IV. LES TRAVAUX DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : FONDER LE SUCCÈS DE L'INTERCOMMUNALITÉ SUR UNE DÉMARCHE PROGRESSIVE ET VOLONTAIRE
La
réforme du régime de la coopération intercommunale doit
être envisagée au regard du débat plus
général sur
l'évolution des structures territoriales
de la France. Le
nombre
et la
superposition
de ces structures
sont de plus en plus fréquemment mis en cause. Ils apparaissent souvent
comme un
obstacle
à l'efficacité de l'action
publique
.
Si les structures territoriales doivent s'adapter aux nouveaux défis
auxquels la gestion publique doit faire face, il paraît naturel que cette
adaptation porte en priorité sur le niveau d'administration de
proximité que constitue la commune. A cet égard, le
renforcement
et la
simplification
de la coopération
intercommunale constituent des facteurs incontestables de
rationalisation
et d'
efficacité
.
Cet effort de clarification et de simplification serait néanmoins
voué à l'échec
si parallèlement, de nouveaux
niveaux d'administration devaient apparaître. Votre commission des Lois
tient à souligner que
les pays ne sauraient être directement ou
indirectement érigées en nouvelles structures territoriales
.
Ils doivent demeurer des
espaces de projets
permettant une synergie des
initiatives locales.
Ces remarques liminaires étant faites et après que votre
rapporteur eut procédé à de très larges
consultations des associations d'élus locaux et des organismes
professionnels, votre commission des Lois vous soumet des conclusions qui
tendent à approfondir la démarche de renforcement et de
simplification de la coopération intercommunale.
A. ÉVITER LA DICHOTOMIE ENTRE L'URBAIN ET LE RURAL
1. Le pari audacieux d'une nouvelle structure propre aux agglomérations
Les
expériences passées ont montré qu'un modèle de
coopération qui serait fondé sur la
dichotomie
entre
l'urbain
et le
rural
n'était pas pertinent. Ainsi, la
formule du district a-t-elle été étendue au milieu rural
en 1970. Inversement, la formule des communautés de communes d'abord
conçue pour le milieu rural a été étendue aux
agglomérations en 1993.
Des communautés de communes ont déjà été
créées dans des grandes agglomérations comme Marseille ou
Grenoble. En outre, les communautés de communes peuvent d'ores et
déjà opter pour la taxe professionnelle d'agglomération et
aligner ainsi leur régime fiscal sur celui applicable aux
communautés de villes.
Dans ces conditions, il aurait été envisageable de fusionner les
districts, les communautés de communes et les communautés de
villes
sans créer une nouvelle catégorie
. Cette solution
aurait pu se combiner avec la définition, au sein du régime des
communautés de communes, de règles distinctes offrant un cadre
adapté à la coopération intercommunale selon le niveau
d'intégration souhaité.
Le choix des auteurs du projet de loi de créer des communautés
d'agglomération
limite la réduction du nombre de
catégories
d'établissements publics de coopération
intercommunale : à la suppression de deux catégories
(districts et communautés de villes) répond la création
d'une nouvelle.
En outre, la hiérarchie des différentes formules de
coopération n'est qu'apparente. En effet, compte tenu du
relèvement des seuils de création des communautés
urbaines, la probabilité que de telles structures soient
créées
apparaît très faible
. Force est donc
de constater que les nouvelles communautés d'agglomération sont
aussi un substitut aux communautés urbaines.
Compte tenu de l'échec des communautés de villes, le choix du
Gouvernement de créer une nouvelle structure propre aux
agglomérations peut paraître
risqué
. Il est vrai
qu'il s'appuie sur des
incitations financières fortes
qui
devraient rendre plus attractives les nouvelles communautés
d'agglomération que ne l'étaient les communautés de
villes. Néanmoins, le succès de cette nouvelle catégorie
d'établissement public de coopération intercommunale devra
répondre à
la mise en oeuvre effective de projets de
développement
et non pas à une simple " logique de
guichets ".
Le choix de structurer l'intercommunalité à partir de
seuils
rigides
soulève également des interrogations au regard des
expériences passées qui se sont traduites par la
remise en
cause des seuils
qui avaient été arrêtés par le
législateur.
Observons, en outre, que les
seuils
retenus par le projet de loi pour la
création de communautés d'agglomération
laissent
à l'écart
de cette nouvelle catégorie
un certain
nombre de départements qui ne rempliront pas les critères de
population requis
.
Jugeant, dans ces conditions, que les seuils prévus par le projet de loi
entraîneraient une disparité de traitement entre les
différentes parties du territoire, votre commission des Lois vous
propose de prendre en compte les
chefs-lieux de départements
.
En outre, la définition de compétences nombreuses dont les
communautés d'agglomération devront être obligatoirement
dotées dès leur création, soulève une
réelle difficulté
. Il n'est en effet pas du tout certain
que les communautés d'agglomération soient en mesure d'assumer
ces compétences par le seul biais de la taxe professionnelle unique,
l'unification des taux de taxe professionnelle devant être
réalisée sur une période maximum de
douze ans
. Si
tel n'était pas le cas, les nouvelles structures se verraient dans
l'obligation de recourir de manière systématique à une
fiscalité additionnelle au risque
d'augmenter la pression
fiscale
. Votre commission des Lois vous suggère, en
conséquence, de permettre une prise en charge plus progressive des
compétences.
Enfin, la création des communautés d'agglomération ne
devra pas avoir pour effet de
déséquilibrer le territoire
en mettant en cause des formes d'intercommunalité en cours de
développement dans des parties du territoire environnant les nouvelles
communautés d'agglomération.
2. Des disparités de traitement injustifiées entre les différentes catégories d'établissements publics de coopération intercommunale
Les
écarts actuellement constatés entre les attributions de dotation
globale de fonctionnement versées aux différentes
catégories d'établissements publics de coopération
intercommunale
paraissent excessifs
.
En dotant les nouvelles communautés d'agglomération d'une
dotation globale de fonctionnement de
250 francs par habitant
, le projet
de loi établit une hiérarchie plus équilibrée que
celle qui résulte actuellement du rapport entre les communautés
de communes et les communautés urbaines.
Néanmoins, en dépit des aménagements positifs retenus par
l'Assemblée nationale, les écarts qui subsistent entre les
communautés de communes et les communautés d'agglomération
ne sont pas justifiés
au regard des missions exercées par
ces établissements publics.
Le maintien d'un tel écart, même si les moyennes de dotation
peuvent recouvrir des réalités variables, aurait pour effet de
créer une
différence de traitement inacceptable
entre les
structures qui s'adressent aux agglomérations et celles qui, sans
concerner exclusivement le milieu rural, le concernent néanmoins en
premier lieu.
Votre commission des Lois, en plein accord avec la commission des Finances,
souhaite, en conséquence, que la dotation globale de fonctionnement par
habitant des communautés de communes dotées de la taxe
professionnelle unique et exerçant des compétences importantes
soit
majorée
.
Elle vous propose également de
corriger les critères
retenus par l'Assemblée nationale pour faire bénéficier
ces communautés de communes d'une dotation globale de fonctionnement
majorée. Ces critères paraissent en effet mal adaptés aux
compétences légales confiées à ces
établissements publics de coopération intercommunale.