B. UNE COMPENSATION INSUFFISANTE DES HANDICAPS
1. Les indemnités compensatoires de handicaps naturels
a) Jusqu'en 2000
(1) Historique et principe
Créée en 1972 sous la dénomination de
« prime à la vache tondeuse » et consacrée au
niveau communautaire en 1975, l'indemnité compensatoire de handicaps
naturels (ICHN) est considérée depuis son origine comme la mesure
essentielle de la politique de soutien à l'agriculture de montagne. Son
principe est de compenser financièrement les surcoûts de
production des exploitations liés aux handicaps naturels permanents
qu'elles subissent par rapport aux régions de plaine. Afin de diminuer
les distorsions de concurrence, l'objectif est donc de placer l'agriculture de
montagne sur « un pied d'égalité » avec les
exploitations de plaine, tout au moins du point de vue des conditions de
production.
Cette compensation consistait, jusqu'en 2001, en une prime calculée en
fonction du nombre de têtes de bétail détenues durant
l'hivernage et/ou par hectare de certaines cultures dans un nombre
réduit de cas. Le nombre maximum d'animaux primables a été
en France initialement fixé à 40 unités gros
bétail (UGB) puis à 50 UGB à partir de 1988. Etaient ainsi
éligibles : les ovins (brebis mère et antenaises), les
bovins de plus de 6 mois, les caprins (chèvres mères) et les
équins. Une UGB par ha de surface fourragère, qui correspond
à une norme standard d'agriculture extensive et garante de
qualité, était primée au maximum.
(2) L'extension des ICHN hors des zones de montagne.
Après avoir été exclusivement
réservé aux zones de montagne, le bénéfice de cette
indemnité a été progressivement ouvert à d'autres
zones, mais à taux réduit du fait du moindre impact des handicaps
locaux. Ainsi, les ovins à partir de 1980 et les bovins-viande à
partir de 1987, ont-ils pu bénéficier de l'indemnité dans
les zones défavorisées.
Avec l'extension progressive des zones bénéficiaires, le montant
total des primes versées au titre de l'ICHN est passé de
290 millions de francs en 1974 à 400 millions d'euros
(2,62 milliards de francs) en 2000, ce qui correspond à un
décuplement. Au cours des dix dernières années plus de la
moitié des bénéficiaires se situaient en zone de montagne
(contre 66 % en 1986) et ont perçu les 3/4 des primes versées.
Néanmoins, on constate une diminution particulièrement forte du
nombre de bénéficiaires en haute montagne. Depuis 20 ans, le
nombre de bénéficiaires des ICHN a globalement diminué de
près de 20 %, essentiellement en raison des cessations
d'activité. Cette diminution a été particulièrement
notable dans les zones de haute montagne où elle a atteint 30 %.
La dynamique régressive de l'activité agricole en haute montagne
apparaît donc comme préoccupante car l'évolution des
structures de production se traduit par la concentration spatiale du cheptel et
par une dégradation de la gestion de l'espace dans les zones les plus
difficiles.
(3) Un rééquilibrage en faveur des petites exploitations
Jusqu'à la fin des années 80, le montant des
subventions perçues au titre de l'ICHN était, dans la limite des
plafonds autorisés, directement corrélé au nombre d'UGB
présentes dans l'exploitation, sans modulation selon la taille du
cheptel. En outre, le montant de l'ICHN par UGB, déterminé par
des coefficients d'équivalence entre espèces primables,
était le même quel que soit le type d'élevage (bovin ou
ovin).Ces conditions d'application de l'ICHN avaient pour effet de favoriser
les exploitations les plus grandes possédant un cheptel plus important
et se situant généralement dans les massifs humides. En revanche,
les agriculteurs des zones les plus difficiles (altitude, topographie, climat
plus sec...), dans lesquelles l'agriculture était le plus en
déclin et où la gestion de l'espace était donc la plus
difficile, percevaient les indemnités les plus faibles.
Afin de remédier à cette situation, diverses décisions ont
été prises: une majoration de l'ICHN pour l'élevage ovin
en général, puis une majoration spécifique à
l'élevage ovin en zone sèche, et enfin une revalorisation de la
prime unitaire pour les 25 premières UGB .
(4) L'ultime versement en 2000 selon les modalités anciennes
En 2000, les ICHN ont encore été mises en oeuvre, selon les anciennes modalités. Elles ont été versées en fonction du nombre d'UGB des espèces bovine, ovine, caprine et équine détenues en permanence par l'éleveur pendant l'hivernage, le nombre maximum d'UGB primées étant de 50 par exploitation. En zone de montagne sèche, une indemnité spéciale a été versée à certaines cultures, dans la limite de 40 hectares.
NOMBRE
DE BÉNÉFICIAIRES ET MONTANTS VERSÉS
|
|||
Année |
Indemnités compensatoires de handicaps naturels |
|
|
|
Nombre de bénéficiaires |
Part nationale |
Part communautaire |
1990 |
161.215 |
213,44 |
71,15 |
1991 |
156.503 |
215,38 |
71,79 |
1992 |
153.435 |
209,85 |
69,95 |
1993 |
144.351 |
230,02 |
76,68 |
1994 |
140.634 |
237,13 |
79,04 |
1995 |
132.213 |
239,35 |
79,78 |
1996 |
127.658 |
305,88 |
101,96 |
1997 |
122.955 |
246,65 |
82,22 |
1998 |
118.000 |
281,88 |
93,96 |
1999 |
112.469 |
265,28 |
90,43 |
2000 |
115.293 |
187,09 |
187,09 |
Il convient de noter que la dotation de 240 millions d'euros (1,57 milliard de francs) ouverte en loi de finances initiale pour 2000 s'est avérée nettement supérieure aux besoins : du fait des nouvelles règles de cofinancement communautaires, applicables à partir du 1 er janvier 2000, la part nationale a été réduite à 187 millions d'euros (1,23 milliard de francs), contre 265 millions d'euros (1,74 milliard de francs) l'année précédente.