M. Michel Charasse

SECTION III. LE PROGRAMME 209 « SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT »

I. PRÉSENTATION ET EFFECTIFS

A. ARCHITECTURE ET OPÉRATEURS

1. Un programme qui ne regroupe pas tous les crédits d'APD du ministère des affaires étrangères

Le programme 209 regroupe l'essentiel, mais pas la totalité, des moyens du MAE consacrés à l'APD dans ses dimensions économiques, sociales et culturelles, et aux interventions dans les pays en situation de crise et de post-crise. Un certain nombre d'actions partagées avec la mission « Action extérieure de l'Etat » (réseau culturel en particulier) sont réparties selon une clef géographique , le programme 209 ayant vocation à recevoir les crédits afférents aux 152 pays figurant dans la liste des bénéficiaires d'APD établie par le CAD.

Ainsi qu'il a été précisé supra , un volume non négligeable de crédits comptabilisables en APD demeure néanmoins logé dans trois programmes de la mission « Action extérieure de l'Etat », ce qui atténue la cohérence de la mission APD :

- la quote-part des crédits de l'AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger) correspondant aux élèves étrangers scolarisés dans les établissements des pays en développement (soit 46.000 élèves sur un total de 90.000), figurant dans l'action 5 « Service public d'enseignement à l'étranger » du programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique », soit environ 18 % des CP du programme en 2007 ;

- la part des crédits de l'OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) correspondant à des demandeurs d'asile des pays en développement (soit 92 % de la subvention à l'OFPRA, d'un montant de 45,6 millions d'euros). Ces crédits sont logés dans l'action 4 « Garantie de l'exercice du droit d'asile » du même programme 151 « Français de l'étranger et étrangers en France » ;

- les coefficients d'APD pour les contributions aux organismes des Nations Unies, figurant dans l'action 4 « Contributions internationales » du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde », dont une partie des activités relèvent du domaine du développement en application des directives du CAD.

A contrario , la coopération militaire et de défense (106,4 millions d'euros de CP demandés en 2007), qui constitue l'action 5 du programme 105, n'est pas comptabilisée par le CAD comme de l'APD , au moins pour la quote-part des pays en développement. Il en est de même pour les opérations de maintien de la paix (186,2 millions d'euros en AE et CP), logées dans l'action 4, précitée, du programme 105. En revanche, l'inscription au programme 209 de crédits de promotion de la culture française (notamment la subvention à CulturesFrance) et de la francophonie peut être contestée ; ces dotations auraient sans doute vocation à rejoindre le programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique », précité.

Le programme 209 est mis en oeuvre par la Direction générale de la coopération internationale et du développement ( DGCID ). Il s'appuie également sur un réseau diplomatique étendu , au sein duquel les 112 services de coopération et d'action culturelle (SCAC) collaborent avec 88 établissements culturels, 196 Alliances françaises et 20 centres de recherche.

2. De nombreux opérateurs en voie de réforme

Ce programme s'appuie aussi sur six d'opérateurs (contre huit en 2006) , qui pour la plupart ne ressortissent pas exclusivement à l'APD : l'Agence française d'action artistique (AFAA), l'Association pour la diffusion de la pensée française (ADPF), l'Association française des volontaires du progrès (AFVP), le groupement d'intérêt public France coopération internationale (FCI), l'agence Edufrance (groupement d'intérêt public assurant la promotion dans le monde de l'offre française de formation supérieure) et EGIDE (Centre français pour l'accueil et les échanges internationaux). L'Agence pour la diffusion de l'information technologique ( ADIT ) et Canal France international ( CFI ) ne font plus partie des opérateurs du programme .

La nécessaire rationalisation de ces opérateurs est en cours : outre la mise en place de conventions d'objectifs et de moyens et la réorganisation de FCI consécutive à l'extension de son champ de compétences (cf. supra ), l'AFAA et l'ADPF ont fusionné en septembre 2006 pour donner naissance à une agence unique de coopération culturelle à l'étranger, CulturesFrance, et l'opérateur CampusFrance, agence de mobilité universitaire et scientifique devrait être prochainement créé par rapprochement entre Egide et Edufrance.

A la demande de votre commission des finances et en application de l'article 58-2° de la LOLF, l'AFAA a fait l'objet d'une enquête de la Cour des comptes sur les exercices 2000 à 2005 (donc antérieurs au regroupement avec l'ADPF), qui a donné lieu à une audition pour « suites à donner » le 8 novembre 2006 18 ( * ) . Cette enquête a mis en exergue un certain nombre de dysfonctionnements , parmi lesquels une part trop importante d'opérations engagées en France (40 %), l'absence de véritable gestion des ressources humaines, un contrôle routinier exercé par les tutelles, le respect approximatif des règles élémentaires du statut associatif, ou l'évaluation lacunaire de l'impact des actions.

Votre rapporteur spécial considère également que la fusion doit donner lieu à des économies de gestion , estimées dans le PAP à 200.000 euros pour le programme 209 que ne traduit pas la quote-part de subvention du MAE imputée sur ce programme, stable par rapport à 2006. Ce constat, joint à une certaine abondance de la trésorerie (4,7 millions d'euros en 2005), conduit votre rapporteur spécial à proposer un amendement de réduction de la subvention, afin d'inciter CulturesFrance à engager rapidement les efforts d'amélioration de la gestion qu'implique cette restructuration.

B. 2.983 EMPLOIS À TEMPS PLEIN

1. Des effectifs aux statuts multiples et dont diminution réelle est faible

Comme en 2006, l'ensemble des 2.983 ETPT de la mission pour 2007 relève de ce programme et du plafond d'emplois du MAE. Ils s'inscrivent en diminution importante de 4,7 % par rapport à 2006 (analogue à celle de l'exercice 2006 par rapport à 2005), soit une réduction nette de 148 postes . Cette diminution est cependant très largement liée au transfert de 129 assistants techniques à l'AFD, dans le cadre de la réforme décidée par le CICID. Les suppressions nettes réelles représentent donc seulement 19 ETPT , qui rapportés au nombre de départs à la retraite estimé en 2007 (250), font apparaître un « taux de sortie » de 7,6 %, après 25 % en 2006.

Au titre du contrat de modernisation du ministère, il est prévu de ne pas remplacer 15 % des 285 départs définitifs (soit 43 emplois) parmi les titulaires civils, ainsi que 174 contrats à durée déterminée, 34 personnels militaires et 40 agents de droit local.

Un volume hors plafond de 290 ETPT (288 en 2006) est également rémunéré, pour la quasi-totalité d'entre eux, par les trois opérateurs subventionnés FCI, EGIDE et l'AFVP , soit plus de la moitié des emplois en fonction dans le groupement FCI (9 ETPT sur 16, le solde correspondant à des mises à disposition), la totalité (214 ETPT) des emplois d'EGIDE et 67 ETPT à l'AFVP.

Les emplois sous le plafond concernent essentiellement des contrats à durée déterminée et des volontaires internationaux (2.125 sur 2.983 ETPT).

Les AE et CP de titre 2 du programme 209 demandés pour 2007 s'élèvent à 242,77 millions d'euros (dont 20,9 millions d'euros au titre de la contribution employeur au compte d'affectation spéciale des pensions et 4,92 millions d'euros de prestations sociales ministérielles et interministérielles) soit une augmentation de près de 20 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2006.

A cet égard, votre rapporteur spécial précise que dans la loi de finances initiale pour 2006, les coûts paramétriques de l'assistance technique avaient été sous-estimés , et la rapidité des transferts à l'AFD surestimée, ce qui a nécessité un abondement par décret d'avance en juillet 2006. Cette erreur d'estimation des coûts, qui n'est pas imputable au seul MAE, est néanmoins corrigée dans le projet de loi de finances pour 2007, puisque le coût moyen de l'assistance technique est révisé à la hausse de près de 20 %.

Coûts moyens annuels par catégorie d'emploi en 2006 et 2007

(en euros)

LFI 2006

PLF 2007

Ecart

Titulaires et CDI administration centrale

47.476

37.200

-21,6 %

Titulaires et CDI à l'étranger

133.524

99.034

-25,8 %

CDD et volontaires internationaux

74.510

89.257

19,8 %

Agents de droit local

15.104

16.065

6,4 %

Source : Source : projets annuels de performances du programme 209 annexés aux projets de loi de finances pour 2006 et 2007

2. Le personnel d'assistance technique

Le personnel d'assistance technique géré directement par le MAE représentait 1.633 personnes début 2006, soit une diminution de 7,9 % par rapport à 2005 et de moitié par rapport à 1999, dont près de 59 % en Afrique et 71 % dans les Etats de la ZSP. Les trois quarts des effectifs sont constitués de chargés de mission recrutés en France ou sur place.

Ventilation sectorielle du personnel d'assistance technique en 2005 et 2006

01/2005

01/2006

Evolution

Part 2006

Audiovisuel et communication

30

35

16,7 %

2,1 %

Culture et français

473

443

-6,3 %

27,1 %

Coopération technique

889

781

12,1 %

47,8 %

Enseignement supérieur et recherche

347

344

-0,9 %

21,1 %

Multilatéral

30

19

-36,7 %

1,2 %

Divers

2

11

450 %

0,7 %

Total

1.774

1.633

-7,9 %

100 %

Source : ministère des affaires étrangères

L'assistance technique a connu au cours des dernières années un certain nombre d'évolutions structurantes qui ont trait au positionnement géographique (élargissement aux pays émergents et en transition), aux compétences, à la durée des missions, à la diversification des partenaires et à la nécessaire présence dans les programmes multilatéraux, aujourd'hui insuffisante.

Votre rapporteur spécial considère que l'évolution quantitative de l'assistance technique depuis une dizaine d'années est justifiée, compte tenu de la marginalisation volontaire de la coopération de substitution. Il importe désormais, à tout le moins, de stabiliser cette présence et de limiter la diversification dans les pays émergents , car la coopération technique demeure un de nos avantages comparatifs. Il nous faut également être plus réactifs et visibles sur les appels d'offres européens et multilatéraux , afin d'affirmer l'expertise française et de faire valoir nos priorités dans ces canaux qui drainent une aide croissante et sont trop souvent assimilés par les pays récipiendaires à une assistance apatride ou anglo-saxonne.

Ainsi qu'il l'a exposé dans un récent rapport d'information 19 ( * ) afférent au contrôle budgétaire qu'il a conduit sur le GIP FCI en mars 2006, votre rapporteur spécial nourrit cependant quelques inquiétudes sur les ambiguïtés du positionnement et sur les moyens de FCI, comme sur la permanence de la « balkanisation » de notre dispositif de coopération technique .

Chaque ministère exerçant une action internationale soutient en effet un opérateur d'assistance technique 20 ( * ) , ce qui accroît les risques d'illisibilité pour les donneurs d'ordre étrangers et de renforcement de la stratification et de la complexité administratives . Pour l'heure, FCI ne joue pas encore le rôle transversal auquel il a vocation , témoignant de la difficulté à traduire dans les faits la fonction de chef de file de l'aide française qu'est supposé exercer le MAE. Votre rapporteur spécial juge donc nécessaire, à terme, de prévoir la fusion de certains opérateurs (en particulier des trois opérateurs Santé, ESTHER et FVI ressortissant au pôle « santé-protection sociale ») puis l'unification des structures de coopération technique , pour disposer d'une « force de frappe » suffisante dans les appels d'offres internationaux et mieux concurrencer les opérateurs étrangers.

* 18 Cf. bulletin de la semaine du 6 novembre 2006.

* 19 Rapport d'information n° 346 (2005-2006) « Opérations de contrôle budgétaire effectuées dans le Pacifique, les Grandes Antilles et auprès du GIP France coopération internationale ».

* 20 A ce titre, outre FCI et l'ADETEF, on peut mentionner les GIP Santé-Protection sociale, Inter (qui relève du ministère de l'emploi, du travail et de l'insertion professionnelle), France vétérinaire international (FVI) et Ensemble pour une solidarité thérapeutique en réseau (ESTHER), l'association ACOJURIS et la société anonyme CIVI.POL Conseil (qui dépend du ministère de l'intérieur).