EXAMEN DES ARTICLES
DU PROJET DE LOI ORGANIQUE
Article 1er
(article L.O. 137-1 du code
électoral)
Incompatibilité entre un mandat de
parlementaire
national et le mandat de parlementaire
européen
L'article premier du projet de loi organique tend à
insérer dans le code électoral un nouvel article L.O. 137-1
rendant incompatible le mandat de député avec celui de
représentant au Parlement européen.
Pour mémoire,
selon l'article L.O. 297 du même code, la
législation sur les incompatibilités applicables aux
députés l'est également aux sénateurs.
De la sorte, tout mandat parlementaire national serait incompatible avec celui
de parlementaire européen, ce que n'exigent pas les textes
communautaires qui déclarent, au contraire, ces deux mandats
compatibles.
On pourrait certes considérer que l'incompatibilité entre le
mandat de parlementaire national et celui de parlementaire européen
serait de nature à accroître la césure entre le Parlement
français et l'Assemblée de Strasbourg, cette dernière
étant souvent critiquée pour être coupée des
réalités nationales.
En pratique, l'exercice simultané d'un mandat parlementaire avec celui
de député européen ne concerne actuellement que deux
députés et aucun sénateur.
Cinq pays de la communauté ont d'ores et déjà
établi une telle incompatibilité.
Votre commission des Lois vous propose d'approuver le texte proposé
pour le premier alinéa de l'article L.O. 137-1 du code
électoral, posant le principe de l'incompatibilité.
Le
deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.O.
137-1
du code électoral déterminerait les
conditions dans
lesquelles il serait mis fin à l'incompatibilité.
Le parlementaire national élu au Parlement européen
cesserait
de ce fait même, d'exercer son mandat de parlementaire national.
Toutefois, en cas de contentieux électoral, la vacance du
siège ne serait proclamée qu'après la décision
juridictionnelle confirmant l'élection
.
Tout parlementaire national se portant candidat aux élections
européennes s'engagerait donc à cesser d'être
député ou sénateur s'il était élu au
Parlement européen.
Cette solution est la reprise de celle retenue par le deuxième
alinéa de l'article L.O. 137 du code électoral, aux
termes duquel tout député élu sénateur ou tout
sénateur élu député cesse, de ce fait même,
d'appartenir à la première assemblée dont il était
membre, sous la même réserve en cas de contentieux
électoral.
On notera qu'une solution similaire serait apportée dans le cas inverse
(membre du Parlement européen élu à l'Assemblée
nationale ou au Sénat) par l'article 8 du projet de loi ordinaire (voir
ci-après le commentaire de cet article).
L'article 1er du projet de loi organique
initial
ajoutait, dans une
dernière phrase, que,
pendant la durée d'un contentieux
électoral éventuel, l'élu ne pourrait participer aux
travaux de l'Assemblée nationale ou du Sénat.
Cette dernière phrase a été
supprimée par
l'Assemblée nationale
, contre l'avis du Gouvernement, après
que l'auteur de l'amendement, M. Brunhes, eut fait valoir le risque
qu'elle n'encourage les contentieux, notamment en cas de faible majorité
à l'Assemblée nationale.
La commission n'avait pas examiné cet amendement, sur lequel le
rapporteur a émis un avis favorable à titre personnel.
Votre commission des Lois estime préférable de retenir la
solution applicable au cas d'un député élu sénateur
ou d'un sénateur élu député, à savoir
l'impossibilité de participer aux travaux de l'assemblée pendant
le contentieux électoral éventuel et donc de rétablir la
phrase supprimée par l'Assemblée nationale.
Elle vous propose un
amendement
en ce sens.
Elle vous propose
d'adopter l'article 1er ainsi
modifié.
Article 1er bis
(article L.O. 139 du code
électoral)
Incompatibilité du mandat parlementaire avec la
fonction de membre du Conseil de la politique monétaire de la Banque de
France
L'article L.O. 139 du code électoral prévoit
actuellement l'incompatibilité entre, d'une part, un mandat
parlementaire et, d'autre part, la qualité de membre du Conseil
économique et social ou la fonction de membre du Conseil du gouvernement
d'un territoire d'outre-mer.
L'incompatibilité entre un mandat parlementaire et cette dernière
fonction, qui n'existe plus serait supprimée par l'article 9 du
présent projet de loi organique.
L'article 1
er
bis
du projet de loi organique tend à
insérer à l'article L.O. 139 une incompatibilité
avec les fonctions de membre du Conseil de la politique monétaire de la
Banque de France.
Le texte résulte d'un amendement de Mme Frédérique
Bredin, repris par la commission et sur lequel le Gouvernement s'en est remis
à la sagesse de l'Assemblée nationale.
L'incompatibilité proposée a, en réalité,
déjà été établie
par l'article 10
de la loi n° 93-980 du 4 août 1993 relative au statut de la Banque
de France et à l'activité et au contrôle des
établissements de crédit.
Selon ce texte en effet, le gouverneur, les sous-gouverneurs et les autres
membres du Conseil de la politique monétaire "
ne peuvent
exercer de
mandats électifs
".
Certes, s'agissant d'une incompatibilité avec un mandat parlementaire,
celle-ci devrait être établie par une loi organique.
On pourrait toutefois se demander si l'article L.O. 142 du code
électoral ne serait pas suffisant pour établir
l'incompatibilité (incompatibilité du mandat parlementaire avec
des fonctions publiques non électives).
L'article 1
er
bis
est donc sans effet pratique et sans lien
avec l'objet initial du projet de loi.
Votre commission des Lois vous propose en conséquence un
amendement
tendant à disjoindre l'article 1er bis.
Article 1er ter
(article L.O. 140 du code
électoral)
Incompatibilité du mandat parlementaire avec les
fonctions
de juge des tribunaux de
commerce
L'article L.O. 140 du code électoral rappelle les
dispositions de l'article 9 de l'ordonnance n° 58-1270 portant loi
organique relative au statut de la magistrature, rendant incompatible le mandat
parlementaire avec les fonctions de magistrat.
L'article 1
er
ter
du projet de loi tend à
compléter l'article L.O. 140 du code électoral pour
établir une incompatibilité entre le mandat parlementaire et les
fonctions de juge des tribunaux de commerce.
Il résulte d'un amendement de M. Jacques Brunhes, repris par
la commission, voté en première lecture par l'Assemblée
nationale après que le Gouvernement eut émis un avis de
" sagesse " (disposition n'entrant pas dans le cadre du texte).
La décision de Conseil constitutionnel du 19 décembre 1996 a
confirmé que les fonctions de juge des tribunaux de commerce ne sont pas
incompatibles avec l'exercice d'un mandat de député ou de
sénateur.
D'une part, l'article L.O. 140 précité ne vise que les personnes
relevant du statut de la magistrature.
D'autre part, l'article L.O. 142 du même code relatif à
l'incompatibilité des fonctions publiques non électives n'est pas
applicable aux juges des tribunaux de commerce, puisque ceux-ci sont
élus (dans les conditions fixées par les articles L. 413-1 et
suivants du code de l'organisation judiciaire).
On relèvera cependant que les tribunaux de commerce ne sont pas les
seules juridictions au sein desquelles des fonctions juridictionnelles sont
exercées par des personnes élues et non soumises au statut de la
magistrature.
Pourrait être cité, par exemple, le cas des conseillers
prud'hommes et des assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux.
Les juges non soumis au statut de la magistrature, mais
désignés
(assesseurs des tribunaux des affaires de
sécurité sociale ou des tribunaux de l'incapacité, par
exemple) pourraient, en l'absence de texte spécifique, néanmoins
être considérés comme exerçant des fonctions
incompatibles avec un mandat parlementaire (article L.O. 142 du code
électoral, concernant des fonctions publiques non électives).
Par ailleurs, les fonctions de membre du Conseil d'Etat et des tribunaux
administratifs, de magistrat des chambres régionales des comptes et de
membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel ont été
rendues incompatibles avec un mandat parlementaire par des textes particuliers
pris en application de l'article L.O.142 du code précité.
La disposition proposée, plus inspirée semble-t-il par
l'actualité immédiate que par une réflexion approfondie,
créerait donc une
inégalité de traitement
susceptible d'être censurée par le Conseil constitutionnel
.
Il est apparu préférable à votre commission des Lois de ne
pas examiner cette question de manière isolée mais
d'étendre cette réflexion à celle plus
générale de la compatibilité des fonctions
juridictionnelles électives avec un mandat parlementaire.
Pour ces raisons, la commission des Lois vous propose par
amendement tendant
à disjoindre l'article 1er
ter
du projet de loi
organique.
Article 2
(article L.O. 141 et L.O. 141-1 du code
électoral)
Incompatibilité d'un mandat parlementaire avec une
fonction
d'exécutif d'une collectivité territoriale ou avec
plus
d'un mandat local
L'article 2 contient la disposition essentielle du projet de
loi organique. Il concerne deux catégories d'incompatibilités
applicables aux parlementaires :
- d'une part, le mandat parlementaire serait incompatible avec
l'exercice simultané d'une fonction d'
exécutif
d'une
collectivité territoriale,
- d'autre part, il étendrait à tous les
conseillers
municipaux
la liste des mandats compatibles avec celui de parlementaire
dans la limite d'un seul.
L'article L.O.141 en vigueur permet au parlementaire l'exercice d'un seul
mandat ou d'une seule fonction parmi les suivantes : maire d'une commune d'au
moins 20.000 habitants, maire-adjoint d'une commune d'au moins 100.000
habitants, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller
régional, conseiller à l'Assemblée de Corse.
Cette limitation ne concerne donc actuellement ni le mandat de conseiller
municipal (quelle que soit la taille de la commune) ni les fonctions de maire
ou de maire-adjoint des communes dont la population est inférieure aux
seuils fixés par l'article L.O.141 précité.
Le parlementaire, s'il est président de conseil général ou
régional, peut ainsi, en l'état actuel du droit, être
simultanément maire d'une commune peuplée de moins de 20.000
habitants ou conseiller municipal de toute commune.
Le
projet de loi organique
interdirait
au député ou
au sénateur d'exercer
une fonction d'exécutif
d'une
collectivité territoriale, quelle que soit sa taille (maire,
président de conseil général ou régional,
président du conseil exécutif de Corse).
L'Assemblée nationale a étendu cette incompatibilité, sur
amendements de M. Pierre Albertini et de la commission, sur lesquels
le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée, aux
fonctions de président d'un établissement public de
coopération intercommunale (EPCI) doté d'une fiscalité
propre.
Appartiennent à cette catégorie : les communautés
urbaines, les communautés de villes, les districts, les
communautés de communes et les syndicats d'agglomérations
nouvelles.
Le texte permettrait au parlementaire l'exercice d'un seul mandat local, y
compris celui de conseiller municipal, quel que soit le nombre des habitants de
la commune.
Il en résulterait que le député ou le sénateur ne
pourrait être le maire de la plus petite commune de France. S'il en
était conseiller municipal, il ne pourrait exercer d'autres mandats, ce
qui aboutirait à assécher singulièrement le vivier des
candidats à ces fonctions le plus souvent bénévoles.
Sous une apparente simplicité
(incompatibilité du mandat
parlementaire avec une fonction exécutive locale ; limitation à
un seul du nombre des mandats locaux des parlementaires),
le projet de loi
organique ne prend pas en considération la nécessaire
articulation entre mandat national et fonctions ou mandats locaux.
Loin d'écarter par principe toute perspective d'aménagement des
incompatibilités parlementaires -comme elle l'a déjà
montré à propos de l'article 1er du projet-, votre commission des
Lois entend examiner la question d'ensemble avec, par rapport à la mise
en oeuvre des lois de décentralisation, un recul dont on ne pouvait pas
disposer lors de la discussion des lois du 30 décembre 1985 tendant
à limiter le cumul des mandats électoraux et des fonctions
électives.
Votre commission des Lois a tout d'abord entendu écarter tout esprit de
système et, en particulier, l'idée trop simple suivant laquelle
il conviendrait de distinguer l'intérêt local de
l'intérêt national afin d'éviter tout risque de conflit
d'intérêts.
Les risques de conflit d'intérêt paraissent davantage
résulter de la multiplication des niveaux administratifs, de
l'enchevêtrement des compétences et des financements
croisés, questions non traitées par le projet.
Les options que vous propose votre commission des Lois s'appuient sur plusieurs
objectifs :
1°
le libre choix de l'électeur
, qui doit demeurer un
principe essentiel de la démocratie.
Le corps électoral détermine lui-même les personnes qui lui
paraissent en meilleure situation pour exercer les responsabilités et
assure un renouvellement adapté des élus
6(
*
)
.
Telle est la signification première des élections.
Aussi convient-il de limiter la législation sur les
incompatibilités au strict nécessaire, la législation
électorale n'étant pas destinée à restreindre le
choix des citoyens.
2°
La proximité du parlementaire
Pour rester proches des réalités du terrain, dans
l'intérêt même de la fonction parlementaire, il convient que
les députés et les sénateurs puissent conserver la
possibilité d'exercer des responsabilités de gestion d'une
collectivité territoriale.
3°
La disponibilité
La nécessaire disponibilité des élus est souvent
invoquée à l'appui du renforcement de la législation sur
les incompatibilités.
Votre commission des Lois admet naturellement qu'un parlementaire doive
disposer de temps pour exercer ses fonctions. Elle observe néanmoins que
l'emploi du temps d'un élu ne se limite pas aux horaires d'un
salarié et que les nouvelles technologies abolissent
singulièrement les distances géographiques (TGV, avion, Fax,
Internet, ordinateur ...).
Certes, chacun aura pu constater que les charges des élus se sont
accrues et diversifiées (complexification de la législation,
conséquences de la décentralisation). L'instauration de la
session unique du Parlement a pu alourdir l'agenda parlementaire alors qu'elle
était destinée à en faciliter l'organisation.
Ces évolutions doivent être incontestablement prises en
considération mais elles ne conduiront jamais l'opinion publique
à souhaiter que les élus nationaux cessent de faire la navette
entre la capitale et leur circonscription pour devenir des législateurs
en chambre.
4°
La lisibilité
Les auteurs du projet de loi organique font valoir que celui-ci aurait
l'avantage de la clarté, au sens où il rendrait incompatibles les
fonctions d'exécutif local avec le mandat parlementaire et ne
permettrait l'exercice de ce dernier qu'avec un seul mandat local.
Rien n'est moins sûr.
Comment les Français pourraient-ils comprendre qu'un
député ou un sénateur ne puisse pas être maire d'une
commune de 500 habitants mais puisse être vice-président d'un
conseil régional ou d'un établissement public de
coopération intercommunale de 500.000 habitants ?
Quant aux ministres, rien ne les empêcheraient d'être maire d'une
grande ville tant que n'aurait pas été déposé puis
adopté un projet de révision de l'article 23 de la Constitution.
En conséquence, votre commission des Lois vous propose par voie
d'amendement une nouvelle rédaction de l'article 2 du projet de loi
organique, pour modifier l'article L.O.141 du code électoral.
Le premier alinéa de l'article L.0.141 reprendrait les dispositions
proposées par le projet de loi organique pour l'article L.O.141-1,
permettant à un parlementaire d'exercer simultanément un seul
mandat local (conseiller régional, conseiller de l'Assemblée de
Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller
municipal) en écartant du dispositif proposé les conseillers
municipaux des communes de moins de 3 500 habitants.
Par rapport aux dispositions en vigueur de l'article L.O.141, le texte
proposé étendrait donc aux conseillers municipaux des communes
d'au moins 3 500 habitants l'incompatibilité d'ores et
déjà applicable au maire d'une commune d'au moins
20.000 habitants et au maire adjoint d'une commune d'au moins 100.000
habitants.
En conséquence, il ne serait plus possible à un parlementaire
de siéger simultanément dans un conseil général (ou
un conseil régional)
et
un conseil municipal d'une commune d'au
moins 3 500 habitants, et ce quelles que soient les fonctions qu'il y
exerce le cas échéant.
En revanche, un parlementaire pourrait toujours exercer un mandat local dans sa
plénitude, c'est-à-dire y compris en assumant des fonctions
exécutives.
Le deuxième alinéa de l'article L.O.141 en vigueur, concernant la
population prise en compte serait maintenu.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 2 ainsi
modifié
.
Article 2 bis
(article L.O. 142-1 du code
électoral)
Incompatibilité d'un mandat parlementaire
avec
les fonctions de membre de cabinet
du président de la
République ou d'un cabinet
ministériel
L'article 2
bis
du projet de loi organique tend à
instituer une incompatibilité entre un mandat parlementaire et les
fonctions de membre du cabinet du président de la République ou
d'un cabinet ministériel.
L'amendement dont ce texte est issu, présenté par la commission
des Lois de l'Assemblée nationale sur l'initiative de M. Pierre
Albertini, reprend une suggestion formulée par le groupe de travail
"
Politique et argent
" constitué à
l'Assemblée nationale en 1994 sous la présidence de
M. Philippe Séguin. Le Gouvernement s'en est remis à la
sagesse de l'Assemblée nationale sur cet amendement.
Cette proposition pourrait être rapprochée des textes instituant
une inéligibilité -et non une incompatibilité- pour
l'élection des conseillers municipaux, généraux et
régionaux, concernant les membres du cabinet du président du
conseil général ou régional (articles L. 231 (8°), L.
195 (18° et 19°) et L. 340 (1°) du code électoral).
On remarquera que l'article 2
quater
du projet de loi ordinaire limite
le champ de cette inéligibilité, s'agissant uniquement des
conseillers municipaux, aux seuls directeurs de cabinet (voir ci-après
le commentaire de cet article).
Les membres de ces cabinets ne sont-ils pas déjà concernés
par l'article L.O. 142 du code électoral
(incompatibilité avec les fonctions publiques non électives) qui
traduit le principe de la séparation entre l'exécutif et le
législatif ?
En tout état de cause, cet article n'a pas de lien avec l'objet du
projet de loi initial, à savoir les incompatibilités entre
mandats électifs.
En conséquence, votre commission des Lois vous propose un
amendement
tendant à disjoindre de l'article 2
bis
du projet de loi
organique.
Article 2 ter
(article 143-1 du code
électoral)
Incompatibilité du mandat parlementaire avec les
fonctions de membre du directoire de la Banque centrale européenne
et
de membre de la Commission
européenne
L'Assemblée nationale a adopté un article
additionnel
tendant à insérer dans le code électoral un nouvel article
L.O. 143-1 qui rendrait incompatible le mandat de député ou de
sénateur avec les fonctions de membre du directoire de la Banque
centrale européenne et de membre de la Commission européenne.
Cet article additionnel provient d'un amendement de
M. Pierre Albertini, repris par la commission, sur lequel le
Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
La disposition proposée est déjà satisfaite par les
dispositions en vigueur de l'article L.O. 143 du code électoral selon
lequel "
l'exercice des fonctions conférées par un
État étranger ou une organisation internationale et
rémunérées sur leurs fonds est également
incompatible avec le mandat de député
".
S'agissant des
membres du directoire de la Banque centrale
européenne
, l'article 109 A, paragraphe 2, point b du
Traité sur l'Union européenne prévoit leur nomination d'un
commun accord par les gouvernements des Etats membres au niveau des chefs
d'Etat ou de gouvernement, sur recommandation du Conseil et après
consultation du Parlement européen et du conseil des gouverneurs.
Selon l'article 11-4 du protocole sur les statuts du système
européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne
(publié au
Journal
officiel
du 28 janvier 1994), les
conditions d'emploi des membres du directoire, en particulier leurs
émoluments et leur protection sociale font l'objet de contrats conclus
avec la Banque centrale européenne et sont fixées par le conseil
des gouverneurs.
L'article L.O. 143 paraît donc applicable aux membres du directoire de
la Banque centrale européenne, puisqu'il s'agit bien de fonctions
conférées par une organisation internationale et
rémunérées sur leurs fonds.
Les
membres de la Commission européenne
remplissent
également les critères fixés par l'article L.O. 143 du
code électoral
. Ses membres sont nommés d'un commun accord
par les gouvernements des Etats membres et ne représentent pas l'Etat
dont ils ont la nationalité puisqu'ils "
ne sollicitent ni
n'acceptent d'instructions d'aucun gouvernement ni d'aucun organisme
"
(article 10-2 du traité instituant un Conseil unique et une Commission
unique).
Ils sont naturellement rémunérés sur le budget
communautaire et ne peuvent exercer aucune autre activité
professionnelle rémunérée ou non.
Outre qu'il n'est pas lié à l'objet du projet de loi,
l'article 2
ter
du projet de loi organique est donc
inutile
et votre commission des Lois vous propose en conséquence
un
amendement tendant à sa
suppression
.
Article 2 quater
(article L.O. 144 du code
électoral)
Missions confiées à un
parlementaire
L'article 2
quater
du projet de loi organique tend
à
compléter les dispositions de l'article L.O. 144 du code
électoral concernant les missions temporaires confiées à
un parlementaire par le Gouvernement.
Il est issu d'un amendement de Mme Frédérique Bredin,
repris par la commission, et sur lequel le Gouvernement s'en est remis à
la sagesse de l'Assemblée.
Selon le texte en vigueur, les missions temporaires sont compatibles avec un
mandat de député ou de sénateur à condition que
leur durée ne dépasse pas six mois.
Le projet limiterait à deux le nombre de missions que le parlementaire
pourrait se voir confier au cours d'une même législature.
La formule de la mission temporaire auprès du Gouvernement était
largement utilisée sous les IIIème et IVème
Républiques, les parlementaires étant nommés pour une
durée parfois longue à des postes d'ambassadeur, de préfet
ou de gouverneur.
L'ordonnance n° 58-998 du 24 octobre 1958 a rendu les fonctions
publiques non électives incompatibles avec un mandat de parlementaire.
Ces dispositions ont été reprises à l'article L.O. 142 du
code électoral.
Afin d'assouplir le nouveau principe ainsi établi, la pratique
antérieure de la mission confiée par le Gouvernement a
été encadrée par l'article L.O. 144 du code
électoral qui admet la compatibilité de ces missions, mais dans
un délai limité à six mois.
Ces missions permettent aujourd'hui au parlementaire désigné de
remplir des fonctions d'étude, de réflexion et de proposition.
La mission est confiée au député ou au sénateur par
un décret visant expressément l'article L.O. 144 du code
électoral, suivi d'une lettre de mission définissant l'objet de
celle-ci.
Pendant la durée de cette mission, dans la limite de six mois, le
parlementaire peut continuer d'exercer son mandat.
A l'issue de cette durée, si la mission n'est pas terminée, le
sénateur (articles L.O. 319 et 320) ou le député (article
L.O. 176-1) est remplacé. Si nécessaire, il est
procédé à des élections partielles (articles L.O.
322 et L.O. 178).
La proposition serait destinée à éviter la dérive
résultant de l'éventualité de plusieurs missions qui
seraient confiées à un même parlementaire durant une
période limitée.
Le texte ne permettrait donc pas à un parlementaire de remplir plus de
deux missions temporaires au cours d'une législature, quelle que soit la
durée de celles-ci (qui, par hypothèse, n'auraient pas
dépassé six mois chacune). En revanche, il ne s'appliquerait
qu'aux missions confiées par le Gouvernement et non à celles
exercées à la demande du président de la République.
L'hypothèse couverte par cette exception apparaît très
exceptionnelle (elle n'aurait concerné qu'un député depuis
1974).
La limitation du nombre des missions temporaires serait
considérée sur une législature, ce qui peut s'admettre
pour un député dont la durée du mandat se confond
évidemment avec celle de la législature.
En revanche, on perçoit mal pourquoi cette limitation devrait, pour les
sénateurs, porter sur la durée du mandat de député.
En tout état de cause, cet article ne concerne pas les
incompatibilités avec des fonctions électives et ne parait donc
pas avoir sa place dans le présent projet de loi organique.
Votre commission des lois vous propose en conséquence un
amendement
tendant à disjoindre l'article 2
quater
du
projet de loi organique
.
Article 2 quinquies
(article L.O. 145 du code
électoral)
Incompatibilité du mandat parlementaire avec les
fonctions
de membre d'une chambre consulaire ou d'une chambre
d'agriculture
Cet
article additionnel, tendant à insérer un alinéa
additionnel après le premier alinéa de
l'article L.O. 145 du code électoral, résulte du vote
d'un amendement de Mme Frédérique Bredin repris par la
commission et sur lequel le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de
l'Assemblée nationale.
Il ne permettrait plus l'exercice simultané d'un mandat parlementaire et
des fonctions de membre du bureau d'une chambre consulaire ou d'une chambre
d'agriculture.
On remarquera qu'un sous-amendement de M. Jean-Marie Demange tendait
à substituer au terme -juridiquement imprécis- de chambre
consulaire celui plus clair de chambre de commerce et d'industrie et de chambre
des métiers.
Ce sous-amendement n'a cependant pas été défendu en
séance publique.
Selon l'article 48 du décret n° 91-739 du
18 juillet 1991, le terme de " compagnie consulaire "
désigne les assemblées des chambres françaises de commerce
et d'industrie, les chambres régionales de commerce et d'industrie, les
chambres de commerce et d'industrie et groupements consulaires.
L'article 1er de la loi du 9 avril 1898 qualifie les chambres de
commerce d'établissement public économique.
La rédaction imprécise du texte proposé ne permet pas de
savoir si l'incompatibilité serait retenue pour les assemblées
des chambres françaises de commerce et d'industrie seulement ou,
éventuellement, les chambres régionales, voire les chambres
locales.
Si le texte concerne l'Assemblée des chambres françaises de
commerce et d'industrie, qui regroupe les chambres régionales et
locales, l'article L.O. 145 en vigueur du code électoral
s'applique d'ores et déjà, ce texte instituant une
incompatibilité avec les fonctions de président et de membre du
conseil d'administration d'un établissement public national
(décision du Conseil constitutionnel n° 95-12-I du
14 septembre 1995).
Il n'en serait pas de même, en l'état actuel du droit, pour les
chambres régionales ou locales de commerce et d'industrie, car elles ne
constituent pas des établissements publics
nationaux
.
Un raisonnement comparable pourrait être tenu pour les chambres
d'agriculture.
En tout état de cause, l'amendement voté par l'Assemblée
nationale excède l'objet du présent projet de loi organique. Si
le débat sur cette question devait être ouvert, il trouverait plus
sûrement sa place dans un texte spécifique, proposé, le cas
échéant, après une étude approfondie.
En conséquence, votre commission des Lois vous propose un
amendement
tendant à disjoindre l'article 2
quinquies
du projet de
loi organique.
Article 2 sexies
(article L.O. 146 du code
électoral)
Incompatibilité avec des fonctions de direction
de sociétés ayant un objet financier et faisant
publiquement appel à
l'épargne
Cet
article additionnel est issu d'un amendement de
Mme Frédérique Bredin, repris par la commission et sur
lequel le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée
nationale.
Il modifierait sensiblement le champ de l'article L.O. 146 (2°)
du code électoral.
Le texte en vigueur concerne les incompatibilités applicables aux
dirigeants des sociétés (à l'exclusion des entreprises
constituées sous une autre forme) ayant
exclusivement
un objet
financier et faisant publiquement appel à l'épargne, ces deux
critères étant cumulatifs et non alternatifs.
La mention de l'adverbe
exclusivement
a pour conséquence de
limiter le champ de l'incompatibilité aux fonctions de direction
exercées dans les établissement bancaires ou financiers et
d'"
éviter que le parlementaire n'utilise sa situation pour
capter la confiance des épargnants en engageant ceux-ci dans une
activité de spéculation financière
" (rapport de
M. Dailly sur la loi organique n° 72-64 du 24 janvier 1972
- Sénat n° 15 (1971-1972), page 9).
Ce texte vise aussi les sociétés civiles autorisées
à faire publiquement appel à l'épargne, en particulier
celles dont l'objet est d'acquérir un patrimoine immobilier dans un but
locatif (SPCI et sociétés d'attribution).
La suppression de l'adverbe
exclusivement
aurait pour effet
d'étendre le champ de l'incompatibilité à l'ensemble des
sociétés ayant un objet
au moins en partie
financier et
faisant publiquement appel à l'épargne, soit en
réalité, à la plupart des sociétés
autorisées par la loi à faire appel à l'épargne
publique et qui utilisent cette faculté.
Sont autorisées à faire publiquement appel à
l'épargne :
- les sociétés anonymes et les sociétés en
commandite par action ;
- les société civiles de placement immobilier (SCPI) et les
sociétés d'attribution ;
- les banques mutualistes ou coopératives ;
- certains groupements d'intérêts économiques (GIE) ;
- les sociétés coopératives agricoles ;
- les associations ayant une activité économique ;
- les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).
La suppression de l'adverbe "
exclusivement
", proposée
par l'article 2
sexies
aurait donc pour conséquence
d'empêcher de très nombreux dirigeants d'entreprises d'exercer un
mandat parlementaire, sauf à renoncer à leur activité
professionnelle, et donc de contribuer à couper le Parlement de
l'activité économique du pays, à
" professionnaliser " le mandat parlementaire tout en
réduisant l'éventail des catégories socio-professionnelles
susceptibles d'accéder au Parlement.
Cette suppression entraînerait probablement de grandes
difficultés d'interprétation
: à partir de
quel niveau l'entreprise ayant un objet financier et une activité
industrielle ou commerciale devrait-elle être considérée
comme soumise au champ de l'article L.O. 146 (2°) du code
électoral ?
Il ne paraît là encore pas souhaitable de traiter cette question
par le biais d'un amendement sur un texte concernant initialement les
incompatibilités avec des fonctions électives.
Une telle évolution impliquerait une réflexion préalable
sur les incompatibilités professionnelles dont le régime est
complexe et mérite sans doute mieux qu'un amendement dont les
conséquences ne paraissent pas avoir été bien
mesurées.
Aussi, votre commission des Lois vous propose-t-elle un
amendement
tendant à disjoindre l'article 2
sexies
du projet de
loi organique
.
Article 2 septies
(article L.O. 146 du
code électoral)
Interdiction pour un parlementaire d'exercer les
droits attachés
à la propriété de tout ou partie
d'une société visée
à
l'article L.O. 146 du code
électoral
L'article 2
septies
du projet de loi
priverait,
pendant la durée de son mandat, le parlementaire de la
possibilité d'exercer les droits attachés à la
propriété de tout ou partie du capital d'une
société visée à l'article L.O. 146 du
code électoral, qu'il compléterait à cet effet. La
disposition, issue d'un amendement de
Mme Frédérique Bredin, repris par la commission et sur
lequel le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée
nationale, priverait en particulier le parlementaire du droit de vote et de
celui de percevoir des dividendes dans la société dont il
détiendrait des actions.
L'article L.O. 146 du code électoral concerne les fonctions de
président du conseil d'administration, président et membre du
directoire, président du conseil de surveillance, administrateur
délégué, directeur général, directeur
général adjoint ou gérant exercées dans les
sociétés répondant à l'un des critères
ci-après :
1° jouissance d'avantages assurés par une collectivité
publique, sauf s'ils découlent de l'application automatique d'un
texte ;
2° ayant
exclusivement
un objet financier et faisant publiquement
appel à l'épargne (cf. modification proposée à
l'article 2 sexies) ;
3° activité principale de prestation pour le compte ou sous le
contrôle d'une collectivité publique, d'une entreprise nationale
ou d'un État étranger ;
4° achat ou vente de terrains destinés à des constructions ;
promotion immobilière ou construction d'immeubles en vue de leur
vente ;
5° plus de la moitié du capital est constituée de
participations de sociétés visées aux 1° à
4°.
Ces dispositions s'appliquant à toute personne qui, directement ou par
personne interposée, exerce, en fait, la direction de l'une de ces
sociétés.
L'auteur de l'amendement a indiqué en séance publique à
l'Assemblée nationale que la disposition proposée avait pour
point de départ une décision du Conseil constitutionnel
n'assimilant pas la détention d'une partie du capital d'une
société quelle qu'en soit l'importance à la
" direction de fait " (décision 78-5-1 du
18 octobre 1977).
Les attributs attachés à la détention de tout ou partie du
capital d'une société se décomposent en trois
éléments :
- le droit d'information, de vote et de contrôle ;
- celui de percevoir des dividendes et de participer à la distribution
des actifs lors de la dissolution de la société ;
- le droit de céder des parts sociales.
Pendant son mandat, le parlementaire ne pourrait pas exercer ces droits. Son
droit de propriété se trouverait confisqué sans juste et
préalable indemnité -ce qui serait contraire à
l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen-
et " sans que la nécessité publique légalement
constatée l'exige évidemment " (décision du Conseil
constitutionnel DC 81-132 du 16 janvier 1982 sur la loi de
nationalisation).
On rappellera aussi que, selon la décision du Conseil constitutionnel
(DC 98-403 du 29 juillet 1998 sur la loi d'orientation relative
à la lutte contre les exclusions), "
le droit de disposer
librement de son patrimoine est un attribut essentiel du droit de
propriété
".
La disposition serait donc susceptible d'être déclarée
inconstitutionnelle.
De surcroît, celle-ci pourrait bloquer le fonctionnement d'une
société.
Ainsi, en aucun cas les engagements d'un associé ne peuvent être
augmentés sans le consentement de celui-ci. D'autres décisions
sont subordonnées à un accord unanime des actionnaires (par
exemple, transformation d'une société anonyme en
société en nom collectif ou en société civile).
Manifestement, les implications du texte proposé sont nombreuses et
complexes. Elles ne pourraient être sérieusement
étudiées, pour autant qu'elles soient constitutionnelles et
opportunes, que dans le cadre d'un texte portant spécifiquement sur les
incompatibilités professionnelles.
Aussi, votre commission des Lois vous propose-t-elle un
amendement tendant
à disjoindre
l'article 2
septies
du projet de loi
organique.
Article 2 octies
(article L.O. 147 du code
électoral)
Interdiction faite au parlementaire d'exercer une fonction
de direction ou de conseil dans une société
énumérée
à l'article L.O. 146 du code
électoral
L'article L.O. 147 en vigueur interdit au
parlementaire
d'accepter
en cours de mandat
une fonction de membre du conseil
d'administration dans l'un des établissements, sociétés ou
entreprises visés à l'article L.O. 146 du code
électoral (cf. article 2
septies
ci-dessus).
Le texte proposé est issu d'un amendement de
Mme Frédérique Bredin repris par la commission et sur
lequel le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée
nationale.
Il apporterait deux modifications aux dispositions en vigueur :
- reprenant les termes abrogés par la loi organique n° 95-63
du 19 janvier 1995, il étendrait à nouveau l'interdiction
aux fonctions de surveillance ou de conseil exercées de façon
permanente ;
- l'interdiction, actuellement limitée aux fonctions acceptées en
cours de mandat,
concernerait aussi les parlementaires qui exerçaient
ces fonctions avant leur élection
.
En interdisant à un parlementaire de poursuivre une activité
professionnelle qu'il exerçait avant son élection, le texte
contribuerait incontestablement à une " professionnalisation "
du mandat de député ou de sénateur.
Comme pour les articles précédents, votre commission des Lois
estime qu'une telle disposition devrait être examinée dans un
texte portant sur les incompatibilités professionnelles et non sur
celles concernant des fonctions électives.
Aussi, vous propose-t-elle un
amendement tendant à disjoindre
l'article 2
octies
du projet de loi organique.
Article 2 nonies
(article L.O. 148 du code
électoral)
Interdiction pour un parlementaire non élu local
d'exercer
des fonctions non rémunérées au sein du
conseil d'administration
d'une société d'économie mixte
locale
Cet
article issu d'un amendement de Mme Frédérique Bredin
repris par la commission et sur lequel le Gouvernement a émis un avis
défavorable, tend à supprimer le second alinéa de
l'article L.O. 148 du code électoral.
Le premier alinéa de l'article L.O. 148 -que le projet de loi ne
modifierait pas- autorise, par exception aux dispositions des articles L.O. 146
et L.O. 147 du code électoral rendant incompatible le mandat
parlementaire avec certaines activités privées, le parlementaire
à siéger dans des organismes d'intérêt
régional ou local aux conditions suivantes :
- le parlementaire est membre d'une assemblée délibérante
de collectivité territoriale,
- le parlementaire est désigné pour représenter cette
collectivité,
- la fonction n'est pas rémunérée,
- l'organisme n'a pas pour objet propre de faire ou de distribuer des
bénéfices.
Le second alinéa de l'article L.O. 148 autorise, toujours par
dérogation aux dispositions des articles L.O. 146 et 147 du code
électoral, les parlementaires, y compris dans le cas où ils
n'exercent pas de mandat local, à exercer des fonctions de
président du conseil d'administration, d'administrateur
délégué ou de membre du conseil d'administration des
sociétés d'économie mixte d'équipement
régional ou local (par exemple, agences financières de bassin) ou
des sociétés ayant un objet exclusivement social. Les fonctions
ne doivent pas être rémunérées.
Cette nouvelle interdiction, particulièrement si elle devait
être combinée avec un régime d'incompatibilité plus
restrictif, priverait d'un " ancrage local " important des
parlementaires qui n'exerceraient aucun autre mandat, alors même qu'il
s'agirait de fonctions non rémunérées.
Votre commission des Lois considère, en tout état de cause, que
des dispositions de cette nature ne devraient pas être examinées
à la faveur d'un amendement voté à la hâte dans le
cadre d'un texte concernant initialement les fonctions électives.
Elle vous propose donc un
amendement tendant à disjoindre
l'article 2
nonies
.
Article 2 decies
(article L.O. 149 du code
électoral)
Limitation pour les parlementaires du droit
d'exercer
la profession d'avocat
L'article L.O. 149 du code électoral
définit
les conditions d'exercice de la profession d'avocat par un parlementaire.
La nouvelle rédaction de cet article, résultant d'un amendement
de Mme Frédérique Bredin repris par la commission,
adopté par l'Assemblée nationale après que le Gouvernement
s'en fut remis à la sagesse des députés, renforcerait les
limitations apportées à l'exercice de cette profession par un
parlementaire.
L'article L.O. 149 en vigueur comporte trois limitations qui, dans
tous les cas, s'appliquent aux actes de la profession accomplis directement ou
indirectement par l'intermédiaire d'un associé, d'un
collaborateur ou d'un secrétaire :
1° le parlementaire ne peut accomplir aucun acte de sa profession dans les
affaires à l'occasion desquelles des poursuites pénales sont
engagées pour crimes et délits
contre la nation, l'Etat et la
paix publique
ou en matière de presse ou d'atteinte au crédit
ou à l'épargne,
sauf devant la Haute Cour de justice et la
Cour de justice de la République
.
Le projet de loi
remplacerait le cas de crimes et délits contre
la nation, l'Etat et la paix publique par celui de
crimes et délits
contre la chose publique
,
reprenant ainsi les termes de
l'article L.O. 149 avant l'entrée en vigueur de la loi
organique n° 95-63 du 19 janvier 1995
.
Or, la loi du 19 janvier 1995 avait seulement opéré une
actualisation rédactionnelle à la suite de l'adoption du nouveau
code pénal (l'ancien titre premier du livre troisième du code
pénal "
crimes et délits contre la chose
publique
" ayant été repris dans le livre
quatrième du nouveau code pénal "
des crimes et
délits contre la Nation, l'Etat et la paix publique
").
Le projet de loi supprimerait en outre l'exception à ce premier cas
d'interdiction, lorsque les poursuites seraient engagées devant la Haute
Cour de justice et la Cour de justice de la République
.
La loi du 19 janvier 1995 précitée avait étendu
à la Cour de Justice de la République cette exception
déjà applicable à la Haute Cour de justice, à la
suite de l'adoption de la révision constitutionnelle du 27 juillet
1993.
2°
le texte en vigueur
interdit au parlementaire de plaider ou de
consulter pour le compte de l'une des sociétés, entreprises ou
établissements visés aux articles L.O. 145 et L.O. 146
du code électoral
dont il n'était pas habituellement le
conseil avant son élection
. Il s'oppose donc à une extension
d'une activité d'avocat en cours de mandat.
Le projet de loi
étendrait cette interdiction au cas où le
parlementaire aurait exercé habituellement ses fonctions de conseil dans
les mêmes établissements avant son élection.
En d'autres termes, il s'opposerait aussi à la poursuite du traitement
de dossiers dont il avait la charge avant son élection.
La disposition proposée, en réduisant le champ de
l'activité professionnelle du parlementaire, ne pourrait conduire
qu'à une plus grande " professionnalisation " de son mandat.
3° le texte en vigueur interdit de plaider ou de consulter contre l'Etat,
les sociétés nationales, les collectivités ou
établissements publics sauf dans les cas
d'actions en
responsabilité des dommages causés par tout véhicule et
dirigées contre une personne morale et droit public
.
Cette exception à la troisième catégorie d'interdiction
serait supprimée par l'article L.O. 149 du code
électoral.
Comme pour les articles précédents, votre commission des Lois
considère que le renforcement des interdictions d'exercice par un
parlementaire de la profession d'avocat n'a pas sa place dans un projet de loi
concernant les incompatibilités avec des fonctions électives.
Elle vous propose en conséquence un
amendement tendant à
disjoindre l'article 2
decies
du projet de loi
organique.
Article 3
(article L.O. 151 du code
électoral)
Harmonisation des délais de règlement des
incompatibilités
Publication au Journal Officiel des
déclarations
d'activités professionnelles et
d'intérêt
général
L'article 3 du projet de loi organique initial,
approuvé par
l'Assemblée nationale, se limitait à rendre applicables, en cas
d'incompatibilité avec une fonction de chef d'exécutif d'une
collectivité territoriale, proposée par l'article 2, les
dispositions en vigueur concernant le règlement des
incompatibilités apparaissant lors de l'élection du
parlementaire, en complétant à cet effet l'article L.O. 151 du
code électoral (paragraphe II de l'article transmis au Sénat).
Le parlementaire en situation d'incompatibilité au jour de son
élection doit se démettre des fonctions et mandats incompatibles,
faute de quoi il est déclaré démissionnaire d'office par
le Conseil constitutionnel à la requête du Bureau de
l'assemblée à laquelle il appartient ou du Garde des Sceaux.
Par coordination avec ses propositions à l'article 2 du projet de
loi (possibilité pour un parlementaire d'exercer un seul mandat local
dans sa plénitude, fonctions d'exécutif y compris), votre
commission des Lois vous propose un
amendement de suppression du paragraphe
II du présent article
.
L'Assemblée nationale a complété ce dispositif par deux
adjonctions :
1° - elle a, tout d'abord, souhaité
harmoniser les délais
de mise en conformité avec la législation sur les
incompatibilités fixés par le code électoral
,
adoptant, sur proposition de sa commission et avec l'avis favorable du
Gouvernement, deux amendements à l'article 3 du projet (paragraphes I et
IV du texte transmis au Sénat). Elle a procédé de
même pour les autres articles ayant le même objet des projets de
loi organique et ordinaire.
Ces délais sont actuellement différents selon les cas de figure :
- incompatibilités parlementaires :
- avec les fonctions de membre du Gouvernement : un mois (article L.O. 153)
- avec un mandat ou une fonction élective :
. si elle apparaît lors de l'élection du parlementaire : deux
mois (article L.O. 151)
. si elle survient en cours de mandat : quinze jours (article L.O. 151-1)
- avec une activité professionnelle ou d'intérêt
général : quinze jours (article L.O. 151)
- incompatibilité entre mandats locaux : quinze jours
(article L. 46-1).
Le point de départ du délai est fixé suivant les cas
à la date de nomination du membre du Gouvernement, à la date de
l'élection ayant mis la personne en situation d'incompatibilité,
ou à la date à laquelle le jugement ayant confirmé
l'élection est devenu définitif, ou, s'agissant d'une
incompatibilité professionnelle, si le Conseil constitutionnel a
été saisi, à la date de la notification de la
décision du Conseil constitutionnel.
Une harmonisation de ces délais constituerait donc une source de
simplification
. L'alignement sur le délai actuellement applicable
aux membres du Gouvernement apparaît acceptable.
L'article 3 du projet de loi organique complété par
l'Assemblée nationale propose de fixer à trente jours le
délai de mise en conformité de la situation du parlementaire dont
l'incompatibilité avec un mandat ou une fonction apparaîtrait au
jour de son élection comme parlementaire et, par voie de
conséquence, le délai à l'expiration duquel le
parlementaire qui ne se serait pas conformé à la
législation sur les incompatibilités serait déclaré
démissionnaire d'office par le Conseil constitutionnel (soit à
l'expiration du délai de trente jours).
Votre commission des Lois approuve la fixation uniforme d'un délai de
trente jours pour la mise en conformité de l'élu avec les
situations d'incompatibilité.
2° -
Les déclarations d'activités professionnelles ou
d'intérêt public seraient publiées au Journal Officiel
(paragraphe III)
.
Cette disposition résulte d'un amendement
de Mme Frédérique Bredin repris par la commission et
approuvé par le Gouvernement.
Selon l'article L.O. 151 du code électoral, le parlementaire doit
déposer dans un délai qui serait porté à trente
jours sur le Bureau de son assemblée une déclaration
certifiée sur l'honneur exacte et sincère comportant la liste des
activités professionnelles ou d'intérêt
général, même non rémunérées, qu'il
envisage de conserver ou attestant qu'il n'en exerce aucune.
En cours de mandat, il doit déclarer, dans les mêmes formes, tout
élément de nature à modifier sa déclaration
initiale.
Le Bureau examine la compatibilité des activités du parlementaire
avec l'exercice de son mandat.
S'il y a doute ou contestation à ce sujet, le Bureau de
l'assemblée, le Garde des Sceaux ou le parlementaire saisit le Conseil
constitutionnel qui apprécie souverainement. A défaut de saisine
du Conseil constitutionnel, la décision appartient au Bureau de
l'assemblée.
Si le Conseil constitutionnel décide que la fonction est incompatible,
le parlementaire doit régulariser sa situation dans un délai qui
serait porté de quinze à trente jours, faute de quoi il est
déclaré démissionnaire d'office par le Conseil
constitutionnel.
Une réflexion éventuelle sur la modification de cette
procédure relèverait d'un autre débat.
L'ensemble de ces observations conduit votre commission des Lois à
proposer un
amendement
tendant à la suppression des
paragraphes II et III de l'article 3 du projet de loi organique.
Elle vous propose
d'adopter l'article 3 ainsi
modifié
.
Article 4
(article L.O. 151-1 du code
électoral)
Règlement des incompatibilités survenant
postérieurement
à l'élection du
parlementaire
L'article L.O. 151-1 du code électoral
organise le
règlement des incompatibilités survenant
postérieurement à l'élection du parlementaire
.
L'article 4 du projet de loi organique remplacerait le premier
alinéa de l'article L.O. 151-1 précité par deux
alinéas nouveaux traitant respectivement de l'acquisition d'une fonction
élective et de celle d'un mandat incompatible.
Le texte proposé pour le premier alinéa de l'article
L.O. 151-1, relatif aux conséquences de l'acquisition d'une
fonction incompatible selon l'article 2 du projet de loi organique
(article L.O. 141 du code électoral) prévoit que le
parlementaire démissionne de son mandat parlementaire ou de sa nouvelle
fonction. A défaut d'option, l'élu serait réputé
avoir renoncé à son mandat de parlementaire.
Par coordination avec ses propositions à l'article 2, la commission des
Lois vous propose de supprimer cette disposition, sans objet dès lors
qu'un parlementaire pourrait conserver une fonction exécutive.
Le deuxième alinéa du
texte proposé pour
l'article 151-1 précité ferait obligation au parlementaire
acquérant postérieurement à son élection un mandat
propre à le placer dans un cas d'incompatibilité de
démissionner d'un des mandats qu'il détenait
antérieurement
.
A défaut d'option le projet prévoit la cessation de plein droit
du mandat acquis ou renouvelé à la date la plus ancienne.
Cette disposition s'appliquerait au règlement de
l'incompatibilité du mandat parlementaire avec l'exercice de plus d'un
mandat local (de laquelle votre commission vous a proposé d'exclure les
communes de moins de 3 500 habitants), prévue par
l'article 2 du projet de loi organique, approuvé sur ce point par
votre commission des Lois.
Le
texte en vigueur
-concernant le règlement de cette
incompatibilité actuellement limitée aux maires des communes d'au
moins 20.000 habitants et aux maires-adjoints des communes d'au moins
100.000 habitants- prévoit que le parlementaire en situation
d'incompatibilité doit
démissionner du mandat ou de la
fonction de son choix
. A défaut d'option, le mandat acquis à
la date la plus récente prend fin de plein droit.
Sur cet alinéa,
l'Assemblée nationale a adopté deux
amendements
:
- le premier porte de 15 à 30 jours le délai de mise en
conformité et serait la conséquence du souhait d'harmonisation
des délais d'option, exprimé par la commission à l'origine
de l'amendement, sur lequel le Gouvernement a émis un avis favorable
(voir ci-dessus examen de l'article 3 du projet de loi organique) ;
- le second prévoit qu'en cas de démission du dernier mandat
acquis (au lieu d'un des mandats détenu antérieurement), le
mandat acquis ou renouvelé à la date la plus ancienne prend
également fin de plein droit (amendement de la commission sur lequel le
Gouvernement a émis un avis de sagesse).
Il en résulterait que le parlementaire perdrait deux mandats.
Votre commission des Lois, considérant que le système actuel n'a
entraîné aucun dysfonctionnement, estime préférable
de
conserver la liberté de choix du parlementaire
et donc de
maintenir le texte de l'article L.O. 151-1 du code électoral
en vigueur.
Elle vous propose en conséquence un
amendement de suppression de
l'article 4 du projet de loi organique
.
Article 4 bis
(article L.O. 296 du code
électoral)
Age d'éligibilité des
sénateurs
L'article 4
bis
du projet de loi organique
tend
à
abaisser à 18 ans l'âge
d'éligibilité des sénateurs
, fixé actuellement
à 35 ans par l'article L.O. 296 du code électoral.
Cet article additionnel est issu d'amendements identiques de
M. Dominique Paillé et de Mme Monique Collange,
repoussés par la commission des Lois de l'Assemblée nationale
bien que le rapporteur ait émis un avis favorable à titre
personnel.
Le projet de loi ordinaire fixerait également à 18 ans
l'âge d'éligibilité des députés, des membres
du Parlement européen, des conseillers généraux,
régionaux et municipaux ainsi que des maires.
Les propositions sur l'âge d'éligibilité ne figuraient pas
dans les projets de loi organiques et ordinaire initiaux.
On remarquera en premier lieu que l'âge d'éligibilité du
sénateur serait modifié par une loi organique et celui du
député par une loi ordinaire, et ce en dépit de
l'article 25 de la Constitution suivant lequel les conditions
d'éligibilité et le régime des
inéligibilités des membres de chaque assemblée
parlementaire sont définies par une loi organique.
Au cours des débats à l'Assemblée nationale,
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'Intérieur, a
déclaré que "
ces amendements sont intéressants,
mais leur place dans le texte dont nous débattons ne serait
peut-être pas la meilleure (...). Le Gouvernement a l'intention de
reprendre le sujet comme il le mérite dans une optique plus
vaste
". Le ministre a ensuite suggéré, en vain, un
retrait des amendements.
La déclaration du ministre laisse donc percevoir un
doute sur la
constitutionnalité
de la fixation dans un texte sur les
incompatibilités de dispositions sur l'éligibilité.
Elle laisse aussi entendre la possibilité de dépôt de
projets de loi portant spécifiquement sur l'âge
d'éligibilité aux différents mandats.
Votre commission des Lois estime en tout état de cause
préférable de ne pas traiter à la sauvette de l'âge
d'éligibilité, dans l'attente d'éventuels projets de loi
spécifiques sur une question qui n'entre en tout état de cause
pas dans le cadre du présent texte.
Elle vous propose en conséquence
un amendement tendant à
disjoindre l'article 4
bis
du projet de loi
organique.
Article 4 ter
Participation des parlementaires aux
commissions
constituées dans leur département
d'élection
Cet
article ajouté par l'Assemblée nationale prévoit que les
parlementaires seraient membres de droit des commissions constituées
dans leur département d'élection, dès lors qu'elles
seraient présidées par le préfet ou
coprésidées par le préfet et le président du
conseil général.
Il s'agirait de permettre au parlementaire de maintenir, malgré les
nouvelles dispositions sur les incompatibilités, un lien avec le
territoire et la population du département d'élection.
L'article 4
ter
du projet de loi organique serait donc destiné
à corriger les conséquences excessives de ses dispositions
principales.
Le Gouvernement a émis un avis défavorable à cet
amendement de M. Gaëtan Gorse (approuvé par la
commission) en invoquant des raisons juridiques et des raisons
d'opportunité.
Le ministre de l'Intérieur a fait valoir que l'amendement
était sans lien avec le texte.
Il a douté de la nécessité pour un parlementaire
d'être membre de toutes les commissions instituées au plan local.
Votre commission des Lois retient les objections du ministre.
Elle remarque aussi que cette disposition illustre un contresens sur la nature
du mandat du parlementaire : une fois élu, le député ou le
sénateur participe à l'exercice de la souveraineté
nationale.
On observera que l'adoption de cette disposition s'opposerait à l'un des
objectifs affichés par les auteurs de la réforme proposée,
à savoir favoriser l'assiduité aux travaux du Parlement. Sa mise
en oeuvre serait, dans les faits, pratiquement
ingérable pour le
parlementaire
, compte tenu du nombre et de la diversité des
commissions départementales (commission départementale de la
coopération intercommunale, commission d'harmonisation des
investissements, commission d'élus pour la dotation globale
d'équipement...).
Dans le département de Seine-et-Marne, par exemple, en
conséquence de l'adoption du présent article et du suivant, le
parlementaire pourrait être appelé à siéger dans
106 commissions.
En tout état de cause,
la position prise par votre commission des
Lois
sur les propositions formulées en matière
d'incompatibilités (compatibilité avec mandat et fonctions au
sein d'une seule collectivité territoriale, non compris les communes de
moins de 3 500 habitants)
rendrait inutile l'article 4
ter
.
Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission des Lois
vous propose un
amendement tendant à supprimer l'article 4
ter
du projet de loi
organique.
Article 4 quater
Association des parlementaires à
la préparation
et à l'exécution des " contrats
locaux "
L'article 4
quater
du projet de loi organique
prévoit
l'association, par les préfets, des députés et des
sénateurs à la préparation des différents
" contrats locaux " (contrats de plan, d'agglomération, de
ville ou de pays) négociés dans leur département
d'élection.
Ils seraient aussi régulièrement informés des conditions
d'exécution de ces contrats.
Cet article ajouté par l'Assemblée nationale provient d'un
amendement de M. Gaëtan Gorse, non défendu en
séance publique et repris par M. Pierre Albertini. La
commission a émis un avis favorable et le Gouvernement a pris une
position contraire.
Très conscience de l'utilité de la contractualisation, votre
commission constate néanmoins que les objections formulées
à propos de l'article 4
ter
du projet s'appliquent
également à l'article 4
quater
.
On remarquera, de surcroît, l'imprécision des contraintes
imposées au préfet : que signifie exactement l'association
à la préparation des contrats ? Qu'est-ce qu'une information
régulière sur les conditions d'exécution de ceux-ci ?
Votre commission des Lois vous propose en conséquence un
amendement
de suppression de l'article 4
quater
du projet de
loi organique.
Article 4 quinquies
(article 34 de l'ordonnance n°
59-2 du 2 janvier 1959
portant loi organique relative aux lois de
finances)
Communication pour avis avant leur publication
des
décrets d'ouvertures et arrêtés d'annulations de
crédits
La
dernière phrase de l'article 34 de l'ordonnance n° 59-2 du
2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances
prévoit que les lois de finances rectificatives "
soumettent
obligatoirement à la ratification du Parlement toutes les ouvertures de
crédits opérées par décrets d'avances. "
L'article 4
quinquies
du projet de loi organique, issu d'un amendement
de Mme Frédérique Bredin approuvé par la
commission et combattu par le Gouvernement,
remplacerait cette obligation
par celle de la communication
pour avis avant leur publication
à la commission des Finances de chacune des assemblées :
- des ouvertures de crédits opérées par décrets
d'avances ;
- des annulations opérées par arrêtés.
En d'autres termes, ce projet substituerait à une ratification
a posteriori
des ouvertures de crédits par les
assemblées, un avis préalable de la commission des Finances avant
publication des décrets d'avances et des arrêtés
d'annulations.
Il en résulterait que les assemblées perdraient le pouvoir de
ratification au profit d'un simple avis préalable émis par la
commission des Finances.
Lors des débats à l'Assemblée nationale, il a
été exposé que la disposition proposée tendait
à établir des rapports plus équilibrés entre le
Gouvernement et le Parlement, en rendant obligatoire l'information
préalable et l'avis des parlementaires avant la modification par voie
réglementaire de crédits votés par le Parlement.
Le texte proposé serait donc censé se situer dans le prolongement
des dispositions du projet, le parlementaire plus disponible pouvant de ce fait
voir son rôle revalorisé.
Sans se prononcer sur l'opportunité de modifier sur ce point
l'ordonnance de 1959, votre commission constate que le texte voté par
l'Assemblée nationale se heurte à
d'importantes
difficultés juridiques
:
- la procédure d'examen des lois de finances à laquelle la
disposition se rattache est
manifestement dépourvue de tout lien avec
un projet de loi relatif aux incompatibilités parlementaires
;
- l'article 1er (2ème alinéa) de
l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi
organique relative aux lois de finances prescrit que
" les dispositions
législatives destinées à organiser l'information et le
contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques (...) sont
contenues dans les lois de finances ".
L'adoption d'une disposition organisant cette information dans un texte autre
qu'une loi de finances, peut être déclarée non conforme
à la Constitution par le Conseil constitutionnel (par exemple,
DC 91-290 du 9 mai 1991 sur la loi relative au statut de la
Corse).
Un texte concernant les incompatibilités parlementaires n'offre donc pas
un cadre approprié pour un tel débat.
Aussi, votre commission des Lois vous propose-t-elle
un amendement tendant
à disjoindre l'article 4
quinquies
du projet de loi
organique.
Article 5
Application de la loi dans les
collectivités d'outre-mer
L'article 5 prévoit l'application du projet de loi
organique
dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de
Mayotte.
Depuis la dernière révision constitutionnelle intervenue au mois
de juillet dernier, et bien que la loi référendaire du
9 novembre 1988 portant statut de la Nouvelle-Calédonie soit
encore aujourd'hui applicable, la Nouvelle-Calédonie n'appartient plus
à la catégorie juridique des territoires d'outre-mer.
Il paraît donc nécessaire d'énumérer les
collectivités d'outre-mer dans lesquelles les nouvelles dispositions
organiques seraient applicables au lieu de viser, comme le fait le texte
adopté par l'Assemblée nationale, la catégorie des
territoires d'outre-mer.
En conséquence, votre commission des Lois vous propose un
amendement
de réécriture de l'article 5.
Article 6
(article L.O 328-2 du code
électoral)
Incompatibilités applicables à
Saint-Pierre-et-Miquelon
Le texte
proposé pour compléter l'article L.O. 328-2 du code
électoral, relatif au député de Saint-Pierre-et-Miquelon
assimilerait, dans son premier alinéa, les fonctions de président
du conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon à celles de
président du conseil général d'un département pour
l'application de l'incompatibilité entre le mandat de
député et les fonctions de président de conseil
général prévu par l'article 2 du projet de loi.
Son second alinéa assimilerait le mandat de conseiller
général dans cette collectivité territoriale à
celui de conseiller général d'un département pour
l'application de l'incompatibilité du mandat de député
avec plus d'un mandat local.
Par coordination avec la position qu'elle a adoptée à l'article 2
du projet de loi organique, votre commission des Lois vous propose de ne
retenir que la seconde de ces assimilations.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter l'article 6 ainsi
modifié.
Article 7
(article L.O.141-1 du code
électoral)
Incompatibilités applicables à
Mayotte
L'article 7 tend à compléter l'article L.O.
141-1 du
code électoral (incompatibilité du mandat parlementaire avec plus
d'un mandat local) afin d'assimiler, pour l'application de cette
incompatibilité, le mandat de conseiller général de
Mayotte à celui de conseiller général d'un
département.
Par coordination avec l'ordonnance n° 98-728 du
20 août 1998 qui a inséré dans un nouveau titre
II du livre III du code électoral les dispositions particulières
applicables à Mayotte, votre commission des Lois vous propose un
amendement
tendant à insérer les dispositions
prévoyant cette assimilation dans ce nouveau titre du code
électoral .
Elle vous propose d'
adopter l'article 7 ainsi modifié.
Article 8
(article 6-1 de la loi n° 52-1175 du 21
octobre 1952)
Assimilation du mandat de conseiller territorial de la
Polynésie française avec le mandat de conseiller
général
L'article 8, dans sa rédaction adoptée par
l'Assemblée nationale, tend à assimiler les mandats des
élus des assemblées territoriales et des assemblées de
province au mandat de conseiller général d'un département
pour l'application dans les territoires d'outre-mer de l'ensemble des
dispositions instituant des incompatibilités entre certains mandats
électoraux ou fonctions électives. Il prévoit
également, pour l'application des ces mêmes dispositions,
d'assimiler les fonctions de membre du gouvernement ou de président du
gouvernement de la Polynésie française ainsi que les fonctions de
président des assemblées de province de Nouvelle-Calédonie
à celles de président du conseil général d'un
département.
En effet, s'agissant de mandats et de fonctions concernant les institutions
propres des territoires d'outre-mer, leur régime
d'incompatibilité est nécessairement défini par une loi
organique en application de l'article 74 de la Constitution.
Pour instaurer ces assimilations, le projet de loi organique initial avait
prévu une disposition " flottante ". L'Assemblée
nationale a choisi d'insérer les dispositions proposées dans le
code électoral.
Dans la mesure où ce code
ne comporte
pas de partie spécifique consacrée aux territoires d'outre-mer,
il est apparu préférable à votre commission des Lois
d'intégrer ces dispositions dans les lois spécifiques
électorales et statutaires de chacune des collectivités
visées, l'ordonnancement juridique gagnant ainsi en lisibilité.
Cette façon de procéder conduit votre commission des Lois
à vous proposer
un
amendement
de réécriture
de l'article 8, consacré aux conseillers territoriaux de la
Polynésie française, trois articles additionnels devant poser les
règles d'assimilation applicables respectivement au président et
aux membres du gouvernement de ce même territoire, aux élus
territoriaux des îles Wallis-et-Futuna et aux membres des
assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 8
ainsi
modifié.
Article additionnel après
l'article 8
(article 13 de la loi n°96-312 du 12 avril
1996)
Assimilation des fonctions de président du gouvernement et de
membre du gouvernement de la Polynésie française avec les
fonctions de président du conseil
général
Pour les raisons exposées précédemment, votre commission vous soumet un amendement insérant un article additionnel après l'article 8 afin d'insérer dans la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française les dispositions relatives à l'assimilation entre les fonctions de président du gouvernement ou de membre du gouvernement de la Polynésie française et celles de président du conseil général d'un département.
Article additionnel après
l'article 8
(article 13-1-1 de la loi n° 61-814 du
29 juillet 1961)
Assimilation du mandat de membre de
l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna avec le mandat
de conseiller
général
L'article 8 du projet de loi organique ne prévoit
pas
d'assimilation pour les fonctions exécutives de l'assemblée
territoriale, celles-ci étant assurées par l'administrateur
supérieur du territoire et non par un élu selon l'article 9
de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 relative au statut de ce
territoire d'outre-mer.
Par coordination avec ce qu'elle vous a proposé à l'article 8
pour les membres de l'assemblée de la Polynésie française,
votre commission des Lois vous soumet
un
amendement
tendant
à insérer après cet article un
article
additionnel
afin d'intégrer dans la loi n° 61-814 du
29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis-et-Futuna le
statut de territoire d'outre-mer les dispositions concernant l'assimilation du
mandat de membre de l'assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna au
mandat de conseiller général pour l'application du régime
des incompatibilités entre mandats électifs.
Article additionnel après
l'article 8
(article 78 de la loi n° 88-1028 du
9 novembre 1988)
Assimilation du mandat de membre d'une
assemblée de province de Nouvelle-Calédonie avec le mandat de
conseiller général
L'opportunité de prévoir dès maintenant,
comme
le fait l'article 8 du projet de loi organique, un dispositif
d'assimilation des fonctions et mandats en Nouvelle-Calédonie pour
l'application de la législation proposée par les projets de loi
en matière d'incompatibilité aurait pu être
contestée.
En effet, l'Accord de Nouméa du 5 mai 1998 -qui sera soumis à la
population par référendum le 8 novembre 1998- prévoit
une modification importante de l'équilibre institutionnel de ce
territoire, par une loi organique.
La loi organique devra déterminer, en particulier, selon la loi
constitutionnelle n° 98-610 du 20 juillet 1998 ayant approuvé
cet accord de Nouméa, "
les règles d'organisation et de
fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie et notamment
les conditions dans lesquelles certaines catégories d'actes de
l'assemblée délibérante pourront être soumises au
contrôle préalable du Conseil constitutionnel
. "
Dès lors que certains délibérations de l'assemblée
délibérante seront susceptibles être
déférées au Conseil constitutionnel, pourra-t-on toujours
assimiler le mandat des membres de celle-ci à celui de conseiller
général ?
Le régime des incompatibilités en Nouvelle-Calédonie devra
donc être réexaminé lors de la discussion du projet de loi
organique en préparation sur le statut de la Nouvelle-Calédonie.
Dans l'attente, votre commission des Lois vous présente
un
amendement
tendant à insérer dans la loi
n° 78-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions
statutaires et préparatoires à l'autodétermination en
Nouvelle-Calédonie en 1998, la règle de l'assimilation entre le
mandat de membre d'une assemblée de province et celui de conseiller
général d'un département.
Elle vous propose d'adopter cet
article additionnel.
Article
9
Abrogation
L'article 9 du projet de loi organique abrogerait
l'article 4 de la loi organique n° 85-1405 du
30 décembre 1985 tendant à la limitation du cumul des
mandats électoraux et des fonctions électives par les
parlementaires.
Le texte en vigueur assimile au mandat de conseiller général d'un
département, pour l'application des articles L.O. 141 du code
électoral (limitation à un seul du nombre des mandats et
fonctions locaux exercés par les parlementaires) et L.O. 297
(application aux sénateurs des incompatibilités applicables aux
députés), certains mandats dans les assemblées
territoriales ou dans les conseils généraux d'outre-mer.
Le projet de loi organique initial (articles 6 à 8)
prévoyait l'insertion de ces dispositions dans le code électoral
(sauf pour Mayotte).
Les mandats concernés sont ceux de membre de l'assemblée
territoriale de Polynésie française, du territoire des îles
Wallis et Futuna, de membre du congrès du territoire de
Nouvelle-Calédonie et de conseiller général de
Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que de Mayotte.
Votre commission des Lois vous a proposé par amendements
d'insérer ces dispositions dans les textes appropriés concernant
ces collectivités territoriales.
L'article 9 du projet de loi organique abrogerait aussi le deuxième
alinéa de l'article L.O. 139 du code électoral rendant
incompatible avec un mandat parlementaire l'exercice des fonctions de membre du
conseil de gouvernement d'un territoire d'outre-mer, ces fonctions n'existant
plus.
Elle vous propose en conséquence d'
adopter sans modification
l'article 9 du projet de loi organique.
Article 10
Dispositions
transitoires
Le
projet de loi organique
initial
prévoyait que le
parlementaire se trouvant, à la date de publication de la loi, dans l'un
des cas d'incompatibilité qu'elle institue,
pourrait continuer
d'exercer ses mandats et fonctions jusqu'au terme de celui d'entre eux qui,
pour quelque cause que ce soit, prendrait fin le premier.
Autrement dit, la mise en oeuvre du texte correspondrait, pour chaque
parlementaire, à la date du prochain renouvellement de l'un des mandats
ou fonctions incompatibles.
Cette formule présentait l'avantage d'adapter la date d'application du
texte à la situation de chaque élu. Elle évitait de
contraindre un élu à mettre fin à l'un de ses mandats ou
à l'une de ses fonctions avant le terme normal du mandat ou de la
fonction.
Mais, la solution proposée par le texte initial aurait,
pour
certains
des élus concernés, été applicable
à compter des prochaines élections
municipales
(mars
2001). Un certain nombre de députés ou sénateurs pouvant
choisir de renoncer à leur mandat parlementaire, l'Assemblée
nationale a craint que le nombre des vacances alors constaté
(estimé par le rapporteur à 150 sièges), ne rende
problématique la mise en oeuvre de la réforme.
En effet, il ne peut être procédé à des
élections partielles dans l'année précédant un
renouvellement de l'Assemblée nationale (article L.O.178 du code
électoral) ou du Sénat (article L.O. 322 du même code).
Sauf dissolution de l'Assemblée nationale, les prochaines
élections législatives interviendront en mars 2002. Les
députés qui auraient renoncé à leur mandat ne
pourraient donc pas être remplacés et leurs sièges
resteraient vacants pendant presque une année.
Aussi, l'Assemblée nationale a-t-elle retenu comme date
d'entrée en vigueur du texte, celle des prochaines élections
législatives.
Le parlementaire se trouvant, à la date de sa promulgation, dans un cas
d'incompatibilité institué par la présente loi pourrait
continuer d'exercer ses mandats et fonctions jusqu'à la date du prochain
renouvellement de l'Assemblée nationale.
Cette solution présenterait l'avantage de rendre la loi applicable au
même moment à tous les élus concernés.
Elle serait donc plus lisible et éviterait l'inconvénient
cité plus haut d'une entrée en vigueur lors des prochaines
élections municipales.
En revanche, la date d'entrée en vigueur du texte ne serait pas
totalement certaine, car une éventuelle dissolution de
l'Assemblée nationale aurait pour conséquence d'en avancer le
terme.
Surtout, cette solution apparaît inadaptée aux sénateurs
dont on ne voit pas sur quel fondement l'évolution de leur situation
devrait intervenir à la date des élections législatives.
Aussi, votre commission des Lois vous propose-t-elle par amendement de faire
entrer en vigueur les nouvelles dispositions à la date du renouvellement
du mandat parlementaire concerné.
Elle vous propose en outre que le député ou le sénateur
parlementaire européen soit tenu de faire cesser cette
incompatibilité au plus tard lors du renouvellement de son mandat
européen.
Elle vous propose d'
adopter l'article 10 du projet de loi organique ainsi
modifié.