ANNEXE 3
La modernisation
des administrations en Europe
Les 10, 11 et 12 mai 2000, s'est tenu à Lisbonne un colloque d'un type nouveau. Pour la première fois, les pays de l'Union européenne ainsi que la Commission se sont réunis pour échanger des bonnes pratiques en matière de qualité dans l'administration publique.
Les thèmes et projets suivants ont été retenus :
Administrations municipales
Allemagne |
Passau |
Autriche |
Zell-am-See |
Espagne |
Barcelone
|
France |
Parthenay |
Grèce |
Amaroussion |
Italie |
Bologne
|
Citoyens
Espagne |
Amélioration des relations entre l'administration et les citoyens |
Irlande |
Lois sur la liberté d'information |
Portugal |
Boutique point unique pour les citoyens |
Suède |
Accès en libre-service au service d'immatriculation des véhicules |
Management
Allemagne |
-Gestion du personnel du ministère des finances -
Brême
|
France |
-Direction départementale de l'agriculture et de la forêt des Landes |
Grèce |
-Centre national de l'administration publique |
Luxembourg |
-Commissariat aux affaires maritimes |
Portugal |
-Institut national des statistiques
|
Commission européenne |
Europaplus, l'intranet de la Commission européenne |
Éducation
Finlande |
Consortium d'éducation de la région de Lathi |
Irlande |
Retour des copies d'examen à l'université |
Royaume-Uni |
Collège Sainte-Mary |
Emploi
Belgique |
Office national de l'emploi |
Danemark |
Agence publique de l'emploi de Ringkobing |
Finlande |
Emploi dans la ville de Turku |
France |
Agence nationale pour l'emploi |
Suède |
Systèmes-client « ouverts » dans le service de l'emploi public |
Douanes - Administrations fiscales
Danemark |
Service des douanes et du fisc de la région d'Aarhus |
Finlande |
Organisation de la trésorerie de Keski-Uusimaa |
Irlande |
Projet de consolidation du code fiscal |
Italie |
Dépôt électronique des déclarations et du règlement des impôts |
Pays-Bas |
Administration des impôts et des douanes |
Royaume-Uni |
-Administration du Trésor du Comté de
Warwickshire
|
Suède |
Administration des douanes |
Santé - Solidarité
Belgique |
Office national d'allocations familiales pour travailleurs salariés |
Danemark |
Hôpital général d'Herning |
Source : Site Internet du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 30 mai 2001, sous la présidence de M. Alain Lambert, président , la commission a entendu une communication de M. Gérard Braun , rapporteur spécial des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat , sur une étude comparative portant sur la réforme de l'Etat à l'étranger .
Après que M. Gérard Braun, rapporteur spécial , eut présenté les grandes orientations de son rapport, un large débat s'est engagé.
M. Jacques Oudin a estimé que la réflexion sur la réforme de l'Etat ne pouvait être séparée de l'examen prochain de la proposition de loi organique relative aux lois de finances. La communication du rapporteur a suscité de sa part plusieurs observations. La sphère publique en France dépense beaucoup, comme le montre un niveau de prélèvements obligatoires très élevé et de plus en plus mal supporté par la population, avec une efficacité parfois limitée. Il a ensuite rappelé que de nombreux travaux avaient montré que l'importance de ces prélèvements obligatoires s'accompagnait d'un niveau de service souvent moindre que dans de nombreux pays étrangers, ce qui pose la question de l'efficacité de notre système de gestion publique. Il a ensuite relevé que la quasi-totalité de nos voisins avait manifesté la volonté politique de mettre en oeuvre des mesures parfois draconiennes. Il a surtout insisté sur l'extrême difficulté à mesurer l'efficacité de la sphère publique en France, la rationalisation des choix budgétaires (RCB) dans les années 1970 ayant échoué sur l'insuffisance des informations relatives aux administrations publiques. Les grands axes de la réforme de l'ordonnance organique de 1959 rappellent cette expérience : il a dès lors déploré qu'en trente ans, la France n'ait pas avancé sur ce sujet, tout en constatant qu'elle avait en revanche recruté toujours plus de fonctionnaires et accru considérablement le niveau de ses dépenses publiques. Il a toutefois salué l'amélioration de l'information relative aux dépenses sociales.
M. René Trégouët a souhaité obtenir des informations sur l'évolution de l'emploi public en Italie.
M. Maurice Blin , déplorant la lenteur des réformes de l'administration ainsi que le désintérêt pour les résultats de son action, a voulu connaître les principales critiques adressées aux administrations des Etats étudiés. Il a également regretté le caractère tabou de la réforme de la fonction publique en France, notant que très peu de responsables politiques prenaient des engagements sur ce sujet. Il s'est lui-même interrogé sur la pertinence de l'existence de l'emploi à vie.
M. Michel Charasse a noté que la réforme de l'Etat était en France un très vieux débat, remontant au moins au début du XX e siècle, tout comme le thème de la réforme fiscale. Il a constaté, pour le regretter, que l'Etat ne faisait l'objet de réformes qu'en cas de crises graves, comme au lendemain des deux guerres mondiales ou comme en 1958. Il a toutefois souligné l'existence de l'exception constituée par la décentralisation en 1981-1982, tout en considérant que cette réforme concernait les relations à l'intérieur des pouvoirs publics et non les relations entre l'Etat et les citoyens. Il a dès lors estimé qu'il était indispensable de prendre l'opinion publique à témoin pour réussir la réforme de l'Etat, et a cité l'exemple, a contrario, de la réforme avortée du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il a également insisté sur la nécessité d'un consensus politique minimal, relevant qu'il n'existait pas en France aujourd'hui. Il s'est dès lors interrogé sur les conséquences d'une réforme de l'Etat « rampante » qui serait imposée à notre pays de l'extérieur, c'est-à-dire sous la contrainte communautaire.
M. Alain Lambert, président , a observé que l'ensemble des contrôles effectués par les rapporteurs spéciaux de la commission des finances convergeaient dans leurs conclusions, souhaitant que la France se dote d'instruments de gestion administrative plus performants. Il a voulu savoir si la réforme de l'Etat conduite à l'étranger devait nécessairement passer par une réforme de la procédure budgétaire. Puis, il s'est interrogé sur les réactions des organisations syndicales.
M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a estimé que l'argent public était trop souvent mal dépensé en France, et qu'il était indispensable d'améliorer l'emploi des dotations budgétaires. Il a indiqué que la réforme de l'Etat devait être conduite sur la base d'un triptyque réunissant la volonté politique, insuffisante en France à ses yeux sur ce point, la sensibilisation auprès de l'opinion publique et un réel dialogue social avec les organisations syndicales qui doivent être parties prenantes au processus de réforme. Il a confirmé que, dans les pays qu'il avait observés, la réforme de l'Etat avait nécessité une réforme des procédures budgétaires. Il a ajouté que la haute fonction publique devait faire l'objet d'un intérêt spécifique. Il a indiqué que, d'une manière générale, la réforme de l'Etat était plus avancée dans les pays étrangers étudiés qu'en France, mais que les événements porteurs de ces réformes étaient extrêmement différents selon les pays : la crise politique, économique et sociale en Italie, la nécessité de rétablir l'équilibre des finances publiques en Australie ou au Canada, la prise de conscience d'une administration indifférente, inefficace et corrompue en Belgique ou au Japon... Seuls, les pays scandinaves n'ont pas été confrontés à une crise aussi grave, la réforme de l'Etat ayant été engagée afin de préserver les spécificités de leur modèle social d'Etat-providence. Il a indiqué que la privatisation et la contractualisation de l'emploi public en Italie avaient abouti, avec l'agrément des organisations syndicales, à la suppression du statut général de la fonction publique, les fonctionnaires étant désormais soumis au droit du travail applicable aux salariés du secteur privé. Enfin, il a conclu sur la nécessité d'engager la réforme de l'Etat de manière pragmatique et progressive, la Nouvelle-Zélande étant le seul pays à avoir réformé en profondeur son Etat avec rapidité.
La commission a alors donné acte au rapporteur des conclusions de sa communication et a décidé d'autoriser leur publication sous la forme d'un rapport d'information.
LA RÉFORME DE L'ÉTAT À L'ÉTRANGER
A l'occasion de l'examen par le Sénat de la proposition de loi organique relative aux lois de finances, qui s'inscrit dans le cadre plus large de la modernisation de la gestion administrative, il convenait d'observer les expériences étrangères en matière de réforme de l'Etat, pour apprécier la situation de la France sur ce point.
La réforme de l'Etat, plus que comme un choix politique partisan, apparaît, dans de très nombreux pays, comme une nécessité résultant de difficultés parfois très sérieuses, dont les gouvernements étaient bien décidés à sortir. Ces réformes ont, le plus souvent, bénéficié d'un soutien consensuel.
La première orientation de la réforme de l'Etat concerne la modernisation de la gestion publique, qui vise à apprécier les résultats obtenus par les administrations et services publics. Si l'état d'avancement de ces réformes varie selon les pays, la tendance générale est la même : attention portée aux résultats plus qu'aux moyens, introduction de nouvelles méthodes comptables, adoption de méthodes proches de celles existant dans le secteur privé.
Le deuxième volet est relatif aux réformes, parfois profondes, qu'a subies la fonction publique : gestion des ressources humaines dynamisée, assouplissement des dispositions statutaires, voire alignement sur le droit du travail, plus grandes possibilités de rémunération au mérite, sensibilisation des fonctionnaires aux résultats de l'administration par la responsabilisation et la recherche de l'efficacité.
Le troisième axe de la réforme de l'Etat concerne la simplification et la modernisation des structures administratives : systèmes administratifs reposant sur des agences, souvent puissantes et gérées comme des entreprises privées, amélioration de la qualité du service rendu, intérêt porté à la satisfaction des usagers-clients, réforme des administrations centrales, simplification des démarches administratives, développement de l'administration électronique.
Il est urgent que la France tire les conclusions de ces expériences étrangères.