b) Des intérêts bien compris, qui s'organisent
(1) Vers un front uni des nouveaux pays producteurs ?
Plusieurs de ces pays se sont engagés dans une stratégie de rapprochement dans le cadre d'accords en matière viticole .
Quatre pays producteurs, les Etats-Unis, l'Australie, le Chili et la Nouvelle-Zélande, ainsi qu'un pays consommateur, le Canada, ont ainsi signé le 18 décembre 2001 un accord sur l'acceptation réciproque de leurs pratiques oenologiques .
Aux termes de cet accord, chacune des parties autorise l'importation des vins issus des autres pays signataires dès lors que ces vins répondent aux normes et aux pratiques oenologiques reconnues dans le pays de production.
L'accord prévoit également des conditions de transparence, ainsi que des mécanismes de règlement des différends.
Ce texte devrait être suivi de la signature d'un autre accord, visant à permettre une reconnaissance mutuelle des règles en matière d'étiquetage .
L'objectif de ces accords est l'augmentation des débouchés commerciaux entre les cinq pays signataires, avec l'espoir que ces derniers seront, à terme, rejoints par l'Union européenne.
L'harmonisation à l'oeuvre entre ces pays vise donc explicitement à intensifier les échanges viti-vinicoles internationaux et à conquérir le marché européen.
Il convient toutefois de noter que l'Afrique du Sud et l'Argentine ne se sont pour l'instant pas encore décidées à entrer dans cette démarche.
(2) Une mise en cause de la conception européenne du vin
L'Union européenne a beaucoup de mal à faire valoir et à protéger ses modes de production et ses dénominations face aux nouveaux pays producteurs , même si le faible volontarisme de la Commission européenne en la matière n'arrange rien.
Ainsi, l'accord sur le commerce des vins et des spiritueux avec l'Afrique du Sud , qui offre une protection renforcée aux appellations d'origine communautaires et à certaines dénominations, et tend à éliminer les marques considérées comme trompeuses quant l'origine du vin n'a-t-il été signé que le 28 janvier 2002, après trois ans d'atermoiements de la part de ce pays.
Compte tenu des avantages substantiels -et excessifs, comme l'a souligné notre collègue Marcel Deneux, auteur et rapporteur d'une proposition de résolution sur cet accord- que l'Union européenne lui a offert « en compensation » (un contingent annuel de 42 millions de litres de vins en franchise de droits de douanes, ainsi qu'une aide de 15 millions d'euros destinée à financer la restructuration de l'industrie sud-africaine des vins et spiritueux), la réticence sud-africaine est surprenante. En outre, rien n'a pu être obtenu dans cet accord sur la protection des mentions traditionnelles.
Les mêmes difficultés apparaissent actuellement à l'occasion de la négociation d'un accord semblable avec l'Australie , qui refuse de renoncer à l'utilisation de dénominations géographiques et de mentions traditionnelles d'origine européenne.
Dans un tel contexte, votre rapporteur regrette que le nouveau règlement 5 ( * ) sur l'étiquetage des vins européens, récemment publié, n'offre qu'une protection limitée des mentions traditionnelles à l'égard des pays tiers. La Commission européenne a, en effet, imposé le principe de deux listes distinguant :
- les mentions traditionnelles qui s'apparentent à des indications géographiques et qui, de ce fait, bénéficieront d'une protection absolue ;
- les autres mentions traditionnelles qui pourront être utilisées par les opérateurs des pays tiers sous certaines conditions, en particulier le respect d'un cahier des charges.
Compte tenu du fait que l'Union Européenne ne sera, en pratique, pas en mesure de vérifier le contenu de ces cahiers des charges, la protection est, en fait, inexistante pour les autres mentions traditionnelles.
* 5 Règlement (CE) n° 753 de la Commission du 29 avril 2002 fixant certaines modalités d'application du règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil en ce qui concerne la désignation, la dénomination, la présentation et la protection de certains produits vitinicoles.