b) Le partage des compétences : l'équarrissage à la DGAL, la fabrication d'aliments à la DGCCRF
La note de service du 6 novembre 1990 précise que les contrôles de l'application de l'arrêté du 24 juillet 1990 modifié incombent aux agents de la DGAL et de la DGCCRF.
Les interventions doivent avoir lieu au niveau des unités de collecte de production et de stockage des protéines animales, qu'elles se situent dans les abattoirs et les entreprises d'équarrissage, ou chez les fabricants d'aliments composés.
Pour les protéines issues de volaille, les exploitants d'ateliers qui disposent de circuits de collecte, de traitement et de stockage séparés de ceux par lesquels transitent les protéines interdites par l'arrêté doivent se signaler à la Direction des services vétérinaires dont ils dépendent, si les produits qu'ils élaborent sont susceptibles d'être incorporés dans les aliments pour bovins.
Les contrôles réalisés par les agents de la DGAL sont principalement axés sur les installations de production et de stockage de protéines animales, ainsi que sur l'origine des matières premières qu'elles mettent en oeuvre et les conditions de leur collecte. Ils interviennent donc principalement chez les équarrisseurs.
Les interventions des agents de la DGCCRF consistent principalement à examiner les documents écrits et à procéder à des prélèvements aux fins d'analyse. Elles ont lieu principalement chez les fabricants d'aliments pour animaux mais cette intervention n'empêche pas les agents de remonter en amont, notamment chez les équarrisseurs, pour contrôler l'origine des matières premières utilisées.
c) Les contrôles relevant spécifiquement de la DGCCRF
(1) Les contrôles sur les farines destinées aux animaux
Lors de son audition par la commission d'enquête, M. Jérôme Gallot a distingué les trois volets relevant des contrôles de sa direction.
Des contrôles généraux réalisés dans les entreprises
Les contrôles réalisés par la DGCCRF dans les entreprises ont pour objet de déceler, à tous les stades de la production et de la transformation, les pratiques interdites, de repérer les marchandises non conformes et dangereuses et, par conséquent, de rechercher des infractions éventuelles, d'évaluer le dispositif d'autocontrôle mis en oeuvre par les entreprises pour s'assurer de la bonne exécution de leur activité au regard de leurs obligations et de remédier aux anomalies détectées à l'occasion des contrôles.
A cette occasion, les agents de la DGCCRF effectuent des constatations directes, procèdent, éventuellement, à des prélèvements d'échantillons qui sont ensuite analysés dans un laboratoire officiel, et examinent les différents documents ayant trait à la fabrication (factures d'achat, bons de livraison, factures de vente, formules de fabrication).
Les entreprises de fabrication d'aliments pour animaux constituent donc le coeur de la compétence de la DGCCRF. Entre 1990 et 1995, le nombre de ces contrôles était compris entre 200 et 400 par an ; depuis 1995, entre 700 et 950 contrôles sont effectués chaque année.
Le nombre de visites de contrôle en entreprise par la DGCCRF, entre 1989 et 1999, a évolué comme suit :
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
202 |
429 |
435 |
416 |
368 |
377 |
271 |
957 |
693 |
820 |
880 |
Source : DGCCRF
Des contrôles sur les farines de viande importées
Depuis l'avènement du marché unique, les instructions de contrôles ont été renouvelées par la DGCCRF, dans une note de service du premier trimestre 1993 ayant pour objet de vérifier l'absence d'utilisation illégale de farines de viande importées. Les opérateurs de la filière étaient recensés et les lots de marchandises importées suivis jusqu'à leur destination finale.
Les importations d'aliments composés pour bovins faisaient également l'objet de contrôles aléatoires afin de vérifier l'absence de farines animales interdites. Ces contrôles n'ont pas mis en évidence d'utilisation illicite de farines de viande.
Depuis la fin des années 1970, le service de la répression des fraudes a également mis en place un contrôle qualitatif des produits destinés à l'alimentation animale en effectuant des prélèvements pour analyse microbiologique et physico-chimique lors de leur débarquement dans les ports des régions Ouest ; ces contrôles ne peuvent être, stricto sensu , considérés comme des contrôles à l'importation.
Ainsi, trois navires ont fait l'objet de contrôles en 1993 pour un tonnage de 2.150 tonnes , 19 en 1994 pour un tonnage de 19.920 tonnes de farines de viande irlandaises, 24 en 1995 représentant un tonnage de 28.667 tonnes et 6 au premier semestre 1996 pour un tonnage de 7.488 tonnes.
Ces vérifications portuaires -indépendamment des contrôles effectués lors de la procédure d'importation qui ne sont pas de son ressort- et dans les entreprises de fabrication d'aliments pour animaux- permettront en juillet 1996 de rectifier les données douanières sur les importations de farines britanniques de 1993 à 1996.
Des contrôles ciblés sur les aliments pour animaux
Une enquête conjointe DGAL-DGCCRF a été lancée le 24 juin 1996 sur le contrôle des aliments destinés aux ovins. Les vérifications ont porté sur l'application de l'arrêté du 20 décembre 1994 (qui étend l'interdiction prévue par l'arrêté du 24 juillet 1990 à tous les ruminants) et sur l'absence d'incorporation de farines animales importées du Royaume-Uni dans les aliments pour ovins.
En application de la modification de l'arrêté d'interdiction des protéines animales dans l'alimentation des ruminants en juillet 1996, une note de service conjointe DGCCRF-DGAL du 16 août 1996 a modifié les dispositions de contrôle prévues dans la note de service du 6 novembre 1990 : ainsi, la DGCCRF réalise, depuis 1997, des contrôles ciblés avec des comptes rendus précis et méthodiques sur les aliments pour animaux et procède à des prélèvements dans les entreprises, qui sont ensuite analysés par les laboratoires utilisant une méthode spécifique de détection de la présence de farines dans les aliments pour animaux.
Selon M. Jérôme Gallot, il s'agit d'un « tournant dans la réalité et dans l'efficacité des contrôles puisque nous sommes passés d'un contrôle général en entreprise à un contrôle spécifique orienté vers des prélèvements nous permettant de détecter des traces de farines ».
Les agents de la DGCCRF peuvent désormais combiner le contrôle documentaire et le contrôle analytique : un programme de contrôles sur cette base a donc immédiatement été lancé par la Direction, appelé « tâche programmée 84 » qui, depuis, a été reconduite pour chaque trimestre d'activité.
M. Jérôme Gallot a souhaité, sur ce point, apporter à la commission d'enquête des précisions quant à l'existence d'un « prétendu seuil de tolérance dans la présence de farines ». Il a précisé que sa direction avait fixé une limite à partir de laquelle une procédure était engagée devant les tribunaux. Cette limite est égale à 0,3 % de traces de farines dans l'alimentation animale ce qui, techniquement, correspond à 0,1 % de fragments d'os. Elle résulte du fait que la méthode d'analyse comporte une marge d'approximation et d'erreur.
Dans le cadre d'une procédure pénale, il doit être démontré au juge l'intention frauduleuse ou la négligence coupable. A partir d'une présence de 0,1 % de fragments d'os dans l'aliment, la DGCCRF estime qu'une négligence coupable ou une intention frauduleuse peut être établie. En deçà, il est très difficile d'obtenir des condamnations. Sur quinze affaires transmises aujourd'hui à la justice, concernant des cas à partir, ou au-delà de 0,1 % de fragments d'os, sept ont été jugées, cinq ont été classées, une a fait l'objet d'une relaxe et une seule condamnation a été prononcée.
En deçà de ce seuil, l'administration des fraudes ne transmet pas les affaires au Parquet mais elle agit au titre de ses pouvoirs de police administrative. Dans ce cas, ses agents se rendent à nouveau dans les entreprises concernées et les obligent à modifier leur process, afin que les sources de contamination soient recherchées et éliminées.
Lors de son audition, M. Jérôme Gallot a déclaré à la commission : « Je suis heureux de pouvoir m'exprimer pour la première fois sur ce sujet pour préciser que cela ne signifie pas que l'administration accepte des traces jusqu'à 0,1 % ; cela veut dire qu'elle agit au titre des pouvoirs de police administrative qui sont les siens. Il faut d'ailleurs augmenter ces pouvoirs, et j'ai fait des propositions au gouvernement à ce sujet. ».
Contrôles effectués par la DGCCRF depuis 1997 sur les aliments pour ruminants
Teneur en fragments d'os ou écailles et arêtes de poisson |
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Année |
Nombre de prélèvements |
Comprise entre 0,01 et 0,1 % |
supérieure à entre 0,01 et 0,1 % |
PV |
Suites |
1997 |
307 |
48 (15,6 %) |
17 (5,5 %) |
4 |
1 relaxe, 1 procédure en cours, 1 contravention, 1 classement sans suite |
1998 |
454 |
23 (5,1 %) |
5 (1,1 %) |
5 |
3 en cours, 1 classement sans suite, 1 condamnation |
1999 |
380 |
14 (3,7 %) |
7 (1,8 %) |
3 |
1 relaxe et 3 procédures en cours |
2000 |
1115 |
40 (4,5 %) * |
1 (0,1 %) * |
2 |
1 en cours, 1 classement sans suite sous réserve de non réitération des faits pendant 3 ans. |
Total |
2256 |
125 (6,2 %)* |
30 (1,5 %)* |
14 |
* pourcentage exprimé par rapport aux échantillons analysés au 31 décembre 2000 - Source : DGCCRF
Le contrôle du traitement thermique des farines
En 1999, le laboratoire de Rennes a adopté une technique encore inédite pour vérifier que les farines ont bien été traitées à 133°C, sous une pression de 3 bars pendant 20 minutes. Cette méthode est fondée sur la dégradation d'une protéine de porc.
Des contrôles ont été réalisés et donnent lieu, en cas d'anomalies à une information et à une coopération entre les services vétérinaires et les services des fraudes chez l'équarrisseur fabriquant la farine.
D'après les indications de M. Jérôme Gallot, la mise en oeuvre de ce traitement thermique ne s'est pas faite sans difficultés : des défauts de traitement ont en effet été constatés, dus à des dérèglements d'appareils de mesure, à une insuffisante maîtrise des procédures ou au fait que les températures n'étaient pas suffisantes au coeur du lot de farine.