INTRODUCTION GÉNÉRALE
Dans sa réunion du 17 novembre 1999, le Bureau de l'Assemblée nationale, à la demande du Groupe communiste, a saisi l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), d'une étude sur les " conditions techniques d'implantation du projet de synchrotron SOLEIL " .
L'OPECST a, le 15 décembre 1999, adopté l'étude de faisabilité présentée par vos Rapporteurs, et a suggéré au Bureau de l'Assemblée nationale de reformuler sa saisine dans les termes suivants : " les conditions d'implantation d'un nouveau synchrotron et le rôle des très grands équipements dans la recherche publique et privée, en France et en Europe" , une demande que le Bureau de l'Assemblée nationale a acceptée le 2 février 2000.
La première partie du présent rapport sur les conditions d'implantation d'un nouveau synchrotron a été adoptée à l'unanimité par l'Office parlementaire, le 15 mars 2000.
Après avoir démontré, dans cette étude, l'utilité d'un nouveau synchrotron en France, l'Office parlementaire a pu constater avec satisfaction que le ministre de la recherche, suivant en cela ses recommandations, avait, contrairement à son prédécesseur, choisi comme priorité la construction d'un synchrotron sur le territoire national.
Le présent document traite du sujet plus général du rôle des très grands équipements dans la recherche publique et privée en France et en Europe.
Cet élargissement du sujet s'avère particulièrement opportun.
Les investissements dans les TGE étaient précédemment quelque peu artificiellement opposés à la nécessité d'améliorer les moyens des laboratoires, à l'urgence d'accélérer le recrutement de jeunes chercheurs, et à l'impératif de favoriser l'imagination et à la mobilité des petites équipes de recherche.
Aujourd'hui, les controverses sur les très grands équipements semblent s'être atténuées mais n'ont pas disparu. Pour autant la question des très grands équipements demeure d'une importance capitale pour la recherche.
Dans le souci d'une bonne utilisation des fonds publics, il y a bien évidemment lieu de s'interroger sur leur efficacité scientifique ainsi que sur celui de leur rentabilité économique, d'autant que l'évolution du budget civil de la recherche et du développement technologique, malgré une légère amélioration cette année, ne semble pas suffisante pour amorcer une remontée significative de l'effort national de recherche et développement rapporté au PIB.
En contrepartie, il convient aussi d'analyser l'apport de ces investissements, non seulement au plan scientifique et technologique mais aussi pour l'industrie et l'économie nationales.
Les très grands équipements de la recherche, dont au demeurant le rôle dans la science moderne n'a pas été décrit en détail, sont en effet présentés depuis quelques années sous leur seul angle budgétaire, sans que d'ailleurs leurs retombées aient été prises en compte.
Quel bilan peut-on dresser de leur contribution à la collectivité nationale, européenne ou internationale ?
Au reste, au delà de la réponse à apporter sur leur rôle dans la recherche, il convient de noter que les très grands équipements posent une série de questions essentielles sur l'organisation des pouvoirs publics et les processus de décision.
Comment effectuer des choix d'investissement lorsque les projets de TGE de différentes disciplines entrent en concurrence ?
Comment intégrer les investissements à long terme que représentent les très grands équipements dans les contraintes de la gestion budgétaire annuelle de l'Etat et des organismes de recherche ?
Comment trouver un équilibre entre les contributions des régions, de l'Etat et de l'Union européenne et comment articuler ces efforts plus complémentaires que substituables ?
Telles sont quelques-unes unes des questions auxquelles le présent rapport tente d'apporter une contribution, étant entendu que leur résolution, si elle est possible, supposera des travaux supplémentaires et approfondis de la part de tous les acteurs de la recherche.
Comme pour l'étude sur le synchrotron, vos Rapporteurs se sont entourés d'un groupe de travail comprenant des scientifiques de haut niveau. En voici la liste :
• M. Roger BALIAN , membre de l'Académie des sciences, ancien président de la Société française de physique
• M. Gilles COHEN-TANNOUDJI , Conseiller du directeur des sciences de la matière du CEA
• M. Robert COMÈS , Directeur du Laboratoire pour l'Utilisation du Rayonnement Electromagnétique (LURE)
• M. Jean GALLOT , Professeur émérite à l'université de Rouen, ancien Recteur
• M. Jean JERPHAGNON , Conseiller du directeur technique d'Alcatel
• Mme Sylvie JOUSSAUME , Directrice-adjointe, Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement, CEA-CNRS
• M. Philippe LAREDO , Directeur de recherche, Centre de sociologie de l'innovation, Ecole nationale supérieure des Mines de Paris
• Mme Claudine LAURENT , Vice-présidente du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT)
• M. Denis LE BIHAN , Directeur de recherche, CEA, Service Hospitalier Frédéric Joliot, Orsay
• Mme Phyllis LIVANOS , Direction des sciences de la matière, chargée du suivi de la fusion, CEA
• M. Vincent MIKOL , Directeur de recherche, Aventis
• M. Jérôme PAMELA , Responsable du Joint European Torus (JET)
• M. Pierre POINTU , ancien Directeur des services de recherche du groupe Saint Gobain
• M. Jochen SCHNEIDER , Directeur du Hasylab, Hambourg
• M. Michel SPIRO , Président du conseil scientifique du LEP-CERN.
Au cours des 16 réunions tenues avec les membres de ce groupe, ce sont plus de 200 responsables d'administrations, d'organismes et de laboratoires de recherche qui ont été auditionnés sur le rôle des très grands équipements dans la recherche publique et privée en France et en Europe.
Vos Rapporteurs tiennent à souligner l'extraordinaire enthousiasme des chercheurs auditionnés. La recherche française possède à l'évidence des équipes motivées, compétentes et compétitives, capables de communiquer brillamment les résultats de leurs travaux dans un langage accessible.
Que tous les membres du groupe de travail et les scientifiques auditionnés soient remerciés ici de leur contribution à l'information de la représentation nationale.