Présenté par M. Daniel Hoeffel, vice-président du Sénat, au Bureau du Sénat
CHAPITRE VI
LE SÉNAT ET
L'INTERNATIONAL
XI. LA DIVERSIFICATION DE L'ACTION DU SENAT, NOTAMMENT POUR LA PROMOTION DU BICAMÉRISME
Au cours des dernières années, l'action du Sénat en matière internationale s'est substantiellement accrue. L'activité traditionnelle des principaux acteurs sénatoriaux s'est approfondie et a été complétée par le développement d'actions nouvelles. Cela principalement dans deux domaines spécifiques : la diplomatie et la coopération technique interparlementaires. Ce mouvement a contribué à l'émergence d'une véritable diplomatie parlementaire .
A. LE DÉVELOPPEMENT DE L'ACTIVITÉ TRADITIONNELLE DU SÉNAT
1. Le Président du Sénat
Le Président du Sénat joue un rôle de premier plan en matière diplomatique et internationale, et les autres autorités concernées du Sénat ( Président de la commission des Affaires étrangères, Président de la délégation pour l'Union européenne et Présidents de groupe d'amitié ...) y sont étroitement associées. A ce titre, le Président reçoit un nombre 58 ( * ) de plus en plus important de chefs d'État ou de Gouvernement , de Présidents d'assemblée , d'ambassadeurs ou de ministres ou autres hautes personnalités étrangères et accomplit une dizaine de voyages à l'étranger par an.
2. La commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées.
.
L'action du Sénat dans le domaine international est,
parallèlement, assurée par la commission des Affaires
étrangères qui intervient, ainsi que dans une moindre mesure la
commission des Finances, dans le domaine de
l'autorisation de la
ratification des conventions et accords internationaux. Une quarantaine de
conventions ou accords internationaux
sont examinés en moyenne
chaque année par le Sénat, qui est saisi dans
85 % des
cas
en première lecture
.
.
Outre sa dimension législative, l'action internationale de la
commission des Affaires étrangères s'exerce également dans
le cadre de
sa fonction d'information et de contrôle,
qui se
traduit par
une quarantaine d'auditions
59
(
*
)
par an, la publication de
rapports
d'information
et le déplacement de
missions
d'information.
3. Les autres acteurs
De
nombreux autres organismes sénatoriaux constitués
jouent
également un rôle significatif dans le suivi des questions
internationales ou européennes. Il s'agit spécifiquement de la
Délégation pour l'Union européenne
mais aussi de
l'ensemble des délégations et commissions, dans leur domaine
respectif de compétences (notamment la
commission des Finances
pour ce qui est, en matière législative, de l'examen des
conventions fiscales et, en matière de contrôle, du suivi de
travaux d'organisations internationales telles que le F.M.I. ou la Banque
mondiale).
L'intérêt du Sénat pour l'international a été
récemment souligné par la mise en place au sein du Bureau de deux
délégations chargées de suivre et d'animer deux secteurs
particuliers importants de l'activité internationale du
Sénat : la
délégation à la
coopération interparlementaire
présidée par
M. Serge Vinçon, Vice-Président du Sénat et la
délégation à la coopération
décentralisée
que préside M. Jean-Claude Gaudin,
Vice-Président du Sénat.
On doit également mentionner que, depuis 1994, le Sénat s'est
doté d'une structure administrative chargée de soutenir
l'activité internationale du Sénat. C'est ainsi que le
service
des relations internationales
, qui s'est progressivement
étoffé, apporte notamment son soutien à l'activité
des groupes sénatoriaux d'amitié, aux actions de
coopération interparlementaire et à l'accueil des
personnalités ainsi que de stagiaires étrangers, en collaboration
avec les autres services du Sénat.
B. LES ÉVOLUTIONS RÉCENTES DE L'ACTIVITÉ INTERNATIONALE DU SÉNAT
1. Les groupes d'amitié comme vecteur privilégié de l'action internationale du Sénat
Au cours
des dernières années, les groupes d'amitié
60
(
*
)
ont fait l'objet d'une
attention particulière
61
(
*
)
, compte tenu de leur activité croissante dans
le domaine de la diplomatie interparlementaire.
.
Le Bureau du Sénat a adopté en décembre 1998
différentes mesures destinées à dynamiser et à
assurer une meilleure coordination de l'action des groupes d'amitié et,
le 23 mai 1999, un arrêté (n° 99-68) dont l'objectif
fondamental était de
« professionnaliser » les
groupes et d'en faire un vecteur privilégié de l'action
internationale du Sénat
.
Cette dernière réforme, engagée par le Président du
Sénat ainsi que par M. Jean Faure, alors Vice-Président
chargé par le Bureau de suivre et de coordonner l'action des groupes
sénatoriaux d'amitié, partait du constat que les groupes
sénatoriaux disposaient, à travers la réception de
délégations étrangères et des missions qu'ils
effectuent à l'étranger
62
(
*
)
,
d'un potentiel de contacts importants
qu'il
convenait de valoriser.
Dans cette perspective, la réforme s'est traduite par trois
évolutions principales :
.
l'élargissement des missions des groupes
au-delà de leur
mission -classique- d'établissement de relations politiques et
d'amitié, dans trois directions : le renforcement du rôle culturel
et
économique
de la France à l'étranger ; le
soutien au développement de la
coopération
décentralisée
; la contribution à la
coopération interparlementaire ;
.
l'abaissement des seuils
d'effectifs requis pour la
constitution des groupes d'amitié ;
.
enfin
,
l'implication d'un plus grand nombre de
sénateurs
favorisée par l'instauration de trois nouvelles
règles : la désignation d'un
Président
délégué
par pays (excepté pour les
micro-États) dans les groupes régionaux ;
la
limitation à 2
du nombre de groupes sénatoriaux concernant un
seul pays pouvant être présidés par un même
sénateur ;
la
limitation à un
du nombre de
groupes sénatoriaux régionaux pouvant être
présidés par un même sénateur.
Il apparaît que les
groupes sénatoriaux d'amitié
connaissent, depuis lors, un succès renouvelé
et sont
notamment devenus les interlocuteurs réguliers d'organismes tels que le
Centre français du Commerce Extérieur, la Direction des Relations
Économiques Extérieures, ou le ministère des affaires
étrangères.
2. La promotion du bicamérisme
Le
Président du Sénat avait mis l'accent, dès 1998, sur le
regain du bicamérisme dans les Parlements contemporains et sur la
nécessaire promotion du bicamérisme dans le monde, et pris
l'initiative de réunir au Sénat les Présidents des
deuxièmes chambres de tous les Parlements du monde, en mars 2000.
Ce « Forum des Sénats du monde », le premier du
genre, a permis d'analyser les multiples causes de ce nouvel essor du
bicamérisme qui s'affirme comme une
« idée
d'avenir »
et a contribué, selon le Président,
à
« l'émergence d'une prise de conscience du
patrimoine commun des deuxièmes chambres du monde »
.
Les initiatives du Sénat français ont été
relayées : c'est ainsi que la Mauritanie a organisé à
Nouakchott, en février 2001, un Forum des Sénats et secondes
chambres des pays africains et du monde arabe.
Ainsi que cela a été indiqué au Chapitre V, sont
désormais en place une
association des Sénats d'Europe
ainsi qu'une
association des Sénats d'Afrique et des pays arabes
.
Ces deux associations constituent les premiers maillons d'une
« Internationale Sénatoriale », dont le Sénat
français apparaît comme le fédérateur.
3. La coopération interparlementaire
Bénéficiant du soutien et des initiatives du service
des Relations internationales,
la coopération interparlementaire,
définie par le Président Jean Faure lors du colloque du 23 mai
2001 sur la diplomatie parlementaire comme
« l'ensemble des
actions permettant un échange de savoir et de méthode entre
assemblées parlementaires »
, s'est notablement
développée au cours des dernières années, sous
l'effet d'une double évolution historique : l'effondrement des
régimes communistes et la démocratisation progressive du
continent africain.
C'est dans ce nouveau contexte que se sont inscrites, au cours des
dernières années, les actions les plus significatives dans le
domaine de la technique
parlementaire
, notamment au profit des nouvelles
démocraties. Aux programmes de coopération et de
développement traditionnels
63
(
*
)
tels les stages de formation de fonctionnaires en
collaboration avec l'assemblée nationale et l'Institut International
d'Administration publique, désormais intégré par l'ENA, se
sont ajoutées de nouvelles formes de coopération avec les
parlements étrangers : l'
assistance à
l'intégration dans l'Union européenne
des pays candidats et
l'apport d'une expertise sur mesure (programmes TACIS et PHARE, en
Géorgie, Russie, Pologne, Ouzbékistan), l'
aide à la
stabilisation des nouvelles démocraties
en collaborant à la
modernisation de leur Parlement (par exemple au Sénat du Royaume du
Cambodge).
* 57 La réflexion sur la composition et les compétences de cette seconde chambre a été largement engagée par la Délégation pour l'Union européenne du Sénat notamment dans le rapport précité.
* 58 A titre d'exemple, en 2001 : 16 chefs d'Etat ou de Gouvernement, 15 Présidents d'assemblée, 18 ministres ou hautes personnalités étrangères...
* 59 Les auditions sont d'ailleurs ouvertes, en certaines circonstances, à des membres extérieurs à la commission : ouverture aux autres commissions concernées ou à l'ensemble des sénateurs (audition des ministres des affaires étrangères, de l'intérieur et de la défense à la suite des attentats du 11 septembre 2001), aux Présidents de groupe, aux Vice-Présidents et aux autres Présidents de commission (guerre du Golfe) afin d'assurer, même en l'absence de séance publique, une information suivie du Sénat en cas d'événements internationaux graves. Par ailleurs, des auditions communes sont régulièrement organisées avec la Délégation pour l'Union européenne, ou ouvertes aux membres des groupes d'amitié concernés.
* 60 Aujourd'hui les groupes sont au nombre de 79 dont 16 régionaux et 63 groupes mono pays. Ils couvrent au total 184 pays.
* 61 Parallèlement aux modifications réglementaires, le pôle « Groupes sénatoriaux » du service des Relations internationales mène depuis 1995 de nombreuses actions de dynamisation des groupes : assistance technique ; mise en contact avec des organismes experts extérieurs (IFRI, CERI, CFCE ...) ; organisation de colloques économiques : plus de 3.000 responsables d'entreprises ont été accueillis au Sénat dans ce cadre.
* 62 18 réceptions de délégations en 2001 et en moyenne 15 à 30 missions à l'étranger pour l'ensemble des groupes d'amitié.