CHAPITRE II :

GARANTIE DES ASSURÉS

ARTICLE 49

Fonds de garantie des assurés

Commentaire : Cet article prévoit la création d'un fonds de garantie chargé de sécuriser le paiement des prestations dues aux assurés en cas de défaillance d'une compagnie d'assurance de personnes. Financé ex ante pour partie par les cotisations des entreprises adhérentes, le fonds interviendrait à l'initiative de la Commission de contrôle des assurances, après que celle-ci aura tenté de transférer le portefeuille de contrats de l'entreprise en difficulté.

La création par le présent article d'un fonds de garantie des assurés est consécutive à la faillite d'une société d'assurance-vie qui a laissé de nombreux assurés sans recours. Fort heureusement, les entreprises d'assurance ont su trouver, dans le cas d'Europavie, un terrain d'entente pour indemniser les assurés, sans qu'il soit besoin de conférer au dispositif que le présent article propose de créer un caractère rétroactif.

Ainsi, contrairement au fonds de garantie envisagé dans le domaine bancaire qui s'inspire des systèmes de garantie mis en place par les différentes familles bancaires, le fonds de garantie prévu pour préserver les droits des assurés est-il un dispositif totalement nouveau.

Le présent article prévoit ainsi de créer un chapitre III nouveau dans le titre II du livre IV du code des assurances qui s'intitulerait " Mesures relatives à la garantie des assurés " et qui comprendrait huit nouveaux articles, numérotés L. 423-1 à L. 423-8. Compte tenu de l'insertion de ce nouveau chapitre dans un titre portant comme intitulé " Le fonds de garantie " après deux chapitres concernant respectivement " Le fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse " et " Le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions " , il apparaît plus logique de l'intituler " Le fonds de garantie des assurés contre la défaillance d'une entreprise d'assurance de personnes " . Votre commission vous proposera un amendement en ce sens.

L'Assemblée nationale a adopté de nombreux amendements à cet article, qui n'ont pour l'essentiel, qu'une portée rédactionnelle.

I.  UN CHAMP D'APPLICATION RESTREINT

Le fonds de garantie des assurés dont le présent article prévoit la création se distingue du système de garantie bancaire par son caractère non universel. En effet, outre que tous les organismes exerçant une activité d'assurance n'y cotiseront pas, les assurés ne seront indemnisés que pour une seule catégorie de contrats.

A. L'EXCLUSION DES MUTUELLES DE 1945 ET DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE

En vertu du nouvel article L. 423-1 du code des assurances, seules les entreprises d'assurances agréées en France 133( * ) , régies par le code des assurances, et en conséquence soumises au contrôle de la Commission de contrôle des assurances, sont appelées à cotiser au fonds de garantie des assurés, à l'exception donc des mutuelles dites de " 1945 " qui relèvent du code de la mutualité et des institutions de prévoyance qui relèvent du code de la sécurité sociale ou du code rural, et en dépit du fait que ces deux catégories d'opérateurs entrent dans le champ des directives européennes d'assurance.

De même, les succursales d'entreprises d'assurance dont le siège social est situé dans un État membre de l'Espace économique européen ne seront pas tenues de cotiser au fonds de garantie puisqu'elles relèvent de l'éventuel système existant dans l'Etat du siège social.

Rappelons que les mutuelles du code de la mutualité et les institutions de prévoyance sont soumises au contrôle de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP) et non à celui de la Commission de contrôle des assurances. Les mutuelles de 1945 ne doivent pas être confondues avec les sociétés d'assurance mutuelle (SAM), parmi lesquelles on trouve la MACIF, la MAAF, Groupama ou les Mutuelles du Mans, qui relèvent du code des assurances et qui devront, à ce titre, adhérer au futur fonds de garantie.

L'absence de transposition dans le code de la mutualité des troisièmes directives européennes sur l'assurance 134( * ) justifierait, selon le gouvernement, le fait que les mutuelles de 1945 demeurent à l'écart du mécanisme de garantie, n'étant pas soumises aux mêmes contraintes prudentielles et au même contrôle que les entreprises d'assurance. On notera toutefois qu'un tel argument est sans portée pour les institutions de prévoyance qui ont transposé les directives européennes depuis 1994. En outre, une telle exclusion prive les assurés qui ont souscrit des contrats auprès de ces organismes de toute protection en cas d'insolvabilité de l'un d'entre eux, à l'exception de la garantie qui est prévue statutairement par la Fédération nationale de la mutualité française mais qui ne couvre que les groupements mutualistes les plus importants.

Toutefois, selon les informations recueillies par votre rapporteur, la transposition prochaine des directives européennes dans le code de la mutualité devrait emporter création d'un fonds de garantie spécifique aux mutuelles de 1945 et aux institutions de prévoyance. Il importe d'obtenir des engagements précis du gouvernement sur la date qu'il envisage pour procéder enfin à cette transposition.

Dans l'intervalle, il convient d'observer que l'exclusion des mutuelles de 1945 et des institutions de prévoyance les dispense de cotiser au fonds, ajoutant en cela aux avantages dont elles bénéficient par ailleurs 135( * ) .

Il faut noter par ailleurs que l'obligation d'adhérer au futur fonds de garantie ne s'étend pas à toutes les entreprises d'assurance soumises au code des assurances. Elle concerne les sociétés qui sont soumises au contrôle de l'Etat et qui proposent l'un des contrats visés au 1° et au 2° de l'article L. 310-1 du code des assurances :

- entreprises qui contractent des engagements dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine, s'engagent à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d'enfants, ou font appel à l'épargne en vue de la capitalisation et contractent à cet effet des engagements déterminés ;

- entreprises qui, sous forme d'assurance directe, couvrent les risques de dommages corporels liés aux accidents et à la maladie.

Sont en revanche explicitement exclues les entreprises visées au 3° de l'article L. 310-1, c'est-à-dire les entreprises qui " couvrent d'autres risques y compris ceux liés à une activité d'assistance " (assurance dommages).

B.  UN FONDS DESTINÉ À INDEMNISER LES PERSONNES PHYSIQUES TITULAIRES DE CONTRATS D'ASSURANCE DE PERSONNES

Le champ des contrats d'assurance couverts par le futur fonds de garantie recouvre la catégorie de contrats que les directives européennes incluent dans la branche " vie " ou que les professionnels de l'assurance classent dans l'assurance dite " de personnes ". Il s'agit :

- des contrats d'assurance-vie, c'est-à-dire ceux permettant la constitution d'une épargne et le versement de celle-ci sous forme de capital ou de rente si l'assuré est en vie au terme du contrat ;

- des contrats d'assurance en cas de décès, garantissant le versement d'un capital en cas de décès avant le terme du contrat, quel qu'en soit la cause ;

- des contrats de capitalisation garantissant le versement d'un capital déterminé à l'échéance du contrat ;

- des contrats couvrant des risques de dommages corporels liés aux accidents et à la maladie : remboursement des frais de soins en complément des régimes obligatoires d'assurance maladie, versement d'un capital en cas de décès par accident, versement d'indemnités en cas d'incapacité de travail ou d'invalidité...

- et des contrats visés à l'article L. 441-1 du code des assurances, c'est-à-dire un certain nombre de régimes collectifs de retraite que peuvent gérer les entreprises d'assurance.

La restriction du champ d'application de la garantie aux seuls contrats d'assurance de personnes recouvre une certaine logique. En effet, comme pour le fonds de garantie bancaire qui garantit les dépôts des clients bancaires, c'est-à-dire leur épargne, il est équitable de garantir aux assurés qui ont placé une partie de leur épargne dans des produits d'assurance destinés à leur verser une rente ou une somme d'argent en contrepartie de la survenance d'un événement lié à la personne, que les sommes ainsi épargnées ne seront pas définitivement perdues en cas de défaillance de l'organisme prestataire. Les produits d'assurance ainsi souscrits sont en effet proches de produits d'épargne à moyen et long terme.

En revanche, à l'instar de ce qui est prévu pour le fonds de garantie des dépôts, les personnes morales susceptibles de souscrire ces contrats (entreprises d'assurance, établissements de crédit, organismes de placement collectifs, organismes de retraite...) et les personnes physiques qui détiennent au moins 5 % de l'entreprise défaillante ne pourront bénéficier d'aucune indemnisation. Cette exclusion ne s'applique toutefois pas aux salariés et clients des personnes morales susmentionnées lorsque les contrats ont été souscrits à leur profit. Il s'agit bien d'éviter l'indemnisation des personnes morales sans toutefois priver leurs clients ou salariés de toute compensation.

La disposition précisant que le fonds de garantie est une personne morale de droit privé a été déplacée par les députés dans l'article L. 423-4 relatif aux organes de gestion du fonds.

II. LE MODE D'INTERVENTION DU FONDS DE GARANTIE

L'article L. 423-2 inséré dans le code des assurances par le présent article décrit le mode d'intervention du fonds de garantie des assurés. Contrairement au fonds de garantie des dépôts, ce dernier n'est sollicité qu'à titre curatif, par la Commission de contrôle des assurances (CCA), après éventuel transfert de son portefeuille de contrats à une autre entreprise.

Le projet de loi prévoit ainsi un dispositif en deux étapes, destiné pour l'essentiel à éviter la mise en liquidation de la compagnie d'assurance, cette procédure étant considérée comme peu adaptée aux réalités spécifiques de l'assurance. Le fonds n'intervient qu'au cours de la deuxième étape.

A. LA PROCÉDURE DE TRANSFERT DE PORTEFEUILLE

1. Une garantie de dernier recours


Le fonds de garantie des assurés est conçu comme un volet ultime de protection des intérêts des assurés. Il est actionné par la CCA - et par elle seule - une fois que celle-ci a épuisé les moyens dont elle dispose pour tenter de remettre d'aplomb l'entreprise chancelante. Ces moyens, prévus aux articles L. 310-17 et L. 310-18 du code des assurances, sont gradués. La CCA adresse d'abord une mise en garde à l'entreprise qui enfreint une disposition législative ou réglementaire ou dont le comportement met en péril la marge de solvabilité 136( * ) ou l'exécution des engagements qu'elle a contractés envers les assurés. Elle peut également lui adresser une injonction de prendre toutes mesures destinées à rétablir ou renforcer son équilibre financier ou à corriger ses pratiques. Enfin, si l'entreprise persiste dans son infraction ou ne défère pas à ses injonctions, la CCA peut prononcer l'une (ou plusieurs) des six sanctions disciplinaires suivantes à son encontre, en fonction de la gravité des manquements : l'avertissement, le blâme, l'interdiction d'effectuer certaines opérations, la suspension temporaire d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise, le retrait partiel ou total d'agrément et le transfert d'office de tout ou partie du portefeuille. Ces sanctions sont prononcées dans le cadre d'une procédure contradictoire au cours de laquelle les responsables de l'entreprise sont entendus.

Si, en dépit de ces mesures, la CCA estime, au cours de la procédure disciplinaire ci-dessus, que l'entreprise n'est plus en mesure de faire face à ses engagements envers les assurés, elle lui notifie sa décision de recourir au fonds après avoir consulté par écrit le président du directoire du fonds de garantie. La consultation du président du directoire est légitime dès lors que le fonds sera éventuellement amené à indemniser les assurés lésés. L'exposé des motifs du présent projet de loi parle d'un " examen concerté du dossier entre le président de la CCA et le président du directoire du fonds ".

Le texte ne précise toutefois pas ce qui se passe si l'appréciation du président du directoire diverge de celle de la CCA, ou de celle du Conseil de surveillance, représentatif des milieux professionnels, sur la situation de l'entreprise et sur la nécessité de recourir au fonds. Il peut être utile d'instituer une procédure d'arbitrage qui donne le dernier mot au ministre chargé de l'économie. Votre commission vous proposera un amendement en ce sens.

2. La procédure de transfert du portefeuille


La CCA lance ensuite un appel d'offres en vue du transfert du portefeuille de contrats de l'entreprise défaillante. Le texte précise que l'appel d'offres est effectué " dans les conditions prévues au 6° de l'article L. 310-18 " du code des assurances. Toutefois, le 6° de l'article L. 310-18 ne comportant aucune disposition de nature à éclairer les conditions dans lesquelles doit s'opérer l'appel d'offres, votre commission vous proposera de supprimer cette référence.

Selon les explications fournies par le gouvernement dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, ce transfert doit s'effectuer au profit d'une institution agréée (y compris communautaire) pour réaliser des opérations d'assurances et relevant indifféremment du code des assurances, du code de la sécurité sociale, du code rural ou du code de la mutualité.

Le texte du présent article précise ensuite que la CCA retient, parmi la ou les offres, celle qui lui paraît le plus en mesure de préserver les intérêts des assurés, eu égard, notamment à la solvabilité des entreprises candidates et aux taux de réduction des engagements envers les assurés que chacune des entreprises propose pour permettre de ramener la valeur de ces engagements au montant que l'actif permet de couvrir (avec la possibilité de ne retenir aucune des offres). Les députés ont souhaité permettre aux entreprises potentiellement cessionnaires de proposer plusieurs taux de réduction en fonction des types de contrats à racheter ce qui pourrait encourager certaines entreprises à trier entre les bons et les mauvais engagements. Pour éviter cette sélection, votre commission vous proposera de revenir à la rédaction initiale qui prévoyait un seul taux de réduction.

C'est à la CCA qu'il revient, en cas de transfert du portefeuille à plusieurs entreprises et lorsque les circonstances l'exigent, de retenir un taux de réduction différent pour chaque type de contrats transférés. La décision de la CCA, publiée au Journal Officiel , libère l'entreprise cédante de tout engagement envers les assurés dont les contrats ont été transférés.

Les engagements et les actifs transférés font l'objet d'une comptabilité distincte afin de faire bénéficier les assurés d'un éventuel retour à meilleure fortune dans l'hypothèse où les actifs auraient été sous-estimés et/ou les engagements surestimés. Cette clause bénéficiera notamment aux assurés dont les droits seraient supérieurs aux plafonds d'indemnisation du fonds.

B. L'INTERVENTION DU FONDS DE GARANTIE

Dans un deuxième temps, si le portefeuille de l'entreprise en difficulté a pu être transféré, les droits des assurés qui n'auraient pas été couverts dans leur intégralité par l'entreprise cessionnaire, sont garantis par un versement du système de garantie au cessionnaire , mais " dans les limites prévues par décret en Conseil d'Etat ".

Lorsqu'en revanche, la procédure de transfert de portefeuille n'a pas abouti, les assurés sont indemnisés par un versement à leur profit du système de garantie, toujours dans les limites prévues par décret en Conseil d'Etat.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le plafond de garantie devrait être le même que pour la garantie des dépôts, c'est-à-dire 400.000 francs par assuré.

Il peut toutefois être opportun de prévoir plusieurs plafonds, en fonction du type de contrat souscrit par les assurés. En effet, il est équitable de différencier les assurés selon qu'ils ont souscrit un contrat d'assurance maladie ou de prévoyance ou un contrat d'assurance vie. Votre commission vous proposera un amendement en ce sens.

C. LES CONSÉQUENCES

Lorsque le fonds de garantie intervient, quelle que soit l'issue de la procédure de transfert du portefeuille de contrats, l'entreprise fait automatiquement l'objet d'un retrait d'agrément ce qui la fait entrer en liquidation. C'est le fonds de garantie qui accomplit, jusqu'à la nomination du liquidateur, tous les actes nécessaires à la gestion de la partie du portefeuille de contrats qui n'a pas été transférée. Toutefois, l'administrateur provisoire nommé le cas échéant par la CCA peut accomplir ces actes de gestion pour le compte du fonds de garantie.

En outre, le fonds de garantie est subrogé dans les droits des assurés à concurrence du montant des sommes qu'il a versées, dans toute procédure de liquidation ultérieure. Si celle-ci permet de satisfaire les droits - d'un montant supérieur - de certains assurés, c'est à eux, au delà de la somme compensant l'intervention du fonds, que ces produits supplémentaires de la liquidation reviendront.

L'alinéa suivant prévoit que le fonds est subrogé dans les mêmes limites dans les droits de l'entreprise défaillante, à concurrence des sommes exigibles en vertu de l'exécution des traités de réassurance en cours : dans la mesure où l'entreprise défaillante reste juridiquement responsable envers les assurés, le plus simple est un dédommagement de ces derniers par le fonds, suivi d'une action récursoire (sans doute plus lente) du fonds de garantie envers le réassureur. Le fonds peut donc se retourner au nom de l'entreprise défaillante, contre toute entreprise de réassurance qui aurait acquis des contrats de cette dernière.

Enfin, le fonds peut, après avis de la CCA, engager toute action en responsabilité à l'encontre des dirigeants de fait ou de droit de l'entreprise défaillante, aux fins d'obtenir le remboursement des sommes qu'il aura versées.

Les députés ont amendé le texte par deux fois pour supprimer l'obligation pour le fonds de recueillir l'avis de la CCA avant d'engager une action contre les dirigeants, d'une part, tout en obligeant le fonds à en informer la CCA, d'autre part.

III. L'ORGANISATION DU FONDS DE GARANTIE

L'article L. 423-4 que le présent article insère dans le code des assurances précise le statut et organise le mode de gestion du futur fonds de garantie. Comme le fonds de garantie des dépôts bancaires, le fonds de garantie des assurés est une " personne morale de droit privé " gérée par les professionnels.

A. UN FONDS GÉRÉ PAR " LA PLACE "

A l'instar du fonds de garantie des dépôts, le fonds de garantie des assurés est géré par un directoire de trois membres agissant sous le contrôle d'un conseil de surveillance de douze membres nommés par les entreprises adhérentes. L'Assemblée nationale a précisé que les membres du directoire et du conseil de surveillance devront remplir les conditions énoncées à l'article L. 322-2 du code des assurances pour pouvoir fonder diriger ou administrer une entreprise d'assurance (notamment absence de condamnation pénale).

1. Le conseil de surveillance

Les dispositions relatives aux compétences du conseil de surveillance (contrôle permanent du fonds de garantie, élaboration des statuts et du règlement intérieur, approbation des comptes), à sa composition, au mode de désignation de ses membres, aux règles de majorité et au poids de chaque adhérent sont identiques à celles retenues pour le fonds de garantie des dépôts.

La composition du conseil de surveillance devra être représentative des différentes catégories d'entreprises d'assurances soumises au code des assurances. Chacun des membres représentera une ou plusieurs des entreprises adhérentes. Enfin, le nombre de voix dont disposera chaque membre sera fonction de sa contribution financière totale au fonds de garantie et de celles des entreprises qui l'ont désigné comme leur représentant.

Comme pour le fonds de garantie des dépôts, les statuts et le règlement intérieur du fonds, établis par le conseil de surveillance, devront être homologués par arrêté du ministre chargé de l'économie.

2. Le directoire

Comme pour le fonds de garantie des dépôts, les trois membres du directoire sont nommés par le conseil de surveillance mais le Président ne peut exercer ses fonctions qu'après l'agrément du ministre chargé de l'économie.

Enfin, la disposition qui interdit aux membres du directoire d'exercer des fonctions au sein des entreprises adhérentes ou de recevoir des rétributions de l'une d'entre elles vise à préserver leur indépendance face à des pressions qui ne devraient pas manquer de se faire sentir. En pratique, les membres du directoire devraient être d'anciens dirigeants d'entreprises d'assurance.

3. Les relations entre les diverses instances

Le présent article prévoit que le ministre chargé de l'économie et le président de la Commission de contrôle des assurances (ou leur représentant) peuvent être entendus à leur demande par le conseil de surveillance ou le directoire. Même si la nécessité d'une telle disposition n'apparaît pas évidente, elle confère au fonds de garantie une certaine importance.

Initialement, le texte prévoyait la participation avec voix consultative du président du directoire du fonds aux séances de la CCA au cours desquelles celle-ci était amenée soit à examiner la réponse apportée par une entreprise entrant dans le champ de la garantie à l'une de ses injonctions, soit à prononcer à son encontre une des sanctions mentionnées plus haut. Cette disposition est apparue aux députés comme étant de nature à engendrer une confusion des responsabilités respectives de chaque acteur et à mettre en danger l'indépendance et la confidentialité des délibérations de la CCA. Ils ont en conséquence substitué à cet alinéa une rédaction plus neutre prévoyant que la CCA " entend le président du directoire du Fonds de garantie pour toute question concernant une entreprise d'assurance pour laquelle elle envisage de mettre en oeuvre les dispositions du présent chapitre " .

Votre rapporteur souscrit à l'analyse de l'Assemblée nationale. La présence automatique du président du directoire du fonds aux délibérations de la CCA mettrait ce dernier dans une position délicate vis-à-vis des membres du conseil de surveillance devant lesquels il est responsable. Il est plus logique qu'il soit en revanche systématiquement entendu par la CCA lorsque celle-ci envisage de recourir au fonds. Il convient de noter que cette disposition rend alors inutile la disposition de l'article L. 423-2 qui prévoit la consultation écrite du président du directoire par la CCA avant la saisine officielle du fonds de garantie.

Les députés ont par ailleurs prévu que le président du directoire pouvait demander à être entendu par la CCA. Cette disposition remplace utilement la disposition supprimée par les députés en permettant au président du directoire du fonds de garantie d'alerter l'autorité de contrôle sur le cas de l'un des adhérents au fonds dont la situation financière se dégraderait ou dont les agissements seraient douteux, toutes informations dont la CCA ne bénéficie pas nécessairement. Votre commission vous proposera d'étendre cette faculté au président du conseil de surveillance du fonds .

4. Le secret professionnel

L'article L. 423-6 nouveau soumet les membres des organes dirigeants du fonds de garantie ainsi que " toute personne qui par ses fonctions a accès aux documents et informations détenues par le fonds de garantie ", au secret professionnel. Toutefois, ce secret n'est opposable ni à l'autorité judiciaire agissant dans le cadre d'une procédure pénale, ni aux juridictions civiles statuant sur un recours formé à l'encontre d'une décision du fonds de garantie, ni à la CCA.

B. UN FONDS AU STATUT JURIDIQUE ET FISCAL INDÉTERMINÉ

1. Un statut juridique sui generis


Le fonds de garantie des assurés créé par le présent article revêt la forme d'une " personne morale de droit privé " n'appartenant à aucune catégorie juridique préexistante.

Le précédent dont ce projet de loi s'est inspiré est celui du Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse, créé en 1951, qui, aux termes de l'article L. 421-2 du code des assurances, est " doté de la personnalité civile ". Plusieurs décisions rendues par des juridictions civiles ont considéré que ce fonds était doté d'une personnalité morale de droit privé.

Comme il est rappelé sous le commentaire de l'article 47 du présent projet de loi créant le fonds de garantie unique des dépôts (voir page ...), ce statut sui generis s'est imposé en raison de l'inadéquation des formes juridiques existantes à prendre en compte toutes les caractéristiques que doit revêtir un tel système de garantie : autonomie par rapport aux pouvoirs publics, adhésion obligatoire des entreprises d'assurance de personnes, constitution de réserves impartageables... La solution retenue évite en particulier de perturber le droit commun des sociétés commerciales.

Selon le gouvernement, une telle innovation n'est pas de nature à soulever de grandes difficultés dès lors que le fonds de garantie n'évoluera pas dans un secteur concurrentiel et que le projet de loi permet de définir en pratique les règles de droit qui lui sont applicables.

2. Un statut fiscal indéterminé

Le texte ne donne aucune précision sur le statut fiscal du fonds de garantie. Des amendements ont été déposés au cours du débat à l'Assemblée nationale pour aligner le régime fiscal des fonds de garantie sur celui des organismes à but non lucratif prévu à l'article 206-5 du code général des impôts.

Ces amendements ont permis au gouvernement de préciser que les fonds de garantie étaient des personnes morales de droit privé soumises, par leur forme, à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun. Madame Lebranchu, secrétaire d'Etat aux PME, a souligné que le régime de droit commun était, en l'espèce, plus avantageux que le régime de faveur des associations, dans la mesure où le résultat imposé est un bénéfice net de charges (cf. article 39 du CGI) alors que l'application de l'article 206-5 relatif aux associations conduirait à taxer les produits financiers dégagés sans que puissent être déduites les charges supportées par le fonds.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les cotisations reçues par le fonds de garantie devraient trouver leur contrepartie dans des provisions constituées en franchise d'impôt conformément au 5° du I de l'article 39 du code général des impôts, en vue de faire face aux sinistres que les cotisations sont censées couvrir. Il en serait de même pour les revenus de capitaux mobiliers perçus par le fonds qui seraient compensés par des provisions déductibles d'égal montant. En conséquence, le résultat annuel du fonds devrait être nul, ce qui l'exonérerait de facto de tout impôt sur les sociétés. Un tel raisonnement part du postulat selon lequel le montant des cotisations appelées et des résultats financiers représenterait exactement le montant estimatif du risque couvert par le fonds, grâce à la possibilité de moduler les cotisations. Le tout serait donc un jeu à somme nul.

En tout état de cause, il semble qu'il n'entre pas dans les intentions du gouvernement d'assujettir les fonds de garantie créés par le présent projet de loi à l'impôt sur les sociétés.

IV. DES MODALITÉS DE FINANCEMENT PEU PRÉCISES

En vertu du nouvel article L. 423-4 du code des assurances, les établissements adhérant au fonds de garantie devront lui fournir par avance les moyens financiers nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Les conditions dans lesquelles ces ressources seront fournies au fonds sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat.

Votre rapporteur regrette le silence du texte de la loi sur un sujet aussi sensible que le chargement financier du fonds . Il considère pour sa part qu'il n'est pas justifié de financer ex ante un fonds appelé à ne jamais intervenir ou presque. Si l'on en croit les entreprises d'assurance (et la CCA elle-même), la faillite d'Europavie est en effet un cas tout à fait exceptionnel dans le monde de l'assurance-vie. On notera d'ailleurs que parmi les fonds de garantie existant à l'étranger (Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, Japon), seul le système japonais exige des cotisations préalables. Un financement ponctuel ex post peut être tout aussi efficace, surtout si des sanctions sont prévues (comme c'est le cas dans le présent projet de loi 137( * ) ) pour inciter les adhérents à s'acquitter de leurs obligations financières.

Le mode de financement du fonds de garantie des assurés devrait être similaire à celui du fonds de garantie des dépôts et reposer sur trois instruments :

A. LES CERTIFICATS D'ASSOCIATION

Au moment de sa création, le fonds pourra émettre des titres de participation qui auront les mêmes caractéristiques que ceux concernant le fonds de garantie des dépôts : ces " certificats d'association " constitueraient la dotation initiale du fonds (voire une source de financement supplémentaire en cas de nécessité). Dans l'hypothèse où le fonds de garantie utiliserait pour tout ou partie le produit de ces titres, ceux-ci verraient leur valeur nominale réduite à due proportion dans les bilans des établissements contributeurs. Les provisions alors nécessaires seraient fiscalement déductibles dans les conditions de droit commun. Ces certificats seront rémunérés sauf lorsque les pertes subies par le fonds ne pourront plus être couvertes par les cotisations déjà appelées. Dans ce cas également, leur valeur nominale sera réduite à due proportion dans les bilans des établissements 138( * ) .

B. LES COTISATIONS DES ENTREPRISES ADHÉRENTES

Des cotisations seront appelées auprès des entreprises adhérentes. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, elles seront assises sur les provisions mathématiques des entreprises adhérentes et pourront atteindre 0,05 % de ces provisions. Leur montant global pourrait s'élever à 1,5 milliards de francs.

Toutefois, pour faire droit à une préoccupation des assureurs qui contestaient le bien fondé d'un chargement ex ante du fonds, une partie (vraisemblablement la moitié) de ces cotisations pourra ne pas être versée en numéraire et faire l'objet d'un cantonnement spécifique au passif des bilans des entreprises adhérentes. Les fonds propres des entreprises ne seraient pas affectés par la constitution de cette garantie. Les députés ont inscrit cette faculté dans le texte du projet de loi en prévoyant que le décret précisera " les conditions dans lesquelles une partie des cotisations peut ne pas être versée au fonds de garantie moyennant la constitution de garanties appropriées " . Votre commission ira plus loin en proposant que la moitié au moins des cotisations reste cantonnée au bilan des assureurs.

En vertu de l'article 52 du présent projet de loi, un quart des sommes effectivement déboursées par les assureurs seront imputables, sous forme de crédit d'impôt, sur la contribution des institutions financières (CIF) payée par les entreprises adhérentes. En revanche, les sommes mises en réserve ne donneront lieu à aucun crédit d'impôt.

C. LA POSSIBILITÉ D'EMPRUNTER

Enfin, le projet de loi prévoit que le fonds de garantie peut emprunter auprès de ses adhérents.

Aux termes de l'article L. 423-8 du code des assurances, le décret en Conseil d'Etat précisera :

- le plafond d'indemnisation par assuré et les modalités et délais d'indemnisation :

- les modalités de définition des taux de réduction des engagements ;

- les caractéristiques des certificats d'association ;

- le montant global des cotisations annuelles des adhérents ;

- la formule de répartition des cotisations qui refléteront les risques " objectifs " que l'adhérent fait courir au fonds, sur la base d'indicateurs de sa situation financière (notamment des provisions mathématiques et des cotisations déjà versées) ; votre commission vous proposera une nouvelle rédaction de cet alinéa afin de préciser que les cotisations sont assises sur les provisions mathématiques des entreprises d'assurance, cette assiette étant modulée en fonction du risque que l'adhérent fait courir au fonds, estimé au vu de certains indicateurs financiers comme sa marge de solvabilité et le montant des cotisations qu'il a déjà versées ;

La marge de solvabilité

Les sociétés d'assurance doivent disposer, indépendamment de leurs provisions techniques et des placements admis à les représenter, d'un montant minimal de fonds propres appelé marge de solvabilité réglementaire, qui est déterminé en fonction du niveau de leurs engagements. Ces derniers sont évalués en fonction des primes annuelles (ou des sinistres) en assurances de dommages et à partir des provisions mathématiques en assurance vie (articles R. 334-1 et suivants du code des assurances).

Selon les normes communautaires en vigueur, la marge de solvabilité minimale est de 16 % des primes en assurances de dommages et de 4 % des provisions mathématiques en assurance vie et capitalisation (1 % pour les contrats en unités de compte).

En 1997, la marge de solvabilité des sociétés d'assurance vie représentait 13,2 % des provisions mathématiques, soit plus de trois fois la marge minimale réglementaire.

- les conditions et les modalités de nomination des membres du conseil de surveillance et la durée de leur mandat.

Dans la rédaction initiale du présent article, le décret en Conseil d'Etat devait également préciser les limites de l'intervention du fonds afin d'éviter que le fonds soit sollicité pour des montants qui fragiliseraient l'ensemble de la profession. Une telle disposition a été supprimée par les députés au motif que la fixation d'un plafond global d'intervention pourrait aboutir à rendre impossible le respect du principe posé par le projet de loi d'une indemnisation des assurés égale pour tous, bien que plafonnée. Les députés craignaient notamment que les assurés ne soient victimes de traitements différenciés selon l'ampleur du sinistre ou parce que le fonds aurait été sollicité un peu plus tôt.

Votre rapporteur considère pour sa part que le fonds de garantie n'a pas vocation à intervenir pour indemniser les assurés contre la faillite d'un géant de l'assurance. Les fonds propres des autres entreprises n'y suffiraient pas et l'on risquerait d'entraîner des défaillances en cascade. Il vous proposera en conséquence de rétablir la disposition qui figurait dans le texte initial.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi amendé.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 49

Rapport sur les modalités de constitution de systèmes de garantie obligatoires pour les mutuelles du code de la mutualité et les institutions de prévoyance

Le présent projet de loi limite le champ d'application du fonds de garantie des assurés aux seules entreprises d'assurance soumises au code des assurances, à l'exception donc des sociétés mutuelles dites de " 1945 " et des institutions de prévoyance. Rien ne justifie une telle exclusion même si les mutuelles de " 1945 " ne sont pas encore soumises aux directives communautaires. Il n'apparaît pas opportun de laisser les sociétaires et clients de ces organismes sans garantie contre leur éventuelle défaillance.

Le présent article additionnel propose donc de donner un délai de six mois au gouvernement pour rédiger un rapport examinant les modalités de constitution de systèmes de garantie obligatoires propres aux mutuelles du code de la mutualité et aux institutions de prévoyance.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

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