CHAPITRE II :
GARANTIE DES ASSURÉS
ARTICLE 49
Fonds de garantie des
assurés
Commentaire : Cet article prévoit la
création
d'un fonds de garantie chargé de sécuriser le paiement des
prestations dues aux assurés en cas de défaillance d'une
compagnie d'assurance de personnes. Financé ex ante pour partie par les
cotisations des entreprises adhérentes, le fonds interviendrait à
l'initiative de la Commission de contrôle des assurances, après
que celle-ci aura tenté de transférer le portefeuille de contrats
de l'entreprise en difficulté.
La création par le présent article d'un fonds de garantie des
assurés est consécutive à la faillite d'une
société d'assurance-vie qui a laissé de nombreux
assurés sans recours. Fort heureusement, les entreprises d'assurance ont
su trouver, dans le cas d'Europavie, un terrain d'entente pour indemniser les
assurés, sans qu'il soit besoin de conférer au dispositif que le
présent article propose de créer un caractère
rétroactif.
Ainsi, contrairement au fonds de garantie envisagé dans le domaine
bancaire qui s'inspire des systèmes de garantie mis en place par les
différentes familles bancaires, le fonds de garantie prévu pour
préserver les droits des assurés est-il un dispositif totalement
nouveau.
Le présent article prévoit ainsi de créer un chapitre III
nouveau dans le titre II du livre IV du code des assurances qui s'intitulerait
"
Mesures relatives à la garantie des assurés
"
et qui comprendrait huit nouveaux articles, numérotés
L. 423-1 à L. 423-8. Compte tenu de l'insertion de ce nouveau
chapitre dans un titre portant comme intitulé
" Le fonds de
garantie "
après deux chapitres concernant respectivement
" Le fonds de garantie contre les accidents de circulation et de
chasse "
et
" Le fonds de garantie des victimes des actes de
terrorisme et d'autres infractions "
, il apparaît plus logique
de l'intituler
" Le fonds de garantie des assurés contre la
défaillance d'une entreprise d'assurance de personnes "
. Votre
commission vous proposera un
amendement
en ce sens.
L'Assemblée nationale a adopté de nombreux amendements à
cet article, qui n'ont pour l'essentiel, qu'une portée
rédactionnelle.
I. UN CHAMP D'APPLICATION RESTREINT
Le fonds de garantie des assurés dont le présent article
prévoit la création se distingue du système de garantie
bancaire par son caractère non universel. En effet, outre que tous les
organismes exerçant une activité d'assurance n'y cotiseront pas,
les assurés ne seront indemnisés que pour une seule
catégorie de contrats.
A. L'EXCLUSION DES MUTUELLES DE 1945 ET DES INSTITUTIONS DE
PRÉVOYANCE
En vertu du nouvel article L. 423-1 du code des assurances, seules les
entreprises d'assurances agréées en France
133(
*
)
, régies par le code des
assurances, et en conséquence soumises au contrôle de la
Commission de contrôle des assurances, sont appelées à
cotiser au fonds de garantie des assurés, à l'exception donc des
mutuelles dites de " 1945 " qui relèvent du code de la
mutualité et des institutions de prévoyance qui relèvent
du code de la sécurité sociale ou du code rural, et en
dépit du fait que ces deux catégories d'opérateurs entrent
dans le champ des directives européennes d'assurance.
De même, les succursales d'entreprises d'assurance dont le siège
social est situé dans un État membre de l'Espace
économique européen ne seront pas tenues de cotiser au fonds de
garantie puisqu'elles relèvent de l'éventuel système
existant dans l'Etat du siège social.
Rappelons que les mutuelles du code de la mutualité et les institutions
de prévoyance sont soumises au contrôle de la Commission de
contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCMIP)
et non à celui de la Commission de contrôle des assurances. Les
mutuelles de 1945 ne doivent pas être confondues avec les
sociétés d'assurance mutuelle (SAM), parmi lesquelles on trouve
la MACIF, la MAAF, Groupama ou les Mutuelles du Mans, qui relèvent du
code des assurances et qui devront, à ce titre, adhérer au futur
fonds de garantie.
L'absence de transposition dans le code de la mutualité des
troisièmes directives européennes sur l'assurance
134(
*
)
justifierait, selon le gouvernement,
le fait que les mutuelles de 1945 demeurent à l'écart du
mécanisme de garantie, n'étant pas soumises aux mêmes
contraintes prudentielles et au même contrôle que les entreprises
d'assurance. On notera toutefois qu'un tel argument est sans portée pour
les institutions de prévoyance qui ont transposé les directives
européennes depuis 1994. En outre, une telle exclusion prive les
assurés qui ont souscrit des contrats auprès de ces organismes de
toute protection en cas d'insolvabilité de l'un d'entre eux, à
l'exception de la garantie qui est prévue statutairement par la
Fédération nationale de la mutualité française mais
qui ne couvre que les groupements mutualistes les plus importants.
Toutefois, selon les informations recueillies par votre rapporteur, la
transposition prochaine des directives européennes dans le code de la
mutualité devrait emporter création d'un fonds de garantie
spécifique aux mutuelles de 1945 et aux institutions de
prévoyance.
Il importe d'obtenir des engagements précis du
gouvernement sur la date qu'il envisage pour procéder enfin à
cette transposition.
Dans l'intervalle, il convient d'observer que l'exclusion des mutuelles de 1945
et des institutions de prévoyance les dispense de cotiser au fonds,
ajoutant en cela aux avantages dont elles bénéficient par
ailleurs
135(
*
)
.
Il faut noter par ailleurs que l'obligation d'adhérer au futur fonds de
garantie ne s'étend pas à toutes les entreprises d'assurance
soumises au code des assurances. Elle concerne les sociétés qui
sont soumises au contrôle de l'Etat
et
qui proposent l'un
des contrats visés au 1° et au 2° de l'article
L. 310-1 du code des assurances :
- entreprises qui contractent des engagements dont l'exécution
dépend de la durée de la vie humaine, s'engagent à verser
un capital en cas de mariage ou de naissance d'enfants, ou font appel à
l'épargne en vue de la capitalisation et contractent à cet effet
des engagements déterminés ;
- entreprises qui, sous forme d'assurance directe, couvrent les risques de
dommages corporels liés aux accidents et à la maladie.
Sont en revanche explicitement exclues les entreprises visées au
3° de l'article L. 310-1, c'est-à-dire les entreprises
qui " couvrent d'autres risques y compris ceux liés à une
activité d'assistance " (assurance dommages).
B. UN FONDS DESTINÉ À INDEMNISER LES PERSONNES
PHYSIQUES TITULAIRES DE CONTRATS D'ASSURANCE DE PERSONNES
Le champ des contrats d'assurance couverts par le futur fonds de garantie
recouvre la catégorie de contrats que les directives européennes
incluent dans la branche " vie " ou que les professionnels de
l'assurance classent dans l'assurance dite " de personnes ". Il
s'agit :
- des contrats d'assurance-vie, c'est-à-dire ceux permettant la
constitution d'une épargne et le versement de celle-ci sous forme de
capital ou de rente si l'assuré est en vie au terme du contrat ;
- des contrats d'assurance en cas de décès, garantissant le
versement d'un capital en cas de décès avant le terme du contrat,
quel qu'en soit la cause ;
- des contrats de capitalisation garantissant le versement d'un capital
déterminé à l'échéance du contrat ;
- des contrats couvrant des risques de dommages corporels liés aux
accidents et à la maladie : remboursement des frais de soins en
complément des régimes obligatoires d'assurance maladie,
versement d'un capital en cas de décès par accident, versement
d'indemnités en cas d'incapacité de travail ou
d'invalidité...
- et des contrats visés à l'article L. 441-1 du code des
assurances, c'est-à-dire un certain nombre de régimes collectifs
de retraite que peuvent gérer les entreprises d'assurance.
La restriction du champ d'application de la garantie aux seuls contrats
d'assurance de personnes recouvre une certaine logique. En effet, comme pour le
fonds de garantie bancaire qui garantit les dépôts des clients
bancaires, c'est-à-dire leur épargne, il est équitable de
garantir aux assurés qui ont placé une partie de leur
épargne dans des produits d'assurance destinés à leur
verser une rente ou une somme d'argent en contrepartie de la survenance d'un
événement lié à la personne, que les sommes ainsi
épargnées ne seront pas définitivement perdues en cas de
défaillance de l'organisme prestataire. Les produits d'assurance ainsi
souscrits sont en effet proches de produits d'épargne à moyen et
long terme.
En revanche, à l'instar de ce qui est prévu pour le fonds de
garantie des dépôts, les personnes morales susceptibles de
souscrire ces contrats (entreprises d'assurance, établissements de
crédit, organismes de placement collectifs, organismes de retraite...)
et les personnes physiques qui détiennent au moins 5 % de
l'entreprise défaillante ne pourront bénéficier d'aucune
indemnisation. Cette exclusion ne s'applique toutefois pas aux salariés
et clients des personnes morales susmentionnées lorsque les contrats ont
été souscrits à leur profit. Il s'agit bien
d'éviter l'indemnisation des personnes morales sans toutefois priver
leurs clients ou salariés de toute compensation.
La disposition précisant que le fonds de garantie est une personne
morale de droit privé a été déplacée par les
députés dans l'article L. 423-4 relatif aux organes de
gestion du fonds.
II. LE MODE D'INTERVENTION DU FONDS DE GARANTIE
L'article L. 423-2 inséré dans le code des assurances par le
présent article décrit le mode d'intervention du fonds de
garantie des assurés. Contrairement au fonds de garantie des
dépôts, ce dernier n'est sollicité qu'à titre
curatif, par la Commission de contrôle des assurances (CCA), après
éventuel transfert de son portefeuille de contrats à une autre
entreprise.
Le projet de loi prévoit ainsi un dispositif en deux étapes,
destiné pour l'essentiel à éviter la mise en liquidation
de la compagnie d'assurance, cette procédure étant
considérée comme peu adaptée aux réalités
spécifiques de l'assurance. Le fonds n'intervient qu'au cours de la
deuxième étape.
A. LA PROCÉDURE DE TRANSFERT DE PORTEFEUILLE
1. Une garantie de dernier recours
Le fonds de garantie des assurés est conçu comme un volet ultime
de protection des intérêts des assurés. Il est
actionné par la CCA - et par elle seule - une fois que
celle-ci a épuisé les moyens dont elle dispose pour tenter de
remettre d'aplomb l'entreprise chancelante. Ces moyens, prévus aux
articles L. 310-17 et L. 310-18 du code des assurances, sont
gradués. La CCA adresse d'abord une mise en garde à l'entreprise
qui enfreint une disposition législative ou réglementaire ou dont
le comportement met en péril la marge de solvabilité
136(
*
)
ou l'exécution des
engagements qu'elle a contractés envers les assurés. Elle peut
également lui adresser une injonction de prendre toutes mesures
destinées à rétablir ou renforcer son équilibre
financier ou à corriger ses pratiques. Enfin, si l'entreprise persiste
dans son infraction ou ne défère pas à ses injonctions, la
CCA peut prononcer l'une (ou plusieurs) des six sanctions disciplinaires
suivantes à son encontre, en fonction de la gravité des
manquements : l'avertissement, le blâme, l'interdiction d'effectuer
certaines opérations, la suspension temporaire d'un ou plusieurs
dirigeants de l'entreprise, le retrait partiel ou total d'agrément et le
transfert d'office de tout ou partie du portefeuille. Ces sanctions sont
prononcées dans le cadre d'une procédure contradictoire au cours
de laquelle les responsables de l'entreprise sont entendus.
Si, en dépit de ces mesures, la CCA estime, au cours de la
procédure disciplinaire ci-dessus, que l'entreprise n'est plus en mesure
de faire face à ses engagements envers les assurés, elle lui
notifie sa décision de recourir au fonds
après avoir
consulté par écrit le président du directoire
du fonds
de garantie. La consultation du président du directoire est
légitime dès lors que le fonds sera éventuellement
amené à indemniser les assurés lésés.
L'exposé des motifs du présent projet de loi parle d'un
" examen concerté du dossier entre le président de la CCA et
le président du directoire du fonds ".
Le texte ne précise toutefois pas ce qui se passe si
l'appréciation du président du directoire diverge de celle de la
CCA, ou de celle du Conseil de surveillance, représentatif des milieux
professionnels, sur la situation de l'entreprise et sur la
nécessité de recourir au fonds. Il peut être utile
d'instituer une procédure d'arbitrage qui donne le dernier mot au
ministre chargé de l'économie.
Votre commission vous proposera
un amendement en ce sens.
2. La procédure de transfert du portefeuille
La CCA lance ensuite un
appel d'offres en vue du transfert du portefeuille
de contrats
de l'entreprise défaillante. Le texte précise que
l'appel d'offres est effectué
" dans les conditions
prévues au 6° de l'article L. 310-18 "
du code
des assurances. Toutefois, le 6° de l'article L. 310-18 ne comportant
aucune disposition de nature à éclairer les conditions dans
lesquelles doit s'opérer l'appel d'offres, votre commission vous
proposera de supprimer cette référence.
Selon les explications fournies par le gouvernement dans l'exposé des
motifs du présent projet de loi, ce transfert doit s'effectuer au profit
d'une institution agréée (y compris communautaire) pour
réaliser des opérations d'assurances et relevant
indifféremment du code des assurances, du code de la
sécurité sociale, du code rural ou du code de la mutualité.
Le texte du présent article précise ensuite que la CCA retient,
parmi la ou les offres, celle qui lui paraît le plus en mesure de
préserver les intérêts des assurés, eu égard,
notamment à la solvabilité des entreprises candidates et aux taux
de réduction des engagements envers les assurés que chacune des
entreprises propose pour permettre de ramener la valeur de ces engagements au
montant que l'actif permet de couvrir (avec la possibilité de ne retenir
aucune des offres). Les députés ont souhaité permettre aux
entreprises potentiellement cessionnaires de proposer plusieurs taux de
réduction en fonction des types de contrats à racheter ce qui
pourrait encourager certaines entreprises à trier entre les bons et les
mauvais engagements.
Pour éviter cette sélection, votre
commission vous proposera de revenir à la rédaction initiale qui
prévoyait un seul taux de réduction.
C'est à la CCA qu'il revient, en cas de transfert du portefeuille
à plusieurs entreprises et lorsque les circonstances l'exigent, de
retenir un taux de réduction différent pour chaque type de
contrats transférés. La décision de la CCA, publiée
au
Journal Officiel
, libère l'entreprise cédante de tout
engagement envers les assurés dont les contrats ont été
transférés.
Les engagements et les actifs transférés font l'objet d'une
comptabilité distincte afin de faire bénéficier les
assurés d'un éventuel retour à meilleure fortune dans
l'hypothèse où les actifs auraient été
sous-estimés et/ou les engagements surestimés. Cette clause
bénéficiera notamment aux assurés dont les droits seraient
supérieurs aux plafonds d'indemnisation du fonds.
B. L'INTERVENTION DU FONDS DE GARANTIE
Dans un deuxième temps, si le portefeuille de l'entreprise en
difficulté a pu être transféré, les droits des
assurés qui n'auraient pas été couverts dans leur
intégralité par l'entreprise cessionnaire, sont garantis par un
versement du système de garantie au cessionnaire
, mais
"
dans les limites prévues par décret en Conseil
d'Etat
".
Lorsqu'en revanche, la procédure de transfert de portefeuille n'a pas
abouti, les assurés sont indemnisés par un
versement à
leur profit
du système de garantie, toujours dans les limites
prévues par décret en Conseil d'Etat.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le plafond de garantie
devrait être le même que pour la garantie des dépôts,
c'est-à-dire 400.000 francs par assuré.
Il peut toutefois être opportun de prévoir plusieurs plafonds, en
fonction du type de contrat souscrit par les assurés. En effet, il est
équitable de différencier les assurés selon qu'ils ont
souscrit un contrat d'assurance maladie ou de prévoyance ou un contrat
d'assurance vie. Votre commission vous proposera un
amendement
en ce
sens.
C. LES CONSÉQUENCES
Lorsque le fonds de garantie intervient, quelle que soit l'issue de la
procédure de transfert du portefeuille de contrats, l'entreprise fait
automatiquement
l'objet d'un
retrait d'agrément
ce qui la
fait entrer en liquidation. C'est le fonds de garantie qui accomplit,
jusqu'à la nomination du liquidateur, tous les actes nécessaires
à la gestion de la partie du portefeuille de contrats qui n'a pas
été transférée. Toutefois, l'administrateur
provisoire nommé le cas échéant par la CCA peut accomplir
ces actes de gestion pour le compte du fonds de garantie.
En outre, le fonds de garantie est subrogé dans les droits des
assurés à concurrence du montant des sommes qu'il a
versées, dans toute procédure de liquidation ultérieure.
Si celle-ci permet de satisfaire les droits - d'un montant
supérieur - de certains assurés, c'est à eux, au
delà de la somme compensant l'intervention du fonds, que ces produits
supplémentaires de la liquidation reviendront.
L'alinéa suivant prévoit que le fonds est subrogé dans les
mêmes limites dans les droits de l'entreprise défaillante,
à concurrence des sommes exigibles en vertu de l'exécution des
traités de réassurance en cours : dans la mesure où
l'entreprise défaillante reste juridiquement responsable envers les
assurés, le plus simple est un dédommagement de ces derniers par
le fonds, suivi d'une action récursoire (sans doute plus lente) du fonds
de garantie envers le réassureur. Le fonds peut donc se retourner au nom
de l'entreprise défaillante, contre toute entreprise de
réassurance qui aurait acquis des contrats de cette dernière.
Enfin, le fonds peut, après avis de la CCA, engager toute action en
responsabilité à l'encontre des dirigeants de fait ou de droit de
l'entreprise défaillante, aux fins d'obtenir le remboursement des sommes
qu'il aura versées.
Les députés ont amendé le texte par deux fois pour
supprimer l'obligation pour le fonds de recueillir l'avis de la CCA avant
d'engager une action contre les dirigeants, d'une part, tout en obligeant le
fonds à en informer la CCA, d'autre part.
III. L'ORGANISATION DU FONDS DE GARANTIE
L'article L. 423-4 que le présent article insère dans le
code des assurances précise le statut et organise le mode de gestion du
futur fonds de garantie. Comme le fonds de garantie des dépôts
bancaires, le fonds de garantie des assurés est une
" personne
morale de droit privé "
gérée par les
professionnels.
A. UN FONDS GÉRÉ PAR " LA PLACE "
A l'instar du fonds de garantie des dépôts, le fonds de garantie
des assurés est géré par un directoire de trois membres
agissant sous le contrôle d'un conseil de surveillance de douze membres
nommés par les entreprises adhérentes. L'Assemblée
nationale a précisé que les membres du directoire et du conseil
de surveillance devront remplir les conditions énoncées à
l'article L. 322-2 du code des assurances pour pouvoir fonder diriger ou
administrer une entreprise d'assurance (notamment absence de condamnation
pénale).
1. Le conseil de surveillance
Les dispositions relatives aux compétences du conseil de surveillance
(contrôle permanent du fonds de garantie, élaboration des statuts
et du règlement intérieur, approbation des comptes), à sa
composition, au mode de désignation de ses membres, aux règles de
majorité et au poids de chaque adhérent sont identiques à
celles retenues pour le fonds de garantie des dépôts.
La composition du conseil de surveillance devra être
représentative des différentes catégories d'entreprises
d'assurances soumises au code des assurances. Chacun des membres
représentera une ou plusieurs des entreprises adhérentes. Enfin,
le nombre de voix dont disposera chaque membre sera fonction de sa contribution
financière totale au fonds de garantie et de celles des entreprises qui
l'ont désigné comme leur représentant.
Comme pour le fonds de garantie des dépôts, les statuts et le
règlement intérieur du fonds, établis par le conseil de
surveillance, devront être homologués par arrêté du
ministre chargé de l'économie.
2. Le directoire
Comme pour le fonds de garantie des dépôts, les trois membres du
directoire sont nommés par le conseil de surveillance mais
le
Président ne peut exercer ses fonctions qu'après
l'agrément du ministre chargé de l'économie.
Enfin, la disposition qui interdit aux membres du directoire d'exercer des
fonctions au sein des entreprises adhérentes ou de recevoir des
rétributions de l'une d'entre elles vise à préserver leur
indépendance face à des pressions qui ne devraient pas manquer de
se faire sentir. En pratique, les membres du directoire devraient être
d'anciens dirigeants d'entreprises d'assurance.
3. Les relations entre les diverses instances
Le présent article prévoit que le ministre chargé de
l'économie et le président de la Commission de contrôle des
assurances (ou leur représentant) peuvent être entendus à
leur demande par le conseil de surveillance ou le directoire. Même si la
nécessité d'une telle disposition n'apparaît pas
évidente, elle confère au fonds de garantie une certaine
importance.
Initialement, le texte prévoyait la participation avec voix consultative
du président du directoire du fonds aux séances de la CCA au
cours desquelles celle-ci était amenée soit à examiner la
réponse apportée par une entreprise entrant dans le champ de la
garantie à l'une de ses injonctions, soit à prononcer à
son encontre une des sanctions mentionnées plus haut. Cette disposition
est apparue aux députés comme étant de nature à
engendrer une confusion des responsabilités respectives de chaque acteur
et à mettre en danger l'indépendance et la confidentialité
des délibérations de la CCA. Ils ont en conséquence
substitué à cet alinéa une rédaction plus neutre
prévoyant que la CCA
" entend le président du directoire
du Fonds de garantie pour toute question concernant une entreprise d'assurance
pour laquelle elle envisage de mettre en oeuvre les dispositions du
présent chapitre "
.
Votre rapporteur souscrit à l'analyse de l'Assemblée nationale.
La présence automatique du président du directoire du fonds aux
délibérations de la CCA mettrait ce dernier dans une position
délicate vis-à-vis des membres du conseil de surveillance devant
lesquels il est responsable. Il est plus logique qu'il soit en revanche
systématiquement entendu par la CCA lorsque celle-ci envisage de
recourir au fonds. Il convient de noter que cette disposition rend alors
inutile la disposition de l'article L. 423-2 qui prévoit la
consultation écrite du président du directoire par la CCA avant
la saisine officielle du fonds de garantie.
Les députés ont par ailleurs prévu que le président
du directoire pouvait demander à être entendu par la CCA. Cette
disposition remplace utilement la disposition supprimée par les
députés en permettant au président du directoire du fonds
de garantie d'alerter l'autorité de contrôle sur le cas de l'un
des adhérents au fonds dont la situation financière se
dégraderait ou dont les agissements seraient douteux, toutes
informations dont la CCA ne bénéficie pas nécessairement.
Votre commission vous proposera d'étendre cette faculté au
président du conseil de surveillance du fonds
.
4. Le secret professionnel
L'article L. 423-6 nouveau soumet les membres des organes dirigeants du
fonds de garantie ainsi que " toute personne qui par ses fonctions a
accès aux documents et informations détenues par le fonds de
garantie ", au secret professionnel. Toutefois, ce secret n'est opposable
ni à l'autorité judiciaire agissant dans le cadre d'une
procédure pénale, ni aux juridictions civiles statuant sur un
recours formé à l'encontre d'une décision du fonds de
garantie, ni à la CCA.
B. UN FONDS AU STATUT JURIDIQUE ET FISCAL
INDÉTERMINÉ
1. Un statut juridique
sui generis
Le fonds de garantie des assurés créé par le
présent article revêt la forme d'une
" personne morale de
droit privé "
n'appartenant à aucune catégorie
juridique préexistante.
Le précédent dont ce projet de loi s'est inspiré est celui
du Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse,
créé en 1951, qui, aux termes de l'article L. 421-2 du code
des assurances, est " doté de la personnalité civile ".
Plusieurs décisions rendues par des juridictions civiles ont
considéré que ce fonds était doté d'une
personnalité morale de droit privé.
Comme il est rappelé sous le commentaire de l'article 47 du
présent projet de loi créant le fonds de garantie unique des
dépôts (voir page ...), ce statut
sui generis
s'est
imposé en raison de l'inadéquation des formes juridiques
existantes à prendre en compte toutes les caractéristiques que
doit revêtir un tel système de garantie : autonomie par
rapport aux pouvoirs publics, adhésion obligatoire des entreprises
d'assurance de personnes, constitution de réserves impartageables... La
solution retenue évite en particulier de perturber le droit commun des
sociétés commerciales.
Selon le gouvernement, une telle innovation n'est pas de nature à
soulever de grandes difficultés dès lors que le fonds de garantie
n'évoluera pas dans un secteur concurrentiel et que le projet de loi
permet de définir en pratique les règles de droit qui lui sont
applicables.
2. Un statut fiscal indéterminé
Le texte ne donne aucune précision sur le statut fiscal du fonds de
garantie. Des amendements ont été déposés au cours
du débat à l'Assemblée nationale pour aligner le
régime fiscal des fonds de garantie sur celui des organismes à
but non lucratif prévu à l'article 206-5 du code
général des impôts.
Ces amendements ont permis au gouvernement de préciser que les fonds de
garantie étaient des personnes morales de droit privé soumises,
par leur forme, à l'impôt sur les sociétés dans les
conditions de droit commun. Madame Lebranchu, secrétaire d'Etat aux PME,
a souligné que le régime de droit commun était, en
l'espèce, plus avantageux que le régime de faveur des
associations, dans la mesure où le résultat imposé est un
bénéfice net de charges (cf. article 39 du CGI) alors que
l'application de l'article 206-5 relatif aux associations conduirait à
taxer les produits financiers dégagés sans que puissent
être déduites les charges supportées par le fonds.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les cotisations
reçues par le fonds de garantie devraient trouver leur contrepartie dans
des provisions constituées en franchise d'impôt
conformément au 5° du I de l'article 39 du code
général des impôts, en vue de faire face aux sinistres que
les cotisations sont censées couvrir. Il en serait de même pour
les revenus de capitaux mobiliers perçus par le fonds qui seraient
compensés par des provisions déductibles d'égal montant.
En conséquence, le résultat annuel du fonds devrait être
nul, ce qui l'exonérerait
de facto
de tout impôt sur les
sociétés. Un tel raisonnement part du postulat selon lequel le
montant des cotisations appelées et des résultats financiers
représenterait exactement le montant estimatif du risque couvert par le
fonds, grâce à la possibilité de moduler les cotisations.
Le tout serait donc un jeu à somme nul.
En tout état de cause, il semble qu'il n'entre pas dans les intentions
du gouvernement d'assujettir les fonds de garantie créés par le
présent projet de loi à l'impôt sur les
sociétés.
IV. DES MODALITÉS DE FINANCEMENT PEU PRÉCISES
En vertu du nouvel article L. 423-4 du code des assurances, les
établissements adhérant au fonds de garantie devront lui fournir
par avance les moyens financiers nécessaires à l'accomplissement
de ses missions. Les conditions dans lesquelles ces ressources seront fournies
au fonds sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat.
Votre rapporteur regrette le silence du texte de la loi sur un sujet aussi
sensible que le chargement financier du fonds
. Il considère pour sa
part qu'il n'est pas justifié de financer
ex ante
un fonds
appelé à ne jamais intervenir ou presque. Si l'on en croit les
entreprises d'assurance (et la CCA elle-même), la faillite d'Europavie
est en effet un cas tout à fait exceptionnel dans le monde de
l'assurance-vie. On notera d'ailleurs que parmi les fonds de garantie existant
à l'étranger (Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, Japon), seul le
système japonais exige des cotisations préalables. Un financement
ponctuel
ex post
peut être tout aussi efficace, surtout si des
sanctions sont prévues (comme c'est le cas dans le présent projet
de loi
137(
*
)
) pour inciter les
adhérents à s'acquitter de leurs obligations financières.
Le mode de financement du fonds de garantie des assurés devrait
être similaire à celui du fonds de garantie des
dépôts et reposer sur trois instruments :
A. LES CERTIFICATS D'ASSOCIATION
Au moment de sa création, le fonds pourra émettre des titres de
participation qui auront les mêmes caractéristiques que ceux
concernant le fonds de garantie des dépôts : ces
"
certificats d'association
" constitueraient la dotation
initiale du fonds (voire une source de financement supplémentaire en cas
de nécessité). Dans l'hypothèse où le fonds de
garantie utiliserait pour tout ou partie le produit de ces titres, ceux-ci
verraient leur valeur nominale réduite à due proportion dans les
bilans des établissements contributeurs. Les provisions alors
nécessaires seraient fiscalement déductibles dans les conditions
de droit commun. Ces certificats seront rémunérés sauf
lorsque les pertes subies par le fonds ne pourront plus être couvertes
par les cotisations déjà appelées. Dans ce cas
également, leur valeur nominale sera réduite à due
proportion dans les bilans des établissements
138(
*
)
.
B. LES COTISATIONS DES ENTREPRISES ADHÉRENTES
Des cotisations seront appelées auprès des entreprises
adhérentes. Selon les informations recueillies par votre rapporteur,
elles seront assises sur les provisions mathématiques des entreprises
adhérentes et pourront atteindre 0,05 % de ces provisions. Leur
montant global pourrait s'élever à
1,5 milliards de
francs.
Toutefois, pour faire droit à une préoccupation des assureurs qui
contestaient le bien fondé d'un chargement
ex ante
du fonds, une
partie (vraisemblablement la moitié) de ces cotisations pourra ne pas
être versée en numéraire et faire l'objet d'un cantonnement
spécifique au passif des bilans des entreprises adhérentes. Les
fonds propres des entreprises ne seraient pas affectés par la
constitution de cette garantie. Les députés ont inscrit cette
faculté dans le texte du projet de loi en prévoyant que le
décret précisera
" les conditions dans lesquelles une
partie des cotisations peut ne pas être versée au fonds de
garantie moyennant la constitution de garanties appropriées "
.
Votre commission ira plus loin en proposant que la moitié au moins
des cotisations reste cantonnée au bilan des assureurs.
En vertu de l'article 52 du présent projet de loi, un quart des sommes
effectivement déboursées par les assureurs seront imputables,
sous forme de crédit d'impôt, sur la contribution des institutions
financières (CIF) payée par les entreprises adhérentes. En
revanche, les sommes mises en réserve ne donneront lieu à aucun
crédit d'impôt.
C. LA POSSIBILITÉ D'EMPRUNTER
Enfin, le projet de loi prévoit que le fonds de garantie
peut
emprunter
auprès de ses adhérents.
Aux termes de l'article L. 423-8 du code des assurances, le décret
en Conseil d'Etat précisera :
- le plafond d'indemnisation par assuré et les modalités et
délais d'indemnisation :
- les modalités de définition des taux de réduction des
engagements ;
- les caractéristiques des certificats d'association ;
- le montant global des cotisations annuelles des adhérents ;
- la formule de répartition des cotisations qui refléteront les
risques " objectifs " que l'adhérent fait courir au fonds, sur
la base d'indicateurs de sa situation financière (notamment des
provisions mathématiques et des cotisations déjà
versées) ; votre commission vous proposera une
nouvelle
rédaction
de cet alinéa afin de préciser que les
cotisations sont assises sur les provisions mathématiques des
entreprises d'assurance, cette assiette étant modulée en
fonction du risque que l'adhérent fait courir au fonds, estimé au
vu de certains indicateurs financiers comme sa marge de solvabilité et
le montant des cotisations qu'il a déjà versées ;
La marge de solvabilité
Les
sociétés d'assurance doivent disposer, indépendamment de
leurs provisions techniques et des placements admis à les
représenter, d'un montant minimal de fonds propres appelé marge
de solvabilité réglementaire, qui est déterminé en
fonction du niveau de leurs engagements. Ces derniers sont
évalués en fonction des primes annuelles (ou des sinistres) en
assurances de dommages et à partir des provisions mathématiques
en assurance vie (articles R. 334-1 et suivants du code des assurances).
Selon les normes communautaires en vigueur, la marge de solvabilité
minimale est de 16 % des primes en assurances de dommages et de 4 %
des provisions mathématiques en assurance vie et capitalisation
(1 % pour les contrats en unités de compte).
En 1997, la marge de solvabilité des sociétés d'assurance
vie représentait 13,2 % des provisions mathématiques, soit
plus de trois fois la marge minimale réglementaire.
- les conditions et les modalités de nomination des membres du conseil
de surveillance et la durée de leur mandat.
Dans la rédaction initiale du présent article, le décret
en Conseil d'Etat devait également préciser les
limites de
l'intervention
du fonds afin d'éviter que le fonds soit
sollicité pour des montants qui fragiliseraient l'ensemble de la
profession. Une telle disposition a été supprimée par les
députés au motif que la fixation d'un plafond global
d'intervention pourrait aboutir à rendre impossible le respect du
principe posé par le projet de loi d'une indemnisation des
assurés égale pour tous, bien que plafonnée. Les
députés craignaient notamment que les assurés ne soient
victimes de traitements différenciés selon l'ampleur du sinistre
ou parce que le fonds aurait été sollicité un peu plus
tôt.
Votre rapporteur considère pour sa part que le fonds de garantie n'a pas
vocation à intervenir pour indemniser les assurés contre la
faillite d'un géant de l'assurance. Les fonds propres des autres
entreprises n'y suffiraient pas et l'on risquerait d'entraîner des
défaillances en cascade. Il vous proposera en conséquence de
rétablir la disposition qui figurait dans le texte initial.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article ainsi amendé.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE
49
Rapport sur les modalités de constitution de
systèmes de garantie obligatoires pour les mutuelles du code de la
mutualité et les institutions de prévoyance
Le
présent projet de loi limite le champ d'application du fonds de garantie
des assurés aux seules entreprises d'assurance soumises au code des
assurances, à l'exception donc des sociétés mutuelles
dites de " 1945 " et des institutions de prévoyance. Rien ne
justifie une telle exclusion même si les mutuelles de " 1945 "
ne sont pas encore soumises aux directives communautaires. Il n'apparaît
pas opportun de laisser les sociétaires et clients de ces organismes
sans garantie contre leur éventuelle défaillance.
Le présent article additionnel propose donc de donner un délai de
six mois au gouvernement pour rédiger un rapport examinant les
modalités de constitution de systèmes de garantie obligatoires
propres aux mutuelles du code de la mutualité et aux institutions de
prévoyance.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article additionnel dans la rédaction
qu'elle vous soumet.