II. LES CARACTÉRISTIQUES SPÉCIFIQUES DE LA TAXE SUR LES SALAIRES

A. UN CHAMP D'APPLICATION LIMITÉ DANS LE TEMPS POUR LES ASSUJETTIS PARTIELS À LA TVA

Il convient dès à présent de souligner que la réglementation prévoit de manière assez claire la situation des employeurs qui, pour un exercice donné de versement des rémunérations, ne sont pas du tout assujettis à la TVA et ceux qui le sont totalement. En effet, quelle que fut, l'exercice précédent, la situation de l'employeur au regard de la TVA, la taxe sur les salaires est due dans le premier cas et ne l'est pas dans le second 17 ( * ) .

En outre, la loi fiscale prévoit l'assujettissement à la taxe sur les salaires des assujettis partiels à la TVA, lorsque, pour l'exercice précédent, ceux-ci n'ont pas été assujettis à la TVA dans une proportion équivalente à celle de l'exercice en cours.

Il convient de préciser à ce stade que dans cette hypothèse, et dans la mesure où le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires est directement lié au taux d'assujettissement à la TVA, seul le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires calculé à partir du taux d'assujettissement à la TVA de l'année précédant l'année de versement des rémunérations doit être retenu.

Cependant, lorsqu'au titre de l'exercice précédent, les assujettis partiels à la TVA ont été assujettis à cette taxe pour 90 % au moins de leur chiffre d'affaires, la jurisprudence 18 ( * ) a clarifié la législation fiscale relativement absconse en la matière en jugeant que de tels assujettis ne devaient pas être redevables à la taxe sur les salaires au titre de l'exercice en cours. Autrement dit, il existe dans cette hypothèse un délai de carence ou une franchise d'impôt limitée à un an (lorsque l'assujetti à la TVA l'a été sur au moins 90 % de son chiffre d'affaires) 19 ( * ) .

B. LE RAPPORT D'ASSUJETTISSEMENT À LA TAXE SUR LES SALAIRES

Le but du législateur de 1968 était de réduire la charge constituée par la taxe sur les salaires pour les entreprises assujetties à la TVA. A cet effet, un mécanisme permettant de moduler l'assiette de la taxe sur les salaires en fonction du taux d'assujettissement à la TVA a été élaboré.

Le principe du rapport d'assujettissement est exposé par la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 231-1 du code général des impôts : l'assiette de la taxe sur les salaires est constituée par une part des rémunérations versées. Cette part est inversement proportionnelle au taux d'assujettissement des activités de l'employeur à la TVA l'année précédant celle du versement des rémunérations. Ainsi, si ce dernier était assujetti à la TVA à 70 % au titre de l'année n-1, le "rapport d'assujettissement" à la taxe sur les salaires serait de 30 % au titre de l'année n.

Concernant ce rapport d'assujettissement, historiquement, il convient de retracer trois étapes :

- Avant l'arrêt SA SATAM de la Cour de Justice des Communautés européennes 20 ( * ) en juin 1993, le rapport d'assujettissement n'était que le "contreprorata" 21 ( * ) , c'est-à-dire le complément à 100 % du prorata de déduction admis pour les immobilisations au bénéfice des assujettis partiels à la TVA.

Par conséquent, le prorata de déduction, et par différence le rapport d'assujettissement, était constitué par le rapport entre les recettes ouvrant droit à déduction (recettes soumises à TVA et recettes assimilées à des opérations taxables) et les recettes totales (soumises à la TVA, exonérées ou placées hors du champ d'application de la TVA). Ce mécanisme était favorable aux entreprises dans la mesure où plus le prorata était élevé, plus le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires était faible.

- L'arrêt SA SATAM a précisé les modalités de calcul du prorata de déduction en jugeant qu'au dénominateur, seules devaient être prises en compte les recettes situées dans le champ d'application de la TVA (imposables et exonérées). Cette jurisprudence a eu pour effet d'augmenter le prorata de déduction des assujettis partiels et corrélativement de réduire le "rapport d'assujettissement" à la taxe sur les salaires.

Cependant, l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1993 22 ( * ) est venu rendre sans effet, pour la taxe sur les salaires, cette jurisprudence. Le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires est désormais calculé directement, sans référence au prorata de déduction TVA, et ne constitue donc plus un "contreprorata". Ce rapport d'assujettissement s'obtient désormais en rapportant au chiffre d'affaires total (recettes imposables, exonérées et recettes hors du champ d'application de la TVA), le chiffre d'affaires qui n'ouvre pas droit à déduction (exonérés ou hors champ). Néanmoins, cette nouvelle méthode revient à obtenir le même résultat qu'avant l'arrêt SA SATAM.

* 16 Loi n° 2000-1352 du 30 décembre 2000.

* 17 Cette disposition ne se déduit pas nécessairement du texte législatif lui-même, mais telle est l'interprétation courante que donne la doctrine de l'intention du législateur.

* 18 CE 21 mai 1986, n° 49766, 7e et 9e s.-s. : RJF 7/86, n° 679.

* 19 Cf. La Doctrine Administrative 5L-121, n° 18 et suivants, du 1 er juillet 1990, ayant analysé l'arrêt susvisé.

* 20 CJCE, SA SATAM, aff. 333/91 du 22 juin 1993, RJF 7/93 n° 986.

* 21 Expression de M. J.F Verny dans ses conclusions (RJF 12/81, n° 1057) relatives à un arrêt du Conseil d'Etat (CE 30 octobre 1981, n° 21230) confirmant l'interprétation de la loi par la doctrine.

* 22 Loi n° 93-1353 du 30 décembre 1993 modifiant l'article 231-1 du code général des impôts.

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