 GHz. Ce mandat porte la référence M/305. Il a été formellement accepté par les trois organismes en mars 2001. Le CENELEC assure la coordination de l'ensemble des travaux de normalisation dans ce domaine.
Le mandat M/305 définit le cahier des charges des normes harmonisées et fixe les modalités de sa mise en oeuvre. En particulier, les normes harmonisées portent exclusivement sur « la description des méthodes de test, les équipements de test et les méthodes de calcul qui sont requises pour évaluer la conformité des équipements. Les normes doivent prendre en considération les restrictions de base et les niveaux de référence définis par la recommandation 1999/519/CE. » L'évaluation des limites d'exposition n'est donc pas du ressort des organismes de normalisation électrotechnique.
Ce mandat clarifie le rôle du CENELEC. En effet, un premier mandat M/032 avait été émis le 11 octobre 1993 afin que le CENELEC se prononce sur les exigences de sécurité concernant les champs électromagnétiques émis par les équipements de communications mobiles. Ce mandat initial avait abouti notamment à l'adoption par le CENELEC le 30 novembre 1994 des deux prénormes ENV50166-1 et ENV50166-2 concernant « l'exposition humaine aux champs électromagnétiques » basse fréquence et haute fréquence, respectivement. Ces prénormes concernaient à la fois l'exposition du public et des travailleurs. Elles ont été publiées en 1995. Ces deux documents proposaient des valeurs limites et des considérations générales concernant les méthodes de mesure. Ces prénormes ont été utilisées de façon transitoire et ont été annulées par le CENELEC en décembre 1999, suite à la publication de la recommandation européenne 1999/519/CE.
2. Le comité TC106x du CENELEC
Le CENELEC est une organisation à but non lucratif de droit Belge qui a été créée en 1973. Il a été formellement reconnu par la Commission comme un organisme de normalisation européen par la directive 83/189/EEC. Les membres du CENELEC sont les représentants des comités nationaux (NC) d'une vingtaine de pays de l'union européenne ou de l'espace européen. Pour la France, le représentant est l'Union technique de l'électricité et de la communication (UTE). Par l'intermédiaire des comités nationaux, le CENELEC s'appuie sur un très large réseau d'experts de tous horizons, près de 35000 selon son site Internet.
Le bureau technique (BT) du CENELEC est composé d'un représentant de chaque comité national. Il coordonne les travaux de normalisation qui sont réalisés au sein des comités techniques (TC). Il décide de la ratification des normes préparées par les comités techniques sur la base des votes exprimés par les comités nationaux.
Sur le plan international, le CENELEC travaille en relation étroite avec la Commission électrotechnique internationale (CEI), qui publie des normes dans les domaines de l'électricité, l'électronique et les technologies apparentées. La CEI regroupe les comités nationaux de près d'une soixantaine de pays. L'accord de coopération entre la CEI et le CENELEC, appelé « accord de Dresde », a pour objectif de réduire la duplication des travaux en favorisant l'acceptation mutuelle des normes.
Le comité technique TC106x définit les méthodes d'évaluation de « l'exposition du corps humain aux champs électromagnétiques ». Il travaille en relation avec le TC106 de la CEI, qui s'intitule « Méthodes d'évaluation des champs électriques, magnétiques et électromagnétiques associés à l'exposition humaine ». Le groupe de travail WG1 traite des normes sur « les téléphones mobiles et les stations de base ».
3. Le principe de la normalisation
Les normes définissent les spécifications techniques qui permettent d'évaluer la conformité des équipements émettant des champs électromagnétiques aux valeurs limites définies par la recommandation européenne ou l'ICNIRP. Ces méthodes s'appuient de façon complémentaire sur des outils de mesure ou des outils de simulation, à partir du moment où les méthodes de calcul et les modèles ont pu être validés. Les normes définissent le protocole à suivre, la méthode d'évaluation de l'incertitude et les critères d'évaluation de la conformité par rapport aux valeurs limites.
Selon le Guide R106x-001 « Recommandations pour les comités produits pour la préparation des normes relatives à l'exposition des personnes aux champs électromagnétiques », adopté par le TC106x en novembre 2001, les normes sont classées en 3 catégories. Les « normes produits » définissent les critères généraux d'évaluation de la conformité pour des équipements ayant des caractéristiques techniques similaires, par exemple, les téléphones mobiles utilisés près de l'oreille. Les normes produits font référence à des « normes fondamentales » ou « normes de base », qui spécifient en détail le protocole à suivre pour évaluer les grandeurs physiques caractéristiques de l'exposition des personnes aux champs émis par ces équipements. Les « normes génériques » s'appliquent à tous les équipements pour lesquels il n'y a pas de norme produit. Elles fixent les méthodes générales de mesure, de simulation et d'évaluation de la conformité.
4. Les normes relatives aux téléphones mobiles EN5036x
Les critères d'évaluation de la conformité des téléphones mobiles utilisés près de l'oreille sont définis par la norme produit EN50360. Le protocole technique de mesure est spécifié dans la norme de base EN50361. Ces normes ont été ratifiées par le CENELEC le 26 juillet 2001 (JOCE C 208). La norme produit EN50360 est inscrite depuis juillet 2001 dans la liste des normes harmonisées publiée au JOCE. La norme fondamentale EN50361 annule et remplace la spécification européenne ES59005, « Considerations for the evaluation of human exposure to Electromagnetic Fields (EMFs) from Mobile Telecommunication Equipment (MTE) in the frequency range 30 MHz - 6 GHz », qui avait été adoptée en mai 1998 et qui définissait les recommandations générales pour la mesure du DAS des téléphones mobiles ».
Le protocole expérimental défini par la norme EN50361 repose sur l'estimation de la distribution de champ électrique dans un modèle synthétique du corps humain, couramment appelé fantôme. Le fantôme normalisé par la norme EN50361 s'appelle « SAM » ou « Specific Anthropomorphic Mannequin ». SAM est constitué d'une coque transparente aux rayonnements EM, dont la forme représente la tête et qui est remplie d'un liquide diélectrique à pertes dont les propriétés sont représentatives des tissus biologiques. Un téléphone mobile est mis en service de façon à ce qu'il émette le niveau de puissance maximum. Il est placé contre le fantôme dans une position usuelle d'utilisation. Le volume intérieur du fantôme est scruté au moyen d'une sonde miniature de mesure du champ électrique. La valeur maximale du DAS à l'intérieur de la tête est déduite des valeurs du champ électrique acquises au cours de ce balayage. Les travaux de recherche menés dans le cadre du projet COMOBIO (sous-projet 1) ont contribué à la mise au point de ce protocole de mesure.
Compte tenu de la portée internationale de cette norme, un effort important a été consacré à l'harmonisation des méthodes de mesure entre le CENELEC et l'IEEE. Les comités CENELEC TC106x et IEEE SCC34 SC2 (norme P1528) ont adopté une démarche volontaire pour accorder les caractéristiques essentielles des méthodes de certification. Cette démarche est maintenant poursuivie dans le cadre des travaux de normalisation de la CEI (TC106-PT62209).
5. Les normes relatives aux stations de base EN5038x
L'évaluation de la conformité des stations de base aux exigences essentielles doit être réalisée en trois étapes.
• Lors de la mise sur le marché
Les critères d'évaluation de la « conformité des stations de base et des stations terminales fixes pour les communications mobiles aux restrictions de base et aux niveaux de référence relatifs à l'exposition du public aux champs électromagnétiques (110 MHz - 40 GHz) » sont définis par la norme produit EN50385. La norme produit EN50384 concerne l'exposition des travailleurs. La norme EN50383 et la « norme de base pour le calcul et la mesure des champs électromagnétiques et du DAS associés à l'exposition des personnes provenant des stations de base radio et des stations terminales fixes pour les systèmes de télécommunication sans fil (110 MHz - 40 GHz) ». Ces normes ont été ratifiées par le CENELEC en juillet 2002 et soumises à la Commission européenne pour être publiées au JOCE.
A partir de cette publication, la norme EN50385 sera la norme harmonisée qui pourra être utilisée par les fabricants de stations de base pour obtenir le marquage CE lors de la mise sur le marché des équipements nouveaux. Elle fait donc référence à la recommandation européenne 1999/519/CE. Le fabricant est ainsi tenu d'évaluer les limites de conformité en 3 dimensions, dans une configuration typique de l'équipement, notamment lorsqu'il est connecté à une antenne extérieure. Le même principe s'applique à la norme EN50384 qui fait référence, elle, aux limites d'exposition en milieu professionnel définies par l'ICNIRP.
La norme EN50383 spécifie les protocoles de mesure et de calcul qui peuvent être utilisés. Lorsque l'équipement est de petite taille et de faible puissance, il est possible de faire des mesures de DAS. Dans les autres cas, il est nécessaire d'évaluer la répartition des champs électromagnétiques dans un volume situé au voisinage de l'antenne, lorsque celle-ci est installée dans des conditions d'espace libre. En effet, lors de la mise sur le marché, le fabriquant ne connaît pas a priori les conditions dans lesquelles l'équipement et l'antenne associée seront effectivement installés.
• Lors de la mise en service
Lorsque la station de base et l'antenne qui lui est connectée sont installées dans un environnement donné, les limites de conformité évaluées selon la norme EN50383 peuvent être modifiées. Ces perturbations peuvent provenir soit de phénomènes de réflexion ou de diffraction sur des objets situés à proximité de l'antenne, par exemple une construction, soit de champs électromagnétiques émis par d'autres sources radio fréquence, par exemple une autre station de base ou un émetteur radiofréquence (radio ou télévision).
Dans certains cas, il est donc nécessaire de procéder à des vérifications avant la mise en service de l'équipement pour s'assurer de la conformité aux limites de la recommandation européenne 1999/519/CE. Les projets de « norme produit pour l'évaluation de la conformité des stations de base lors de leur mise en service » et de « norme de base » associée ont été mises au point par le groupe de travail WG1. En octobre 2002, le TC106x a adopté formellement ces projets ou « committee draft (CD) » et a lancé la procédure d'adoption définitive par les comités nationaux. Cette procédure devrait durer entre 6 et 12 mois selon la nature des commentaires émis par les comités nationaux.
• Lors de procédures de surveillance
Lorsqu'un ou plusieurs équipements sont déjà en service dans un environnement donné, il est parfois nécessaire de procéder à des vérifications de la conformité aux exigences essentielles. Les méthodes d'estimation du champ électrique doivent être adaptées à un environnement parfois complexe et à des niveaux qui peuvent être faibles et qui varient beaucoup dans l'espace et dans le temps. Les problèmes à résoudre sont relatifs aux mesures (niveaux faibles, variations dues au trafic et au « fast fading ») et à la simulation (environnement complexe, caractéristiques des sources difficiles à obtenir).
Ces protocoles de mesure sur site ou « in situ » sont en cours de projet au sein du groupe de travail WG1. Il est donc peu probable qu'une norme harmonisée soit adoptée par le CENELEC avant la fin 2003. Dans ce contexte, de nombreux états membres ont adopté leur propre protocole. En France, celui-ci a été mis au point par l'ANFR.
La normalisation des méthodes de mesure in situ est indispensable. En effet, certains résultats de mesure, publiés dans la presse, ont été obtenus en se fondant sur des protocoles insuffisamment validés et en utilisant parfois du matériel inadapté, ce qui a conduit à des résultats irréalistes et alarmistes.
6. Les équipements de faible puissance EN50371
Certains équipements de téléphonie mobile, par exemple les téléphones sans fil numériques DECT qui ont une portée limitée, utilisent des puissances d'émission très faibles. En supposant que toute la puissance émise est absorbée par 10 g de tissus du corps humain, tous les équipements qui émettent moins de 20 mW ne peuvent pas dépasser la limite de DAS local de 2 W/kg. Les critères de mise en oeuvre de cette règle simple de conformité aux exigences essentielles sont définis par la norme générique EN50371, qui est considérée comme une norme harmonisée (cf. JOCE C190/19 du 10/10/2002).