TITRE II
DISPOSITIONS TRANSITOIRES
ARTICLE 21
Les modalités de
constitution du
capital social des caisses d'épargne et de prévoyance
Commentaire : Le présent article organise la
transformation des caisses d'épargne en sociétés
coopératives détenues par des groupements locaux d'épargne
(GLE). Il détermine les règles de constitution du capital initial
des caisses, les modalités de répartition de ce capital initial
entre chaque caisse par la CNCEP, le nombre de parts sociales à
acquérir par chaque groupement local d'épargne et le montage
financier permettant aux GLE de devenir sociétaires des caisses.
Conformément à la structure à deux étages
26(
*
)
proposée par le gouvernement,
les 34 caisses d'épargne seront des sociétés
coopératives à capital fixe ou variable, détenues par des
sociétés coopératives à capital variable, les
groupements locaux d'épargne, qui seront eux-mêmes détenus
par les sociétaires finaux. Les caisses d'épargne auront
toutefois la possibilité d'émettre des certificats
coopératifs d'investissement si les groupements locaux d'épargne
s'avéraient dans l'incapacité de souscrire la totalité de
leur capital.
Le capital initial des caisses d'épargne à mettre sur le
marché est déterminé par référence aux
dotations statutaires des caisses, ce qui représente un montant de 18,8
milliards de francs.
La mise en place d'une telle architecture, inspirée par celle du
Crédit agricole, nécessite une ingéniosité qui
force le respect. Le présent article prévoit ainsi un
système de transfert de fonds entre les caisses d'épargne et les
GLE permettant à ces derniers de souscrire d'emblée le capital
des caisses. On peut toutefois se demander quel besoin pousse le gouvernement
à se compliquer autant la tâche dès lors qu'il lui aurait
été possible de placer les parts sociales des caisses
d'épargne directement auprès des sociétaires, sans
l'intermédiation de ces GLE dont aucune des personnes qu'il a
auditionnées n'a réussi à convaincre votre rapporteur de
la nécessité.
Bien qu'elle répugne à mettre à bas une si belle
construction intellectuelle, votre commission vous proposera d'amender cet
article sur deux points principaux :
- pour mieux cerner la situation économique et financière des
caisses d'épargne, elle vous proposera, en premier lieu, de faire
procéder à une évaluation de leur capital initial par la
Commission des participations et des transferts ;
- elle vous proposera, en second lieu, de mettre directement les parts sociales
représentatives de ce capital sur le marché, sans passer par
l'échelon intercalaire des groupements locaux d'épargne.
I. DES MODALITÉS DE FIXATION DU CAPITAL INITIAL CONTESTABLES
A. STRUCTURE ET MONTANT GLOBAL DU CAPITAL INITIAL DES CAISSES
D'ÉPARGNE
Le paragraphe I du présent article est innovant à plusieurs
titres : non seulement, il décrit la structure du capital initial
des caisses d'épargne, mais il fixe le montant global du capital initial
que les caisses d'épargne devront mettre sur le marché.
1. Une structure de capital peu conforme au droit de la
coopération
Le premier alinéa précise que
" les caisses
d'épargne disposent au plus tard quatre mois à compter de la
publication de la présente loi d'un
capital initial composé de
parts sociales ainsi que
, en tant que de besoin,
de
certificats
coopératifs d'investissement
"
. Toutefois, jusqu'au
1
er
janvier 2004, les certificats coopératifs
d'investissement (CCI) ne peuvent représenter plus de 25 % du
capital, est-il précisé dans le deuxième alinéa.
Rappelons que les certificats coopératifs d'investissement
définis par l'article 19
quinquies
de la loi du 10 septembre 1947
portant statut de la coopération, sont des valeurs mobilières
sans droit de vote représentatives de droits pécuniaires
attachés à une part du capital. La faculté
d'émettre des CCI a été accordée aux
sociétés soumises au statut de la coopération par la loi
n° 87-416 du 17 juin 1987 sur l'épargne.
Le fait de prévoir que le capital des caisses d'épargne est
éventuellement composé de CCI vise à accorder une marge de
souplesse aux caisses d'épargne au cas où elles ne parviendraient
pas à placer la totalité de leur capital sous forme de parts
sociales. Elles auront ainsi la possibilité de faire appel au
marché financier en émettant des CCI, ce qui leur
éviterait d'être dans l'obligation de réduire leur capital
à proportion des parts sociales non souscrites (voir infra).
C'est ce qu'a déclaré le ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie, M. Dominique Strauss-Kahn, aux
députés qui mettaient en doute la capacité du
réseau des caisses d'épargne à placer un montant de 18,8
milliards de francs sous forme de parts sociales
27(
*
)
:
" Les 18 milliards de
francs se décomposent en 13 milliards à placer et 5 milliards qui
iront aux institutionnels. Le réseau ne doit donc en placer que
treize. "
Ces dispositions appellent toutefois plusieurs remarques :
- La composition du capital des caisses d'épargne entre dans le cadre du
droit commun de la coopération sans qu'il soit besoin d'en distinguer
les différentes composantes (parts sociales et CCI).
- En prévoyant de telles dispositions, le gouvernement s'affranchit
assez largement du droit commun de la coopération selon lequel :
- il revient à l'assemblée générale extraordinaire
des associés et non au législateur ou aux organes dirigeants des
caisses de décider l'émission de CCI (article 19
quinquies
de la loi du 10 septembre 1947 précitée) ;
- l'émission de CCI s'effectue en principe par augmentation du capital
atteint à la clôture de l'exercice précédant cette
émission (article 19
sexies
) ;
- les CCI ne peuvent représenter plus de la moitié du capital
atteint à la clôture de l'exercice précédent
(article 19
sexies)
et non 25 % comme le prévoit le
présent article ;
- enfin, le présent article écarte les dispositions de l'article
19
decies
de la loi précitée pour les CCI émis par
les caisses d'épargne jusqu'au 31 décembre 2003,
c'est-à-dire le droit de souscription préférentiel de
nouveaux CCI dont disposent les titulaires de CCI déjà
émis.
- Pour se conformer strictement à la lettre de telles dispositions, les
caisses d'épargne devraient
déterminer le montant des CCI
qu'elles souhaitent émettre dès le quatrième mois
qui
suivra la publication de la présente loi, alors que par construction, le
montant des CCI ne peut être connu qu'
ex post
, à l'issue de
la procédure de mutualisation.
En réalité, le fait de préciser que les CCI qui seront
éventuellement émis par les caisses d'épargne entrent dans
la composition du capital initial des caisses permet de fixer le montant
de ce capital dans une fourchette haute et d'accroître à due
concurrence la dotation du fonds de réserve pour les retraites
géré par le Fonds de solidarité vieillesse. Il est en
effet prévu que la totalité du produit de la souscription des
parts sociales et des CCI soit reversé à ce fonds (voir
commentaire de l'article 24).
Le gouvernement s'assure ainsi de toucher le produit des CCI
éventuellement émis par les caisses d'épargne
, ce
qu'il ne pourrait faire si ces derniers devaient être émis
conformément à la loi de 1947, c'est-à-dire par
augmentation du capital initial des caisses.
Ce faisant, il prive les caisses d'épargne du produit de la souscription
de ces CCI qui devrait en principe servir à accroître leurs fonds
propres pour financer leur développement.
2. Une détermination arbitraire du capital global des caisses
d'épargne
Le texte prévoit ensuite que
" le montant total du capital
initial des caisses d'épargne est égal à la somme de la
dotation statutaire de chacune des caisses
telle que cette somme figure
dans les comptes consolidés du groupe arrêtés au 31
décembre 1997 ".
Le rapport financier du groupe Caisses d'épargne pour l'année
1997 fait état d'une dotation statutaire totale de 22.824 millions de
francs pour le groupe des caisses d'épargne, dont il faut retrancher la
dotation des fonds centraux puisque le présent article fait
référence à la somme des dotations statutaires des seules
caisses. On parvient ainsi à un montant de
18.878 millions de
francs
.
La référence à un tel poste comptable pour
déterminer le montant du capital initial des caisses d'épargne
est doublement surprenante.
- En premier lieu, il faut observer que jamais la loi n'avait jusqu'à
présent établi de façon ferme et définitive le
montant du capital d'une entreprise que l'Etat souhaitait mettre sur le
marché. La loi de 1986 prévoit ainsi que les prix d'offre ou de
cession des entreprises que l'Etat souhaite privatiser sont
arrêtés par le ministre chargé de l'économie sur
avis de la commission des participations et des transferts.
- En second lieu,
les dotations statutaires des caisses d'épargne ne
reflètent en rien la situation financière de chaque caisse
.
Les caisses d'épargne ont en effet du constituer ces dotations en 1991
pour que leurs statuts soient conformes au statut-type annexé au
décret n° 91-1101 du 23 octobre 1991 relatif à
l'organisation des caisses d'épargne et de prévoyance. En vertu
de ce statut-type, chaque caisse d'épargne dispose d'une dotation
statutaire
" destinée à garantir sa solvabilité
à l'égard de ses déposants et plus
généralement des tiers, et à préserver
l'équilibre de sa situation financière "
. Chaque caisse
a donc dû requalifier ses fonds propres afin de les répartir entre
les dotations statutaires et les réserves. Certaines ont choisi
d'abonder fortement les réserves alors que d'autres ont fait le choix
inverse pour faire apparaître une dotation statutaire importante, voire
égale à la totalité des fonds propres (comme le prescrit
d'ailleurs la lettre des statuts-type précités). La structure des
fonds propres des caisses d'épargne se caractérise donc par une
forte hétérogénéité
entre caisses.
Enfin, les dotations statutaires ainsi constituées n'ont jamais
été réévaluées.
En réalité, le montant de 18,8 milliards de francs est le
fruit d'une négociation
entre le gouvernement, le CENCEP et la
Commission bancaire. Initialement, le gouvernement avait proposé de
fixer le montant du capital initial des caisses d'épargne à 23
milliards de francs (soit le montant total des dotations statutaires du groupe
tel qu'il figure dans les comptes consolidés au 31 décembre 1997).
La
Commission bancaire
a alors fait valoir, dans une lettre
adressée au ministre de l'économie et des finances datée
du 21 juillet 1998, que l'
objectif
de placement de ces 23 milliards de
francs auprès des sociétaires était
difficilement
réalisable
sauf à servir un intérêt
élevé sur les parts sociales. Le président de la
Commission bancaire s'inquiétait de la menace que constituait la
perspective de la dégradation du ratio de solvabilité du groupe
des caisses d'épargne à l'horizon 2002 (à un niveau proche
du minimum réglementaire de 8 %, voire légèrement
inférieur), dans l'hypothèse d'un placement des parts sociales
aux deux tiers de l'objectif (soit 15,3 milliards de francs). Il
préconisait enfin de préserver le montant des fonds propres du
groupe à un niveau correspondant à un ratio de solvabilité
de l'ordre de 12 % afin que le groupe dispose d'une assise suffisante pour
développer son activité et être en mesure de
réaliser des opérations de partenariat bancaire.
Le CENCEP a quant à lui évalué le
potentiel de
souscription des parts sociales dans une fourchette comprise entre 5,1 et 13,7
milliards de francs
selon les hypothèses retenues, sur la base d'un
sondage réalisé en juillet 1998 auprès de 1.000 clients
représentatifs de la Caisse d'épargne âgés de 18 ans
et plus.
Compte tenu de ces deux objections, le gouvernement a ramené ses
prétentions à 18,8 milliards de francs, ce qui se situe dans la
fourchette de 15 à 20 milliards de francs préconisée par
Raymond Douyère dans son rapport au premier ministre
28(
*
)
.
Dans son rapport sur le présent projet de loi, ce dernier observe que le
capital social des caisses d'épargne représenterait alors
39 % des fonds propres
(plus exactement 39,8 %), soit un
niveau qu'il estime comparable à celui des autres réseaux
bancaires à statut coopératif. Il a pris soin de soustraire du
total des fonds propres inscrit au bilan consolidé du Groupe Caisses
d'épargne au 31 décembre 1997 (soit 65,7 milliards de francs),
les cinq milliards de francs prélevés dans la loi de finances
pour 1999, ainsi qu'une somme représentative des provisions qu'il faudra
enregistrer pour faire face aux déficits prévisionnels de la
Caisse générale de retraites du personnel des caisses
d'épargne (CGRPCE) à partir de 2017 (soit un montant estimatif de
15 milliards de francs, dont 1,7 milliard a été passé en
1997), ce qui ramène le montant des fonds propres à 47,38
milliards de francs.
Le tableau ci-après montre pourtant que les caisses d'épargne
seront confrontées à une
contrainte de
rémunération du capital
en pourcentage des fonds propres
plus forte que la plupart de leurs concurrents mutualistes
, à
l'exception du Crédit mutuel.
Avec 18,8 milliards de francs de capital social, le groupe caisses
d'épargne aurait à rémunérer près de
40 % de ses fonds propres alors que le capital social du Crédit
agricole ne représente que 20 % de ses fonds propres. Le CENCEP a
chiffré l'effort relatif supplémentaire du groupe à 375
millions de francs par an par rapport à son concurrent.
Un tel effort conduirait à amputer la croissance de leurs fonds propres
d'au moins 40 %, selon le CENCEP. Le groupe qui voyait ses fonds propres
augmenter de manière comparable à ses concurrents (soit environ
5,5 % par an) devrait voir cette progression ramenée à
3 % en moyenne.
M. Raymond Douyère lui-même faisait valoir que dans
l'hypothèse où le capital social à rémunérer
à 4 % s'élèverait à 15 milliards de francs,
les caisses d'épargne seraient amenées à verser 600
millions de francs à leurs sociétaires ce qui représente
plus de 30 % du très faible résultat net de 1997.
En outre, ces simulations ne prennent pas en compte la fraction de leur
résultat que les caisses d'épargne devront consacrer au
financement de projets d'intérêt général en
application de l'article 6 du présent projet de loi. Rappelons que les
députés ont souhaité que cette fraction soit au minimum
égale au tiers du résultat distribuable après mise en
réserves. Ils ont ainsi inversé l'ordre des priorités que
le texte initial avait institué en faisant passer le " dividende
social " avant la rémunération des sociétaires.
Selon le CENCEP, le versement supplémentaire que devront consentir les
caisses d'épargne pour satisfaire leur obligation de financement de
projets d'intérêt général conduira à doubler
de nouveau leur effort financier par rapport à celui de leurs
concurrents. Ainsi, les caisses d'épargne devront d'abord consacrer un
tiers de leur résultat distribuable après mise en réserve
au financement de l'intérêt général, puis consacrer
le double, en valeur relative, de la somme versée par le Crédit
agricole, à la rémunération de leurs coopérateurs.
Si le reliquat du résultat distribuable après versement du
dividende social était insuffisant pour rémunérer les
associés, alors les caisses devraient puiser dans leurs réserves,
comme les y autorise l'article 17 de la loi du 10 septembre 1947 selon lequel
" les statuts peuvent prévoir qu'en cas d'insuffisance des
résultats d'un exercice, les sommes nécessaires pour parfaire
l'intérêt statutaire afférent à cet exercice seront
prélevées, soit sur les réserves, soit sur les
résultats des exercices suivants, sans toutefois aller au delà du
quatrième. "
Les simulations effectuées par le CENCEP, avant même que
l'Assemblée nationale ne procède à l'inversion des
priorités évoquée ci-dessus, montraient qu'au terme de la
réforme,
un certain nombre de caisses d'épargne ne pourront
pas rémunérer leur capital à un niveau de marché
sans puiser dans leurs réserves
, par dérogation au principe
de l'impartageabilité des réserves. Il est probable que
l'accroissement de la contrainte de financement de l'intérêt
général conduise à accroître le pourcentage des
caisses mises ainsi en difficulté.
Loin de renforcer les caisses d'épargne face à la concurrence,
le présent projet de loi tendrait ainsi à les fragiliser.
B. LA DÉTERMINATION DU CAPITAL INITIAL DE CHAQUE CAISSE
D'ÉPARGNE
1. Une " redistribution " entre caisses du capital initial global
selon des critères plus représentatifs de leur situation
financière
Comme il a été indiqué plus haut, la dotation statutaire
de chaque caisses d'épargne, établie en 1991, ne reflète
pas nécessairement leur vitalité économique, ni leur
capacité à placer ce montant sous forme de parts sociales. Le
paragraphe II du présent article prévoit en conséquence
une " redistribution " des dotations entre caisses, en fonction de
données comptables plus représentatives. C'est à la Caisse
nationale des caisses d'épargne qu'il reviendrait de fixer le capital
initial de chaque caisse en tenant compte, non seulement de sa dotation
statutaire, mais aussi du montant de ses fonds propres et de son total de bilan
au 31 décembre 1997. Ce dernier élément donne une image
plus fidèle de la réalité économique des caisses
d'épargne en étant représentatif des dépôts
des clients et des encours de prêts.
La CNCEP disposerait pour cela de deux mois après la publication de la
présente loi et devrait recueillir l'avis du conseil d'orientation et de
surveillance de chaque caisse.
A défaut, le capital de chaque caisse serait fixé par
décret en Conseil d'Etat dans les quatre mois de la publication de la
loi.
2. La fixation du montant nominal des parts sociales de chaque caisse
Une fois le capital initial de chaque caisse arrêté par la CNCEP,
le paragraphe III du présent article prévoit que le montant
nominal des parts sociales représentatives de ce capital est fixé
par le conseil d'orientation et de surveillance de chaque caisse, dans les
limites définies par la CNCEP.
Il est ainsi admis que la valeur de souscription des parts sociales offertes
aux groupements locaux d'épargne pourra varier d'une caisse à
l'autre, dans les limites fixées par la CNCEP.
Logiquement, le montant nominal des parts sociales d'une caisse devrait
être égal au rapport entre son capital initial et le nombre de
parts sociales qu'elle souhaite émettre. Tel serait le cas si le capital
initial n'était composé que de parts sociales. Mais dès
lors que le capital initial inclut des certificats coopératifs
d'investissement, il convient d'exclure du numérateur la part du capital
qui sera émise sous forme de CCI. Ainsi,
il est demandé aux
caisses d'épargne de prévoir le montant des CCI qu'elles
émettront
dans les quatre mois qui suivront la publication de la
loi, ce qui semble totalement irréaliste.
En effet, les caisses d'épargne ne seront vraisemblablement pas en
mesure d'émettre des CCI avant d'avoir pu dégager des
capacités bénéficiaires susceptibles d'attirer des
investisseurs institutionnels, c'est-à-dire avant deux ou trois ans.
II. UNE PROCÉDURE DE MUTUALISATION INDIRECTE ET COMPLEXE
Le projet de loi prévoit ensuite une procédure très
complexe d'acquisition des parts sociales des caisses d'épargne, non pas
directement par les sociétaires comme le préconisait
M. Raymond Douyère
29(
*
)
, mais par les groupements locaux
d'épargne (GLE), à l'aide de prêts que leur octroieraient
les caisses d'épargne auxquelles ils sont affiliés.
En procédant ainsi, le gouvernement souhaite que les caisses
d'épargne disposent immédiatement de propriétaires
identifiés. Un tel choix a toutefois été
opéré aux dépens de la simplicité et de la
lisibilité pour les sociétaires.
A. LA SOUSCRIPTION DES PARTS SOCIALES DES CAISSES D'ÉPARGNE PAR
LES GLE
Les modalités de la création et de la répartition des GLE
sont prévues à l'article 25 du présent projet de loi.
Chaque caisse disposera ainsi de deux mois après la publication de la
loi pour établir un plan de création de GLE pour sa
circonscription territoriale, comprenant notamment le nombre de GLE qu'elle
souhaite créer ainsi que le nom des deux sociétaires fondateurs
et de l'administrateur provisoire de chacun de ces GLE. Dès
l'approbation de ce plan par la CNCEP, les GLE seront réputés
constitués et dotés de la personnalité morale. Ils devront
admettre au moins 500 personnes physiques ou 10 personnes morales.
En vertu du paragraphe IV du présent article, les parts sociales de
chaque caisse seraient d'abord réparties entre les GLE en fonction
notamment de l'importance de la population comprise dans le territoire qu'ils
couvrent, puis souscrites par ces GLE à l'aide d'un prêt sans
intérêt octroyé par la caisse d'un montant égal
à la valeur totale des parts qu'ils sont censés souscrire. Ce
prêt serait amorti au fur et à mesure de la vente des parts
sociales représentatives du capital des GLE aux sociétaires
finaux.
Le texte ne précise toutefois pas le montant du capital de chaque GLE,
ni la valeur nominale des parts sociales représentatives de ce capital.
Il est simplement indiqué à l'article 25 que, à l'occasion
de l'établissement des plans de création des GLE par les caisses
d'épargne, la valeur nominale des parts sociales de chaque GLE est
précisée et acceptée par les deux sociétaires
fondateurs. Au demeurant, il est plutôt logique que le montant du capital
des GLE ne figure pas dans la loi puisque ce capital est censé
être variable pour permettre l'entrée et la sortie des
sociétaires.
C'est donc la souscription progressive par les sociétaires des parts
sociales des GLE qui donne à ces derniers la capacité de
rembourser l'endettement qu'ils ont contracté pour acquérir les
parts du capital social de la caisse d'épargne qui leur ont
été attribuées. Toutefois, une certaine incertitude
demeure dans la mesure où, en vertu de la loi portant statut de la
coopération, les parts sociales des coopératives ne doivent
être libérées que pour le quart de leur montant au moment
de leur souscription. Si les futurs sociétaires mettaient à
profit la totalité du délai dont ils disposent légalement
pour libérer leurs parts (c'est-à-dire cinq ans), les GLE
pourraient se trouver dans une position délicate pour rembourser aux
caisses régionales d'épargne les emprunts qu'il auront souscrits.
Pour permettre une certaine péréquation entre les plus dynamiques
des GLE et ceux qui auraient du mal à placer leurs parts sociales, le
texte autorise des transferts de parts sociales de caisses d'épargne
entre GLE sociétaires de la même caisse d'épargne,
moyennant le transfert pour un montant égal d'une fraction du prêt
octroyé par ladite caisse. Il s'agit de transferts et non de cessions de
parts : le GLE qui s'est porté acquéreur de parts sociales
d'une caisse détenues par un autre GLE accroît à due
concurrence le montant de sa dette auprès de la caisse. Il faudra donc
qu'il vende un montant plus important de parts sociales représentatives
de son propre capital.
Les députés ont par ailleurs adopté un amendement tendant
à préciser que jusqu'au 31 décembre 2003, les
collectivités territoriales sont autorisées à
détenir ensemble 10 % au maximum de la valeur totale des parts
sociales revenant à chaque GLE. Une telle disposition vise à
éviter que les collectivités locales soient tributaires du rythme
de souscription des parts sociales par les autres sociétaires pendant la
période de constitution du capital initial des GLE.
B. LE DÉNOUEMENT
Si, à l'issue d'un délai de quatre ans (la date
d'échéance est fixée au 31 décembre 2003), un GLE
n'est pas parvenu à placer dans le public un montant de parts sociales
suffisant pour amortir le prêt qu'il a contracté auprès de
la caisse d'épargne dont il est sociétaire, celle-ci est
censée lui racheter une fraction des parts sociales qu'il a acquises
auprès d'elle afin de lui permettre de solder son compte.
Le capital de la caisse d'épargne est ensuite réduit à
concurrence du montant des parts sociales rachetées aux GLE. On notera
que cette opération n'a aucune incidence sur le montant que les caisses
d'épargne sont censées verser au fonds de réserve pour les
retraites. Les phases de souscription des parts sociales et de reversement du
produit de cette souscription à l'Etat sont en effet totalement
déconnectées. En d'autres termes, l'Etat touchera 18,8 milliards
de francs au titre de la mutualisation des caisses d'épargne quel que
soit le résultat de cette mutualisation. La réduction
éventuelle du capital des caisses d'épargne s'apparentera donc
à une
ponction sur leurs fonds propres
.
Pour tenir compte du plafonnement de la participation des collectivités
territoriales dans le capital des GLE, les députés ont
prévu un dispositif de réajustement du montant des parts sociales
détenues par lesdites collectivités dans l'hypothèse
où les GLE ne seraient pas parvenus, à l'échéance
du 31 décembre 2003, à assurer grâce au placement de leurs
parts sociales, l'amortissement de la totalité du prêt gratuit qui
leur a été consenti par la caisse, et où ils seraient donc
amenés à réduire leur capital social.
Toutefois, les députés ont oublié de tenir compte de
l'amendement qu'ils avaient adopté à l'article 9 du
présent projet de loi tendant à porter de 10 à 20 %
la participation maximale des collectivités territoriales au capital des
GLE.
Comme il a été vu plus haut, la caisse d'épargne peut
à tout moment émettre des CCI dans la proportion de 25 % de
son capital, notamment si elle estime que les GLE qui lui sont affiliés
ne parviendront pas à souscrire la totalité de son capital. Le
texte du paragraphe VI prévoit l'annulation des CCI qui n'auraient pas
été souscrits au 31 décembre 2003. On notera que cette
disposition est
dérogatoire
de la loi du 10 septembre 1947
portant statut de la coopération qui ne mentionne pas la
possibilité d'annuler des CCI.
III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
A. POUR UNE ÉVALUATION OBJECTIVE DU CAPITAL INITIAL DES CAISSES
D'ÉPARGNE
Comme il l'a évoqué plus haut, votre rapporteur observe que la
procédure consistant à demander au législateur de fixer le
montant du capital des caisses d'épargne destiné à
être mis sur le marché est inédite. Jamais le montant du
capital d'une entreprise publique destinée à être
privatisée n'a encore figuré dans la loi.
Par ailleurs, la fixation du capital à 18,8 milliards de francs est le
résultat d'un marchandage entre les caisses d'épargne et le
Trésor, bien plus que d'une évaluation objective de la situation
économique et financière des caisses d'épargne et de leur
faculté à placer un tel montant sous forme de parts sociales.
Votre commission vous proposera en conséquence de renvoyer au
ministre chargé de l'économie la responsabilité de
déterminer le montant du capital initial des caisses d'épargne,
après avis de la commission des participations et des transferts
.
Le ratio " capital social sur fonds propres " des caisses
d'épargne ne pourra toutefois pas excéder la moyenne de ceux des
autres réseaux bancaires coopératifs
.
Selon que l'on choisisse la moyenne arithmétique de ce ratio ou la
moyenne pondérée, le capital initial des caisses d'épargne
pourrait ainsi osciller entre 13 et 15,5 milliards de francs.
Par ailleurs, votre commission vous proposera de supprimer la disposition
tendant à préciser que le capital initial des caisses
d'épargne est composé de parts sociales et de certificats
coopératifs d'investissement, dont on a vu qu'elle contrevenait aux
articles 19
quinquies
et 19
sexies
de la loi de 1947 qui
disposent que l'émission de CCI relève de la décision
souveraine des sociétaires réunis en assemblée
générale extraordinaire et s'effectue par augmentation du capital
atteint à la clôture de l'exercice précédant cette
émission.
Les caisses d'épargne conserveraient toutefois la faculté
d'émettre des CCI
, mais le produit de la souscription de ces
certificats ne viendrait pas abonder le fonds de réserve pour les
retraites. Les CCI seraient ainsi destinés à accroître le
capital de la caisse d'épargne émettrice, conformément
à leur objet.
Il est en effet indispensable de conserver aux caisses d'épargne le
droit d'émettre des CCI dans la mesure où ils constituent une
ressource abondante, rapidement mobilisable, même pour des montants
élevés et liquide. De plus, l'émission de CCI peut
être un aiguillon salutaire pour les caisses d'épargne dans la
mesure où elle les obligera à disposer d'une rentabilité
élevée de leurs fonds propres, compte tenu des règles
générales prévalant actuellement sur le marché
financier et de la décote frappant les titres de capital sans droit de
vote.
Il reste à résoudre la question suivante :
une
société coopérative à capital variable peut-elle
émettre des certificats coopératifs d'investissement ?
C'est en effet un des arguments avancés par le gouvernement à
l'appui de la création des GLE.
Observons d'emblée que la loi du 10 septembre 1947 ne l'interdit pas. Il
n'y a donc
pas d'obstacle législatif
. Le législateur
aurait au demeurant été bien mal avisé de réserver
la faculté d'émettre des CCI aux seules sociétés
coopératives à capital fixe dès lors que la
variabilité du capital constitue un des principes fondateurs de la
coopération.
Pour Raymond Douyère, co-rapporteur du présent projet de loi
à l'Assemblée nationale,
" le capital d'une
société coopérative peut augmenter ou diminuer à
tout moment du fait de l'arrivée de nouveaux sociétaires ou du
départ de certains sociétaires. Cette variabilité du
capital est consubstantielle à la conception d'une société
largement ouverte, susceptible d'accueillir tout un chacun. "
Toutefois, selon le député, une société
coopérative à capital variable se heurterait à une
difficulté technique
si elle émettait des CCI, du fait de
l'obligation de maintenir constante à tout moment la proportion des CCI
dans son capital. Cette obligation découle de l'article 19
undecies
de la loi de 1947 qui dispose :
" les titulaires
de CCI disposent d'un droit sur l'actif net dans la proportion du capital
qu'ils représentent "
. Si la proportion des CCI dans le capital
diminue du fait de l'émission de nouvelles parts sociales, alors le
droit sur l'actif net diminue à due proportion, ce qui aurait pour
conséquence une dégradation de la valeur du CCI. Pour maintenir
constante la proportion des CCI dans le capital et donc leur droit sur l'actif
net, toute émission de parts sociales devrait être assortie d'une
émission à due proportion de nouveaux CCI ou d'une
réévaluation de la valeur des CCI, ce qui est en pratique
ingérable selon Raymond Douyère
30(
*
)
.
Aussi, aucune société coopérative à capital
variable n'a-t-elle jusqu'à présent fait usage de la
faculté d'émettre des CCI, à l'exception du Crédit
agricole. Dix-huit Caisses régionales du Crédit agricole ont
ainsi émis de telles valeurs mobilières, pour un montant total de
l'ordre de 10 milliards de francs.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur auprès de la
direction du Trésor, les groupements locaux d'épargne
permettraient de gérer les fluctuations du nombre de sociétaires,
pour permettre aux caisses régionales de demeurer à capital fixe
si elles souhaitent émettre des CCI. La correspondance entre le capital
fixe de la caisse régionale et le capital variable des GLE qui lui sont
affiliés s'opérerait par la variation d'un compte courant
d'associé ouvert au nom du GLE auprès de la caisse
d'épargne. Tout accroissement du capital d'un GLE trouverait sa
contrepartie dans la variation positive du solde de son compte courant et
inversement. En fin d'exercice, la caisse d'épargne procéderait
à une augmentation (ou à une diminution) de son capital pour
solder les comptes courants.
Ainsi, la très complexe structure à deux étages
conçue par le gouvernement aurait pour seul but de rendre techniquement
possible l'émission par les caisses d'épargne qui le
souhaiteraient de certificats coopératifs d'investissement... Un tel
souci est certes louable, mais votre rapporteur observe qu'il conduit à
contrevenir à un des principes fondamentaux du statut de la
coopération en prévoyant la fixité du capital des caisses
d'épargne.
Si la loi est inapplicable en l'état, alors il faut la modifier. Comme
votre rapporteur l'a déjà observé, il n'était
certainement pas dans l'esprit du législateur en 1987 de réserver
la possibilité d'émettre des certificats coopératifs
d'investissement aux seules sociétés coopératives à
capital fixe
31(
*
)
.
Mais sans aller jusque là, il convient de noter que les
caisses
régionales du Crédit agricole qui émettent des CCI sont
toutes à capital variable
. Il ne semble donc pas y avoir d'obstacle
à ce que les caisses d'épargne émettent de telles valeurs
mobilières, sans qu'il y ait besoin de tordre l'esprit coopératif
en créant des groupements locaux d'épargne.
B. POUR UNE MUTUALISATION DIRECTE DES CAISSES D'ÉPARGNE
Comme il a eu l'occasion de l'indiquer à plusieurs reprises, votre
rapporteur n'est pas du tout convaincu de la nécessité de
créer des " groupements locaux d'épargne " entre les
caisses d'épargne et les sociétaires finaux. La fonction
d'animation du sociétariat au niveau local qu'ils sont censés
assurer peut tout aussi bien être assumée par une structure locale
qui ne serait pas constituée sous forme coopérative. Votre
commission a proposé à l'article 8 de remplacer les GLE par des
sous-ensembles de l'assemblée générale des
sociétaires dénommées " sections locales
d'épargne ".
Elle vous proposera de substituer à la procédure de
mutualisation indirecte prévue par le présent article un
processus plus simple et plus respectueux des sociétaires finaux.
Il s'agirait de permettre aux caisses d'épargne de procéder
elles-mêmes au placement des parts sociales constitutives de leur capital
dans le public, en les autorisant à porter ces parts pendant la
période transitoire. Naturellement, aucun droit de vote ne serait
attaché aux parts sociales non souscrites. Les sociétaires seront
ainsi directement détenteurs de parts sociales des caisses
d'épargne, et non de parts sociales de groupements locaux
d'épargne.
En outre, pour accroître l'attractivité des parts sociales, des
bons de souscription de certificats coopératifs d'investissement
pourront leur être attachés. Les coopérateurs
détenteurs de tels bons pourront les exercer lors de l'émission
de CCI par les caisses.
Enfin, pour éviter que les ratios prudentiels des caisses
d'épargne ne se dégradent, il convient de préciser que les
parts sociales non souscrites sont incluses dans leurs fonds propres.
C. POUR UN ALLONGEMENT DE LA DURÉE DE SOUSCRIPTION DES PARTS
SOCIALES
Votre commission vous proposera par ailleurs de doubler le délai dont
disposent les caisses d'épargne pour placer leurs parts. Le délai
de huit ans courrait à partir de la date de publication de la loi.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article ainsi modifié.
ARTICLE 22
La dévolution des fonds
centraux
Commentaire : Le présent article supprime le fonds
commun de réserve et de garantie (FCRG) et le fonds de solidarité
et de modernisation (FSM). Toutefois, pour ne pas créer de rupture
juridique, la Caisse nationale des caisses d'épargne reprend
intégralement à sa charge les garanties qui étaient
auparavant couvertes par ces fonds centraux. Enfin, les sommes inscrites au
bilan de ces deux fonds sont dévolues aux caisses d'épargne qui
sont censées en affecter une partie à une augmentation de capital
de la Caisse nationale.
Deux fonds constituent les fonds centraux des caisses d'épargne :
il s'agit du fonds commun de réserve de garantie (FCRG), dont les
réserves s'élevaient à 9.629 millions de francs au 31
décembre 1997, et du fonds de solidarité et de modernisation
(FSM) doté de 2.847 millions de francs.
Rappelons que ces deux fonds subiront une amputation de 5 milliards de francs
au 30 juin 1999, en application de l'article 52 de la loi de finances pour
1999, ce qui ramènera le montant de leurs réserves à 7.476
millions de francs.
Le FCRG a été créé en application de l'article 4 de
la loi du 1
er
juillet 1983 afin d'assurer la garantie des
déposants et des souscripteurs pour les fonds ne
bénéficiant pas de la garantie de l'Etat ou de celle de la Caisse
des dépôts et consignations.
Le FSM a, quant à lui, été créé pour
permettre au CENCEP de contribuer à des investissements du réseau
reconnus prioritaires à l'échelon national ou, le cas
échéant, venir en aide aux établissements en
difficulté, dans le cadre de sa mission d'organe central.
Les deux fonds ont été constitués en 1984 à partir
d'une dotation
32(
*
)
de 3
milliards de francs prélevée sur le fonds de réserve et de
garantie des caisses d'épargne (FRGCE) géré par la Caisse
des dépôts et alimenté par celle-ci au moyen des profits
réalisés sur les emplois des sommes collectées par le
livret A. 2 milliards de francs ont été affectés au
FCRG et 1 milliard de francs au FSM.
Par la suite, le FCRG a été alimenté par les revenus et
les amortissements de son propre portefeuille, par les commissions
perçues en représentation d'engagement de garantie, et, enfin,
par les cotisations versées par les membres du réseau. Ces
dernières sont fixées chaque année par le conseil de
surveillance du CENCEP qui peut, en outre, procéder en cours d'exercice
à des appels de fonds supplémentaires.
Toutefois, depuis 1991, la gestion des emplois du FCRG a permis de maintenir le
niveau de garantie jugé nécessaire par le Comité de la
réglementation bancaire et financière (CRBF) sans qu'il soit
nécessaire de faire appel aux cotisations des membres du réseau.
C'est pourquoi, depuis 1996, les caisses d'épargne ont été
invitées réglementairement par le CENCEP à affecter leurs
résultats au fonds pour risques bancaires
généraux
33(
*
)
(FRBG) plutôt qu'aux fonds centraux.
Quant au FSM, dont les modalités de financement sont similaires, il
continue à percevoir les cotisations des membres du réseau pour
un montant de l'ordre de 60 millions de francs par an.
Le présent article prévoit la suppression de ces fonds
à la date de création de la Caisse nationale des caisses
d'épargne, c'est-à-dire au plus tard un mois après la
publication de la présente loi.
Il distingue ensuite entre les obligations couvertes par ces fonds, qui seront
intégralement transférées à la Caisse nationale
(voir commentaire de l'article 12), et les sommes inscrites au bilan de ces
fonds (7,5 milliards de francs, déduction faite des 5 milliards de
francs reversés au budget de l'Etat), qui seront dévolues aux
caisses d'épargne. Celles-ci devront en affecter une partie à une
augmentation de capital de la CNCEP. Le solde pourra être
éventuellement reversé au fonds commun de garantie et de
solidarité que la Caisse nationale peut créer en vertu de
l'article 12 du présent projet de loi.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article sans modification.
ARTICLE 23
Les modalités de
souscription des
parts sociales par les salariés des caisses
Commentaire : Le présent article prévoit des
modalités préférentielles de souscription des parts
sociales des GLE pour les salariés du réseau des caisses
d'épargne.
De façon similaire à ce que prévoit la loi du 6 août
1986 relative aux modalités des privatisations pour les salariés
des entreprises faisant l'objet d'une privatisation, le présent article
prévoit que les caisses d'épargne peuvent accorder des conditions
préférentielles de souscription à leurs salariés.
La loi du 6 août 1986 précitée prévoit ainsi que les
demandes des salariés doivent être intégralement servies,
pour chaque opération, à concurrence de 10 % du montant de
celle-ci.
Par transposition, le présent article dispose que, jusqu'au
1
er
décembre 2003, le personnel des caisses d'épargne
pourra souscrire, dans des conditions préférentielles,
jusqu'à 10 % du capital social des GLE ou 3 % du capital
initial de la caisse d'épargne souscrit par le GLE.
Si les demandes des salariés excèdent ces montants, la CNCEP
fixera les conditions de leur réduction.
On notera que dans la mesure où, contrairement à ce qui se
produit en cas de cession d'une entreprise publique, le coût des
conditions préférentielles de souscription accordé aux
salariés devra être pris en charge par la caisse qui les octroie,
le présent article n'en fait pas une obligation, mais une
simple
faculté
laissée à l'appréciation de chaque
caisse.
Les conditions préférentielles consistent en des rabais et des
délais de paiement consentis par les caisses d'épargne, sans que
le rabais puisse excéder 20 % de la valeur des parts sociales
acquises et que les délais de paiement puissent excéder trois ans.
Les caisses peuvent également décider d'attribuer des parts
sociales gratuites, dans la limite d'une part sociale par part sociale de
même montant acquise par le salarié. En aucun cas, précise
le texte, la valeur des parts sociales ainsi attribuées ne peut
toutefois excéder la moitié du plafond mensuel de la
sécurité sociale.
Les mêmes avantages seront accordés aux salariés des autres
entreprises du réseau, des filiales et organismes communs.
Votre commission vous proposera d'étendre également ces
conditions de souscription préférentielles aux anciens
salariés du réseau pouvant justifier d'un contrat d'une
durée accomplie d'au moins cinq ans avec l'entreprise ou ses filiales et
organismes communs.
Par cohérence avec les amendements de suppression des GLE qu'elle vous
propose, votre commission vous proposera par ailleurs de supprimer la
référence aux GLE.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
le présent article ainsi amendé.
ARTICLE 24
Le fonds de mutualisation
Commentaire : Le présent article organise les
modalités de reversement du produit de la souscription du capital des
caisses d'épargne au fonds de réserve pour les retraites
géré par le Fonds de solidarité vieillesse.
Deux observations importantes doivent être faite à propos du
présent article. En premier lieu, le produit de la souscription du
capital des caisses d'épargne n'est pas destiné à abonder
un compte d'affectation spéciale, comme il est de tradition pour les
recettes de privatisation, mais un fonds de réserve pour les retraites
créé par la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999.
En second lieu, ce fonds de réserve touchera 18,8 milliards de francs,
quel que soit le résultat du placement de leurs parts sociales par les
caisses d'épargne. En clair, si les caisses d'épargne ne
parviennent pas à placer la totalité de ces 18,8 milliards de
francs de capital social dans le public, elles seront dans l'obligation de
puiser dans leurs réserves les ressources nécessaires pour
combler la différence.
Le versement effectif des 18,8 milliards de francs se fera selon un
système de vases communicants : dans une première
étape, les caisses d'épargne verseront à intervalles
réguliers le produit de la souscription de leur capital à un
fonds de mutualisation géré par la CNCEP, qui reversera à
son tour le produit de cette collecte au fonds de réserve pour les
retraites.
I. LA CRÉATION D'UN FONDS DE MUTUALISATION
A. UN DISPOSITIF INCITATIF
Le présent article prévoit que la Caisse nationale des caisses
d'épargne (CENCEP) gère dans ses livres un fonds de mutualisation
destiné à recevoir le produit de la souscription des parts
sociales des groupements locaux d'épargne et des certificats
coopératifs d'investissement.
Le produit de la souscription des parts sociales des GLE correspond à
l'amortissement de l'emprunt que ces derniers ont contracté
auprès des caisses d'épargne pour en devenir sociétaires.
Tous les six mois, les caisses d'épargne sont ainsi appelées
à verser à ce fonds un montant représentatif du
remboursement par les GLE de leur prêt et de la souscription des CCI
éventuellement émis, jusqu'au terme du délai de quatre ans
dont les GLE disposent pour placer les parts sociales représentatives de
leur capital. Les versements auraient lieu les 1
er
juin et
1
er
décembre de chaque année jusqu'en 2003.
Dans sa version initiale, le présent article précisait que le
versement devait atteindre le plus élevé des montants
suivants :
- le produit de la souscription des parts sociales des groupements locaux
d'épargne et des certificats coopératifs d'investissement ;
- le huitième du capital initial de chaque caisse.
Un tel dispositif visait à contraindre les caisses d'épargne
à procéder à la mutualisation d'au moins un
huitième de leur capital par semestre. Le risque aurait en effet
été que les groupements locaux d'épargne attendent la fin
de la période transitoire pour assurer la commercialisation de leurs
parts sociales.
Toutefois, ce schéma était
pénalisant
pour les plus
dynamiques des caisses d'épargne puisqu'il les contraignait à
reverser au fonds de mutualisation un montant plus élevé, en
proportion de leurs fonds propres, que celui que devaient acquitter les caisses
d'épargne les moins pressées de placer leur capital.
Aussi, l'Assemblée nationale a-t-elle adopté un amendement
tendant à supprimer l'alternative : dans la rédaction du
présent article qui nous est soumise, les caisses d'épargne
devront reverser au fonds de mutualisation une somme égale au
huitième de leur capital tous les six mois (soit
2,35 milliards de
francs par semestre
). Celles qui auront réussi à placer
davantage disposeront ainsi d'un volant de trésorerie qu'elles pourront
utiliser, par exemple pour rémunérer leurs parts.
B. UN DISPOSITIF CONTRAIGNANT
Il est à noter que dans sa version initiale comme dans sa version
amendée par les députés, le présent article
contraint les caisses d'épargne à verser au fonds de
mutualisation une somme exactement égale à leur capital initial,
quand bien même elles ne seraient pas parvenues à placer ce
montant dans le public et auraient en conséquence été
contraintes de réduire leur capital à due concurrence.
La différence positive entre les 18,8 milliards de francs et le montant
effectivement placé dans le public viendra, le cas
échéant, diminuer les fonds propres des caisses.
Le texte précise ensuite que les versements effectués au profit
du fonds de mutualisation sont sans effet sur la détermination du
résultat fiscal et comptable des caisses d'épargne. Cette
disposition a pour objet d'éviter de faire supporter par le budget de
l'Etat une perte de recettes fiscales qui résulterait du passage en
perte d'exploitation d'un versement minimum, dans l'hypothèse où
celui-ci serait supérieur au produit de la souscription des parts de GLE
et des certificats coopératifs d'investissement. Le gouvernement
souhaite en tout état de cause que les caisses d'épargne
supportent les conséquences de l'absence de dynamisme des GLE qui leurs
sont affiliés dans la commercialisation des parts sociales.
Il est enfin précisé que le fonds de mutualisation est
exonéré d'impôt sur les sociétés. Ce fonds
n'est en effet qu'une structure intermédiaire.
II. LE VERSEMENT DU CAPITAL INITIAL DES CAISSES D'ÉPARGNE AU FONDS DE
RÉSERVE POUR LES RETRAITES
Il est ensuite prévu que le fonds de mutualisation reverse avant le
31 décembre de chaque année, de 2000 à 2003 inclus,
les sommes qu'il aura reçues dans l'année au fonds de
réserve pour le retraites géré par le Fonds de
solidarité vieillesse en application de l'article L. 135-1 du code
de la sécurité sociale.
Le fonds de réserve pour les retraites
Créé au sein du Fonds de solidarité
vieillesse
(FSV) par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999, le fonds de réserve ne dispose ni de ressources
précises, ni de missions déterminées. Sa création
à fait l'objet de commentaires critiques de la part de vos commission
des affaires sociales et commission des finances.
Les missions du fonds de réserve ne sont pas indiquées dans la
loi. Celle-ci se contente de disposer que le fonds est au
bénéfice de la branche vieillesse du régime
général et des régime alignés. Deux options sont
théoriquement possibles : le fonds de réserve peut avoir
pour but, soit de lisser simplement l'augmentation future des cotisations
d'assurance vieillesse, soit d'engendrer des revenus suffisants pour minorer
durablement le niveau futur des cotisations. Dans le premier cas, le montant
visé s'exprime en centaines de milliards de francs. Dans le second cas,
il s'exprime en milliers de milliards de francs. Le conseil d'analyse
économique évalue le montant des réserves
nécessaires pour diminuer de 10 points le niveau des cotisations en
2040, selon les hypothèses, entre 1,7 et 2,5 fois le montant de la masse
salariale.
Ont par ailleurs été mises en cause les modalités de
financement particulièrement complexes du fonds et les incertitudes qui
pèsent sur les sommes effectivement disponibles. La loi
précitée a en effet prévu d'affecter au fonds de
réserve une fraction du produit de la contribution de solidarité
sur les sociétés (C3S), tout ou partie des excédents
éventuels du FSV et toute autre ressource affectée en vertu de
dispositions législatives. Lors des débats, la possibilité
d'une affectation du produit des privatisations et celle d'une surcotisation
ont été aussi évoquées par le gouvernement.
Au total, le fonds de réserve ne dispose d'aucune ressource stable et
assurée, et les montants qui lui sont affectés sont manifestement
hors de proportion avec les sommes nécessaires, sommes qui sont
d'ailleurs impossibles à évaluer tant que les missions du fonds
ne sont pas définies.
En conséquence, le Sénat a accepté le principe de la
création d'un fonds de réserve pour les retraites et
renvoyé la définition de sa finalité, des modalités
de son financement, de son fonctionnement et de sa gestion à un projet
de loi cohérent et complet sur le sujet de l'équilibre à
long terme des régimes d'assurance vieillesse.
III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre commission vous proposera une nouvelle rédaction pour le
présent article, afin :
- d'une part, de tenir compte de la suppression des groupements locaux
d'épargne et de l'allongement de la durée de placement des parts
qu'elle vous propose (voir commentaire de l'article 21) ;
- d'autre part, de renvoyer à une prochaine loi de finances
l'affectation du produit de la souscription des parts sociales des caisses
d'épargne.
Par cohérence avec la position qu'elle a adoptée lors de l'examen
de la loi de financement de la sécurité sociale, votre commission
vous demande en effet de ne pas doter le fonds de réserve pour les
retraites avant de connaître précisément quelles seront ses
missions et de quel montant estimatif le gouvernement escompte le doter.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article ainsi amendé.
ARTICLE 25
La mise en place des groupements
locaux
d'épargne
Commentaire : Le présent article précise les
modalités de création des groupements locaux d'épargne
(GLE).
Dans un délai de
deux mois
après la publication de la
présente loi, chaque caisse d'épargne devra élaborer un
" plan de création de GLE " pour sa circonscription
territoriale et soumettre ce plan à l'approbation de la Caisse nationale.
Ce plan précisera le nombre de GLE créés sur le territoire
de la caisse (avec un minimum de quatre compte tenu du plafond de souscription
de 30 %, voir commentaire de l'article 4).
Il doit en outre comporter, pour chaque GLE dont la création est
envisagée, le nom de deux personnes répondant aux conditions
requises pour être sociétaires qui auront pris l'engagement de
souscrire immédiatement après l'approbation du plan par la Caisse
nationale, au moins une part sociale du GLE.
La valeur nominale de ces parts est déterminée par chaque caisse,
en accord avec les souscripteurs initiaux. Cette disposition garantit une
certaine homogénéité de la valeur des parts sociales des
différents GLE affiliés à une même caisse.
Enfin, la caisse d'épargne doit désigner l'administrateur
provisoire qui sera chargé, sous le contrôle de la caisse
régionale, de contracter au nom du GLE, d'y admettre de nouveaux
sociétaires et de le représenter vis-à-vis des tiers,
jusqu'à la réunion de l'assemblée générale
constitutive, soit, si la loi est publiée en juillet 1999, jusqu'en mai
2000.
Les GLE sont réputés constitués et dotés de la
personnalité morale dès que la CNCEP a approuvé le plan
d'une caisse d'épargne et que les engagements de souscription au capital
de ce GLE sont remplis. Les GLE sont donc dispensés de l'immatriculation
au registre du commerce.
Le présent article fixe ensuite des
seuils de souscription
minimaux
pour les GLE : initialement fixé à 2.000
sociétaires, le seuil a été ramené à 500 par
les députés. En outre, observant que les personnes morales ou les
professionnels pouvaient constituer une catégorie de coopérateurs
particulièrement dynamique et sensible à l'engagement des caisses
d'épargne au service de l'économie locale et de
l'intérêt général, l'Assemblée nationale a
introduit un
seuil distinct pour les GLE constitués de personnes
morales
. Elle craignait en effet que ces personnes s'identifient
difficilement à un GLE dans lequel, en application du principe " un
homme, une voix ", elles se seraient trouvées diluées dans
une clientèle généralement plus passive, constituée
en majorité de simples déposants.
Ne sont ainsi appelés à demeurer neuf mois après la
publication de la présente loi, que les GLE qui auraient admis
au
moins 500 sociétaires personnes physiques ou 10 sociétaires
personnes morales
; les autres seraient fusionnés avec d'autres
GLE de même nature pour atteindre le seuil précité.
On notera que le projet de loi ne précise ni le montant du capital
initial de chaque GLE, ni les modalités de fixation des parts sociales,
ni ce qu'il advient des parts sociales de GLE qui ne seraient pas souscrites.
Car contrairement aux caisses d'épargne, les GLE ne disposeront pas de
capital initial, mais leur capital évoluera en fonction de
l'entrée et de la sortie des sociétaires.
Enfin, dans un délai de dix mois à compter de la publication de
la présente loi, l'administrateur provisoire convoque une
assemblée générale pour adopter les statuts du GLE et
désigner son conseil d'administration. Le mandat initial de ce conseil
prend fin le 1
er
février 2003.
Par cohérence avec les amendements de suppression des GLE qu'elle vous
propose, votre commission vous proposera de supprimer le présent article.
Décision de la commission : votre commission vous propose de
supprimer le présent article.
ARTICLE 25 BIS (nouveau)
L'information des
souscripteurs de parts sociales
Commentaire : Le présent article vise à
offrir
aux futurs souscripteurs de parts sociales de GLE une information suffisante
sur les modalités de la souscription, les liens entre les GLE et les
caisses, et la situation financière et l'évolution de
l'activité des caisses.
Le présent article prévoit que chaque caisse doit publier et
tenir à la disposition de toute personne intéressée un
document contenant les précisions suivantes :
- des informations sur le contenu et les modalités de l'émission
de parts sociales représentatives du capital des GLE ;
- des informations sur les liens, notamment juridiques et financiers entre la
caisse d'épargne et les GLE affiliés ;
- des informations sur la situation financière et l'évolution de
l'activité de la caisse d'épargne.
Ce document doit être établi tous les ans. Son contenu sera
précisé par décret. Ce rapport d'information doit
être soumis au visa préalable de la CNCEP et de la COB. Votre
commission vous proposera de modifier la rédaction de l'alinéa
correspondant en prévoyant que le document est approuvé par la
CNCEP avant d'être soumis au visa de la COB. Il n'est en effet pas
juridiquement exact de parler d'un visa de la CNCEP.
Par ailleurs, par cohérence avec les amendements de suppression des GLE
qu'elle vous propose, votre commission vous proposera une nouvelle
rédaction de cet article tendant à assurer l'information des
sociétaires des caisses d'épargne et non des GLE.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article ainsi modifié.
ARTICLE 26
La mise en place de la Caisse
nationale
des caisses d'épargne et de prévoyance
Commentaire : Le présent article organise les
modalités de la création de la CNCEP, nouvel organe central du
réseau des caisses d'épargne, à partir de la fusion de
l'ancien centre national des caisses d'épargne (CENCEP) et de l'ancienne
caisse centrale des caisses d'épargne (CCCEP).
La Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance
(CNCEP) résultera de l'absorption du CENCEP par la Caisse centrale des
caisses d'épargne. Ce choix résulte du fait que la CCCEP est une
société anonyme dotée d'un capital social de 1,2 milliard
de francs alors que le CENCEP n'est constitué que sous la forme d'un
simple groupement d'intérêt économique (GIE), doté
d'un capital de 136 millions de francs. En outre, la CCCEP est
agréée comme établissement de crédit, ce qui n'est
pas le cas du CENCEP.
Les opérations de création de la Caisse nationale se
dérouleront en deux temps :
Tout d'abord, dans un délai d'un mois à compter de la
promulgation de la loi, la Caisse centrale des caisses d'épargne devra
modifier ses statuts en vue de sa transformation en société
anonyme à directoire et conseil de surveillance, soumise aux
dispositions du droit commun des articles 118 à 150 de la loi du 24
juillet 1966 sur les sociétés commerciales.
Dans ce même délai, elle devra en outre désigner son
conseil de surveillance et son directoire pour une durée initiale
s'achevant le 31 décembre 2003. Cette échéance
coïncide avec la fin de la période de constitution du capital
initial des caisses d'épargne, ce qui permettra la désignation
des nouveaux dirigeants de la Caisse nationale par des mandataires sociaux
portant la légitimité que leur confère la
désignation par des coopérateurs.
Par cohérence avec l'article 10 du présent projet, le texte
prévoit que la nomination du premier président du directoire est
soumise à l'agrément du ministre chargé de
l'économie. Comme elle l'a fait à l'article 10, votre commission
vous propose de supprimer cette disposition qui n'a plus de justification
dès lors que le statut des caisses d'épargne est banalisé.
On relèvera que pour Raymond Douyère, le fait que la nomination
du président du directoire du CENCEP soit subordonnée à
l'agrément du ministre de l'économie et des finances est en
partie responsable du manque d'autorité et de légitimité
du CENCEP vis-à-vis du réseau.
Dans un deuxième temps, qui débutera avec l'octroi de
l'agrément du ministre chargé de l'économie au
président du directoire, la Caisse centrale prendra le nom de Caisse
nationale des caisses d'épargne et de prévoyance et est
immédiatement substituée au CENCEP comme organe central du groupe.
En conséquence, le CENCEP sera dissous et ses biens, droits et
obligations transférés à la Caisse nationale. Toutefois,
si la Caisse nationale en décide ainsi, certains biens, droits et
obligations peuvent être apportés à la
Fédération nationale des caisses d'épargne et de
prévoyance en proportion des missions confiées à cette
dernière.
Enfin, à la même date, les titres I
er
et III de la loi
du 1
er
juillet 1983 seront abrogés et les termes
" Caisse nationale des caisses d'épargne et de
prévoyance " substitués aux termes " Centre national
des caisses d'épargne et de prévoyance " dans tous les
textes législatifs et réglementaires en vigueur.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article ainsi modifié.
ARTICLE 27
La mise en place de la
Fédération nationale des caisses d'épargne et de
prévoyance
Commentaire : Le présent article organise la mise
en
place de la Fédération nationale des caisses d'épargne
(FNCEP)
La FNCEP sera constituée dans les trois mois qui suivent la publication
de la présente loi.
Les présidents de COS et de directoire des caisses d'épargne sont
ainsi appelés à se réunir en assemblée
générale constitutive pour adopter les statuts de la FNCEP et
désigner son conseil d'administration.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article sans modification.
ARTICLE 28
Les dispositions fiscales
Commentaire : Le présent article a pour objet de
préciser que les opérations rendues nécessaires par la loi
n'ont pas de conséquences fiscales pour le réseau des caisses
d'épargne.
Le premier alinéa du présent article dispose que les
opérations rendues nécessaires par la mise en place du nouveau
réseau des caisses d'épargne ne donnent lieu ni à
indemnité, ni à perception d'impôts, droits ou taxes, ni au
versement de salaires ou d'honoraires au profit d'agents de l'Etat.
Il s'agit des opérations suivantes :
- constitution des nouvelles entités : Caisse nationale des caisses
d'épargne, Fédération nationale, groupements locaux
d'épargne ;
- absorption du CENCEP par la Caisse nationale ;
- octroi par les caisses d'épargne d'un prêt sans
intérêt aux groupements locaux d'épargne pour leur
permettre d'acquérir les parts sociales constitutives de leur capital
initial ;
- remboursement par les GLE du prêt consenti par les caisses
d'épargne.
La seule exception admise au principe de non assujettissement aux impôts
de toute nature porte sur le maintien d'un régime de droit commun des
plus-values financières pour les salariés cédant à
titre onéreux des parts sociales acquises à titre
préférentiel selon les modalités prévues à
l'article 23.
Dans un second alinéa, le présent article dispose que, dans le
cas de fusion, les cessionnaires et bénéficiaires des apports
doivent se conformer, pour la détermination de leurs résultats
imposables, aux conditions prévues au 3 de l'article 210 A du code
général des impôts, à raison des biens, droits et
obligations qui leur ont été cédés ou transmis.
Cette disposition avait déjà été prévue par
l'article 26 de la loi du 1
er
juillet 1983 portant réforme
des caisses d'épargne.
Ces dispositions concerneront en pratique la fusion du CENCEP et de la Caisse
centrale, la dévolution des fonds centraux aux caisses d'épargne
et, éventuellement, les fusions de GLE n'ayant pas atteint le seuil
minimum de sociétaires. La société absorbante, devra, au
terme du 3 de l'article 210 A du CGI, respecter les prescriptions
suivantes :
- reprendre à son passif, d'une part les provisions dont l'imposition
est différée, d'autre part, la réserve spéciale
où la société absorbée a porté les
plus-values à long terme antérieurement soumises aux taux
réduits de 10 %, de 15 %, de 18 %, de 19 % ou de
25 %, ainsi que la réserve où ont été
portées les provisions pour fluctuation de cours ;
- se substituer à la société absorbée pour la
réintégration des résultats dont la prise en compte avait
été différée pour l'imposition de cette
dernière ;
- calculer les plus-values réalisées ultérieurement
à l'occasion de la cession des immobilisations non amortissables, qui
lui sont apportées d'après la valeur qu'elles avaient, du point
de vue fiscal, dans les écritures de la société
absorbée ;
- réintégrer dans ses bénéfices imposables les
plus-values dégagées lors de l'apport des biens
amortissables ;
- inscrire à son bilan les éléments autres que les
immobilisations pour la valeur qu'ils avaient, du point de vue fiscal, dans les
écritures de la société absorbée. A défaut,
comprendre dans les résultats de l'exercice au cours duquel intervient
l'opération le profit correspondant à la différence entre
la nouvelle valeur de ces éléments et la valeur qu'ils avaient,
du point de vue fiscal, dans les écritures de la société
absorbée.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article sans modification.
ARTICLE 29
Les dispositions transitoires
relatives
à la révision des accords collectifs
Commentaire : Le présent article prévoit
certaines mesures transitoires concernant les relations sociales.
Le présent article a pour objet de prolonger la période
d'application de l'ancienne procédure d'arbitrage, prévue par
l'article 17 de la loi du 1
er
juillet 1983, pour les demandes de
modification du statut du personnel qui auraient été
exprimées avant la publication de la présente loi et qui
n'auraient pas encore fait l'objet d'un accord ou d'un arbitrage. En pratique,
une seule dénonciation est visée, celle portant sur la caisse
générale de retraite du personnel des caisses d'épargne
(CGRPCE).
Rappelons en effet que le régime de retraite géré par la
CGRPCE a été dénoncé par la partie patronale le 30
décembre 1997. Les règles actuellement en vigueur ouvrent un
délai de deux ans au terme duquel, si aucun accord n'a pu être
trouvé entre les représentants du personnel et les
représentants des employeurs, le différend doit être
porté devant une formation arbitrale dont la composition est
définie par arrêté conjoint du ministre chargé de
l'économie et des finances et du ministre chargé du travail.
L'article 17 précité précise que cette formation ne rend
sa décision qu'après avoir recherché la conciliation entre
les parties.
Ce conflit n'a, pour l'instant, pas trouvé d'issue et le délai
légal de négociation échoit le 30 décembre 1999.
Le présent article a pour objet de
ramener de deux ans à
dix-huit mois le délai
de négociation
dont disposent
les représentants des salariés et les représentants des
employeurs pour parvenir à un accord. Si, à la date du 30 juin
1999, aucun accord n'a donc pu être trouvé, la demande de
modification du régime de retraite sera portée devant la
commission arbitrale évoquée ci-dessus. Le présent article
précise en outre que ladite commission doit prendre en compte,
" d'une part, la situation et les perspectives financières du
réseau des caisses d'épargne, et, d'autre part, les droits
sociaux des salariés "
. Les députés ont
souhaité ajouter à cette phrase les termes :
" et
notamment en matière de régime de retraite "
pour
rappeler le sujet concret de la demande de conciliation dont sera saisie la
commission arbitrale.
Par ailleurs, afin de permettre dans le futur la révision des accords
collectifs en vigueur à la date de la publication de la loi et conclus
selon l'ancienne procédure de la loi de 1983, le second alinéa du
présent article prévoit que la Caisse nationale des caisses
d'épargne et de prévoyance (CNCEP) et les organisations
syndicales représentatives mentionnées à l'article 16 du
présent projet de loi sont réputées être signataires
de l'accord conclu au sein de l'ancienne commission paritaire nationale.
Dans le futur, la dénonciation des accords collectifs se fera
conformément aux dispositions du code du travail, et notamment de son
article L. 132-8. Ce dernier prévoit ainsi que lorsque la
dénonciation émane de la totalité des signataires
employeurs ou des signataires salariés, une nouvelle négociation
soit s'engager à la demande d'une des parties intéressées
dans les trois mois qui suivent la date de la dénonciation. L'accord
collectif dénoncé continue de produire effet jusqu'à
l'entrée en vigueur de l'accord qui lui est substitué, ou
à défaut, pendant une durée d'un an à compter de
l'expiration du délai de préavis fixé par les parties. Si
aucun accord n'est intervenu dans ces délais, les salariés des
entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont
acquis en application de l'accord dénoncé.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article sans modification.
ARTICLE 30
Les dispositions relatives aux
dirigeants
Commentaire : Le présent article prolonge le
mandat des
directoires et des conseils d'orientation et de surveillance des caisses
d'épargne en fonction à la date de promulgation de la loi.
Le présent article prévoit le renouvellement des membres du
directoire et du conseil d'orientation et de surveillance (COS) de chaque
caisse au plus tard treize mois après la publication de la
présente loi, pour un premier mandat de trois ans.
En conséquence, les mandats des membres des directoires, des COS et des
conseils consultatifs des caisses d'épargne en fonction à la date
de publication de la loi sont prolongés jusqu'au terme de cette
période transitoire de treize mois, nonobstant toute disposition
relative à la limite d'âge. Leurs mandats devraient donc durer
jusqu'en juillet 2000.
Rappelons que les mandats des membres des conseils consultatifs de clients
(prévus par les articles 10 et 10-1 de la loi du 1
er
juillet
1983) et ceux des membres des COS devaient en principe arriver à
expiration respectivement en novembre-décembre 1997 et en janvier mars
1998.
Ils ont été une première fois prolongés jusqu'en
mars 1999 par l'article 8 de la loi du 10 novembre 1997 portant diverses
dispositions d'ordre économique et financier, puis jusqu'au
1
er
novembre 1999 par la loi du 3 février 1999. Cette
dernière échéance reste valable pour les conseils
consultatifs de clients, qui disparaîtront à cette date puisque
leur renouvellement n'est pas prévu dans le cadre du nouveau statut des
caisses d'épargne. L'abrogation du titre II de la loi du 1
er
juillet 1983 ne prendra effet qu'à l'issue de la période
transitoire de treize mois.
Les mandats des membres des directoires des caisses d'épargne,
désignés pour six ans en avril-mai 1992, et qui venaient à
échéance en avril-mai 1997, ont, quant à eux,
été renouvelés à cette date, dans les conditions
prévues par la loi du 1
er
juillet 1983 et par les statuts. Le
présent article anticipe donc l'échéance normale du
renouvellement de leur mandat qui auraient en principe dû intervenir en
avril-mai 2002.
Pendant la période transitoire de treize mois, les caisses
d'épargne resteront régies par les dispositions des titres II et
IV de la loi du 1
er
juillet 1983 portant réforme des caisses
d'épargne, pour autant qu'elles ne seront pas contraires à la
présente loi.
Toutefois, le présent article prévoit que les membres et
présidents de COS pourront recevoir un défraiement des
dépenses engagées pour l'accomplissement de leur mission, dans
des conditions fixées par l'organe central. Initialement, le texte
prévoyait le versement d'une indemnité de fonction mais
l'Assemblée nationale a estimé que cette disposition portait
atteinte au principe de gratuité des fonctions de membres de COS.
Passée la période transitoire de treize mois, il appartiendra aux
statuts des caisses d'épargne de déterminer les conditions d'une
éventuelle rémunération des mandataires sociaux.
Par ailleurs, le présent article confie aux COS le soin de
définir, pendant la période transitoire, les modalités de
financement des projets d'économie locale et sociale, selon les
conditions prévues à l'article 6 du présent projet de loi.
Au terme de cette période, il appartiendra aux sociétaires
réunis en assemblée générale de déterminer
l'affectation du résultat distribuable des caisses.
Enfin, le paragraphe II du présent article prévoit que les titres
II et IV de la loi du 1
er
juillet 1983 seront abrogés le
premier jour du quatorzième mois suivant la date de publication de la
loi.
A cette date, chaque caisse d'épargne sera donc à même de
convoquer sa première assemblée générale de
groupements locaux d'épargne. Celle-ci adoptera les statuts de la caisse
et désignera les membres du directoire et du COS pour un premier mandat
limité à trois ans.
Dans l'hypothèse d'une publication de la présente loi en juillet
prochain, le mandat des nouveaux mandataires sociaux durerait ainsi jusqu'au 31
juillet 2003, soit six mois avant la fin des opérations de diffusion du
capital initial des caisses d'épargne.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article sans modification.