TITRE II :
DISPOSITIONS RELATIVES À LA GARANTIE DES
DÉPOSANTS, DES ASSURÉS ET DES INVESTISSEURS
CHAPITRE PREMIER :
GARANTIE DES
DÉPOSANTS
ARTICLE 47
Fonds de garantie des
dépôts
Commentaire : Le présent article prévoit
d'instituer un nouveau dispositif de garantie des dépôts, sous la
forme d'un fonds de garantie unique (couvrant l'ensemble des
établissements de crédit quelque soit leur statut juridique),
alimenté par des cotisations
ex ante
ajustées au risque.
I. LA SITUATION ACTUELLE
La directive n° 94/19/CE du 30 mai 1994
prévoit que
"
chaque Etat membre veille à l'instauration et à la
reconnaissance officielle sur son territoire d'un ou plusieurs systèmes
de garantie des dépôts
"
106(
*
)
.
Cette directive a été transposée en France dès le 8
août 1994 au niveau législatif (article 10 de la
loi n°
94-679
portant diverses dispositions d'ordre économique et financier
créant un article 52-1 de la loi bancaire) et en 1995 au niveau
réglementaire
107(
*
)
.
ð
En France, il n'y a pas eu de création d'un fonds de garantie
obligatoire et couvrant l'ensemble du système bancaire.
En effet, le premier alinéa de cet
article 52-1
de la loi n°
84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au
contrôle des établissements de crédit dispose que
"
tout établissement de crédit agréé en
France adhère à un système de garantie
destiné à indemniser les déposants en cas
d'indisponibilité de leurs dépôts ou autres fonds
remboursables
". Il existe aujourd'hui en France trois systèmes
de garantie.
En outre, cet article organise, en conformité avec le texte de la
directive, une
reconnaissance de systèmes
équivalents
108(
*
)
en
disposant que "
les établissements affiliés à l'un
des organes centraux mentionnés à l'article 20 sont
réputés satisfaire
à l'obligation de garantie dans les
conditions prévues au troisième alinéa du présent
article
", en vertu de l'obligation légale qui leur est faite
à
l'article 21
de la même loi de "
garantir la
liquidité et la solvabilité de chacun de (leurs)
établissements (affiliés) comme de l'ensemble du
réseau
". Il existe aujourd'hui en France six systèmes
reconnus équivalents.
II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT
Le présent article regroupe quatorze articles : le premier d'entre
eux modifie l'actuel article 52-1 de la loi bancaire et il est
inséré treize autres articles à sa suite.
Ces nouveaux articles instaurent un système de garantie des
dépôts
obligatoire
,
universel
, financé par
des
cotisations appelées
ex ante
et ajustées au
risque
, et
géré par une personne morale de droit
privé
: le fonds de garantie des dépôts.
L'ARTICLE 52-1
1. Un système unique et universel
Cet article institue un fonds de garantie des dépôts,
système unique de dépôts auquel tous les
" établissements de crédit agréés en
France " sont tenus d'adhérer, quelque soit leur statut
juridique
.
C'est donc la fin de la pluralité des systèmes de garantie et
surtout de la reconnaissance de systèmes dits équivalents au
profit des réseaux mutualistes ou coopératifs. Le présent
projet de loi instaure ce qu'il est convenu d'appeler une "
maison
bancaire commune
", réunissant les banques commerciales et les
réseaux mutualistes et coopératifs. Il est incontestable que les
restructurations actuelles du système bancaire français, avec
notamment le rachat de banques commerciales par de grands réseaux
mutualistes, ouvre la voie à une réglementation plus
homogène du secteur bancaire dans son ensemble.
Ce nouveau système unique conserve le même objet que l'actuel
article 52-1 de la loi bancaire : " indemniser les déposants
en cas d'indisponibilité de leurs dépôts et autres fonds
remboursables
109(
*
)
".
2. Une personne morale
sui generis
Le premier alinéa
de cet article indique en outre que ce fonds est
une "
personne morale de droit privé
". Il ne
relève donc d'aucune catégorie préexistante. Selon la
Direction du Trésor, interrogée par votre rapporteur, ce
caractère
sui generis
s'est imposé en raison de
l'inadéquation des formes juridiques existantes à prendre en
compte toutes les caractéristiques propres à un tel
système de garantie.
En effet, ce fonds doit répondre à plusieurs impératifs
particuliers :
1- le rôle des membres doit être proportionnel à leur
contribution,
2- le système de garantie ne doit pas pouvoir s'opposer à
l'entrée d'un nouvel adhérent, ni prononcer l'exclusion d'un
membre (le système n'a pas de compétence disciplinaire de place),
3- la responsabilité des membres du système ne doit pas pouvoir
être engagée au titre de leur participation au système.
Or, les catégories juridiques existantes ne permettent pas de prendre en
compte ces impératifs :
a-
l'établissement public
n'est pas adapté pour des
adhérents qui sont exclusivement des sociétés
commerciales ; en outre la structure doit bénéficier d'une
réelle autonomie à l'égard des pouvoirs publics ;
b- l'association
ne permet pas de déroger à la
règle de l'égalité entre les membres ;
c- le groupement d'intérêt économique
(GIE) ne peut
pas accumuler de réserves et les membres du groupement sont tenus
indéfiniment et solidairement de ses dettes sur leur patrimoine
propre ;
d- la société en nom collectif
prévoit
également que ses membres sont tenus indéfiniment et
solidairement de ses dettes sur leur patrimoine propre ;
e- la société anonyme
ne convient pas non plus car il
faudrait prévoir l'incessibilité des parts, organiser par voie
réglementaire la répartition initiale et ultérieure du
capital, prévoir des augmentations (des réductions) de capital
à chaque fois qu'un établissement de crédit obtient un (se
voit retirer son) agrément ;
f- enfin,
la société à responsabilité
limitée
et
la société par actions
simplifiée
ne peuvent pas non plus être retenues sauf à
prévoir des dérogations qui dénatureraient le droit commun
des sociétés commerciales.
3. Les exclusions
Le deuxième alinéa
de cet article établit une
liste
des exclusions obligatoires
; il s'agit d'exclusions traditionnelles,
autorisées par la directive de 1994 précitée.
Ne peuvent bénéficier de l'indemnisation, les dépôts
et autres fonds des établissements de crédit
eux-mêmes, des entreprises d'assurance, des organismes de placement
collectif, des organismes de retraite, des entreprises d'investissement et des
institutions financières non soumises à la loi bancaire : le
Trésor public, la Banque de France, les services financiers de La Poste,
l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM),
l'institut d'émission d'outre-mer (IEOM) et la caisse des
dépôts et consignations
110(
*
)
.
Ne sont pas non plus indemnisés les " fonds reçus ou
laissés en compte par les associés en nom ou les commanditaires
d'une société de personnes, les associés ou actionnaires
détenant au moins 5 % du capital social, les administrateurs, les
membres du directoire et du conseil de surveillance ou les gérants ainsi
que les fonds provenant de prêts participatifs "
111(
*
)
.
En outre, un
règlement du CRBF
pourra prévoir d'autres
exclusions, facultatives,
en raison :
a- soit des informations sur la situation de l'entreprise ou des avantages
particuliers dont a pu bénéficier le déposant
concerné,
b- soit de la nature spécifique de certains fonds ou
dépôts,
c- soit de l'origine illicite des fonds concernés.
L'ARTICLE 52-2
L'article 52-2 est relatif au
fonctionnement du fonds
. Deux
modalités sont prévues, un fonctionnement à titre curatif
classique et un fonctionnement à titre préventif qui constitue
une nouveauté.
1. Le fonctionnement à titre préventif
A titre préventif, le fonds de garantie pourra intervenir auprès
d'un établissement de crédit "
dont la situation laisse
craindre à terme une indisponibilité des dépôts ou
autres fonds remboursables, compte tenu du soutien dont il peut par ailleurs
bénéficier
112(
*
)
". En toute logique, cette
possibilité devrait être utilisée si le coût de
l'intervention préventive est jugé inférieur à
celui de la liquidation de l'établissement de crédit.
Cette intervention est conditionnée par une
proposition de la
Commission bancaire
. Toutefois, dans ce cas, le fonds de garantie est
libre d'accepter ou de refuser d'intervenir
. En outre, il
définit, après avis de la Commission bancaire - il y aura donc
vraisemblablement concertation entre eux - les
conditions de son
intervention
. A titre d'exemple, le texte prévoit qu'il peut
subordonner celle-ci à la "
cession totale ou partielle de
l'établissement de crédit ou à l'extinction de son
activité, notamment par la cession de son fonds de commerce
".
Ces conditions sont nécessaires afin, comme l'écrit M. Dominique
Baert dans son rapport sur ce présent projet de loi
113(
*
)
,
" d'éviter qu'un
établissement de crédit puisse continuer à exercer son
activité et à concurrencer les autres établissements alors
qu'il aura été " renfloué " grâce à
la solidarité de place ".
Cette action préventive constitue bien
une innovation
puisqu'aujourd'hui la Commission bancaire n'a pas les moyens financiers ni
légaux d'intervenir en amont d'un sinistre bancaire. L'Association
française des banques (AFB) avait bien effectué une intervention
préventive lors des difficultés de la banque Finindus, mais sans
base juridique solide.
L'intervention préventive pose également la question de la
liberté des
dirigeants de l'établissement de crédit
concerné d'accepter ou de refuser l'action du fonds de garantie. Il
apparaît que de nombreuses dispositions du présent projet de loi
(en particulier, le nouveau pouvoir de recommandation de la Commission
bancaire, la possibilité de limitation de la distribution des
dividendes) permettront en pratique, dans la plupart des cas, de contraindre
les dirigeants à accepter cette intervention.
Dans le cadre d'une telle intervention, le fonds de garantie peut se porter
acquéreur des actions ou, avec l'accord de l'organe central
concerné, des parts sociales d'un établissement de crédit.
Cette phase doit être entourée d'une certaine discrétion,
afin de ne pas effrayer les déposants et de ne pas précipiter la
cessation de paiements de l'établissement.
2. Le fonctionnement à titre curatif
Plus classiquement, le fonds interviendra à titre curatif
à la
demande de la Commission bancaire
dès que celle-ci aura
constaté que l'un des établissements adhérents au fonds
"
n'est plus en mesure de restituer, immédiatement ou à
terme rapproché, les fonds qu'il a reçus du public dans les
conditions législatives, réglementaires ou contractuelles
applicables à leur restitution
".
Dans ce cas de figure,
le fonds n'aura pas la possibilité de refuser
d'intervenir
ni de poser des conditions à son intervention.
3. Dispositions communes à ces interventions
Lorsque l'organe central d'un réseau mutualiste ou coopératif le
demande à la Commission bancaire, le fonds de garantie peut prendre en
charge
une partie du coût des mesures destinées à
garantir la solvabilité d'un établissement de crédit
affilié à cet organe central
114(
*
)
. En vertu de l'article 21 de la
loi bancaire qui fait obligation à l'organe central de garantir la
solvabilité et la liquidité des établissements qui lui
sont affiliés, celui-ci conserve la responsabilité juridique de
l'intervention et aucune intervention ne pourra se faire sans son accord.
ð Il convient de remarquer que lors d'une intervention préventive,
tous les clients de l'établissement auquel est apporté un soutien
financier en bénéficient (qu'ils soient déposants ou
non) ; alors qu'à titre curatif, l'intervention du fonds ne se fait
qu'en faveur des déposants remplissant les conditions
législatives et réglementaires prévues. Il y a donc
une
différence de nature entre les deux types d'intervention
:
a-
l'intervention à titre préventif
constitue un
soutien financier
à l'établissement de crédit, dont
bénéficient
tous ses clients
;
b- alors que
l'intervention à titre curatif
se limite à
une indemnisation des déposants.
A l'occasion de ces interventions, le fonds sera amené à prendre
un certain nombre de
décisions
115(
*
)
. Afin de soumettre celles-ci au
même juge que les décisions de la Commission bancaire sur une
même affaire, il est prévu de les soumettre, en cas de recours de
pleine juridiction, au
juge administratif
116(
*
)
. Il faut toutefois se rendre
compte que soumettre ces litiges au juge administratif c'est aussi, en
l'état actuel des choses, leur imposer
de longs délais de
jugement
. Les autres décisions du fonds relèveront de la
compétence du juge judiciaire.
L'ARTICLE 52-3
Conformément à la directive européenne
117(
*
)
, le fonds de garantie se voit
reconnaître un
droit de subrogation
"
dans les droits des
bénéficiaires de son intervention à concurrence des sommes
qu'il a versées
". Il y a donc rachat des créances des
déposants indemnisés par le fonds de garantie qui devient
créancier à leur place dans la procédure de liquidation
ouverte à l'encontre de l'établissement de crédit
défaillant.
L'ARTICLE 52-4
Dans le même esprit, "
le fonds de garantie peut engager toute
action en responsabilité
118(
*
)
à l'encontre des dirigeants
de droit ou de fait des établissements pour lesquels il intervient aux
fins d'obtenir le remboursement de tout ou partie des sommes versées par
lui
".
L'ARTICLE 52-5
L'article 52-5 est relatif au
financement du fonds de garantie
.
Le premier alinéa de cet article prévoit que ce sont
les
établissements adhérents au fonds
qui lui procurent
l'intégralité de ses ressources financières, dans des
conditions fixées par un règlement du Comité de la
réglementation bancaire et financière (CRBF) prévu
à l'article 52-14 (
cf. infra
).
Ce article prévoit
trois formes de financement
:
1-
les certificats d'association ;
2- les cotisations ;
3- l'emprunt.
Il convient d'ajouter à cette liste
les pénalités de
retard
prévues à l'article 52-6 (
cf. infra
).
ð Au total, il est prévu que ce fonds atteigne une
dizaine de
milliards de francs
119(
*
)
en
régime de croisière
(trois ou quatre années
après sa création). A ce niveau, il serait plafonné :
il y aurait une diminution de l'appel des cotisations en numéraire,
voire l'arrêt de cet appel, et la rémunération des
certificats d'association pourrait être augmentée.
1. Les certificats d'association
Il s'agit de
titres de participation
particuliers achetés,
obligatoirement, par les établissements de crédit contributeurs
lors de leur adhésion et qui constitueraient une
dotation initiale de
ce fonds
(voire une source de financement supplémentaire
ultérieurement en cas de nécessité). Toutefois, le
débours n'interviendrait pas au moment de la souscription mais lors
de l'appel
: ainsi les fonds propres des établissements de
crédit demeureraient inchangés jusqu'à ce que le fonds ait
besoin d'appeler les certificats.
Ces certificats sont
rémunérés
sauf lorsque les
pertes subies par le fonds ne peuvent être couvertes par les cotisations
déjà appelées. Dans ce cas également, leur valeur
nominale est réduite à due proportion dans les bilans des
établissements
120(
*
)
.
Ces titres ne sont pas remboursables sauf en cas de retrait d'agrément
par le CECEI. Enfin, ils ne sont pas éligibles au crédit
d'impôt sur la contribution des institutions financières
(CIF)
121(
*
)
.
ð Il est prévu que ces certificats constituent environ
un tiers
des ressources
du fonds de garantie.
2. Les cotisations
L'article 52-5 prévoit que les cotisations dues par les
établissements de crédit affiliés à un organe
central sont directement versées au fonds de garantie par l'organe
central ; les autres dispositions relatives aux cotisations apparaissent
à l'article 52-14 (
cf. infra
).
ð Il est prévu deux types de cotisations qui devraient
représenter chacune
un tiers des ressources
du fonds de
garantie :
1- des
versements en numéraire
au fonds de garantie
bénéficiant d'un crédit d'impôt de CIF à
hauteur de 25 % (cf. article 52 du présent projet de loi) ;
2- des "
dépôts de garantie
" qui demeureraient,
tant qu'ils ne seraient pas appelés, la propriété de
l'établissement de crédit à son bilan ; contrairement
aux versements en numéraire, ce dépôt ne sera pas
éligible au crédit d'impôt sur la CIF.
3. L'emprunt
Il est prévu que le fonds de garantie peut emprunter auprès de
ses adhérents
122(
*
)
.
L'ARTICLE 52-6
Cet article prévoit que "
tout membre qui ne verse pas au fonds
de garantie sa cotisation appelée est passible
" des sanctions
de la Commission bancaire
123(
*
)
et "
de pénalités de retard versées directement au
fonds de garantie selon des modalités définies par le
règlement intérieur de celui-ci
". Ces
pénalités de retard constituent une quatrième ressource du
fonds.
L'ARTICLE 52-7
Cet article prévoit que
le fonds est géré par un
directoire agissant sous le contrôle d'un conseil de surveillance
.
Les membres du directoire et du conseil de surveillance doivent remplir les
conditions d'honorabilité requises pour les membres des conseils
d'administration ou de surveillance, les dirigeants et les administrateurs des
établissements de crédit
124(
*
)
.
L'ARTICLE 52-8
L'article 52-8 est relatif à
la mission et à la composition du
conseil de surveillance.
1. Les missions du conseil de surveillance
Le conseil de surveillance du fonds de garantie des dépôts a
plusieurs missions :
1- il " exerce le
contrôle permanent de la gestion
du
fonds "
125(
*
)
;
2- il élabore le
règlement intérieur
du fonds et
les règles d'emploi des ressources du fonds, qui sont homologués
par arrêté du ministre chargé de l'économie,
après approbation par le CRBF ;
3- il
approuve les comptes
et nomme les commissaires aux comptes ;
un exemplaire de ces comptes approuvés est remis, à la fin de
chaque exercice, au ministre chargé de l'économie.
Ce même article prévoit que le fonds est
soumis au
contrôle de l'Inspection générale des finances
. En
principe, l'Inspection générale des finances n'est pas
compétente à l'égard des organismes qui ne
bénéficient pas directement de concours financiers de
l'Etat ; la présente dérogation à ce principe
s'explique par le souhait des pouvoirs publics de s'assurer que la situation
financière du fonds ne le place pas en situation de ne pas pouvoir
indemniser les déposants.
2. La composition du conseil de surveillance
Le conseil de surveillance est composé de
douze membres,
représentant chacun un ou plusieurs des adhérents au fonds de
garantie
:
il s'agira donc de professionnels
. La composition
prévue est la suivante :
1- quatre membres représentant respectivement les quatre
établissements de crédit ou ensembles d'établissement de
crédit affiliés à un même organe central
126(
*
)
, qui sont les plus importants
contributeurs, membres de droit ;
2- deux représentants des établissements dotés d'un
organe central, qui ne sont pas membres de droit ;
3- six membres représentant les autres catégories
d'établissements de crédit, qui ne sont pas membres de droit.
Le président du conseil de surveillance est élu en son sein. Il
s'agira donc, comme tous les membres de ce conseil, d'un professionnel.
L'ARTICLE 52-9
Cet article propose que les décisions du conseil de surveillance soient
prises à la
majorité simple
, avec vote
prépondérant du président en cas de partage égal
des voix.
Toutefois il faut noter qu'il n'y a pas égalité des voix :
chaque membre du conseil dispose d'un
nombre de voix dépendant de sa
contribution financière
totale au fonds de garantie et de celles des
établissements qui l'ont désigné comme leur
représentant.
L'ARTICLE 52-10
Cet article traite de la
composition du directoire
du fonds de
garantie . Celui-ci est composé de
trois membres nommés
par le conseil de surveillance
127(
*
)
qui confère à l'un
d'eux la qualité de président.
Deux dispositions encadrent cette nomination :
1-
les membres du directoire ne peuvent pas être des professionnels
en activité
puisqu'il est expressément prévu qu'ils
"
ne peuvent exercer en même temps des fonctions au sein des
établissements ou sociétés membres du fonds de garantie,
ni recevoir de rétribution de l'un d'eux
" ;
2- le président du directoire
ne peut exercer ses fonctions
qu'après
agrément du ministre chargé de
l'économie
.
L'ARTICLE 52-11
Il est prévu que le ministre chargé de l'économie, le
gouverneur de la Banque de France, président de la Commission bancaire,
le président du Conseil des marchés financiers (CMF), ou leur
représentant,
peuvent à leur demande, être entendus
par le conseil de surveillance et le directoire.
Cette disposition permettra d'accroître les échanges
d'informations entre ces autorités afin qu'elles puissent aborder toute
question relative à la sécurité du système
bancaire.
L'ARTICLE 52-12
L'article 52-12 édicte les règles relatives au
secret
professionnel
. Y sont soumis
128(
*
)
les membres du directoire, ceux du
conseil de surveillance, ainsi que toute personne qui, par ses fonctions, a
accès aux documents et informations détenus par le fonds de
garantie.
Toutefois, ce secret n'est pas opposable à
l'autorité
judiciaire
agissant dans le cadre d'une procédure pénale, ni
aux
juridictions administratives ou civiles
statuant sur un recours
formé à l'encontre d'une décision du fonds de garantie des
dépôts, ni à
la Commission bancaire
.
L'ARTICLE 52-13
Les membres du directoire ont
accès à l'ensemble des
documents
comptables et financiers et aux rapports des commissaires aux
comptes de l'établissement pour lequel l'intervention du fonds est
sollicitée par la Commission bancaire. Ces documents sont normalement
couverts par le secret professionnel. Cet accès est nécessaire
pour déterminer les conditions encadrant l'intervention
préventive du fonds, ou encore établir les droits des
déposants.
L'ARTICLE 52-14
Cet article détaille le
contenu du règlement du CRBF
qui
devrait intervenir dans les deux mois suivant la date de publication de la loi.
Celui-ci ne devrait pas, pour de nombreuses dispositions, être
fondamentalement différent du règlement CRBF actuel, n°
95-01.
Ce règlement fixera
le plafond d'indemnisation
par
déposants (qui devrait se situer à
400.000 francs
comme
dans l'actuel système AFB, supérieur au montant minimum de 20.000
écus prévu par la directive européenne), les
modalités et
délais d'indemnisation
(
vraisemblablement
deux mois
, renouvelable trois fois sur décision de la Commission
bancaire à la demande du fonds de garantie) ainsi que les règles
relatives à l'information de la clientèle.
Il fixera en outre les caractéristiques des
certificats
d'association
, les conditions de leur rémunération et de leur
remboursement en cas de retrait de l'agrément.
Le
montant global des cotisations annuelles
, dont le niveau ne doit pas
"
mettre en péril la stabilité du système
bancaire
" sera également précisé dans ce
règlement, ainsi que les conditions dans
lesquelles une partie de ces
contributions peut ne pas être versée
au fonds de garantie
(vraisemblablement 50 % des cotisations, soit environ un tiers des ressources
du fonds).
Ces cotisations sont réparties "
sur la base
d'indicateurs de
la situation financière
de chacun des établissements de
crédit concernés, et notamment du
montant des
dépôts
ainsi que
des fonds propres
et des
cotisations déjà versées
". Les
établissements de crédit n'ayant que peu ou pas de
dépôts s'acquittent d'une cotisation minimale. Les nouveaux
entrants dans le système sont concernés par le critère des
"
cotisations déjà versées
".
La formule de répartition de ces cotisations qui sera adoptée
fera également partie de ce règlement du CRBF.
Enfin, il précisera les conditions et modalités de nomination des
membres du conseil de surveillance ainsi que la durée de leur mandat.
Le règlement ne pourra être modifié qu'après avis du
président du directoire du fonds de garantie des dépôts.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Outre des amendements rédactionnels et de précision,
l'Assemblée nationale a introduit les principales modifications
suivantes :
1- l'Assemblée nationale a tenu à ce que le fonds de garantie
informe la Commission bancaire
lorsqu'il décide d'engager une
action contre les dirigeants de la société pour laquelle il est
intervenu ;
2- dans le texte du Gouvernement (article 52-14), le CRBF devait s'assurer que
le niveau des cotisations dues par les adhérents du fonds
ne puisse
mettre en péril la stabilité du système
financier
: l'Assemblée nationale a supprimé cette
précision ;
3- l'Assemblée nationale a précisé que le montant des
cotisations doit refléter les "
risques objectifs que
l'adhérent fait courir au fonds
" ; par cette expression,
elle entend : le montant des fonds propres, le montant et la
qualité des engagements mais aussi la présence ou non d'un organe
central.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission est
globalement favorable
au dispositif proposé
dans le présent article. La mise en place d'un tel système de
garantie des dépôts - unique, obligatoire, financé par des
cotisations
ex ante
ajustées au risque - a été
préconisée depuis de nombreuses années, notamment par un
rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale de
1996
129(
*
)
puis un rapport de
la commission des finances du Sénat de 1996
130(
*
)
. Sa mise en place rend le dispositif
français plus lisible et plus compréhensible.
Toutefois, votre commission tient à souligner que
ce système
ne constitue pas une innovation majeure
, notamment pour les
déposants qui ne devraient pas connaître de modification notable
dans leurs conditions d'indemnisation.
A. SUR L'UTILITÉ DU FONDS
Doté d'une dizaine de milliards de francs, le fonds de garantie pourra
vraisemblablement faire face des
défaillances de banques
" moyennes "
. En effet, les réseaux mutualistes et les
grandes banques commerciales n'ont pas vocation à faire appel au fonds.
Il est créé essentiellement dans une
logique de mutualisation
des risques
pour prendre en charge la faillite des petites et moyennes
banques non adossées. Or, il faut remarquer que la tendance actuelle de
concentration dans le secteur financier,
réduit le nombre des petites
et moyennes banques
non adossées pour lesquelles ce fonds a
été créé.
En tout état de cause, le fonds sera trop faiblement doté pour
faire face à la faillite d'un grand réseau mutualiste ou d'une
grande banque commerciale
. Seul le budget de l'Etat sera suffisamment
solide pour faire face à une défaillance d'une telle ampleur. De
même, la mise en place de l'euro peut nous faire redouter des
risques
systémiques transfrontaliers accrus
, qui eux non plus, ne pourront
pas trouver de parade dans ce fonds de garantie, mais devront être
traités, en Europe, par concertation au sein du système
européen de banques centrales (SEBC).
B. SUR L'IDENTITÉ DU FONDS
Votre rapporteur général s'interroge sur la qualification
juridique de ce fonds, personne
sui generis
qui semble emprunter des
traits à plusieurs formes juridiques : l'association (avec les
" certificats d'association "), la société anonyme
(avec le conseil de surveillance), etc. sans appartenir à aucune de ces
catégories.
Certes, ce n'est pas la première fois qu'un fonds de garantie est
créé ainsi, sous la forme d'une personnalité morale
sui
generis
; on peut se référer au Fonds de garantie contre
les accidents de circulations et de chasse (dit
Fonds de garantie
automobile) prévu à l'article L. 421-2 du code des assurances est
également doté d'un statut propre.
Toutefois, la question du régime juridique mérite d'être
posée car sa réponse détermine en partie le régime
fiscal applicable.
La Direction de la législation fiscale du ministère des finances
semble privilégier une soumission à
l'impôt sur les
sociétés de droit commun
mais avec la possibilité de
passer des
provisions en franchise fiscale à concurrence des
cotisations versées
au fonds (en l'absence de sinistre, les
bénéfices sont alors égaux aux cotisations
augmentées des produits financiers) puisque le montant contenu dans le
fonds a pour unique objet la provision d'un risque. Ce schéma, qui
pourrait être mis en oeuvre par voie d'instruction,
permettrait au
fonds d'échapper
de facto
à l'impôt sur les
sociétés.
C. SUR LE FONCTIONNEMENT DU FONDS
Il est indispensable de rappeler dans la loi que
tout établissement
faisant l'objet d'une intervention à titre curatif du fonds de garantie,
doit disparaître
. C'était déjà l'une des
principales conclusions du rapport de la Commission des finances du
Sénat sur la situation et les perspectives du secteur
bancaire
131(
*
)
qui
préconisait le retrait des établissements qui
bénéficient des mécanismes de solidarité. C'est le
seule manière de conduire ses dirigeants à la " gestion
saine et prudente " consacrée par les directives
européennes. L'appel à la solidarité des concurrents doit
se traduire par la disparition de l'établissement, par
liquidation ou
cession
à un autre établissement.
De la même manière, mais sans inscrire ce principe de la sanction
automatique dans la loi, les
conditions posées
par le fonds lors
de ses interventions préventives
sont absolument
nécessaires
et devront remplir cet objectif primordial.
Sur ces deux points, la rédaction du présent article doit
être clarifiée.
D. SUR LE FINANCEMENT DU FONDS
Votre rapporteur estime que l
'interprétation
qui peut être
faite de la
notion de " risques objectifs
" comme nouveau
critère de répartition des cotisations, est dangereuse. En effet,
la capacité un réseau mutualiste à assumer la couverture
de ses propres risques réside dans sa bonne situation
financière : c'est à ce titre que ses cotisations seront
réduites et non pas en raison de la seule existence d'un organe central.
Il doit être clair que l'assiette principale des cotisations est
constituée du
montant des dépôts
,
pondéré par différents indicateurs de la situation
financière de l'établissement
, reflétant les
" risques objectifs " qu'il fait courir au fonds : le montant
des fonds propres, le montant et la qualité des engagements, le ratio
européen de solvabilité.
Il semble également nécessaire de préciser que les
établissements ne disposant que peu ou pas de dépôts pour
compte de tiers ne devront s'acquitter que d'une
cotisation minimale
équivalente à des frais de dossiers. Son montant ne devrait
vraisemblablement pas dépasser
quelques milliers de francs
.
Par ailleurs, il convient de remarquer que l'existence d'un fonds
préchargé, éventuellement inutilisé en cas
d'absence de sinistre bancaire, peut susciter la
tentation d'utiliser ces
fonds à l'occasion d'un sinistre
d'une autre nature pour lequel
l'intervention du fonds ne serait pas juridiquement prévue.
L'introduction dans le présent projet de loi d'un dispositif
supplémentaire de garantie des cautions, à l'occasion d'une
défaillance ponctuelle, renforce cette crainte.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi amendé.
ARTICLE 48
Consultation par la Commission
bancaire
Commentaire : Le présent article prévoit
que le
président du directoire du fonds de garantie des dépôts est
entendu par la Commission bancaire pour toute question concernant un
établissement pour lequel cette dernière envisage de solliciter
l'intervention du fonds de garantie.
I. LE PROJET DU GOUVERNEMENT
Il est proposé d'insérer un nouvel article 38-1 dans la loi
n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au
contrôle des établissements de crédit, prévoyant que
le président du directoire du fonds de garantie des
dépôts est entendu par la Commission bancaire
lorsque celle-ci
envisage une intervention du fonds, à titre préventif ou curatif,
au titre de l'article 52-2 de la loi bancaire.
Cette audition du président du directoire du fonds, à
l'initiative de la Commission bancaire, contribue à
renforcer leurs
liens et leur coopération
, notamment dans le cadre d'une
intervention à titre préventif (pour laquelle il est
nécessaire qu'il y ait accord entre eux sur le principe de
l'intervention).
Il faut remarquer que la nouvelle rédaction proposée par le
présent projet de loi pour l'article 45 de la loi n° 92-665 du 16
juillet 1992 prévoit des échanges d'informations, notamment entre
la Commission bancaire et le fonds de garantie des dépôts.
Toutefois, l'audition prévue au présent article est de nature
différente, elle n'est pas un simple échange d'informations :
a. le président du directoire du fonds se déplace devant la
Commission bancaire à la demande de cette dernière et à
l'occasion d'une possible mise en oeuvre du fonds ;
b. il y évoque le cas particulier d'un établissement de
crédit pour lequel il aura probablement à intervenir
financièrement.
II. LES MODIFICATIONS INTERVENUES À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a tout d'abord adopté un amendement
rédactionnel.
Puis, elle a adopté un amendement tendant, à
permettre au
président du directoire d'être entendu, à sa demande, par
la Commission bancaire
, et non pas seulement à l'initiative de cette
dernière.
Cette possibilité ouverte au président du directoire fonds de
garantie n'est encadrée par aucune condition de sujet
abordé
132(
*
)
ou de
circonstances. Elle s'apparente à un
droit d'alerte
reconnu au
président du directoire.
L'ensemble de ce dispositif est à rapprocher des deux derniers
alinéas, introduits par voie d'amendement à l'Assemblée
nationale, de l'article L. 423-4 du code des assurances tels que
proposés à l'article 49 du présent projet de loi :
"
La Commission de contrôle des assurances entend le
président du directoire du fonds de garantie pour toute question
concernant une entreprise d'assurance pour laquelle elle envisage de mettre en
oeuvre les dispositions du présent chapitre.
"
Le président du directoire est également entendu,
à sa demande, par la Commission de contrôle des
assurances
. "
III. POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES
Votre commission des finances estime utile que le
président du
conseil de surveillance
, de même que le président du
directoire, bénéficie de ces dispositions, en sa qualité
de délégué d'une autorité professionnelle.
Décision de la commission : votre commission vous
propose d'adopter cet article ainsi modifié.