EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est de nouveau saisi du projet de loi relatif à
l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, adopté par
l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, le 24 février
dernier.
Ce projet de loi tend à favoriser l'aménagement, sur quelques
années, d'un nombre d'aires suffisant pour faire face aux besoins, en
imposant notamment aux communes un délai de deux ans pour
réaliser les investissements nécessaires et en permettant
à l'Etat de se substituer à elles en cas de carence. Il donne une
nouvelle définition au schéma départemental, dont
l'élaboration avait été prévu par la loi du 31 mai
1990 relative à la mise en oeuvre du droit au logement, et permet au
représentant de l'Etat, passé un délai de dix-huit mois,
d'approuver seul le schéma. Il met en place des commissions
consultatives départementales, qui seront associées à
l'élaboration du schéma départemental et en assureront le
suivi. Ces commissions pourront, en outre, assumer une fonction de
médiation.
Parallèlement, le projet de loi prévoit plusieurs dispositions
destinées à soutenir financièrement les communes dans la
réalisation et la gestion des aires d'accueil. Il renforce, enfin, les
moyens juridiques permettant de lutter contre les occupations illicites.
Composé initialement de
onze
articles, le projet de loi
comprenait
quinze
articles à l'issue de la première
lecture par chacune des deux assemblées. Le Sénat ayant
adopté sans modification les
articles 10 et 11
,
treize
articles restent encore en discussion.
Examinant en première lecture ce texte, au cours de ses séances
des 2 et 3 février derniers, le Sénat lui avait apporté
plusieurs modifications afin de promouvoir un véritable partenariat
entre l'Etat et les collectivités locales, en particulier en affirmant
le rôle de l'Etat dans l'accueil des grandes migrations traditionnelles
et en écartant, au profit d'une véritable concertation, plusieurs
dispositions coercitives à l'égard des collectivités
locales.
Le Sénat avait, par ailleurs, souhaité une meilleure
évaluation des obligations des communes, notamment en clarifiant la
nature et le contenu des schémas départementaux et en supprimant
le seuil de 5 000 habitants retenu par le projet de loi. Enfin, le Sénat
avait renforcé les moyens mis à la disposition des maires pour
faire cesser le stationnement illicite.
A l'occasion de la deuxième lecture, l'Assemblée nationale a,
pour l'essentiel, rétabli le texte qu'elle avait adopté lors de
la première lecture.
Or la solution des difficultés posées à de trop nombreuses
communes par le stationnement des gens du voyage ne pourra résulter que
d'un juste équilibre entre l'amélioration nécessaire des
conditions d'accueil et des moyens accrus pour faire cesser le stationnement
illicite.
Telle avait été la démarche retenue par le Sénat en
adoptant le
6 novembre 1997
, la proposition de loi relative
aux conditions de stationnement des gens du voyage. La même
démarche l'a inspiré lors de l'examen en première lecture
du présent projet de loi.
Un
dispositif coercitif
dans lequel l'Etat se dispenserait de la libre
adhésion des collectivités locales à des solutions
concertées
et qui ne permettrait pas la répression
effective du stationnement illicite aurait peu de chances de résoudre
les difficultés auxquelles trop de communes sont confrontées dans
l'accueil des gens du voyage. Loin de réduire les tensions
malheureusement souvent observées, il risquerait au contraire de les
exacerber.
*
*
*
Comme il
l'avait envisagé lors de l'adoption de la proposition de loi relative
aux conditions de stationnement des gens du voyage, le Sénat avait, en
première lecture du projet de loi, prévu une planification des
grandes migrations traditionnelles des gens du voyage dans le cadre d'un
schéma national
qui permette de véritablement lier l'accueil
de ces grandes migrations aux préoccupations d'aménagement du
territoire (
article 1
er
). Sur la proposition de M. Dominique
Braye, le Sénat avait précisé que les directives
territoriales d'aménagement devraient prendre en compte les orientations
du schéma national.
En outre, le Sénat avait affirmé le rôle du
représentant de l'Etat dans le département
, au titre des
pouvoirs de police qui lui sont reconnus pour les grands rassemblements, afin
de veiller à la mise en oeuvre du schéma national (
article
1
er
bis
).
Considérant qu'une démarche coercitive imposée aux
collectivités locales ne pourrait avoir qu'un
résultat
contraire
à l'objectif recherché et nourrir au lieu de les
apaiser les
tensions
susceptibles d'apparaître au plan local, le
Sénat n'avait pas maintenu la faculté ouverte par le projet de
loi au représentant de l'Etat
d'approuver seul
le schéma
départemental (
article 1
er
).
Dans le même esprit, il avait souhaité mieux faire ressortir la
coordination régionale
- laquelle se justifie essentiellement en
Ile-de-France -dans le cadre d'une véritable concertation entre, d'une
part, les autorités de l'Etat et, d'autre part, les autorités
régionales et départementales (
article 1
er
).
Hors Ile-de-France, il avait entendu privilégier la recherche d'une
coordination
interdépartementale.
En outre, le Sénat avait supprimé le
pouvoir de
substitution
reconnu au représentant de l'Etat qui lui est apparu
disproportionné
et de nature à exacerber inutilement les
tensions locales, alors même qu'une
concertation efficace
avec les
communes concernées dans le cadre de l'élaboration du
schéma départemental et la mise en oeuvre d'une véritable
solidarité financière
dans la réalisation des aires
d'accueil doit permettre de prévenir les difficultés (
article
3
).
Le Sénat avait par ailleurs précisé la composition des
commissions consultatives départementales
, afin d'assurer la
représentation de toutes les parties concernées (
article
1
er
).
Tout en relevant avec satisfaction, le doublement de l'effort financier de
l'Etat prévu par le projet de loi pour la réalisation des
investissements nécessaires (
article 4
), votre commission des
Lois avait néanmoins constaté que l'aide au fonctionnement
apparaissait
insuffisante.
Elle avait fait observer que la solution préconisée par le projet
de loi de prendre en compte dans la
dotation globale de fonctionnement des
communes
des places réservées aux gens du voyage dans les
aires d'accueil n'apparaissait pas de bonne méthode, dès lors que
le coût de cette mesure pèserait nécessairement sur les
équilibres internes à la dotation globale de fonctionnement,
laquelle constitue une " enveloppe fermée " (
article 7
).
C'est pourquoi, écartant cette disposition, votre commission des Lois
avait proposé que le montant de l'aide au fonctionnement ne puisse
être inférieure à 15 000F par place de caravane.
Le Gouvernement ayant opposé l'irrecevabilité de l'article 40 de
la Constitution à cette proposition, le Sénat s'était en
définitive rallié, avec l'avis favorable de la commission des
Lois, à l'amendement de notre collègue M. Jean-Claude
Peyronnet et des membres du groupe socialiste et apparentés, portant
à
quatre
le nombre d'habitant par emplacement de caravane, pris
en compte au titre de la dotation globale de fonctionnement.
Sur la proposition de M. Dominique Braye, le Sénat avait
prévu une plus large mutualisation des coûts de fonctionnement en
faisant intervenir la région dans le dispositif conventionnel
défini par le projet de loi (
article 6
).
Le Sénat avait, par ailleurs, jugé nécessaire de
mieux
définir le champ des obligations imposées aux communes.
Le projet de loi introduisant dans notre droit la nouvelle notion de
"
résidence mobile
" dont il ne donne
aucune
définition bien qu'elle conditionne
l'application de plusieurs
dispositions, le Sénat avait considéré qu'il était
nécessaire de la définir en précisant qu'elle recouvrait
les caravanes affectées à l'habitat permanent de leurs occupants
et les autres abris mobiles ayant la même destination (
article
1
er
).
Dans le même but, il avait souhaité
préciser la nature
et le contenu du schéma départemental.
Tout en relevant que ce schéma avait vocation à concerner les non
sédentaires, il avait prévu le recensement des
terrains
familiaux
aménagés pour l'accueil des gens du voyage, afin de
favoriser une meilleure évaluation des besoins en stationnement qui
devront être satisfaits dans les aires d'accueil aménagées
par les communes.
En outre, si le schéma départemental doit comprendre un certain
nombre de prescriptions qui permettront d'évaluer la nature des
obligations mises à la charge des communes, il ne constituera pas pour
autant un document d'urbanisme susceptible de prévaloir sur les plans
d'occupation des sols. La prise en compte de l'accueil des gens du voyage dans
ces derniers résultera de dispositions de portée
générale prévues par
l'article 8
du projet de loi.
C'est pourquoi, le Sénat avait supprimé l'ajout de
l'Assemblée nationale, selon lequel le schéma
départemental serait
opposable
(
article 1
er
).
Le Sénat avait confirmé la solution qu'il avait retenue, dans le
cadre de la proposition de loi précitée, en supprimant le seuil
de
5 000
habitants et en liant les obligations communales aux
prescriptions du schéma départemental
(
article
2
).
En revanche, il avait maintenu un
délai de deux ans
pour la mise
en oeuvre de leurs obligations par les communes (
article 2
) ainsi que le
caractère obligatoire
des dépenses relatives à la
réalisation des aires d'accueil (
article 3
). Il avait
toutefois
assoupli
le délai de deux ans dans les cas où
une commune serait confrontée à des difficultés techniques
ou procédurales particulières, dûment constatées.
Enfin, le Sénat avait renforcé le pouvoir reconnu au maire de
prendre des mesures pour interdire le stationnement en dehors des aires
aménagées et faire cesser le stationnement illicite. Ce pouvoir
constitue, en effet, la
contrepartie indispensable
des efforts qui sont
demandés aux communes pour réaliser et entretenir des aires
d'accueil.
En premier lieu, sur la suggestion de votre commission des Lois, il avait
permis au maire de prendre un arrêté d'interdiction
dès
la réalisation de l'aire d'accueil
- solution actuellement
applicable en vertu de la loi du 31 mai 1990 - et non à compter de
l'accomplissement de l'ensemble des obligations prévues par le
schéma départemental, comme l'envisage le projet de loi.
En outre, si les procédures juridictionnelles prévues par le
projet de loi correspondent, dans l'ensemble, aux orientations adoptées
par le Sénat en 1997, le Sénat avait permis l'application d'une
procédure de
référé dite d'heure à
heure
, afin d'accélérer le déroulement des
procédures
En revanche, le Sénat n'avait pas jugé possible de suivre
l'Assemblée nationale
qui avait souhaité unifier ce
contentieux
entre les mains du juge judiciaire. Une telle solution
constituerait une
modification substantielle
des règles
générales de répartition des compétences entre les
ordres de juridiction. Elle n'apparaît pas véritablement de nature
à accélérer les procédures et à simplifier
les démarches des maires, compte tenu des caractéristiques
mêmes de ces procédures.
A l'initiative de M. Michel Charasse, le Sénat avait subordonné
l'intervention du maire à l'existence d'une atteinte à la
salubrité, à la sécurité ou à la
tranquillité publiques mais précisé qu'à
défaut pour le représentant de l'Etat d'avoir donné suite
à la demande du maire de mettre en oeuvre la force publique ou si cette
demande était déclarée illégale dans le même
délai, la responsabilité civile et pénale du maire ne
pourrait plus être recherchée, seule la responsabilité du
représentant de l'Etat pouvant être engagée.
Toujours à l'initiative de M. Michel Charasse, le Sénat avait
autorisé le juge à prescrire
collectivement
aux occupants
de résidences mobiles, de rejoindre une aire d'accueil à
défaut de quitter le territoire communal, si les identités
n'étaient pas connues ou ne le seraient pas avant un délai de
vingt-quatre heures. Une astreinte pourrait être prononcée, son
recouvrement pouvant être poursuivi en fonction des
éléments recueillis à partir des numéros
d'immatriculation des véhicules.
Sur la proposition de M. Nicolas About, le Sénat avait reconnu à
l'autorité préfectorale, en cas d'urgence, le pouvoir
d'ordonner
et de
faire exécuter l'expulsion
de
résidences mobiles dont la présence serait de nature à
porter atteinte à la poursuite de l'activité économique
d'un bien à usage industriel, commercial ou professionnel, ou de la zone
économique environnante. Le maire devrait être saisi au
préalable par le propriétaire ou par le titulaire d'un droit
réel immobilier
(article 9).
Le Sénat avait adopté un amendement proposé par M. Patrick
Lassourd, tendant à habiliter le représentant de l'Etat, le cas
échéant alerté par les maires des communes riveraines,
à prononcer d'office l'expulsion et à assurer l'exécution
de cet arrêté,
en cas d'occupation illicite du domaine public
appartenant à l'Etat,
notamment le
domaine maritime
(article 9 bis A nouveau).
Enfin, sur la proposition de M. Philippe Darniche, le Sénat avait
prévu le recensement des populations composant la communauté des
gens du voyage au plus tard
un an
après la promulgation de la
loi
(article 10bis nouveau).
*
*
*
Lors de
l'examen du projet de loi en deuxième lecture,
l'Assemblée
nationale
a écarté quasiment la totalité des
modifications apportées par le Sénat, préférant
rétablir le texte qu'elle avait adopté en première lecture.
L'Assemblée nationale n'a ainsi
pas souhaité définir la
notion de résidence mobile
, en dépit de son impact sur un
certain nombre de dispositions du projet de loi, notamment quant au champ des
obligations faites aux communes et à la mise en oeuvre de la
procédure d'évacuation forcée prévue par l'article
9.
Elle n'a pas retenu l'élaboration d'un schéma national pour les
grands rassemblements traditionnels pas plus qu'elle n'a souhaité
affirmer le rôle du représentant de l'Etat pour ces grands
rassemblements, préférant s'en tenir au projet initial du
Gouvernement qui prévoit leur prise en compte dans le cadre des
schémas départementaux.
Tout en rétablissant le seuil de
5 000
habitants prévu par
le projet de loi initial, l'Assemblée nationale a néanmoins
préféré préciser à l'article 1
er
que les communes de
plus de 5 000
habitants figureraient obligatoirement
au schéma départemental, afin de faire ressortir plus clairement
que l'obligation de réaliser des aires d'accueil dans un délai
de
deux
ans
concernerait toutes les communes inscrites au
schéma, quelle que soit leur taille.
L'Assemblée nationale a par ailleurs rétabli la faculté
pour le représentant de l'Etat d'approuver seul le schéma
départemental, passé un délai de
dix-huit mois,
ainsi que la précision selon laquelle le schéma serait opposable.
Elle a de même prévu, pour la commission consultative
départementale, une composition conforme à celle qu'avait
envisagé le projet de loi initial, sous réserve de l'ajout -
à l'initiative de M. Patrice Martin Lalande - de représentants
d'associations intervenant auprès des gens du voyage. Elle n'a pas
accepté les modalités de coordination régionale et
interdépartementale, envisagées par le Sénat.
Reprenant le texte qu'elle avait voté en première lecture pour
l'article 3
du projet de loi, l'Assemblée nationale a
rétabli le
pouvoir de substitution
du représentant de
l'Etat aux communes qui n'auront pas satisfait à l'obligation de
réaliser des aires d'accueil dans un délai de
deux ans
à compter de la publication du schéma départemental.
Elle a de même confirmé ses choix de première lecture
aux
articles 4
(participation financière de l'Etat à
l'aménagement des aires d'accueil),
5
(aide des organismes de
sécurité sociale aux personnes gestionnaires des aires
d'accueil),
6
(organisation des interventions sociales relatives aux
gens du voyage) et
8
(dispositions modifiant le code de l'urbanisme).
A
l'article 7
(majoration de la population prise en compte au titre du
calcul de la DGF), l'Assemblée nationale n'a pas maintenu la
modification adoptée par le Sénat, portant à
quatre
habitants par emplacement de caravane la population prise en compte au titre du
calcul de la DGF, après que sa commission des Lois eut fait valoir qu'en
l'absence d'engagement du Gouvernement sur la possibilité d'abonder le
montant total de la DGF pour tenir compte des conséquences
financières d'une telle disposition, les risques de répercussions
négatives sur la DSU et la DSR étaient réels. Elle a
néanmoins décidé de porter d'un à
deux
habitants la population prise en compte pour les communes éligibles
à la DSU ou à la fraction bourgs centre de la DSR.
A
l'article 9
(pouvoirs de police du maire - procédures
d'expulsion), l'Assemblée nationale a également repris le
dispositif qu'elle avait voté en première lecture, acceptant
néanmoins la procédure de référé dite
d'heure à heure introduite par le Sénat, sur la proposition de
votre commission des Lois.
Elle a par ailleurs supprimé
l'article 9 bis A
(stationnement sur
le domaine public de l'Etat) et
l'article 10 bis
(recensement des gens
du voyage).
En revanche, elle a rétabli
l'article 9 bis
(hébergement
des gens du voyage dans le cadre d'emplois saisonniers), que le Sénat
avait supprimé, après que votre commission des Lois eut fait
observer que les besoins saisonniers devaient être pris en compte dans le
cadre des schémas départementaux et qu'en conséquence
imposer une obligation spécifique aux employeurs de travailleurs
saisonniers ne s'accordait pas avec la logique d'ensemble du dispositif
proposé.
*
* *
Votre
commission des Lois souhaite réaffirmer que la définition de
réponses adaptées au problème de l'accueil des gens du
voyage ne pourra résulter que d'une claire définition des
droits et devoirs
respectifs non seulement des collectivités
locales et des gens du voyage mais aussi de l'Etat.
Les
devoirs de l'Etat
portent en particulier sur les grands
rassemblements traditionnels qui par leur nature et par les conséquences
qu'ils emportent ne peuvent relever des collectivités locales. Ce
constat n'est que la simple traduction au cas d'espèce du
principe de
subsidiarité
qui veut que les questions soient réglées
au niveau le plus adéquat. C'est pourquoi, votre commission des Lois
juge nécessaire l'élaboration par l'Etat d'un schéma
national qui intègre les objectifs d'aménagement du territoire.
Elle vous propose néanmoins de préciser que les orientations du
schéma national devront être prises en compte par les
schémas départementaux (
article 1
er
). Dans le
même esprit, il paraît utile de réaffirmer la
responsabilité du représentant de l'Etat, au titre de ses
pouvoirs de police, à l'égard de ces rassemblements (
article
1
er
bis
).
Ces devoirs de l'Etat doivent également s'exprimer
sur le plan
financier
afin que les communes bénéficient d'une
compensation effective des charges qui leur sont imposées. Or, si les
dispositions prévues par le projet de loi en ce qui concerne l'aide
à l'investissement paraissent satisfaisantes, il n'en est pas de
même en ce qui concerne l'aide au fonctionnement, qui constitue pourtant
un enjeu crucial pour assurer la pérennité du dispositif. Un
financement complémentaire par l'intermédiaire de la dotation
globale de fonctionnement prévu par
l'article 7
revient en
pratique à faire supporter la charge par les autres communes, faute d'un
abondement corrélatif de la dotation globale de fonctionnement. C'est
pourquoi, votre commission des Lois, comme en première lecture, demande
à ce que le montant de l'aide forfaitaire prévue par
l'article
5
du projet de loi soit porté de 10 000 à
15 000 F.
Enfin, les collectivités locales sont en droit d'attendre en
contrepartie des efforts qui leur sont demandés un véritable
engagement de l'Etat pour veiller à ce que le stationnement illicite en
dehors des aires d'accueil soit effectivement sanctionné. Tel
était l'esprit des dispositions adoptées par le Sénat aux
articles 9 et 9 bis A
du projet de loi.
Tout en considérant que les enjeux constitutionnels attachés
à la protection du domicile et de la vie privée rendent
nécessaires l'intervention préalable du juge dans les
procédures d'évacuation forcée, votre commission des Lois
vous soumet un dispositif de nature à répondre aux attentes
légitimes des élus locaux dans ce domaine.
Le
rôle dévolu aux collectivités locales
doit pour
sa part être conçu et mis en oeuvre dans le respect des principes
de la décentralisation qui en font des acteurs pleinement responsables
dans le cadre des compétences qui leur sont dévolues par la loi.
Le principe de libre administration suppose que les collectivités
locales soient dotées d'"
attributions effectives
".
Qu'en serait-il si l'Etat pouvait se passer de leur accord dans le domaine de
compétences que la loi leur attribue, de manière exclusive ou
conjointement avec l'Etat, en approuvant seul le schéma
départemental ou en exerçant un pouvoir de substitution pour la
réalisation des aires d'accueil ?
De telles mesures coercitives ne pourraient que nourrir des
contentieux
et des
tensions
auxquelles le législateur doit
précisément avoir pour objectif de mettre un terme.
C'est pourquoi, entendant privilégier les formules de
concertation
dans le cadre d'un
véritable partenariat
entre l'Etat et les
collectivités locales, votre commission des Lois vous propose de
confirmer le choix du Sénat en première lecture de supprimer la
faculté pour le représentant de l'Etat d'approuver seul le
schéma départemental (
article 1
er
) et de se
substituer aux communes pour la réalisation des aires d'accueil
(
article 3
). Dans le même esprit, elle vous suggère de
confirmer le dispositif que vous aviez retenu pour la composition et le
rôle des commissions consultatives départementales ainsi que pour
la coordination régionale ou interdépartementale (
article
1
er
).
Le rôle des collectivités locales doit, en outre, clairement
ressortir des obligations qui leur sont imposées. A cet égard,
votre commission des Lois regrette que l'Assemblée nationale n'ait pas
souhaité définir dans le projet de loi, comme l'avait fait le
Sénat, la notion de "
résidence mobile
" alors
même que le projet de loi impose aux communes une obligation, de
portée générale, de participer à l'accueil des gens
du voyage dont l'habitat traditionnel est constitué, selon
l'article
1
er
, de "
résidences mobiles
".
Cette notion intervient, en outre, dans l'exercice du pouvoir de police du
maire et dans les prérogatives qui lui sont reconnues par le projet de
loi pour obtenir du juge une évacuation forcée, lesquelles ne
pourront s'exercer qu'à l'égard de ces
"
résidences mobiles
" (
article 9
).
Conditionnant l'application de plusieurs dispositions du projet de loi, cette
notion doit recevoir une
définition légale.
Votre commission des Lois se félicite que le Gouvernement ait
donné devant l'Assemblée nationale une définition qui
n'est pas éloignée de celle retenue par le Sénat en
première lecture et qui peut lever les interrogations exprimées
sur la notion d'"
abri mobile
". C'est pourquoi, elle vous
suggère de reprendre cette définition à
l'article
1
er
du projet de loi.
Le souci d'une définition claire des obligations imposées aux
communes doit également être pris en compte dans le contenu du
schéma départemental. Si celui-ci a vocation à concerner
les non sédentaires, le recensement des
terrains familiaux
aménagés pour l'accueil des gens du voyage est de nature à
favoriser une meilleure évaluation des besoins en stationnement qui
resteront à satisfaire dans les aires d'accueil aménagées
par les communes (
article 1
er
).
En outre, pour les mêmes motifs qu'en première lecture, il
paraît nécessaire de supprimer l'ajout de l'Assemblée
nationale, selon lequel le schéma départemental sera
opposable
(
article 1
er
).
Si, en faisant figurer dans le schéma départemental les communes
de
plus de 5 000
habitants, l'Assemblée nationale a poursuivi un
effort de clarification qui doit être relevé, les objections du
Sénat à l'inscription de ce seuil dans la loi ne peuvent
qu'être maintenues. Elle revient, en effet, à préjuger du
contexte local et à imposer aux autorités chargées
d'élaborer ce schéma une obligation qui risquera d'être
sans lien avec les réalités locales.
Votre commission des Lois vous propose en conséquence de confirmer la
solution retenue par le Sénat en première lecture, en supprimant
le seuil de
5 000
habitants (
article 1
er
) et en liant
les obligations communales aux prescriptions du schéma
départemental (
article
2
).
Enfin, le
délai de deux ans
pour la mise en oeuvre de leurs
obligations par les communes doit pouvoir être
assoupli
lorsqu'une
commune serait confrontée à des difficultés techniques ou
procédurales particulières, dûment constatées
(
article 2
).