CHAPITRE II
LA CHAMBRE TERRITORIALE DES COMPTES
ET LE CONTRÔLE
BUDGÉTAIRE
Article additionnel avant l'article 198
Chambre
territoriale des comptes propre
à la
Nouvelle-Calédonie
La
chambre territoriale des comptes est en pratique compétente aussi bien
en Nouvelle-Calédonie qu'en Polynésie française. En effet,
les articles L. 262-1 et L. 272-1 du code des juridictions
financières posent le principe de la création d'une chambre
territoriale des comptes par territoire, mais
" les chambres
territoriales des comptes de la Nouvelle-Calédonie et de la
Polynésie française peuvent être présidées
par un même président et dotées des mêmes
assesseurs "
en vertu des articles L. 262-14 et L. 272-15 de
ce même code. De fait, une chambre territoriale des comptes commune est
installée à Nouméa.
Observant que l'éloignement de l'ordre de six mille kilomètres
entre ces deux collectivités n'est pas de nature à favoriser
l'efficacité du contrôle exercé par la chambre territoriale
et, surtout, que la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie
française n'appartiennent plus désormais à la même
catégorie juridique, votre commission des Lois vous propose, par
un
amendement
, d'insérer un
article additionnel avant
l'article 198
pour créer deux chambres distinctes. Une telle
modification institutionnelle est conforme à l'esprit de l'Accord de
Nouméa qui fait de la Nouvelle-Calédonie une collectivité
sui
generis
.
Article 198
Soumission des comptes au
contrôle
de la chambre territoriale des
comptes
Cet
article reproduit, en le précisant, l'article 73 du statut du
9 novembre 1988. Le jugement des comptes de la
Nouvelle-Calédonie, des provinces et de leurs établissements
publics, ainsi que l'examen de leur gestion, sont effectués par la
chambre territoriale des comptes, selon les dispositions ayant valeur de loi
organique du titre VI du livre II du code des juridictions
financières. Il convient de rappeler que l'article 10 du projet de
loi ordinaire soumet le jugement des comptes de la Nouvelle-Calédonie,
des provinces, des communes et de leurs établissements publics, ainsi
que l'examen de leur gestion, aux dispositions du même titre n'ayant pas
valeur de loi organique.
Votre commission des Lois vous soumet
un amendement
de précision
rédactionnelle mentionnant la deuxième partie du code des
juridictions financières, dont l'intitulé est modifié par
l'article 214 du présent projet de loi organique :
" Dispositions applicables en Nouvelle-Calédonie et en
Polynésie française "
.
Afin de maintenir la cohésion du texte, votre commission des Lois vous
soumet
un amendement
transférant, à l'article 198,
les dispositions de l'article 200 du présent projet de loi
organique. Il s'agit de rappeler que les articles L.O. 263-4 à
L.O. 263-7 du code des juridictions financières sont applicables au
budget de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et de leurs
établissements publics. L'article 78 du présent projet de
loi organique indique déjà que le budget de la
Nouvelle-Calédonie est voté selon la procédure
prévue à l'article L.O. 263-3 du code des juridictions
financières. De plus, les comptables de la Nouvelle-Calédonie,
des provinces et de leurs établissements publics exercent leurs
fonctions dans les conditions définies à la section 2 du
chapitre IV du titre VI de la deuxième partie du livre II
du code. L'article 9 du projet de loi ordinaire est comparable, concernant
les comptables des communes et de leurs établissements publics.
Votre commission des Lois rappelle que le titre II de la loi
n° 90-1247 du 29 décembre 1990 détaille les
dispositions budgétaires et comptables relatives au territoire, aux
provinces et à leurs établissements publics (contenu,
présentation et vote du budget, exécution, reddition des comptes,
établissements publics du territoire et des provinces).
La loi organique n° 94-1132 du 27 décembre 1994
relative à certaines dispositions législatives des
livres Ier et II du code des juridictions financières contient en
annexe la partie législative organique de ce code applicable en
Nouvelle-Calédonie.
Pour mémoire, voici les objets de ces articles ayant valeur de loi
organique, tels que les modifie l'article 214 du présent projet de
loi organique.
• au chapitre II consacré à la chambre territoriale
des comptes :
- ses missions : la chambre territoriale des comptes juge l'ensemble des
comptes des comptables publics des provinces, du territoire et de leurs
établissements publics, elle examine la gestion de ces
collectivités publiques (article L.O. 262-2) ; elle
vérifie sur pièces et sur place et contrôle l'emploi
régulier des crédits (article L.O. 262-5) ; elle
concourt au contrôle budgétaire (article L.O. 262-12) ;
- son organisation : les comptables du territoire, des provinces et de leurs
établissements publics sont tenus de produire leurs comptes devant la
chambre territoriale des comptes (article L.O. 262-31) ;
- la procédure : la chambre territoriale des comptes se fait communiquer
tous documents, de toute nature, relatifs à la gestion de ces
collectivités (article L.O. 262-42) ; ses magistrats
disposent, pour l'exercice des contrôles qu'ils effectuent, de l'ensemble
des droits et pouvoirs attribués à la Cour des comptes
(article L.O. 262-43) ;
• au chapitre III relatif au contrôle des actes
budgétaires et de l'exécution des budgets des provinces et du
territoire :
- définition du budget de la province, comprenant deux sections,
voté en équilibre réel ; définition des
dépenses obligatoires et des délibérations
budgétaires ; contrepartie aux augmentations de dépenses ou
réductions de recettes (article L.O. 263-2) ;
- dépôt du budget par le président du gouvernement ;
pratique des douzièmes provisoires si le budget n'est pas
exécutoire au début de l'exercice auquel il s'applique ;
exécution du budget par le haut-commissaire en l'absence d'adoption
avant le 31 mars (articles L.O. 263-3) ;
- si le budget d'une province ou de la Nouvelle-Calédonie n'est pas
voté en équilibre, la chambre territoriale des comptes propose
les mesures budgétaires nécessaires au rétablissement de
l'équilibre ; une nouvelle délibération a lieu ; si elle
est insuffisante, le budget est réglé et rendu exécutoire
par le haut-commissaire (article L.O. 263-4) ;
- le haut-commissaire peut demander une seconde lecture si les crédits
inscrits sont insuffisants ou si une dépense obligatoire a
été omise ; inscription d'office des crédits
nécessaires et mandatement d'office d'une dépense obligatoire
(article L.O. 263-5) ;
- soumission des établissements publics à caractère
administratif et des établissements publics interprovinciaux aux
mêmes règles (article L.O. 263-6) ;
- pouvoirs de la chambre territoriale des comptes ; secret de ses
investigations (article L.O. 263-7)
• au chapitre I relatif aux comptables :
- le comptable du territoire ou de la province ne peut subordonner ses actes de
paiement à une appréciation de l'opportunité des
décisions prises par l'ordonnateur (article L.O. 264-4) ;
- réquisition par l'ordonnateur du comptable qui a suspendu le paiement
d'une dépense ; information de la chambre territoriale des comptes ; en
cas de réquisition, l'ordonnateur engage sa propre responsabilité.
L'article 112 du statut de la Polynésie française est
très proche.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 198
ainsi modifié
.
Article 198 bis (nouveau)
Rapport annuel de
la chambre territoriale des
comptes
Cet
article est issu d'un amendement de l'Assemblée nationale, sur
proposition de sa commission des Lois, le Gouvernement ayant donné un
avis de sagesse.
La chambre territoriale des comptes présentera au congrès un
rapport annuel dans lequel elle exposera les observations relatives à
Nouvelle-Calédonie, aux provinces, aux communes, à leurs
établissements publics ainsi qu'aux établissements,
sociétés, groupements et organismes relevant de sa
compétence. Ce rapport sera publié au
Journal officiel
de
la Nouvelle-Calédonie.
Actuellement, les articles L. 261-1 et L. 261-3 incluent dans le
champ du rapport public de la Cour des comptes une partie consacrée aux
collectivités territoriales, établissements,
sociétés, groupements et organismes qui relèvent de la
compétence de la chambre territoriale des comptes. Il est tout à
fait possible pour la chambre territoriale des comptes de
Nouvelle-Calédonie de présenter à la Cour des comptes les
observations qu'elle souhaite voir figurer dans le rapport public de la Cour.
Votre commission des Lois préfère l'insertion dans le rapport
public de la cour des Comptes, dont l'autorité est avérée,
à une innovation juridique qui éloignerait la chambre
territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie du droit commun des
juridictions financières.
Le rapport de la chambre territoriale des comptes devrait permettre la
publication de l'ensemble des lettres d'observations définitives et leur
regroupement dans un document unique. Le rapporteur de la commission des Lois
de l'Assemblée nationale a ajouté en séance publique que
le rapport annuel de la chambre territoriale des comptes aura vocation à
se substituer
aux lettres d'observations définitives actuellement
adressées à chaque collectivité.
Votre commission des Lois rappelle que les lettres d'observations
définitives sont déjà accessibles au public, puisqu'elles
sont communicables à toute personne qui en fait la demande, une fois
qu'a eu lieu la première réunion de l'assemblée
délibérante ou de l'organe collégial de décision
suivant leur réception par la collectivité ou
l'établissement public concerné (article 117 du
décret n° 95-945 du 23 août 1995 relatif aux
chambres régionales des comptes). De plus, l'ensemble des lettres
d'observations définitives des chambres régionales et
territoriales des comptes font l'objet d'un regroupement par la Cour des
comptes, qui en assure la diffusion par les moyens télématiques.
Votre commission des Lois souligne que les articles L. 136-4 et
L. 136-5 du code des juridictions financières, relatifs au rapport
public de la Cour des comptes, prévoient que la Cour informe les
communes, les départements et les régions des observations
relatives à leur gestion qu'elle envisage d'insérer dans le
rapport public et les invite à lui faire part de leurs réponses.
Ces réponses sont jointes au rapport public et engagent la seule
responsabilité de leurs auteurs. Elle observe que des garanties
similaires n'ont pas été prévues pour les ordonnateurs
exerçant en Nouvelle-Calédonie.
D'un point de vue formel, elle remarque en outre que les dispositions du
présent article ne sont pas codifiées.
Considérant que ce rapport public de la chambre territoriale remettrait
en cause l'équilibre général du contrôle
budgétaire, et qu'il présente un caractère
unilatéral, contrairement au rapport public de la Cour des comptes,
votre commission des Lois vous propose
un amendement de suppression
de
l'article 198 bis.
Article 198 ter (nouveau)
Rapport sur les comptes
de gestion
du comptable de la
Nouvelle-Calédonie
Cet
article est lui aussi issu d'un ajout de l'Assemblée nationale, avec
l'avis favorable du Gouvernement.
La chambre territoriale des comptes établira un rapport sur chaque
compte de gestion du comptable de la Nouvelle-Calédonie. Ce rapport,
remis au congrès, sera annexé au compte administratif.
Pour mémoire, l'article L. 264-1 du code des juridictions
financières dispose que le comptable du territoire est nommé par
le ministre chargé du budget, après information du
président du congrès.
Votre commission des Lois souligne que l'article L.O. 262-31 du
même code impose déjà au comptable du territoire de
produire ses comptes devant la chambre territoriale des comptes dans les
délais réglementaires. En vertu de l'article L. 262-33, la
chambre territoriale des comptes statue en premier ressort, à titre
provisoire ou définitif, sur les comptes des comptables publics, sous
réserve de l'article L. 262-4, selon lequel les comptes des
communes ou groupements de communes dont la population n'excède pas
2.000 habitants, et dont le montant des recettes ordinaires figurant au
dernier compte administratif est inférieur à deux millions de
francs, font l'objet d'un apurement administratif par les comptables
supérieurs du Trésor.
Votre commission des Lois s'interroge donc sur la portée normative de
cet article. En effet, l'objectif de confier à la chambre territoriale
des comptes le contrôle sur les comptes du comptable de la
Nouvelle-Calédonie est déjà satisfait par le droit en
vigueur, tel qu'il est rappelé par les articles 198 et 200 du
présent projet de loi organique.
Il lui semble que l'obligation formelle de produire un rapport sur le compte de
gestion du comptable de la Nouvelle-Calédonie risque d'entrer en
contradiction, au moins formellement, avec le contrôle juridictionnel
exercé par la chambre territoriale des comptes sur l'ensemble des
comptes du comptable de la Nouvelle-Calédonie. La chambre territoriale
peut donner décharge de sa gestion au comptable de la
Nouvelle-Calédonie, comme elle peut le constituer en débet.
S'agissant d'une attribution juridictionnelle, la chambre rend un
jugement
. Votre commission des Lois s'interroge sur la valeur
ajoutée que pourrait présenter un
rapport
sur le
même sujet.
En conséquence, votre commission des Lois vous propose
un amendement
de suppression
de l'article 198 ter.
Article 199
Contrôle des marchés
publics
et des délégations de service
public
Cet
article organise le contrôle par la chambre territoriale des comptes de
conventions relatives aux conventions et délégations de service
public.
Le premier alinéa de cet article permet au haut-commissaire de
transmettre à la chambre territoriale des comptes les conventions
relatives aux marchés et aux délégations de service public
prises par les collectivités de Nouvelle-Calédonie. Le
haut-commissaire en informe l'autorité concernée.
Le deuxième alinéa indique que la chambre territoriale des
comptes formule ses observations dans le délai d'un mois à
compter de sa saisine ; son avis est transmis à la collectivité
territoriale ou à l'établissement public intéressé
et au haut-commissaire. Ces modalités sont identiques à celles de
l'article L. 1411-18 du code général des
collectivités territoriales.
Afin d'éviter le renvoi à l'article L. 242-2 du code
des juridictions financières, l'Assemblée nationale, par souci de
lisibilité, a préféré en reproduire les termes :
l'ordonnateur ou son représentant peut, à sa demande,
présenter oralement ses observations et être assisté par
une personne de son choix.
Enfin, l'assemblée délibérante est informée de
l'avis de la chambre territoriale des comptes dès sa plus proche
réunion.
Des dispositions quasiment identiques à celles du présent
article, dont l'objet était de reproduire l'article L. 234-1
du code des juridictions financières et l'article L. 1411-18
du code général des collectivités territoriales, sont
déjà en vigueur pour les communes, depuis que
l'article 25 de la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996
portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer a
inséré un article L. 263-27 dans le code des juridictions
financières, concernant les seules communes et les établissements
publics communaux et intercommunaux.
Le présent article étend le contrôle exercé par la
chambre territoriale des comptes à l'ensemble des conventions de
marchés et délégations de service public, qu'elles soient
conclues par les provinces ou la Nouvelle-Calédonie. Sa nature est
organique, car il touche aux relations entre l'Etat (haut-commissaire et
chambre territoriale des comptes) et la Nouvelle-Calédonie et les
provinces.
Votre commission des Lois vous soumet donc
un amendement
de codification
de cet article, afin de l'insérer, au titre VI de la
deuxième partie du livre II du code des juridictions
financières, dans la section 4 relative aux compétences et
attributions juridictionnelles de la chambre territoriale des comptes. Elle
vous propose de respecter les subdivisions existantes dans le code concernant
la métropole, c'est-à-dire de reprendre l'intitulé du
chapitre IV du titre III de la première partie du
livre II :
" Contrôle de certaines
conventions "
, puisque ce chapitre contient
l'article L. 234-2 dont est inspiré le présent article.
Votre commission des Lois vous propose de préciser dans le même
amendement
que les collectivités soumises aux dispositions du
présent article sont la Nouvelle-Calédonie, les provinces, et
leurs établissements publics.
Votre commission des Lois vous propose
deux amendements
rédactionnels, en particulier pour tenir compte du fait que les termes
" assemblée délibérante "
sont
normalement réservés aux collectivités territoriales alors
qu'on parle d'
" organe délibérant "
pour un
établissement public (voir les articles L. 5211-1
et
suivants du code général des collectivités territoriales).
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 199
ainsi
modifié
.
Article 200
Budgets de la
Nouvelle-Calédonie, des provinces
et de leurs établissements
publics
Votre commission des Lois vous ayant proposé de reprendre le dispositif de cet article à l'article 198, elle vous soumet par coordination un amendement de suppression du présent article.