2. Une coexistence pour le moins problématique
Il résulte des orientations ainsi esquissées une
série de questions :
- La rémunération mensuelle minimale s'appliquera-t-elle non
seulement aux salariés dont l'horaire de travail sera ramené de
39 à 35 heures (maintien de la rémunération) mais
également aux salariés nouvellement embauchés ? Une
réponse négative consisterait à faire cohabiter dans une
même entreprise des salariés effectuant 35 heures
payées 39 heures et des salariés effectuant 35 heures
payées 35 heures. Est-ce concevable ?
- Mais est-ce davantage concevable de faire coexister, le cas
échéant dans une même entreprise, des salariés
effectuant 35 heures payées 39 heures et des salariés
effectuant 39 heures payées 40 heures ?
- Est-ce concevable de ramener ainsi le tarif des heures
supplémentaires au quart environ de celui des heures normales ? Car le
salarié travaillant 39 heures, soit 17,5 heures de plus sur le
mois, aura une rémunération supérieure de 170,59 F
à celle de son collègue travaillant 35 heures,
c'est-à-dire que les heures supplémentaires lui seront
payées, non pas 39,43F majorées de 25 %, mais 10 F.
Naturellement, la même interrogation vaut pour tout horaire entre
35 heures et 39 heures, chaque durée de travail correspondant
à une rémunération horaire différente.
Et cette interrogation se trouve singulièrement compliquée quand
on sait que, pendant deux ans, du 1
er
janvier 2000 au
1
er
janvier 2002, la durée légale hebdomadaire du
travail sera différente selon que le salarié se trouve dans une
entreprise de plus ou de moins vingt salariés.
A ces questions s'ajoute celle naturellement de l'indexation de la nouvelle
" rémunération mensuelle minimale ".
Sera-t-elle indexée comme le SMIC horaire ? Dans ce cas, les questions
précédentes demeureront entières et ce, durablement.
Ou sera-t-elle " décrochée " du SMIC horaire pour
n'avoir été qu'un moment " historique " du passage aux
35 heures ? Dans ce cas, la réduction du temps de travail se
traduira pour les salariés dont l'horaire aura été
ramené à 35 heures par un véritable blocage des
rémunérations.
Enfin, la question de la rémunération des salariés
à temps partiel qui viendront " buter " sur les
35 heures
reste entière.
Ainsi, sur un point aussi fondamental que celui du SMIC, l'incidence du
projet de loi n'a pas été mesurée. Or, il s'agit d'une
incidence qui est pourtant au coeur même du projet de loi dès lors
que celui-ci fixe une nouvelle durée légale du travail.
Il s'agit en outre d'une question déterminante pour l'évolution
générale des salaires et donc pour l'impact de la
réduction du temps de travail sur l'emploi.