3. Le retour de la contamination directe : l'utilisation des graisses animales
Les contaminations croisées semblent constituer l'explication la plus plausible de la deuxième phase de contamination.
Au vu des informations recueillies lors de ses auditions, la commission s'interrogera également sur l'utilisation :
- de graisses animales dans divers aliments du bétail, pourtant réputés « sans farines » ;
- de graisses animales dans les lactoremplaceurs.
a) L'aliment jeune bovin : une piste sérieuse
M. Jean-Jacques Réveillon, directeur de la Brigade nationale d'enquêtes vétérinaires, a mentionné lors de son audition que tous les éleveurs « enquêtés » ayant eu un cas d'ESB avaient donné de l'aliment jeune bovin dans la première année de vie des animaux.
La commission tient à rappeler que l'avis de l'AFSSA du 7 avril 2001 explique que « l'aliment « jeune bovin » n'est pas systématiquement utilisé en France, ni dans les élevages laitiers, ni dans les élevages allaitants. Compte tenu des statistiques disponibles, il peut être mis en évidence une relation statistiquement significative entre cette pratique et la survenue d'un cas d'ESB, sans qu'une telle relation puisse établir un lien de causalité. Cependant, ce lien, s'il devait être confirmé, pourrait indiquer que l'introduction d'aliments du commerce, dans une exploitation serait un facteur de risque, par l'exposition de jeunes bovins à une source contaminante. Cette question devra être approfondie et les différentes hypothèses testées dans l'enquête cas témoin ».
Le rôle de l'aliment jeune bovin expliquerait ainsi les cas relevés dans les élevages allaitants, puisque les animaux sous la mère peuvent recevoir de cet aliment (moins d'un cas sur deux). En post-sevrage, ils peuvent recevoir, à hauteur de 50 %, un aliment jeune bovin avec du fourrage. Un animal élevé dans des conditions naturelles peut très bien avoir consommé de l'aliment jeune bovin jeune, puis ne plus avoir été alimenté avec des aliments « industriels » le reste de sa vie.
La commission tient à rappeler que l'aliment jeune bovin et que l'aliment pour le bétail « adulte » sont fabriqués dans la même usine et sur la même chaîne de fabrication. Le risque d'une contamination croisée, dans ces conditions, n'est pas négligeable. Si l'aliment jeune bovin peut être parfois sous la forme floconnée (20 %), l'aliment bovin est toujours sous forme granulée : le floconnage (aplatissage d'un produit traité par la chaleur humide) ne constitue pas un facteur favorisant les contaminations croisées. L'aliment jeune bovin est plutôt conditionné en sac, alors que l'aliment bovin est livré en vrac. Leur teneur protéique est également différente.
La commission souhaiterait évoquer deux hypothèses de contamination :
- l'apport de reliquats de formules porcs ou volailles dans l'aliment jeune bovin : cette hypothèse indiquerait que les fabricants ont été particulièrement peu scrupuleux. Elle n'expliquerait pas les cas de « super NAIF », c'est-à-dire les bovins nés après 1996, date de l'interdiction de tout MRS bovin dans les farines ;
- l'utilisation de matières graisses animales (MGA) : il s'agirait de « graisses de cuisson », procurées par les équarrisseurs, et non de simples suifs. Leur utilisation, possible jusqu'en octobre 2000, s'expliquait pour des raisons techniques et non alimentaires : elle permettait au granulé d'être moins friable. Elle n'était pas réservée à l'aliment jeune bovin, mais on peut craindre que les jeunes animaux soient plus exposés à la contamination que les vaches adultes.