c) La situation inacceptable de certains contractuels en poste à l'étranger
Votre Rapporteur spécial a été saisie, lors de son passage à la représentation de Londres, d'un problème de gestion de personnel qui lui est apparu de nature à aggraver ces disparités.
Tandis que les agents recrutés sur une base locale n'ont pas vocation à passer d'un pays à un autre, les agents de l'État recrutés en France sont soumis à mobilité : depuis 1993 , leur rémunération décroît en application de règles générales à partir de six années passées dans un même pays d'affectation. L'indemnité de résidence est diminuée de 25 % après 6 ans, de 55 % après 9 ans et de 85 % après 12 ans sans changement.
Un tel régime cohérent, s'agissant de la gestion du personnel de l'ensemble du Ministère des Affaires Étrangères, peut aboutir, ponctuellement, à des situations peu satisfaisantes, voire franchement injustes, dès lors qu'elles s'appliquent à des personnels ayant déjà un certain âge au moment de l'entrée en vigueur du nouveau dispositif et pour lesquels la mobilité, si elle est souhaitable dans l'absolu, ne constitue pas un impératif fonctionnel comme dans le cas des représentations diplomatiques.
Le problème, qui concerne presqu'une vingtaine de personnes réparties essentiellement entre Londres et New-York, mais aussi au Canada et en Allemagne, est rendu difficile à résoudre du fait qu'il implique des régimes statutaires définis en fonction des besoins du ministère des Affaires étrangères et non de ceux d'agents de Maison de la France.
Pour essayer de clarifier la situation, il faut rappeler que dans les deux postes où le problème est véritablement aigu du fait des variations de change, on retrouve trois catégories de personnels :
1- les agents privés soumis au droit local et rémunérés sur le budget du GIE ;
2- du personnel public recruté en France et payé sur le titre III du budget du Tourisme ;
3- des agents publics recrutés localement et payés également sur le même titre du budget du tourisme.
Le personnel privé de droit local, qu'il soit en contrat à durée déterminée ou indéterminée, bénéficie d'un régime particulier de sécurité sociale. Ainsi, aux États-Unis, ils payent eux-mêmes des cotisations dont 50 % leur est remboursé, tandis que Maison de la France complète leur protection sociale de base par la mise en oeuvre d'un contrat d'assurance de groupe couvrant le risque « incapacité/invalidité » depuis le 1 er janvier 2000.
Le personnel expatrié, dont le statut est régi par le décret 69-697 du 18 juin 1969, applicable aux agents de l'État en poste à l'étranger, sont titulaires de contrat à durée déterminée à reconduction tacite pour les plus anciens et expresse pour ceux passés depuis 1984.
Les contrats sont conclus pour trois ans, pour exercer des fonctions dans une ville bien déterminée. Les cotisations sociales sont assises sur le traitement de base, ce qui, compte tenu de l'importance de l'indemnité de résidence, amène les agents à cotiser à des régimes de retraite complémentaire non obligatoires.
Les agents de l'État recrutés localement se trouvent placés, comme on l'a mentionné, dans une situation personnelle difficile. Il faut rappeler qu'en 1996, les agents recrutés localement et installés depuis plus de 9 ans dans la même ville, ont subi une diminution de 85 % de leur indemnité de résidence, lorsqu'ils souhaitaient y demeurer .
Ce n'est qu' à titre transitoire que le décret du 25 mars 1993 prévoyait le versement d'une indemnité différentielle , dont la résorption devait intervenir au fur et à mesure des augmentations des indemnités de résidence .
L'augmentation de cette indemnité par suite des variations de change a abouti pour ces agents à la stagnation en francs de la somme des deux indemnités, et donc à une diminution drastique de leur pouvoir d'achat .
Ainsi, à Londres, des agents ne gagnaient pas plus en francs courants en septembre 2000 qu'en février 93, alors que l'inflation locale et notamment celle des loyers avait amputé leur pouvoir d'achat de 25 à 30 %.
Cette situation, où, pour reprendre l'expression des intéressés, certains agents ont un « salaire stagnant à perpétuité », aboutit à une situation incohérente : le responsable du service peut se retrouver avec le même traitement qu'un débutant, tandis que, pis encore, les augmentations indiciaires ont pour conséquence, dans la mesure où elles s'accompagnent d'une augmentation de l'indemnité de résidence, d'une réduction de l'indemnité différentielle, ôtant ainsi tout intérêt à la promotion dont bénéficie l'intéressé.
Deux catégories de solutions sont envisageables :
1° - des solutions d'ordre général : si l'on exclut une modification du décret de 1993 7 ( * ) peu réaliste, s'agissant de traiter de cas particuliers, ou une augmentation générale des traitements qui, pouvant faire tache d'huile, a peu de chances d'être mise en oeuvre, il ne reste qu'une transformation du contrat des intéressés en contrat GIE, ce qui aurait pour conséquence néanmoins un alourdissement de la charge supportée par Maison de la France ;
2° - des solutions au coup par coup : des promotions individuelles à l'occasion de mutations géographiques ou de changements de catégories.
L'application de l'article 27 du décret de 1993, qui plafonne la somme des indemnités de résidence et différentielle des agents non titulaires aboutit à neutraliser, contrairement à l'esprit du décret, toute possibilité de promotion.
La parade, finalement largement inefficace, a consisté pour l'administration à obtenir des augmentations indiciaires : celles-ci s'élèvent en moyenne à + 134 points en Allemagne, +115 points à Londres et au Canada ainsi que + 166 points aux États-Unis.
Bref, il faut envisager, selon votre rapporteur spécial, deux hypothèses :
• L'intégration à la Fonction Publique, avec possibilité de titularisation immédiate . Cette solution donnerait des garanties au personnel, mais supposerait une modification des textes réglementaires pour tenir compte des spécificités des métiers et des carrières à Maison de la France et que soit pris en compte les différences de niveau de vie dans les pays concernés ;
• La reprise par le GIE Maison de la France des contrats de travail des agents qui le souhaiteraient . Un contrat pourrait être établi, proposé et étalé sur plusieurs années avec des priorités concernant les agents affectés aux USA, au Canada et au Royaume Uni. Le coût de la mesure en 2002 a été chiffré à 2 millions de francs pour le GIE et à 2,55 millions de francs pour l'État par le directeur général de Maison de la France.
En tout état de cause, le rapporteur spécial note également la nécessité de clarifier, définir la situation et le devenir du personnel d'autant plus que la volonté d'implantation sur de nouveaux marchés en Inde, en Israël, en Russie, conduira à des recrutements.
A ce sujet, des négociations seront à engager sans tarder avec les représentants du personnel pour définir leur statut.
Tout retard dans la solution de ce problème contribuerait à détériorer, le climat de travail dans les bureaux concernés au détriment de l'efficacité de l'action de Maison de la France sur deux marchés stratégiques ce qui n'empêche pas que, sur un plan général, tout doit être fait pour favoriser la mobilité du personnel entre les représentations à l'étranger.
* 7 Toutefois, une piste reste à étudier, celle de la réforme de l'article 9 du décret sus-mentionné du 18 juin 1969 qui dispose que « pendant la période de validité du contrat, seules peuvent être modifiées et faire l'objet d'un avenant les dispositions concernant les fonctions de l'agent. Cette modification peut entraîner le cas échéant une modification du groupe de l'indemnité de résidence, l'indice hiérarchique lorsque l'agent est titulaire. »