B. LA POSITION CONCURRENTIELLE DE LA FRANCE
Ce succès résulte en partie de la compétitivité des entreprises françaises et des services publics mis à la disposition du secteur tourisme. Outre le patrimoine culturel, historique et de bonnes dispositions géographiques, la France possède quelques atouts intéressants :
1. L'évolution récente
Les
déplacements touristiques internationaux, selon l'Organisation Mondiale
du Tourisme, ont progressé de 2,8 % en 1997 par rapport à 1996,
contre 4,4 % en 1996 par rapport à 1995. Ainsi, on estime à 611,9
millions le nombre de voyages internationaux en 1997 pour un volume de 443
milliards de dollars de recettes (hors transport) soit une hausse de 2,2 %.
Derrière ces taux de croissance, apparaissent des situations
contrastées attestant d'une redistribution nouvelle des flux
touristiques internationaux: si l'Europe demeure en tête avec près
de 59 % du total des arrivées et 49 % des recettes mondiales, ce sont
les pays asiatiques ainsi que l'Afrique et l'Amérique du Sud qui
bénéficient depuis quelques années des plus forts taux de
croissance.
Avec 66,9 millions d'arrivées touristiques internationales en 1997, la
France a vu s'accroître de façon significative le nombre de
séjours touristiques réalisés par les clientèles
étrangères, en nette progression par rapport à 1996
(7,1%), lui permettant ainsi d'accroître sa part du marché
mondiale (10,9 contre 10,5% en 1996) et surtout européenne (18,5 contre
17,9% en 1996).Elle confirme ainsi sa position de première destination
touristique internationale devant les États-Unis (48,4 millions
d'arrivées) et l'Espagne (43,4 millions d'arrivées).
Si ces 2 ou 3 dernières années la progression des touristes
internationaux a été légèrement plus importante en
Espagne et en Italie, leur accroissement moyen annuel depuis 1990 est le
même que celui de la France (3,5%).
Évolution de la part du tourisme international de la
France
En termes de recettes touristiques internationales, exprimées en
dollars, ce sont les États-Unis qui sont en tête avec près
de 17% du total. En Europe, les positions se sont rapprochées entre
l'Espagne, la France et l'Italie. L'Espagne, qui avait pris la deuxième
place de la France en 1996, a moins progressé en 1997 et se retrouve au
4ème rang. Au contraire, l'Italie est passé de la 4ème
à la 2ème place, la France restant 3ème malgré une
progression de 12,7% des recettes en FF (0% en dollar), selon l'Organisation
Mondiale du Tourisme.
Les premières estimations pour 1998 du poste "voyages" de la Balance des
Paiements laissent présager une bonne tenue des recettes (+9,2% sur les
cinq premiers mois) permettant d'envisager une augmentation non
négligeable des touristes internationaux.
2. Le poids du tourisme dans l'économie française
On peut
apprécier le poids des activités touristiques dans
l'économie nationale de différentes manières:
1. Une première approche -qui figure traditionnellement dans le compte
français du Tourisme consiste à évaluer la
consommation touristique intérieure
et à comparer cet
agrégat T2,
(correspondant aux dépenses des touristes
résidents et non-résidents sur le territoire métropolitain
ainsi qu'à la consommation des touristes français auprès
de prestataires de services français à l'occasion de voyages se
déroulant hors de France)
au Produit Intérieur Brut national,
le PIB .
Ceci conduit aux résultats suivants (établis à partir
d'agrégats évalués en prix courants en millions de francs):
ANNÉE 1993 1994 1995 1996 1997 (p)
PIB 7077.1 7389.7 7662.4 7871.7 . 8137.1
T2 515.3 533.0 541.9 556.8 565.1
T2/PlB 7.3% 7.2 % 7.1 % 7.1% 6.9%
2. L 'emploi direct dans les activités caractéristiques du tourisme constitue également un bon indicateur du poids économique de ce secteur.
2.a)
Poids des effectifs de la branche " Hôtels-Cafés-Restaurants
"
1997
en milliers
Secteurs d'activité salariés non Total
salariés
HCR 632 186.1 818.1
Services aux particuliers 1468, 329.91 1797.9
Ensemble des services marchands 41941 53-1.61. 4725-.6
Source: Comptes des Services 1996
Près d'un employé sur deux dans les " services aux particuliers " travaille donc dans la branche HCR, un sur six dans l'ensemble des services marchands (entreprises et particuliers).
2.b) Évolution des effectifs salariés dans les activités caractéristiques du tourisme
L'UNEDIC
donne des chiffres sur
l'emploi salarié
au 31 décembre de
chaque année dans les établissements affiliés au
régime d'assurance chômage. Ces chiffres permettent d'analyser
l'évolution des effectifs salariés par activité au niveau
le plus fin de la NAF (Nomenclature d'Activités Française) et
donc d' avoir un éclairage sur les différentes activités
caractéristiques du Tourisme.
Ces activités caractéristiques du tourisme comprennent les
hôtels et autres hébergements touristiques, cafés,
restaurants -hors cantines et traiteurs -, agences de voyages, remontées
mécaniques, thermalisme et thalassothérapie. Le champ de ces
activités diffère de celui retenu dans la branche HCR, telle que
définie dans les Comptes des Services et mentionnée ci-dessus,
qui inclut les hébergements non touristiques, les cantines et traiteurs
mais exclut les remontées mécaniques et le thermalisme - thalasso.
La dernière armée UNEDIC disponible est 1996, avec des chiffes
encore provisoires (5 79 5 10 de salariés au 31/12/96)
On observe sur les dix dernières années une tendance
générale croissante de l'effectif salarié de 3% en moyenne
par an. Mais ce rytlune s'est ralenti au cours des six dernières
années et l'analyse par secteur d'activité souligne certaines
disparités :
La part de la restauration ne cesse de croître depuis 10 ans. De 1986
à 1996, elle est passée de 40,6% à 50,3%, soit près
d'un emploi sur deux dans les entreprises caractéristiques du tourisme.
La croissance de la restauration rapide a été beaucoup plus
importante que celle de la restauration traditionnelle (+l 0,8% par an en
moyenne sur 10 ans contre +3,9%) mais on observe un rééquilibrage
dans les rythmes d'évolution depuis 1990 aux alentours de 3,5%.
En 1996 les effectifs salariés dans les débits de boissons et
cafés tabacs ne représentaient plus que 6,5% de l'ensemble des
salariés des activités caractéristiques contre 10,2% en
1986. Après'une baisse régulière jusqu'en 1992, les
effectifs dans les débits de boissons et cafés tabacs ont
tendance à augmenter depuis ces dernières années au rythme
moyen de +2,2% l'an (hausse légèrement plus marquée pour
les cafés tabacs que pour les débits de boissons).
La part des hôtels diminue très légèrement passant
de 29,7% en 1986 à 27,1% en 1996. L'emploi salarié dans les
hôtels après avoir augmenté jusqu'en 1992 au taux annuel
moyen de +3,5% amorce une période de quasi stagnation avec une
croissance annuelle moyenne de +0,4% à partir de 1993.
A côté des 579 510 salariés recensés par l'UNEDIC au
31 décembre 1996, l'INSEE évaluait en 1996 les
emplois non
salariés
dans la branche " Hôtels-Cafés-Restaurants "
à
186 700.
L'évolution de ces effectifs est moins favorable puisque l'on assiste,
selon les estimations des comptes nationaux à une baisse sensible qui
aurait touché plus de 9 000 emplois ces dernières années
passant de 196 100 en 1992 à 186 700 en 1996 (soit -1,2% en moyenne par
an).Selon les dernières estimations présentées à la
commission des Comtes des Services le 1 er juillet, les effectifs non
salariés auraient même continué à baisser en 1997
pour atteindre le chiffre de 186100.
Cependant ces photographies de l'emploi au 31 décembre de l'année
ne permettent pas d'analyser de façon assez fine l'emploi touristique et
en particulier son caractère permanent ou saisonnier. Des travaux
actuellement menés par la Direction du Tourisme à la demande de
la mission sur l'évaluation de la situation sociale et professionnelle
des travailleurs saisonniers du tourisme, que Madame la Ministre du Tourisme a
confiée à Monsieur Le Pors, permettront grâce à
l'exploitation des Déclarations Annuelles des Données Sociales de
1996 de progresser dans la connaissance de l'emploi saisonnier.
D'autre part l'évaluation de l'emploi non salarié à
travers des enquêtes par sondage reste peu précise lorsque l'on
s'intéresse à des secteurs d'activité très
spécifiques. Il apparaît donc indispensable d'améliorer les
outils statistiques actuels, de développer d'autres sources
d'investigation (fichiers nationaux des DADS, URSSAF ... ) afin de mieux cerner
l'emploi généré par la consommation touristique
intérieure et son évolution.
Enfin, si l'on s'intéresse à une approche conjoncturelle de la
situation de l'emploi dans le secteur touristique, on peut alors se
référer aux
estimations trimestrielles d'emploi salarié
dans les Hôtels-Cafés-Restaurants réalisées par
l'INSEE à partir de l'utilisation combinée des sources
trimestrielles UNEDIC (disponibles pour les établissements de plus de 10
salariés) et ACEMO (enquête trimestrielle sur l'Activité et
les Conditions dEmploi de la main-d'oeuvre). Ces estimations permettent de
suivre
l'évolution des effectifs salariés depuis le
début de l'année 1997.
A la fin du premier trimestre de 1998, dernières données
disponibles, le nombre de salariés dans les
Hôtels-Cafés-Restaurants progressait de 0.2% en données
corrigées des variations saisonnières par rapport à la fin
de l'année 1997. On évaluait alors les effectifs salariés
à un peu plus de 624 000 soit Il 300 de plus qu'au 31 mars de
l'année dernière.
Tout en s'inscrivant dans la croissance régulière des effectifs
salariés, ces dernières, données marquent un
fléchissement de l'accélération observée à
partir du quatrième trimestre de 1996 que l'on n'observe pas dans les
autres services aux particuliers (activités récréatives,
culturelles et sportives, services personnels et domestiques). On retrouve par
contre ce même mouvement dans le " commerce de détail,
réparations " où l'on n' enregistrait que +0. 1 % par rapport au
trimestre précédent.
3. Les entreprises françaises
La
France est le ler pays européen en matière d'offre et de
clientèle accueillie en hôtellerie de plein air puisqu'elle
possède presque la moitié de l'offre européenne. Elle se
range au 2ème position après les Etats-Unis au niveau mondial.
Seules les grandes compagnies sont compétitives sur un plan
international. Parmi les plus grands groupes hôteliers au plan mondial,
on note la prédominance des Américains qui comptent 7 groupes
dans les 10 premiers. En 1998, 3 groupes hôteliers français
figurent parmi les 12 premiers mondiaux: Accor (Sofitel, Novotel, Mercure,
Ibis, Etap Hotel, Formule 1, Les Jardins de Paris, Motel 6), en
quatrième position, la Société du Louvre avec ses
enseignes Concorde, Campanile, Première Classe, Bleu Marine et Clarine
occupe la 7ème place et Hotels & Compagnie (Nuit &hôtel,
balladins, Climat de France) arrive en 11 ème position.
Par ailleurs, les Gîtes de France, ler réseau européen de
tourisme chez l'habitant avec 44 000 gîtes et 21466 chambres
d'hôtes (soit 266 000 lits), accueille 2 millions de vacanciers par an
dont un tiers d'étrangers.
- Les agences de voyages
Les
voyagistes français sont aujourd'hui confrontés à 2
problèmes majeurs par rapport à leurs concurrents
européens :
*
leur taille
(volume d'affaires et nombre de clients relativement peu
importants par rapport aux voyagistes allemands et britanniques)
*
leur faible niveau d'intégration
(fis ne font qu'asserribler
des prestations proposées par d'autres prestataires de services sans en
avoir la maîtrise directe).
Les premiers réseaux français ont une dimension internationale
notable et allient, pour Nouvelles Frontières et Club Med, les deux
activités majeures : le tour operating et la distribution.
L'intégration de la filière tourisme caractérise les
géants européens que sont les TO allemands et anglais, au premier
rang desquels TUI (27.5 millards de FF de CA en 1997), Nur (17 millards de FF
de CA en 1997) et LTT (10.5 millards de FF de CA en 1997) en Allemagne,
Airtours (19.3 millards de FF de CA en 1997) et Thomson Travel (15.9 millards
de FF de CA en 1997) au Royaume-Uni. Ils ont une vocation beaucoup plus
généraliste que leurs homologues français et disposent
d'un réservoir de clientèle plus populaire en raison du fort taux
de départ à l'étranger et des prix des T O de 20 à
30 % moins chers qu'en France.
Les plus gros opérateurs allemands se développent à la
fois par stratégie d'intégration verticale, contrôlant
ainsi transport, hébergement, distribution, et horizontale avec des
prises de participation chez d'autres voyagistes d'autres pays. Les Allemands
dominent le marché européen de ce secteur (4 dans les 10
premiers) de même pour les britanniques (3 dans 10 premiers). Les quatre
premiers TO britanniques (Thomson, Airtours, First Choice et Thomas Cook
-Sunworld) contrôlent 80 % du marché dans leur pays.
L'intégration de la filière tourisme caractérise les
géants européens que sont les voyagistes allemands et anglais, au
premier rang desquels TUI (26 milliards de francs de C.A en 1996), NUR
(16.5 milliards de francs en 1995) et LTU en Allemagne ou Thomson Travel et
Airtours au Royaume-Uni. Ils ont une vocation beaucoup plus
généraliste que leurs homologues français et disposent
d'un réservoir de clientèle plus populaire en raison du fort taux
de départ à l'étranger et des prix des voyagistes de 20
à 30% moins chers qu'en France
2(
*
)
.
Globalement, les TO européens ont amélioré leurs
résultats en 1997. TUI, le chef de file allemand, se situe loin devant
avec un chiffre d'affaires de 27,5 milliards de FF, en progression de 13 % par
rapport à 1996. Les TO britanniques Airtours et Thomson occupent les
2è et 4è places du classement. Pour la lère fois,
Nouvelles Frontières passe devant le Club Med. Les deux groupes
français sont les seuls déficitaires en 1997 quand tous les
concurrents européens affichent des bénéfices en hausse.
Partenariats et synergies entre entreprises sont indispensables pour
prospérer. Depuis quelques années, la France essaie de combler
son retard en multipliant les alliances, notamment à l'étranger.
*
• *
Il faut
garder à l'esprit qu'une bonne part des facteurs de la
compétitivité du secteur du tourisme dépend de facteurs
sinon macro-économiques du moins qui dépasse la compétence
du secrétariat d'État au tourisme.
Le taux de change d'abord, qui a été un paramètre
déterminant dans la concurrence que nous mènent nos deux voisins
espagnols et italiens avec l'avènement de l'Euro, les données
évoluent. Dans un espace économique unifié, la concurrence
a toutes les chances d'être plus rude car les termes de comparaison de
prix seront directs. Le taux de change ne continuera à jouer un
rôle qu'entre zones, la zone dollar étant du point de vue du
tourisme à la fois client et concurrents, tandis que la valeur du Yen
n'interviendra que pour réguler la demande japonaise.
Les autres éléments importants dans la
compétitivité du tourisme français sont les charges
fiscales et sociales :
Dans l'Union Économique Européenne, les taux de TVA varient
encore d'un pays à l'autre. La France applique des taux de TVA
différents selon qu'il s'agit d'hébergement (5.5 %) de
restauration sur place (20.6 %) ou de restauration à emporter (5.5 %).
Ainsi, au plan de la compétitivité des entreprises
françaises, le taux de TVA sur l'hébergement est
particulièrement avantageux, contrairement à celui
appliqué sur d'autres prestations (restauration, location de salles, ...
).
Le coût de la main d'oeuvre est, par ailleurs et selon l'étude
réalisée par Coach Omnium3(
*
), parmi les plus élevés : il
est globalement inférieur de 7 % pour une entreprise italienne et
jusqu'à 42 % pour une entreprise anglaise comparativement à une
entreprise française. L'ensemble de ces données affecte
directement les conditions de rentabilisation des entreprises. Pour la
restauration en particulier, pour un repas payé 100 F par un client, en
tenant compte des taux de TVA, des prélèvements obligatoires, du
coût de la main d'oeuvre et de la vie,... il resterait au restaurateur
français 17 francs de bénéfice, contre 22 F en Allemagne,
32 F au Royaume-Uni et 38 F en Espagne.