b) Les nouvelles règles d'attribution des ICHN depuis le 1er janvier 2001
Le
règlement de développement rural n° 1257/88 du Conseil a
apporté des modifications substantielles pour l'attribution des ICHN.
Le paiement s'effectue désormais en fonction du nombre d'hectares de
surface fourragère et non plus en fonction du nombre de têtes de
bétail.
Le règlement était applicable depuis le
1
er
janvier 2000 mais est entré en vigueur en France
pour la campagne 2001.
Si les conditions d'éligibilité et les zonages ne sont pas
modifiés, les modalités de calcul changent. Le principe de base
d'attribution est le respect des bonnes pratiques agricoles habituelles
compatibles avec les exigences de protection de l'environnement en assurant la
protection du sol, de l'eau, de la biodiversité et l'ouverture des
paysages. L'éleveur est réputé les respecter si son
système d'élevage répond notamment à des
critères d'extensivité tendant à encadrer le nombre
d'animaux primés par hectare.
En-deçà du seuil de chargement minimum et au-delà du seuil
supérieur, les indemnités ne sont plus versées. Elles ne
le sont pas non plus si l'exploitant ne se conforme pas aux directives en
matière de bien-être des animaux ou lorsqu'il ne respecte pas la
réglementation en matière d'épandage des effluents
applicable dans les zones vulnérables ou d'excédent structurel.
Le nombre d'hectares primés est au maximum de 50 par exploitation
individuelle et pour les exploitations sociétaires, sauf pour les
groupements agricoles d'exploitation en commun qui bénéficient
d'une part par associé éligible. Une majoration de l'ensemble des
taux de 10 % est prévue pour les 25 premiers hectares, afin
d'apporter un soutien renforcé aux petites exploitations.
Un tarif unique de prime s'applique par type de zone défavorisée
: il dépend de la localisation (haute montagne, montagne,
piémont, zone défavorisée simple) et de l'appartenance ou
non à la zone sèche. De plus, une compensation
supplémentaire de 10 % en zone de haute montagne et de montagne et
de 20 % dans les autres zones est accordée dans le cas
d'exploitations pratiquant une transhumance de leur cheptel apte à
utiliser les fourrages ligneux, car elles ont une fonction importante en
matière d'entretien de l'espace et des milieux.
En outre, cette réforme comporte un recentrage des indemnités
accordées sur les zones de montagne, au détriment des autres
zones défavorisées telles que les zones de piémont.
Désormais, les trois quarts de l'enveloppe allouée à ces
indemnités doivent bénéficier aux seules zones de montagne
et haute montagne. Cette exigence a conduit à réduire ou
supprimer les ICHN attribuées aux éleveurs de bovins laitiers
purs dans les zones de piémont et les zones défavorisées
simples.
Une phase transitoire de trois ans a été instaurée pour
permettre aux agriculteurs de s'adapter au nouveau régime.
Par ailleurs, les versements, assurés par le Centre national pour
l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA), ont
désormais lieu à l'automne, alors qu'ils étaient
auparavant effectués au printemps mais un acompte a été
versé, à titre exceptionnel, en 2001 en début
d'été pour tenir compte des difficultés de
trésorerie liées au déplacement de la date du
dépôt des demandes de la fin janvier à la fin avril.
Les agriculteurs de montagne entendus par la mission commune d'information ont
insisté sur les difficultés de trésorerie que suscite la
non-reconduction de ce versement exceptionnel.
Ces modifications des règles d'attribution, qui ont pour objectif de
favoriser les bonnes pratiques agricoles, sont accompagnées d'un
doublement du cofinancement communautaire qui est passé en 2000 de
25 % à 50 % et d'un engagement de la Commission à
verser 1,42 milliard d'euros (9,3 milliards de francs) sur sept
ans.
(1) L'application de cette réforme a suscité plusieurs séries de craintes et d'effets pervers.
- Conçue pour tenir compte de la
sévérité accrue des règles anti-dumping de
l'organisation mondiale du commerce, la modification des modalités
d'attribution de l'ICHN apparaît aux montagnards comme une
« décision technocratique ». C'est, en effet,
l'herbivore qui entretient la montagne et pas l'hectare. D'après les
spécialistes de l'agriculture de montagne :
« mieux
aurait valu un dispositif de compensation des handicaps proche de la
réalité des exploitations et qui tiendrait compte de la pente, de
l'altitude, de l'enclavement de la parcelle, du pâturage ou du fauchage,
comme le fait la Suisse. »
- Comme en témoigne, dans certaines zones, la hausse du prix de la
terre, l'aide à l'hectare a provoqué une course à
l'agrandissement.
- Elle entraîne, pour certains éleveurs, un risque
d'exclusion du dispositif, soit parce qu'ils ne satisfont pas aux nouveaux
seuils de chargement, soit parce qu'ils ne se conforment pas aux
« bonnes pratiques agricoles », soit enfin parce que leur
exploitation est située en dehors des zones ciblées.
- Un effort supplémentaire a été demandé par
le Sénat, au cours de la discussion de la loi de finances pour 2002,
pour procéder aux ajustements qui s'imposent s'agissant notamment de la
situation des producteurs laitiers des zones de piémont, des zones de
haute montagne, des petites exploitations, des jeunes agriculteurs et de
certaines productions végétales (comme les fruits) qui
n'étaient pas encore éligibles.
(2) Le bilan de l'application des ICHN en 2001
D'après les indications fournies par M. Hervé
Gaymard,
ministre de l'Agriculture de l'alimentation, de la pêche et des affaires
rurales, lors de son audition, les principales conclusions du bilan de
l'application des ICHN en 2001 sont les suivantes :
- les grands équilibres sont maintenus : 79% des ICHN
bénéficient aux exploitations de montagne et 21 % en zone de
développement surveillé et en zone de piémont ; la
dépense totale pour l'année 2001 est de l'ordre de
427 M€ (dont 50 % d'origine communautaire) ;
- 1,4 % du nombre des exploitants antérieurement
bénéficiaires sont exclus ;
- 70 % des dossiers ont bénéficié d'une
augmentation des montants alloués ;
- 13 % sont en diminution, essentiellement chez les éleveurs
de bovins en piémont et d'ovins en zone de développement
surveillé (ZDS) humide. Toutefois, les ajustements des modalités
de gestion en 2002 devraient résoudre les difficultés pour le
piémont et les ovins.
- l'extension des exploitations à des fins d'optimisation du
montant de la prime concerne seulement 17 % des dossiers, pour la plupart
situés en zone défavorisée simple. Ce
phénomène est par ailleurs encadré par trois règles
de gestion : la limitation à 50 hectares par agriculteur, ce
qui limite l'intérêt des extensions au delà de ce
seuil ; une majoration de l'ICHN pour les 25 premiers hectares ; et
un écrêtement du montant payé en 2001 à 120 %
du montant payé en 2000 pour éviter les effets d'aubaine.
Pour 2002, la dotation a progressé de 30,5 M€. Cette
dernière augmentation sera consacrée à la haute montagne
dont les taux à l'hectare augmenteront de 20 %, à la
montagne et au piémont (+3 %), à la zone
défavorisée simple (+ 2%), aux cultures de pommes, poires et
pêches qui sont primées à compter de cette année et
au financement de quelques reclassements de zone (le Morvan en 2001 et quelques
ajustements en Rhône-Alpes en 2002).
Proposition n°
15.
: Sans bouleverser les
modalités de calcul et d'attribution de l'indemnité compensatoire
de handicaps naturels (ICHN) retenues dans notre pays, renforcer la souplesse
du dispositif et notamment permettre l'augmentation des primes versées
aux 25 premiers hectares afin de favor
iser les petites exploitations.