CHAPITRE III -
SUSCITER DE NOUVELLES
OPPORTUNITÉS
La politique énergétique de la France de demain devra nécessairement prendre en compte les plus récentes technologies en développant notamment la cogénération ou la filière technologique favorisant l'utilisation propre du charbon et s'impliquer davantage dans le secteur des énergies renouvelables. Ces deux objectifs se situent dans le cadre du respect de l'environnement et de l'utilisation optimale de l'énergie.
I. METTRE EN OEUVRE DES TECHNOLOGIES JUSQU'ICI TROP NÉGLIGÉES
Il serait souhaitable que soient développées en France la cogénération ou des technologies visant à produire du charbon propre ou à diminuer les émissions de gaz carbonique.
A. LA COGÉNÉRATION
Contrairement à la production classique
d'électricité qui disperse l'énergie thermique dans l'air
ou dans l'eau, la cogénération est conçue pour valoriser
et redistribuer cette énergie. Elle permet de
produire
simultanément de l'électricité et de la chaleur (ou du
froid) et d'optimiser les coûts d'installation et les rendements
énergétiques
dans les réseaux urbains comme sur les
sites industriels. Si le concept n'est pas nouveau, la technique
présente aujourd'hui un intérêt accru et un
élargissement considérable de ses possibilités
d'application, du fait des développements intervenus dans le domaine des
moteurs et des turbines à gaz.
La cogénération fait appel à trois types
d'équipements :
- les turbines à combustible et plus particulièrement
à gaz : les turbines à gaz sont des réacteurs d'avion
légèrement modifiés et bénéficient donc des
progrès accomplis dans le secteur de l'aéronautique ; la
chaleur qu'elles produisent prend couramment la forme de vapeur et parfois la
forme d'air chaud permettant de sécher directement des produits (papier,
briques, tuiles, lessives, panneaux de bois...) ;
- les turbines à vapeur sont utilisées dans le secteur
industriel, les usines d'incinération d'ordures ménagères
et les cycles combinés ;
- les moteurs à combustion consomment du gaz et/ou du fioul et,
plus rarement, des biocarburants. Leur rendement est inférieur à
celui des turbines mais leurs conditions d'utilisation, plus souples,
expliquent leur prédominance parmi les unités de production de
petite taille.
La cogénération, tout particulièrement lorsqu'elle fait
appel à des
cycles combinés -associant en série une
turbine à gaz et une turbine à vapeur
-, permet d'atteindre un
rendement énergétique global (électrique et thermique) de
75 à 85 %.
Par ailleurs, du point de vue environnemental, la combustion du gaz naturel ne
produit pas de poussières et ne provoque aucun rejet d'oxydes de soufre
ou d'acide chlorhydrique.
Notre pays n'a pas encore véritablement exploité les avantages
de la cogénération
, bien qu'il soit doté de tous les
outils nécessaires : réseaux de chaleur et de froid, centrales
thermiques traditionnelles pouvant être converties en centrales de
cogénération, usines d'incinération de déchets
urbains.
Aujourd'hui,
l'électricité produite par
cogénération représente en France moins de 1,5 %
contre 30 % aux Pays-Bas.
On peut cependant constater, avec satisfaction, que cette tendance
s'inverse : les projets de cogénération au gaz naturel ont
fortement augmenté en 1997 : 580 mégawatts (MW) (contre
200 MW en 1996 et 150 MW en 1995). La production devrait atteindre
rapidement 1 500 MW, soit plus que l'équivalent d'une tranche
nucléaire.
Plusieurs facteurs se sont combinés depuis quelques années pour
favoriser le développement de la cogénération :
- des mesures fiscales : amortissement accéléré
sur les douze premiers mois d'exploitation ; réduction de la taxe
professionnelle ; exonération de la taxe de consommation sur le gaz
naturel (TCGN) sur les quantités de gaz consommées au cours des
cinq premières années ;
- l'assouplissement des modalités de financement des
investissements entraînant des économies d'énergie
(crédit-bail dans les hôpitaux sous certaines conditions) ;
- les mesures prises par Gaz de France : refonte tarifaire,
création de Finergaz qui offre aux clients potentiels un service global
pour la réalisation d'unités de cogénération ;
- l'obligation de rachat par EDF de l'électricité produite
par des installations industrielles, la fixation d'une base tarifaire
indexée sur le prix du gaz dans le cadre d'un contrat de douze ans et la
réduction des pénalités exigées en cas de
défaillance.
Notons cependant qu'il ne convient pas de " subventionner " des
installations de cogénération dont le seul but est de produire de
la chaleur (serres) tout en bénéficiant des tarifs
élevés de rachat de leur électricité.
Cette réserve étant faite, il convient de favoriser en France la
progression de la cogénération " utile " et l'on peut
suggérer en ce domaine deux pistes de développement
technologique :
- la
trigénération
, c'est-à-dire l'association
de deux techniques : la cogénération et la production de froid.
De récentes études ont en effet montré qu'en France des
installations de trigénération fonctionnant de
4 500 heures à 7 000 heures étaient
effectivement rentables dans de nombreuses activités tertiaires et
industrielles et particulièrement pour les industries
aérospatiales, les industries de l'électronique et le
" grand tertiaire " (aéroports, salles
d'informatique...) ;
- le
recours
, parallèlement au gaz naturel, à des
sources d'énergies dites de récupération : les
déchets urbains
traités dans les usines d'incinération
(gisement considérable d'énergie renouvelable) ainsi que les
résidus pétroliers
(le projet d'installation en
Seine-Maritime d'une importante unité de cogénération
produisant vapeur et électricité à partir de
résidus pétroliers devrait commencer à se
concrétiser à la fin de cette année dans le cadre d'un
contrat entre EDF et un groupe pétrolier).
Ces développements technologiques pourraient être utiles
à notre pays, d'une part, en améliorant et en rationalisant sa
production d'énergie, et, d'autre part, en lui permettant d'offrir sur
le marché international des produits sophistiqués dans le secteur
de la cogénération, où la demande est destinée
à croître fortement.