N° 329
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N° 41
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ASSEMBLÉE NATIONALE |
SÉNAT |
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
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SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998 |
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OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION
DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES
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RAPPORT
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L'AMIANTE DANS L'ENVIRONNEMENT DE L'HOMME :
SES CONSÉQUENCES ET SON AVENIR
par
M. Jean-Yves LE DÉAUT,
député
et
M. Henri REVOL,
sénateur
Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale par M. Jean-Yves LE DÉAUT, Président de l'Office. |
Déposé sur le Bureau du Sénat par M. Henri REVOL, Vice-Président de l'Office. |
Santé.
A ceux qui souffrent
de l'amiante
AVANT-PROPOS
En tant que Président de l'Office parlementaire
d'évaluation des choix scientifiques et technologiques,
j'ai
décidé de publier l'étude menée lors de la
précédente législature par M. Christian Daniel, alors
député des Côtes-d'Armor, sur le thème :
"l'amiante dans l'environnement de l'homme : ses conséquences et
son avenir"
. Il m'a paru en effet dommage qu'un tel travail ne soit pas
présenté à la représentation nationale.
Après avoir retracé l'histoire quelque peu mouvementée de
l'élaboration de ce rapport, je ferai part de quelques-unes de mes
réflexions sur un sujet qui demeure actuel et préoccupant.
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et
technologiques a été saisi d'une demande d'étude par le
Bureau de l'Assemblée nationale, dès le 21 juin 1995. Mais, en
raison de problèmes d'organisation interne de l'Office, la nomination
d'un rapporteur - M. Christian Daniel - a été
retardée et n'est intervenue que le 21 février 1996.
Son travail s'est inscrit alors dans un contexte un peu particulier et
très controversé, celui de savoir s'il fallait ou non interdire
l'amiante. Alors que le rapporteur n'en était qu'aux
préliminaires de son étude, la décision d'interdire
l'amiante a été prise le 3 juillet 1996. L'orientation du rapport
s'en est trouvée modifiée.
La première partie du rapport fut certes consacrée à une
justification de cette décision d'interdiction, mais l'essentiel de
l'étude fut désormais axé sur le problème du
devenir de l'amiante incorporé dans les bâtiments, notamment sur
la manière de vivre et travailler avec l'amiante, et sur le souci de
tirer des leçons utiles de l'expérience de l'amiante.
Ce rapport aurait dû être adopté par l'Office lors de sa
réunion du 23 avril 1997, mais la dissolution de l'Assemblée
nationale intervenue le 21 avril a interrompu ce travail à la
veille de sa publication. M. Christian Daniel n'a pas retrouvé son
siège de député aux dernières élections.
Le texte présenté aujourd'hui est donc celui que
M. Christian Daniel avait rédigé en avril 1997. Toutefois,
le gouvernement de M. Lionel Jospin ayant adopté le
12 septembre dernier un nouveau décret sur le sujet, le
présent rapport fait état des modifications intervenues. Elles
sont indiquées par des notes en bas de page aux endroits
concernés du rapport et le texte intégral du décret figure
en annexe. Il faut souligner que ces modifications sont dans la droite
ligne des recommandations qu'avait élaborées M. Christian
Daniel en avril 1997. Elles sont une avancée dans la direction
proposée : extension de l'inventaire, renforcement de la
qualité de la chaîne amiante, mesures de fin de chantier et
archivage des informations recueillies lors de l'inventaire de l'amiante, mais
d'autres textes devront à mon sens compléter la
réglementation existante.
Le rapport de M. Christian Daniel n'a donc rien perdu de son
actualité.
Pour ma part, je me propose de souligner et commenter les points forts de ce
rapport et je souhaite que les propositions qu'il formule soient effectivement
mises en oeuvre.
Il me paraît d'abord nécessaire de faire ressortir le
caractère tardif de la décision d'interdiction de l'amiante,
même s'il est vrai qu'au cours des vingt dernières années,
les textes n'ont cessé de diminuer les valeurs limites d'exposition
tolérées pour les travailleurs et que certains de nos voisins
européens continuent à permettre l'utilisation de l'amiante dans
les limites autorisées par la réglementation européenne.
La santé publique - "on l'a trop souvent oublié", comme l'a
rappelé le Premier Ministre, M. Lionel Jospin, dans son discours
d'investiture devant l'Assemblée nationale - est un
élément essentiel de la sécurité à laquelle
nos concitoyens sont légitimement de plus en plus attachés. La
mise en place d'une autorité indépendante des pouvoirs publics
réglementant la sécurité sanitaire m'apparaît donc
comme une nécessité.
En dépit des incertitudes qui subsistent en matière
épidémiologique, une réglementation protectrice du citoyen
a été mise en place par le précédent gouvernement
et renforcée par le gouvernement de M. Lionel Jospin. Je
souhaiterais attirer l'attention sur des points importants et perfectibles de
la réglementation actuelle.
S'agissant de l'inventaire des bâtiments amiantés, qui est l'axe
essentiel de la réglementation puisqu'il permet de déceler
l'amiante et donc d'identifier le risque, il me semble absolument
impératif de l'imposer avant toute démolition ou travaux
d'importance sur un bâtiment.
En ce qui concerne la manière de réaliser l'inventaire, la
qualité de tous les maillons de la chaîne amiante devra être
rigoureusement respectée. Le rapport met en évidence certaines
faiblesses actuelles de la métrologie, c'est-à-dire des
méthodes d'analyse de l'empoussièrement de l'air qui sont
actuellement peu fiables ; il faudra faciliter et encourager la
recherche en ce domaine. Dans l'optique d'une gestion optimum du risque
amiante, il faudra également revoir les stratégies de
prélèvement actuelles et, en corollaire, prévoir un
renforcement de la sévérité des normes existantes.
La grille d'évaluation du risque amiante qui sert de base à cet
inventaire devrait également être modifiée pour mieux
distinguer - à l'instar de ce qui se fait en Allemagne - les
risques en fonction de la nature de l'utilisation des locaux. Une distinction
devrait être faite entre une utilisation régulière,
occasionnelle ou rare, et une utilisation par des enfants ou par des adultes.
Cela permettrait de mieux définir les priorités des travaux
à effectuer.
Le nombre de bâtiments amiantés dans lesquels des travaux seront
nécessaires et le coût du désamiantage qui s'ensuivra sont
actuellement impossibles à chiffrer avec exactitude. Mais d'ores et
déjà, la publication de la liste de tous les bâtiments
publics dans lesquels l'inventaire aura permis de déceler le
dépassement du seuil de 25 fibres par litre devrait être
obligatoire. Ce devoir d'information et de transparence me paraît
d'autant plus indispensable qu'on a trop souvent dans le passé
occulté ou minimisé les risques. Par ailleurs, la création
d'une structure de coordination de l'action des différents
départements ministériels et d'évaluation de la nouvelle
réglementation ("Monsieur Amiante") me paraît pertinente.
S'agissant des déchets d'amiante, il faudra conserver la
nécessaire mémoire des sites dans lesquels ils sont
entreposés. Sans attendre, il faudrait développer une mesure de
certification et inciter au plus vite les entreprises à diminuer le
volume de leurs déchets. Des conteneurs spécifiques aux produits
amiantés devraient être installés dans les
déchetteries. Enfin, il faudrait modifier l'étiquetage des
déchets de matériaux amiantés. Le A pour amiante n'attire
pas suffisamment l'attention sur les dangers présentés ; il
peut être conservé, mais il devrait lui être ajouté
un signe beaucoup plus "parlant" comme la tête de mort, qui est le
signe
caractéristique de l'étiquetage des substances chimiques toxiques.
S'agissant de l'aspect social du dossier amiante et des risques encourus
pendant de longues années par des travailleurs insuffisamment
informés, ce serait justice que de prendre en compte le caractère
insalubre du travail de l'amiante. Par ailleurs, l'adaptation de leur formation
professionnelle aux risques spécifiques liés à la
présence d'amiante doit être menée sur la base des
publications et guides édités par l'INRS.
Pour ma part, je compte déposer prochainement une proposition de loi qui
créerait un statut du travailleur de l'amiante et qui imposerait la
publication de la liste des bâtiments dépassant le seuil de 25
fibres par litre.
Enfin, je souscris pleinement à la proposition de M. Christian
Daniel de retenir pour thème de la campagne nationale 1998 du timbre des
maladies respiratoires : "l'amiante dans l'air, l'amiante dans nos
poumons" et j'adresserai prochainement un courrier en ce sens à
M. Bernard Kouchner, Secrétaire d'Etat à la Santé.
Jean-Yves LE DÉAUT