b) La réalité : certains massifs souffrent particulièrement de la forte diminution en valeur absolue du nombre d'exploitations agricoles
La
mission commune d'information ne peut pas se satisfaire de la conclusion
purement statistique selon laquelle la diminution du nombre des exploitations
en montagne correspond à une tendance générale. En effet,
sur le terrain, on constate immédiatement que cette diminution
« moyenne » a des conséquences beaucoup plus
dévastatrices sur la vitalité des territoires de montagne.
En effet, l'impact de la régression de l'activité agricole sur la
gestion de l'espace montagnard est renforcé par sa faible densité
de population (23 % du territoire national mais seulement 8 % de sa
population) et l'inégale répartition de celle-ci : les zones
les plus difficiles, et bien souvent les plus fragiles, se dévitalisent
et se désertifient.
La déprise agricole pèse lourdement sur le maintien d'une
société rurale en zone montagnarde. Cette fragilité
particulière de la société rurale montagnarde se mesure
à la proportion élevée de la population agricole familiale
qui représente 11,8 % de la population totale des différents
massifs contre 5,8 % pour la moyenne nationale, soit près du
double.
D'après l'analyse du dernier recensement agricole de l'année
2000, effectué à la demande de la mission sénatoriale par
M. José Rey, chef du Service central des enquêtes et études
statistiques au ministère de l'Agriculture, de l'alimentation, de la
pêche et des affaires rurales, la main d'oeuvre agricole en montagne
reste aujourd'hui principalement familiale : ainsi, alors qu'en moyenne
nationale la proportion de salariés agricoles est passée d'un
sixième à un quart, elle est restée constante en zone
montagnarde.
En outre, contrairement à l'idée reçue, seuls 22 %
des chefs d'exploitations de montagne sont aujourd'hui pluriactifs, ce qui
correspond presque exactement à la moyenne nationale (21 %). La
pluriactivité agricole montagnarde est plus répandue dans les
départements des Alpes du Nord ou des Vosges, où l'emploi est
plus abondant, que dans les zones montagnardes du Massif central où
l'activité fait défaut et qui représente 40 % de la
montagne française.
En « renversant le tableau » on constate qu'environ
80 % des agriculteurs de montagne sont mono actifs, taux qu'il convient
de rapprocher d'une autre grandeur fondamentale : les revenus agricoles
sont en montagne inférieurs de 30 % à la moyenne nationale.
Ces chiffres permettent de mieux cerner la réalité vécue
sur le terrain : les faibles revenus agricoles montagnards constituent, en
l'absence de possibilités d'emplois alternatives ou cumulatives,
l'unique source de revenus pour la très grande majorité des
agriculteurs de montagne.
Votre mission commune d'information ne saurait donc trop insister sur
l'importance qui s'attache à la préservation et à
l'amélioration de ces revenus qui constituent le dernier rempart contre
une désertification totale de territoires que les agriculteurs sont les
seuls à valoriser et à entretenir.