CHAPITRE III
LA GESTION DES CARRIÈRES
La
gestion de la carrière des universitaires confirme bien, après
l'examen des modalités de leur recrutement, que les
enseignants-chercheurs sont des fonctionnaires à part.
Certes, ils partagent avec l'ensemble de la fonction publique le manque de
souplesse des dispositions statutaires et financières qui s'appliquent
au corps de fonctionnaires ; mais
à la différence des
autres agents de l'Etat, ils ne sont soumis ni au pouvoir hiérarchique
d'un chef de service, ni à un système d'inspection, les
règles de l'avancement et l'organisation des tâches reposant
également sur le jugement des pairs
.
Par certains de ses aspects, la profession universitaire demeure assez proche
d'une profession libérale et c'est cette liberté - liberté
pour l'universitaire de choix de ses thèmes de recherche, voire de ses
cours et de l'organisation même de sa journée de travail - qui la
rend attrayante et qui constitue une
incitation
puissante à
s'impliquer dans le bon fonctionnement d'une institution dont on se sent membre
et responsable. Mais cette incitation puissante qu'il faut préserver ne
doit pas être contrebalancée par une mauvaise organisation des
tâches et du déroulement de la carrière.
Ce
système, proche de l'autogestion
, entraîne en effet des
déviations bien connues. Le système français de recherche
souffre d'une régulation insuffisante par la concurrence scientifique
internationale. Les attitudes et valeurs monopolistiques, la lutte pour les
territoires disciplinaires et les postes peuvent conduire aussi bien au
mandarinat qu'au syndicalisme corporatif ou à la bureaucratisation.
L'absence criante de mobilité thématique et la difficulté
de développement des actions innovantes traduisent une rigidité
préoccupante. Le système d'enseignement supérieur souffre
d'un pilotage insuffisant par la demande d'emplois de l'appareil productif,
même si des progrès sensibles apparaissent et que le
développement des filières professionnelles n'est plus
rejeté.
De plus,
la carrière d'un universitaire peut se dérouler sans
la moindre évaluation de son activité, pédagogique comme
de recherche
. En sens inverse,
l'obsolescence des obligations de service
des enseignants-chercheurs
les place dans une situation
particulièrement inconfortable : astreints à un minimum de
service trop rigide, ils ne peuvent se consacrer pleinement à des
activités de plus en plus nombreuses dans l'enseignement
supérieur. Ce problème a conduit le ministre de
l'éducation nationale à instituer une commission, animée
par M. Bernard Espéret, président de l'université de
Poitiers, chargée de réfléchir à une nouvelle
définition des tâches des enseignants et des
enseignants-chercheurs dans l'enseignement supérieur français.
Cette commission vient de rendre son rapport.